Moyen-Orient: l'impérialisme américain recherche un plan de sauvetage

 


Une question taraude la bourgeoisie américaine, au point d’occuper une bonne place dans la précampagne pour la Maison Blanche: comment gérer l'encombrant héritage de Bush au Moyen-Orient?

 

Depuis déjà plus d'un an, depuis qu’il est devenu clair que la réalisation du « Grand Moyen Orient » tournait à la déconfiture, la défiance de larges pans de la classe dominante américaine s'exprime au grand jour à l'encontre de l'administration Bush. En avril, le Congrès à majorité démocrate a ainsi adopté une résolution conditionnant le financement des dépenses militaires à un retrait rapide des troupes américaines – contraignant Bush à lui opposer son véto. Le New York Times et le Washington Post, des généraux, des responsables de la CIA, et même certains élus républicains ont signifié à la Maison Blanche leur volonté de voir la politique américaine au Moyen-Orient changer de cours.  La situation concrète autour de l'Irak et de l'Afghanistan ne laisse non plus aucun répit réel au chantre de la « guerre mondiale contre le terrorisme »: profite-t-il d'une accalmie récente sur le front irakien pour clamer l'efficacité de ses dernières mesures? Un attentat-suicide a lieu au Pakistan qui, emportant Benazir Bhutto dans les flammes, signale au monde entier une fissure dans le dispositif impérialiste.

 

Le contraste est frappant entre le désarroi actuel de la bourgeoisie américaine et l'arrogance initiale de l'administration Bush au sujet du Moyen-Orient. L’invasion militaire de l’Irak en 2003 participait - CPS l'a maintes fois expliqué - d'un plan ambitieux : liquider les conséquences des mouvements révolutionnaires qui, de la fin des années 1950 à la révolution iranienne de 1979, ont mis à mal la tutelle impérialiste sur le Moyen-Orient et sur ses ressources en hydrocarbures.

La destruction de l’Etat irakien baassiste devait ainsi constituer le point de départ d’une mise sous tutelle des pays voisins, accompagnée de leur pillage économique : le « Grand Moyen-Orient » prôné par Bush.

 

Les circonstances politiques semblaient favorables à l’impérialisme américain, unique superpuissance après la dislocation de l’URSS, qui avait mis à profit les attentats du 11 septembre 2001. Mais, plus de quatre ans après l’invasion, cette ambition cède la place à un objectif plus prosaïque : celui de sauver les meubles.

 

Après une première phase au terme de laquelle il était parvenu à intégrer la majorité des factions armées d'Irak à son « processus politique », Washington espérait se délester substantiellement du poids de l'occupation en passant le relais aux « institutions » créées par ses soins: mais le « gouvernement » Al Maliki n'en finit pas d'imploser sous la pression des conflits entre les diverses factions bourgeoises et petites-bourgeoises du pays.

Une situation similaire se développe en Afghanistan, où la tâche était pourtant moins ardue. Elle se répercute aujourd'hui au Pakistan. Quant au Liban, où Bush avait, avec le concours d'Israël et de l'impérialisme français, ouvert un « troisième front de la guerre contre le terrorisme », la présidentielle y a été reportée… onze fois, et cette paralysie au sommet indique la précarité de la situation obtenue. La déstabilisation dont l’Irak est devenu l’épicentre menace de s'étendre partout où est intervenu l'impérialisme américain.


Décembre 2006: définition d'un plan de sauvetage, le rapport Baker-Hamilton


Les élections américaines de mi-mandat en novembre 2006 ont montré que de larges secteurs de la bourgeoisie tiraient un bilan négatif de l’aventure militaire en Irak. Mais dès avant, en mars, avait été constituée une commission composée à égalité de représentants des deux grands partis bourgeois: l'Iraq Study Group, ou commission Baker-Hamilton. Une fois les élections passées, les deux présidents de l'ISG ont remis à Bush leur rapport: « La marche à suivre. Une nouvelle approche ».

La lettre d'introduction du rapport par Baker et Hamilton écarte d'emblée l'hypothèse d'un retrait total et rapide des forces d'occupation – prônant au contraire l'intégration de ces troupes aux unités de l'armée irakienne, afin d'en assurer le contrôle. Unités qui doivent recevoir en sus l'appui d' « équipes de réaction rapide et d'opération spéciales ». Seule est évoquée une évacuation progressive, « et à moins de développements imprévus dans la situation sécuritaire », des « brigades de combat non nécessaires à la protection militaire ». En clair: l'objectif est de permettre au Pentagone de retirer les troupes qu'il peut retirer, quand il peut retirer, s'il peut en retirer.

Baker et Hamilton précisent encore:

« Les recommandations que nous faisons dans ce rapport exigent un niveau considérable de volonté politique et de coopération de la part des corps exécutif et législatif du gouvernement américain ».

 

Très rapidement après sa publication, ce plan recevait la réponse de Bush: «Nous considérerons chaque proposition avec sérieux et nous agirons promptement » (AP, 6/12/2006). L'éviction de Donald Rumsfeld - premier « faucon » de l'administration Bush - du secrétariat à la Défense, avait déjà constitué en soi l'annonce d'un tournant stratégique. Le 10 janvier, Bush faisait connaître un plan d'action qui s'inspirait du rapport Baker. Il formulait néanmoins une demande qui s'en éloignait sensiblement: l'envoi préalable de 20 000 à 30 000 hommes supplémentaires en Irak, dans le cadre d'un vaste plan de « sécurisation » de Bagdad. Au nom du rapport Baker-Hamilton, les démocrates adoptaient quant à eux une résolution solennelle contre ces renforts... avant de voter les crédits de guerre en février.

