Article paru dans CPS ancienne série n°41 du 1er février 1992

ALGERIE

CONTRE LA DICTATURE : POUR UN AUTHENTIQUE PARTI OUVRIER

POUR UN PROGRAMME OUVRIER

La caste des officiers a pris le pouvoir en Algérie. Sa dictature s'étend. Les libertés démocratiques, partielles et très limitées, arrachées par le peuple algérien à la suite du mouvement populaire, des manifestations, des grèves d'octobre 1988 sont remises en cause. Le risque est grand que le prolétariat, la jeunesse soient politiquement écrasés sous son joug sanglant. Au lendemain des élections du 26 décembre 1991, le haut commandement a prétexté de la menace de dictature islamique pour imposer la sienne. Ces élections avaient donné les résultats suivants :

Algérie ‑ Elections du 26 décembre 1991 – 431 sièges à pourvoir ‑ 59 % de bulletins exprimés par rapport aux inscrits (le 19 juin 1990 aux élections municipales il y avait eu 62,73 % d'exprimés)

                                                                      

 

Sièges

% par rapport aux exprimés

% par rapport aux inscrits

FIS

188

43.05

25.14

FLN

25

23.31

13.8

FFS

15

9.83

5.80

Divers

3

15.25

9.00

Le FIS avait besoin de 28 sièges au 2e tour pour disposer de la majorité absolue à l'Assemblée nationale algérienne. Il était certain qu'il les obtiendrait.

Les résultats électoraux étaient clairs, Le parti unique, monopolisant le pouvoir et exerçant sa dictature depuis 1962, le FLN, n'obtenait que 13,8 % des inscrits. Il était politiquement écrasé. Le FIS ne réunissait que 25,4 % des inscrits. Et encore, contrôlant la plupart des municipalités, il est certain qu'il avait "bourré les urnes", sans compter le vote "contrôlé" des femmes. Les résultats du FFS étaient politiquement significatifs : pratiquement présent seulement en Kabylie, il obtenait un succès électoral considérable et imprévu. Certes la question des droits du peuple kabyle a joué. Néanmoins le succès du FFS montrait que là où une autre voie politique que celle du FIS ou du FLN était ouverte, les masses algériennes étaient prêtes à l'emprunter.

A l'appel du FFS, le 3 janvier, une gigantesque manifestation contre la prise du pouvoir par le FIS a déferlé à Alger. La grande majorité de la population, et notamment la population laborieuse et les femmes, sont contre la prise du pouvoir par le FIS qui ne manquerait pas d'établir la dictature de la République islamique, la "charia". Mais contre le FLN, le FIS, la caste des officiers, il n'y a qu'une seule voie: celle propre à la classe ouvrière, entraînant l'ensemble de la population exploitée et misérable. Aucune organisation, aucun parti ne l'ouvre en Algérie. Là est le drame politique du peuple algérien.

Tout s'est alors passé comme si la caste des officiers avait planifié le déroulement des événements. Le 5 juin, le "président" Chadli avait décrété l'état d'urgence. Le commandement de l'ANP l'a laissé le lever le 29 septembre et annoncer le 15 octobre que des élections auraient lieu le 26 décembre. Il était certain que le FLN y serait écrasé. Après ces élections, la grande majorité du peuple algérien a redouté que le FIS prenne le pouvoir et établisse la République islamique. Aucune voie propre ne s'ouvrait à ce peuple. C'est dans ces conditions que la caste des officiers a réalisé un coup d'Etat fomenté de longue date. Le 11 janvier, elle a imposé au "président" Chadli de démissionner. Le 12 janvier le "Haut Conseil de Sécurité" a annulé les élections du 26 décembre. Le 14 janvier la caste des officiers a formé le "Haut Comité d'Etat". Il a été chargé d'exercer le pouvoir jusqu'à la fin du mandat présidentiel (décembre 1993). Ce "Haut Comité d'Etat" est composé de: Mohamed Boudiaf, vieille gloire de la guerre révolutionnaire, Khaled Nezzar, militaire, ministre de la Défense ; Ali Kafi, secrétaire national des anciens combattants; Mohamed Ali Aroun, président de la Ligue des Droits de l'Homme; Tedjini Haddam, recteur de la mosquée de Paris. Le coup d'Etat accompli, de fait, le FIS et toutes les organisations politiques s'y sont pliés après qu'un bloc étrange ‑ FIS, FLN, FFS ‑ ait essayé de se constituer.

La répression s'abat aujourd'hui sur le FIS. Aucun doute n'est possible : elle s'abattra demain sur toutes les autres organisations politiques opposées à la caste des officiers. Pour l'instant celle‑ci triomphe. Mais sa victoire est fragile. L'armée n'est pas un bloc. Il lui faut disposer de structures politiques. Surtout, elle est liée à l'impérialisme et à la faible bourgeoisie algérienne et est incapable de résoudre positivement, pour le peuple algérien, les énormes problèmes économiques et sociaux qui se posent.

Peut‑on organiser en Front Unique avec le FIS la lutte contre la dictature et pour la défense des libertés démocratiques ? Non ! Cela reviendrait à vouloir lutter en Front Unique avec Le Pen et le Front National contre le racisme et la xénophobie et cela préparerait la dictature du FIS, succédant éventuellement à celle de la caste des officiers. Seule l'action politique pour un authentique parti ouvrier, pour un programme ouvrier, peut ouvrir au prolétariat, aux masses exploitées et misérables, une issue dans la lutte pour ce programme qui inclut: le combat contre la dictature, pour les libertés démocratiques, pour une Assemblée nationale souveraine

 

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