 

Une bataille s'engageait donc pour faire du rapport de l'ISG la nouvelle feuille de route de l'impérialisme américain – Bush souhaitant examiner chacune des propositions au cas par cas, tandis que les démocrates ont cherché à l'imposer dans tous ses aspects.

L'ISG a formulé 79 propositions  « unanimes », organisées autour de deux grands axes: « Construire un consensus international » et « Aider les irakiens à se passer des américains » (ils s’en seraient bien passés! - ndlr). Il exprime des objectifs en réponse aux problèmes fondamentaux de l'impérialisme américain: amener l'Iran et la Syrie à collaborer à la stabilisation de l'Irak, aux côtés des autres pays frontaliers; inviter les autres puissances impérialistes à contribuer financièrement à la « reconstruction »; amener la « résistance » sunnite, largement issue du Baas et désignée comme la cause principale des pertes militaires américaines, à s'intégrer aux institutions-relais (dissoudre en parallèle des milices chiites); et surtout, réduire la présence et l'exposition des troupes américaines en renforçant l' « armée » et la « police » irakiennes.


Les problèmes en Irak restent entiers


Sur le plan intérieur irakien, Bush s'est indéniablement inspiré du rapport Baker-Hamilton: rompant avec ses méthodes précédentes, il est même parvenu à obtenir une chute spectaculaire des attaques contre les soldats américains dans les zones à majorité sunnite... en armant, finançant, formant, et confiant le contrôle « sécuritaire » de ces zones à ceux-là même qui, auparavant, luttaient contre l'occupation armes à la main. Reconverties en « groupes du Réveil » dans certaines provinces, en « citoyens concernés » dans d'autres, ces milices sunnites assurent leur contrôle jusqu'aux bastions historiques de parti Baas et sont d'ores et déjà fortes de plus de 65 000 hommes. Depuis septembre, Bush peut s'appuyer sur un autre constat: les attentats à Bagdad ont chuté de manière significative à l'issue du « plan de sécurité ». La « nouvelle approche » porterait-elle ses fruits?

Ce serait faire beaucoup de cas d'une situation récente et limitée (des centaines d'irakiens meurent chaque mois dans des attentats) et dont les causes sont loin d'être toutes la conséquence du plan de Washington, telle la fin de la pseudo-« épuration ethnique » dans la capitale (en réalité fin de « l'homogénéisation » sanglante des zones contrôlées par les milices) ou la « suspension des hostilités » par la première milice chiite, l'Armée du Mahdi, depuis août (reflétant la pression de l'Iran).

 

Mais de plus la stratégie nouvelle mise en oeuvre par le Pentagone a obtenu un autre résultat spectaculaire … l'implosion du « gouvernement » Al-Maliki, boycotté d'abord par les sunnites du Front de la Concorde, ensuite par les chiites de l'Armée du Mahdi.

Cette situation perdurait encore fin décembre, au point de bloquer toutes les décisions nécessaires à la construction d'un Etat colonial. Le budget irakien lui-même n'a pu être voté malgré des mois de tractations. Une loi pétrolière, sensée organiser la privatisation de la première richesse du pays et la répartition des bénéfices entre factions, a bien été votée... mais elle ne s'applique pas dans les faits, et les Kurdes lui préfèrent une loi de leur cru qui leur accorde évidemment toutes les prérogatives sur leur zone « autonome ». Un référendum sur le statut de Kirkouk – ville riche en hydrocarbures réclamée tant par les kurdes que par les chiites – a été repoussé. La réintégration des anciens fonctionnaires bassistes – mesure de « réconciliation nationale » préconisée par l'ISG – est au point mort. Bref: la Maison Blanche continue de voir s'opposer, à son grand dam, les différentes factions cléricales et bourgeoises – toutes étant certes disposées à collaborer avec les Etats-Unis, mais ne trouvant aucun terrain d'entente entre elles.

C'est du sein même de la bourgeoisie américaine que, dans ces conditions, s'exprime la crainte que la « nouvelle approche » américaine puisse n'avoir contribué qu'à une aggravation prochaine de la situation:  « Malgré le succès du mouvement, [le recrutement des miliciens sunnites] est une expérimentation de contre-insurrection qui pourrait contenir les germes d'une guerre civile dans laquelle, si les pires craintes deviennent réalité, les Etats-Unis auraient permis d'organiser en partie les forces sunnites opposées à un gouvernement central pour lequel tant de vies américaines et de dollars ont été dépensés » (The Herald Tribune, 24-25/12/2007). La « paix » armée entre factions, à Bagdad, chacune contrôlant « sa » zone épurée derrière de hauts murs que l’armée d’occupation a fait construire, ne tient qu'à un facteur: la présence massive de troupes américaines.


Tout repose sur les troupes d'occupation


Au-delà de succès de façade, la tentative d'appliquer en Irak les recommandations de l'ISG n'a finalement rien résolu à ce jour.  Tout le poids de l'équilibre précaire de l’Irak repose sur les épaules des GI's – d'autant plus que les alliés de 2003 se sont pour leur part repliés ou opèrent leur redéploiement. La coordination de diverses cliques armées revêtues d'un même uniforme de la « police irakienne » ne tient qu'à la présence, dans les commissariats, de troupes américaines. La formation et le financement de « policiers » sunnites relèvent pour la quasi-totalité de Washington – le « gouvernement » irakien y faisant obstruction. Des sommes importantes doivent en outre être employées à appâter les cheikhs sunnites, sous prétexte de « programmes de recontruction ». Le budget consacré à l'Irak et à l'Afghanistan explose: Bush a d'ailleurs annoncé que les 70 milliards de dollars accordés à cette enveloppe, dans le cadre du budget 2008, ne seraient qu'un « acompte ». Ce sont 196 milliards – l'équivalent de près de la moitié du budget de la France – qui seraient nécessaires.

A plus d'un titre, l'impossibilité de passer de l’occupation militaire de l'Irak à la construction d’un Etat compradore fait ressortir les limites politiques qui sont celles de l'impérialisme américain, et du mode de production capitaliste entré depuis des décennies dans la putréfaction de l’impérialisme, l’époque des guerres et des révolutions.

 

Prosaïquement, depuis des mois, le recrutement des GI's s'est tari aux Etats-Unis: toutes les troupes susceptibles d'être envoyées en Irak ou en Afghanistan – plus d'un million et demi de soldats depuis 2003 - s'y sont rendues au moins une fois. La pénurie de troupes est telle que la durée des missions en Irak a du être étendue de 12 à 15 mois. Outre les 168 000 hommes des troupes régulières présentes en Irak, la débauche d'armement ultra-moderne, 180 000 « sous-traitants », notamment des dizaines de milliers de mercenaires, opèrent dans tout le pays. Et alors que Bush s'est lui-même engagé à rapatrier avant juin 2008 les 30 000 soldats de renfort obtenus début 2007, les agissements criminels desdits mercenaires ont amené le « gouvernement » Al Maliki à abolir le statut d'impunité que Wahington leur avait octroyé après l'invasion du pays: développements qui pourraient bien révéler l'absence de fondements solides pour les « progrès » revendiqués par le général Petraeus, chef des opérations américaines en Irak.

Circonstance aggravante: les pays frontaliers de l'Irak, qui tous interviennent dans la vie intérieure du pays, seraient inévitablement amenés à intervenir dans ce pays à mesure que l'impérialisme américain s'en retirerait, pour y défendre leurs intérêts antagoniques. Déjà, la Turquie, qui a massé plus de 100 000 soldats aux portes du Kurdistan irakien, se livre depuis des semaines à des bombardements massifs sur le Kurdistan irakien, sous prétexte d'éradiquer la base arrière du PKK – en réalité pour interdire tout commencement d'Etat kurde. Et tandis que l'Iran ne peut qu'espérer le contrôle des factions chiites sur le pays, l'Arabie saoudite ne peut accepter sans broncher que son ennemi règne à sa porte. Il ne suffit donc pas d'une recette irako-irakienne pour régler le problème: encore faut-il parvenir à accorder tous ces Etats rivaux.


Menaces de gangrène: de l'Afghanistan...


En Afghanistan aussi, la tentative de mettre en place des institutions coloniales est un échec pour la coalition impérialiste: faute d'un véritable Etat afghan, les talibans – pourtant incapables de contrôler véritablement de larges pans de territoires – ont pu reprendre l'offensive depuis le printemps 2006. Le correspondant du Monde, constatant  (dans l’édition du 21/12/07) que l'année écoulée a été  « la plus sanglante depuis 2001 », est catégorique:

« sans l'aide des 52700 soldats occidentaux, dont 1200 français [ils sont en réalité près de 2000, ndlr] les forces gouvernementales (environ 57000 soldats et 71000 policiers) seraient balayées par les talibans »).

La victoire écrasante de la coalition, en 2002, avait conduit une majorité de chefs de guerre – y compris d'anciens partenaires des talibans – à accepter le cadre institutionnel défini à Berlin, avec la désignation d'un président fantoche, Hamid Karzaï. L'incurie du gouvernement afghan et le retour des talibans aboutissent désormais à un mouvement inverse: chacun retire sa contribution du pot commun. La principale coalition au parlement, le Front Islamique Uni – émanation des chefs  ouzbeks et tadjiks de l'ex-Alliance du Nord – s'est par exemple engagée, au printemps 2007, dans une véritable campagne anti-pachtounes, dégénérant en affrontements sanglants dans le nord du pays: ils ont exigé en particulier l'éviction d'un gouverneur, voté celle d'un ministre appartenant à ce peuple d'où les talibans sont issus.

A mesure que le mince vernis « démocratique » posé par les puissances impérialistes craque, se profile un retour au statu quo ante – c'est-à-dire à la guerre civile, tribale. Une situation de faillite dont Karzaï a lui-même formulé l'aveu, en septembre, en proposant aux talibans d'intégrer et le « parlement » et le « gouvernement » - n'obtenant en réponse qu'un refus et l'exigence d'un retrait des troupes impérialistes.

Une angoisse s'ajoute à ce bilan: celle de voir s'effriter la coalition impérialiste, que nombre de pays sont tentés de déserter. Angoisse suffisante pour que Sarkozy, suivi immédiatement par Prodi, organise une visite surprise à Kaboul le 22 décembre, dans le but manifeste d'assister son « ami américain ».

 

Par ailleurs, l'incapacité de la coalition impérialiste à reconstruire un Etat oblige aujourd'hui Bush à accentuer la pression sur le pays qui possède la frontière commune la plus longue et les liens les plus étroits avec l'Afghanistan: le Pakistan.


...au Pakistan


L'assassinat de Benazir Bhutto, le 27/12, a exposé au grand jour la situation de crise que traverse aujourd'hui l'Etat pakistanais. Bhutto, qui avait été premier ministre, dirigeait le premier parti du pays: le Parti du Peuple du Pakistan (PPP). Un parti populiste qui, profitant de l'absence d'un parti ouvrier de masse, a joué à plusieurs reprises dans l'histoire du pays le rôle de caution et de rempart « démocratique » pour le régime militaro-policier. Sa mort a été commentée par le Herald Tribune en ces termes: « Le meurtre laisse la politique US en ruines » (édition du 28/12) Le retour de Bhutto au Pakistan, en octobre, après des années d'exil, participait en effet d'un dispositif visant à renforcer la collaboration d'Islamabad avec Washington.

 

Vue du Pakistan, l'invasion américaine de l'Afghanistan a été un tournant à 180° de Washington. Depuis le début des années 80, la province nord-ouest du pays (où existent des zones administrées directement par les milices tribales: nord et sud-Waziristan, vallée de Swat) constitue une zone de recrutement, d'entraînement et une base arrière pour les factions islamistes les plus nauséabondes. Ces factions ont été constituées grâce à des subventions massives des Etats-Unis et de l'Arabie Saoudite pour faire pièce aux alliés afghans de l'URSS. En 1994, c'est depuis le Pakistan, grâce à des fonds américains, que les talibans ont lancé leur offensive sur l'Afghanistan. Le trafic de drogue qui, par la suite, a fourni à ces armées de lumpen fanatisés une source considérable de financement, s'est encore développé avec l'assentiment de Washington: déjà placés dans le rôle d'intermédiaires entre les islamistes et la Maison Blanche, des officiers des services secrets (l'ISI) et de l'armée se sont enrichis en fermant les yeux.

Depuis 2002, les choses ont changé: Bush exige désormais de Musharraf, ancien chef des armées parvenu au pouvoir par un coup d'Etat, qu'il organise la « lutte contre le terrorisme » au Pakistan. Le retour en force des talibans depuis un an et demi incite la Maison Blanche à accroître la pression sur le régime d'Islamabad. Pression à laquelle Musharraf ne peut opposer un refus franc: Washington finance très largement l'Etat pakistanais (plus de 10 milliards de dollars lui ont été versés depuis 2001). Mais les créatures de Washington, une fois invoquées, ne peuvent si facilement retourner dans les limbes: les affronter signifie, pour Musharraf, ouvrir une crise au sein même de l'appareil d'Etat dont il est issu, au risque de disloquer ce dernier – d'autant plus qu'outre les talibans, le régime s'épuise dans un conflit permanent avec l'Inde, à l'est, et réprime à l'ouest la minorité baloutche.


Une crise multiforme


Après plusieurs déconvenues militaires, Musharraf avait signé, en novembre 2006, une trêve avec les talibans: la fureur de Bush a contraint ce dernier à relancer la répression – ce qu'il a commencé à faire en fermant les madrasas (écoles coraniques qui constituent les centres de recrutement des islamistes). En juin 2007, la réponse se fait entendre dans le monde entier: plusieurs milliers d'étudiants islamistes occupent la Mosquée Rouge, en plein coeur de la capitale, ce à quoi Musharraf répond par une véritable boucherie de près d'une centaine de morts. Les chefs talibans font alors savoir que la trève est devenue caduque, et déclenchent une série d'attentats qui visent jusqu'au QG de l'armée ou le Ministre de l'Intérieur - l'important étant ici que, par le biais des terroristes, une partie de l'appareil d'Etat envoie un message au pouvoir central. Incapable d'intervenir au sol sans pertes massives, l'armée organise une série de bombardements aériens dans les zones tribales, massacrant des  villageois par centaines, tandis que la vallée de Swat – la moins périlleuse des trois zones tribales – est occupée militairement.

 

Mais depuis le printemps, le dictateur doit aussi faire face à l'opposition de la Cour Suprême pakistanaise, qui s'est opposée à sa « réélection » récente, en l'absence de toute opposition crédible... L'éviction du président de cette cour déclenche des manifestations contre Musharraf de plusieurs dizaines de milliers de personnes.

Enfin, il faut tenir compte de la haine des masses accumulée à l'encontre de Musharraf et de l'Etat qu'il représente, dans ce pays où l'armée est financée à milliards par Washington, qui dispose de l'arme nucléaire, mais où 80% de la population n'a pas même accès à l'eau courante et où les infrastructures de base (électricité, routes, écoles...) font défaut.

 

C'est pour permettre la mise en coupe réglée de l'Etat pakistanais, et pour anesthésier cette haine, que Bush a cherché à obtenir la conclusion d'un accord entre Bhutto et Musharraf, dans la perspective des élections législatives. Le Figaro l'a expliqué: « Bhutto était la seule personnalité politique susceptible de figurer en bonne place au panthéon de la « nouvelle démocratie » pakistanaise appelée à sortir des urnes. Avec la bénédiction, voire à l'instigation, de Washington. » (édition du 28/12/2007). Elle était aussi la seule à faire campagne pour permettre aux troupes de la coalition d'intervenir au Waziristan...

 

Aux exigences de Bush, Musharraf avait cependant, dès avant la mort de Bhutto, opposé toutes les manoeuvres possibles pour empêcher la conclusion d'un accord qui l'amènerait à aller plus loin dans la lutte contre les talibans et leurs soutiens. En novembre, il avait suspendu la Constitution et déclaré l'urgence, avant que Washington n'exige la reprise du processus politique. L'idée selon laquelle Musharraf et l'armée pakistanaise ont tout fait pour permettre la mort de Bhutto est tout-à-fait crédible.

Mais autre chose est certain: les difficultés de la coalition en Afghanistan ne peuvent conduire l'administration américaine qu'à maintenir sa pression sur le régime pakistanais – au risque d'en exacerber la crise.


Au Liban, le dispositif impérialiste patine


Le Liban connaît lui aussi une crise institutionnelle: le jeudi 23 novembre 2007, le mandat de l'ex-président de ce pays, Emile Lahoud, a expiré, sans que sa succession ait pu être assurée. A onze reprises, les élections présidentielles ont été reportées depuis le 25 septembre. Le parlement libanais, où la « majorité » de Sinora-Hariri cherchait à faire élire un candidat issu de ses rangs, ne peut réunir le quorum nécessaire en raison du boycott effectué par l'opposition. Du côté du gouvernement proche de Paris et Washington, la désignation d'un chef d'Etat à la botte aurait été l'occasion d'évincer un peu plus l'influence syrienne au Liban. La crise politique du Liban est donc l'expression des difficultés persistantes de Washington, flanqué en la matière de Paris.

Rappelons que le Liban a subi de plein fouet les conséquences de l'invasion de l'Irak. Depuis 2004, une alliance politique associant notamment l’impérialisme français et l’impérialisme américain essaie de dicter sa loi à ce petit pays – les américains cherchant d’abord par ce biais à mettre la Syrie à genoux, tandis que l'impérialisme français cherche avant tout à défendre une de ses anciennes zones d'influence.

En 2005, exploitant à son profit l'assassinat de Rafic Hariri, cette alliance est parvenue à imposer le retrait hors du Liban de l'armée syrienne, qui l'occupait depuis 1975. Bush a, par la suite, exploité la guerre-éclair menée par Israël contre le Liban, lors de l'été 2006, pour substituer à l'armée syrienne une autre force d'occupation: la FINUL renforcée, à laquelle participent notamment des troupes françaises. Au passage, ils rétablissaient la présence de l'armée libanaise au Liban-sud (v. CPS n°26).

En mai 2007, Paris et Washington ont organisé un autre coup de force: le siège et la réduction en cendres d'un camp palestinien, celui de Nahr el Bared, par une armée libanaise équipée en urgence par l'Amérique et ravitaillée par la France. Sous prétexte d'éradiquer un obscur groupe armé, Fatah el Islam, cette opération meurtrière a permis une consolidation de l'armée libanaise. Elle n'a pourtant été rendue possible que par la réalisation d'une véritable union nationale autour de cette armée – allant des ultras chrétiens aux restes du Parti Communiste Libanais, en passant par le Hezbollah et l' « opposition ». Union consolidée par une effroyable servilité du Hamas et de l'OLP – le responsable de cette dernière organisation au Liban étant allé jusqu'à cautionner la répression à balles réelles de palestiniens désarmés qui manifestaient pour rentrer chez eux: « Nous n'accepterons pas que l'armée soit prise en tenaille entre la bande de Nahr El-Bared et les fauteurs de troubles » (Le Monde, 1er  et 2/7/2007).

Et pourtant: les opérations de Paris et Washington au Liban se heurtent à des limites persistantes: si la FINUL renforcée s'est effectivement déployée au Liban sud, il ne tient en réalité qu'au Hezbollah, tout puissant dans ce secteur, que sa présence devienne un véritable cauchemar. Même renforcée, l'armée libanaise pourrait n'être d'aucune utilité en cas de luttes fratricides entre factions libanaises. Et l'opposition, quand bien même elle est constamment qualifiée de « minoritaire » par la presse occidentale, a prouvé par le passé qu'elle disposait des moyens de déclencher de larges mobilisations contre Siniora.

 

Pour soumettre cette opposition, la nécessité de peser sur ses puissances de tutelle – la Syrie et l'Iran – serait plus que jamais nécessaire. Or, le principal instrument dans ce sens – la menace d'une offensive militaire américaine depuis l'Irak – est devenue plus qu'improbable.


L'étau se desserre autour de l'Iran et de la Syrie


Constatant l'échec de sa diplomatie au Liban, Sarkozy a annoncé, fin décembre 2007, la rupture de ses discussions avec Bachar el Assad... Dès le 6 janvier, un sommet de la Ligue Arabe au Caire adoptait un plan de sortie de crise appuyé aussi bien par le partisans de Siniora et Hariri que par le régime de Damas, accord qui prône « la formation d'un gouvernement d'union nationale » où l'essentiel des pouvoirs serait octroyé à un président de « consensus » en la personne du chef des armées, « nommé à la tête de l'armée libanaise à l'époque où [la Syrie] faisait la pluie et le beau temps au pays des cèdres » (L'Orient le jour). Au préalable, Téhéran avait fait savoir son « soutien (...) aux efforts déployés par la Syrie pour parvenir à un compromis » (AFP, 4/1/2008). Piteux, Kouchner n'avait plus, le 7, qu'à saluer cette initiative... tentant de s'en présenter comme l'inspirateur. C'est en réalité une gifle pour Paris.

 

Malgré l'hostilité de Bush, quelque chose est en train de changer dans la place que l'axe Damas-Téhéran occupe dans la région. Au cours des derniers mois, la Maison Blanche a cherché à contourner les recommandations du rapport de l'ISG, favorable à l'ouverture de véritables négociations avec l'Iran et la Syrie. En mai 2007, Paris et Washington ont ainsi fait adopter la mise en place par l'ONU, via la résolution 1757, d'un tribunal international dirigé contre la Syrie sous prétexte d'enquête sur la mort de Rafic Hariri. Le 6 septembre, Israël procédait à un raid aérien contre ce même pays, tandis que Kouchner évoquait une « guerre » contre l'Iran. La logique de ce dispositif d'intimidation était de préparer le vote d'un troisième volet de sanctions contre l'Iran à l'ONU. Mais Bush et ses alliés ont subi depuis plusieurs camouflets sérieux.

 

Le plus significatif d'entre eux a été la publication, le 3 décembre, d'un rapport des agences de renseignement américaines qui stipule que l'Iran aurait mis fin à son programme nucléaire militaire... depuis 2003. Ce qui ôte toute justification à des raids aériens et a arraché à Ahmadinedjad le cri de « Victoire ». Une réaction en chaîne n'a pas tardé à suivre. Moscou a ainsi annoncé avoir repris la fourniture de combustible nucléaire à l'Iran.

Mais encore: l'Egypte, Bahreïn, le Qatar – qui battaient froid à Téhéran depuis la révolution iranienne - ont repris des contacts diplomatiques et commerciaux avec ce pays. Dans ce contexte, la participation d'Ahmadinejad au pèlerinage de La Mecque, à la mi-décembre, n'a strictement rien de fortuit. Le dispositif d'isolement mis en place par les Etats-Unis semble en voie d'effritement.

La raison en est claire. Prenant acte du fiasco de Bush dans la région, une fraction de l'appareil d'Etat américain cherche à lui imposer un cours nouveau: négocier avec l'Iran et la Syrie, sans délai et tels qu'ils sont – quand bien même une victoire des éléments conciliateurs est espérée contre Ahmadinejad lors des prochaines législatives iraniennes - pour mettre fin à l'instabilité irakienne, remettre le Liban en ordre de marche et trouver un accord dans ce sens avec les autres puissances régionales. Et si Bush cherche encore, en retour, à resserrer ce qu'il reste de son filet autour de l'Iran, ses moyens de pression se réduisent à vue d'oeil.


Pour les prolétariats de la région: une situation très difficile


Insistons à nouveau: si les difficultés de l'impérialisme américain face à ses propres limites sont patentes, elles n’en ouvrent pas pour autant ipso facto la voie du combat pour les masses du Moyen-Orient.

 

Le coup terrible constitué par l'écrasement de l'Irak continue de peser sur elles. En Irak, il n'est pas exagéré d'affirmer que le prolétariat connaît les heures les plus sombres de son histoire, accablé par une misère et un chômage immenses, dépourvu d’organisations ouvrières de masse combattant l’occupation et l’exploitation et de syndicats (ces derniers ne pouvant se construire sans l’organisation de groupes d’autodéfense ouvrière armés).

Dans l'immense majorité des pays de la région, les travailleurs sont confrontés à l'absence de partis et d'organisations ouvrières, ou à la dégénérescence de ces organisations en conséquence de la politique imprimée par les appareils issus du stalinisme. Privés d'expression propre, ils sont ballottés par des organisations petites-bourgeoises souvent patronnées par l'Iran ou la Syrie.

Cela ne signifie nullement qu'il faille exclure des développements de la lutte des classes dans la région, par exemple en Iran, mais que les conditions de ces luttes restent défavorables au prolétariat, dépourvu de perspective politique.

 

L'Egypte, le plus peuplé des pays arabes, en a fourni une illustration tout au long de l'année 2007, à travers une vague de grèves salariales présentée comme sans précédent par la presse: confrontée à la tutelle de « syndicats » officiels inféodés au régime de Moubarak, à l'absence de parti ouvrier (les restes du PC finissant de se fondre dans une coalition vivotant au parlement-croupion: Tagammu), la classe ouvrière massive de ce pays n'a pourtant pas pu, à ce jour, centraliser et coordonner son mouvement, remettant en cause la politique de Moubarak.

Or, ce dernier a fait adopter par référendum, le 26 mars, une série de modifications constitutionnelles qui renforcent son pouvoir et ont été présentées dans le but d'« en finir avec les principes socialistes » et de « créer une atmosphère plus favorable pour les investisseurs étrangers »: ce qui signifie notamment achever de privatiser les usines d'Etat et licencier en masse dans un pays où 25% de la population est au chômage.


Annapolis: Washington adoube une « Autorité palestinienne » totalement à sa botte


Fin novembre s'est tenue, à Annapolis (USA), une conférence internationale présentée comme renouant avec le « processus de paix » entre Israël et la Palestine. Il s'agit de la mise en oeuvre d'une des propositions de l'ISG: la reprise des discussions entre Israël et « les Palestiniens – ceux qui reconnaissent à Israël le droit d'exister ». Cette dernière précision n'étant pas sans importance.

La première implication de cette opération – à laquelle la Syrie a participé – a été d'adouber une version miniature de l' « Autorité palestinienne ». Depuis le mois de juin 2007 existent en effet, en Cisjordanie et à Gaza, deux débris d' « Autorité » dirigées, l'un par l'entourage de Mahmoud Abbas, l'autre par le Hamas. C’est un succès pour Israël. En mars 2007, Hamas et Fatah s'étaient accordés sur la base d'un accord prévoyant notamment « la reconnaissance des accords internationaux pris par la direction de l'OLP ». A comprendre: outre la limitation de la Palestine aux frontières de 1967 (qui la disloquent) et la reconnaissance implicite d'Israël (qui la meurtrit et la colonise), l'engagement à liquider toute résistance armée dans le prolongement d'une « réforme des services de sécurité » (engagements pris dans le cadre de la « feuille de route » de 2003). Israël ne s'engageant, pour sa part, comme à l'accoutumée, à strictement rien... Il s'agissait là d'une tentative pathétique de récupérer, en faisant montre de la plus grande servilité possible, les subventions coupées notamment par l'UE depuis le printemps 2006. Accoutumé à la prière, le Hamas n'éprouvait pas plus qu'Abbas de gêne à se mettre à genoux devant Israël.

Olmert lançait néanmoins le 18 mars un appel aux USA et  l'UE pour qu'ils persévèrent dans leur boycott, au prétexte d'imposer aux palestiniens d'abjurer des « éléments extrêmement problématiques qui sont inacceptables pour Israël ou la communauté internationale, notamment le droit à la résistance et le recours au terrorisme ». Israël peut procéder chaque jour à des incursions, des destructions, des interpellations ou des meurtres: mais il est inadmissible que, même en théorie, l' « Autorité » se reconnaisse le droit de résister. Cet argumentaire emportait aussitôt l'adhésion de Washington et du Quartet  – conduisant à de nouveaux affrontements entre factions palestiniennes.


Poursuite de la décomposition du Fatah


Suite à l'initiative d'Israël, des affrontements sans précédent se sont déclenchés, en juin 2007, entre Hamas et Abbas. A Gaza comme en Cisjordanie, l'issue de ces combats a eu un point commun: celui de voir le Fatah, première organisation nationaliste palestinienne, être expulsé de l' « Autorité », après s'y être auto-détruit pendant près de quinze ans.

C'est avec une remarquable facilité que, le 13 juin, les miliciens du Hamas ont fait tomber à Gaza la place forte de la Sécurité Préventive – bastion de la fraction la plus conciliatrice avec Israël du Fatah. A la suite de cette victoire fulgurante, le Hamas l'a rapidement emporté à Gaza, sans rencontrer de résistance significative. En fait, la « victoire » du Hamas s'explique d'abord et avant tout par l'état de dislocation avancé du Fatah, particulièrement à Gaza: des milliers de combattants, refusant de se battre, se sont littéralement évaporés.

 

En Cisjordanie, Mahmoud Abbas a décrété la « dissolution » du gouvernement Haniyeh et en a proclamé un autre, dirigé par Salam Fayad, « un ancien fonctionnaire du Fonds Monétaire qui jouit de la confiance des pays donateurs après un premier passage  remarqué à la direction du Trésor ».(AFP, 15/6/2007). Abbas lui-même, rappelons-le, n'a jamais été élu par le Fatah – son dirigeant le plus influent étant probablement Marwan Barghouti, emprisonné en Israël. Ce « gouvernement » n'est donc pas une émanation du Fatah: il répond en tous points aux diktats des grandes puissances - qui ont d'ailleurs déclaré qu'elles étaient disposées à lui restituer une partie de leurs subventions. Et dès la mi-juillet, il négociait la capitulation de 178 membres des Brigades des Martyrs d'Al Aqsa, fraction armée issue du Fatah, dont le chef des Brigades à Jénine, jadis considéré « ennemi public n°1 » par Israël.


Toujours plus loin dans la capitulation


Ainsi appuyée sur la création d'une « Autorité » entièrement dépendante de Washington, la conférence d'Annapolis a débouché... sur la promesse de conclure un accord instituant un Etat palestinien avant la fin 2008 (en 2002, Bush s'était engagé à ce qu'un tel Etat vît le jour en 2005...). Il n'aboutissait évidemment à aucune concession israélienne dans ce sens: ni la revendication du droit au retour des réfugiés palestiniens (qui remettrait en cause l’Etat raciste et colonial qu’est Israël), ni celle de frontières (même celles de 1967), ni le démantèlement du « mur de séparation » qui organise le dépeçage de la Cisjordanie, ni celui de la majeure partie des colonies, ni la libération des 11000 prisonniers palestiniens, ni l'arrêt des incursions, ni celui des « exécutions extra-judiciaires » ou des arrestations, ni même la levée des checkpoints…

 

Ce simulacre de discussions, venant s'ajouter à la longue succession de capitulations des dirigeants palestiniens, s'est avéré plus cynique encore que ses prédécesseurs: en échange de la réaffirmation de la « feuille de route », c'est-à-dire du muselage des masses palestiniennes, Abbas et sa clique ont obtenu l'assurance de récupérer de précieux subsides dont ils feront notamment usage pour financer leur police et leur bureaucratie. Tâche que l'impérialisme français s'est fait un honneur de mener à bien, en organisant le 17 décembre une conférence de donateurs à Paris... Quant aux points d'accord sur un « statut final » de l'Etat palestinien – Etat qui ne serait de toutes façons pas viable - ils sont inexistants.

Or, le dernier mot de ce processus semble bien être d'aboutir à la reconnaissance de Jerusalem comme capitale... de l'Etat hébreu. Dès le 9 octobre, plusieurs ministres israéliens organisaient des fuites. Haïm Ramon, vice-premier ministre d'Israël: « Ne faudrait-il pas aujourd'hui que les palestiniens, l'occident et le reste de la communauté internationale reconnaissent l'annexion [par Israël] des quartiers [juifs] de Jerusalem, et de notre côté, que nous nous retirions des quartiers arabes? » (L'Orient le jour, 9/10/2007). En contrepartie de cette capitulation historique, Abbas gagnerait le « droit » (hypothétique) d'étendre les missions de police qui lui sont dévolues aux quartiers arabes encerclés, depuis des années, par des constructions israéliennes. Bush, en annonçant début janvier une visite au Proche-Orient, au cours de laquelle il prévoit de rencontrer Olmert à Jerusalem et Abbas en Cisjordanie, tend à montrer aujourd'hui que cette perspective n'a pas été abandonnée.


Lutter contre la barbarie, aider les masses du Moyen-Orient: combattre l'impérialisme


De ce qui précède, il ressort une conclusion essentielle: quelle que soit l'issue des plans que l'impérialisme américain dresse pour son propre compte, en vue d'aboutir à un retrait plus ou moins rapide des troupes d'occupations, les conséquences de cette politique ne peuvent être, du point de vue des masses, que catastrophiques. Après avoir précipité la barbarie militaire, fait des centaines de milliers de morts, de réfugiés, l’impérialisme rapproche chaque jour la région d’un chaos épouvantable.

L'horreur quotidienne dont Washington et ses alliés accablent le Moyen-Orient et l'Afghanistan, dernier mot de la lutte pour le maintien du mode de production capitaliste, interpellent les prolétariats du monde entier: elle exprime avec la plus grande clarté l'actualité de l'alternative « socialisme ou barbarie ».

L'issue pour les masses de cette région ne procèdera pas de spéculations sur les démêlés internes à la bourgeoisie américaine; le salut ne viendra pas d'un prétendu « droit international » qui n'est qu'une façade mensongère pour le droit du plus fort, celui des pillards impérialistes; il ne viendra pas des factions réactionnaires sous tutelle de Damas ou de Téhéran. Les prolétariats du Moyen-Orient n'ont d'autre perspective que de construire leurs propres organisations pour lutter contre les troupes d'occupation impérialiste et balayer les Etats artificiels, créés par l'impérialisme, soutenus à bout de bras par lui, au compte de ses intérêts: des Partis Ouvriers Révolutionnaires, construits sur la perspective d'une Fédération Socialiste du Proche et du Moyen-Orient.

Les travailleurs et les jeunes des pays capitalistes dominants ont un rôle décisif à jouer dans cette lutte: il passe par le combat contre l'occupation impérialiste de l'Irak, de l'Afghanistan et du Liban, contre le soutien des grandes puissances impérialistes aux Etats compradores et à l'Etat d'Israël, dont l'écrasement de la Palestine et du Proche-Orient est la raison d'être.

 

Exception faite de l'Irak, l'impérialisme français, dirigé par Sarkozy, est impliqué sur tous les fronts de la « guerre contre le terrorisme » : conscient que sa place de troisième ordre ne lui permet pas de jouer un rôle significatif sur le plan international, ni de conserver ses anciennes positions, sa diplomatie passe aujourd'hui par une collaboration plus étroite que jamais avec les « amis américains ». Il contribue à l'occupation de l'Afghanistan et du Liban, soutient plus que jamais l'Etat d'Israël, fournit aux troupes libanaises les munitions qui ont permis d'organiser le massacre de Nahr el Bared. Le combat pour la construction du Parti Ouvrier Révolutionnaire en France implique de combattre la politique de l'impérialisme français au Moyen-Orient.


 

Le 6 janvier 2008

 

Vers la section :Moyen-Orient

 

Vers l’accueil