Editorial de C.P.S Nouvelle série n°27 (n°109) – 12 janvier 2007

 

Le gouvernement UMP Chirac-Villepin-Sarkozy :

« au travail » jusqu’au bout contre les travailleurs

 


Les élections présidentielles d’avril et mai prochain occupent chaque jour une place grandissante dans le paysage politique. Cela n’a rien d’une sorte de phénomène naturel. C’est un fait politique.

 

Pour les travailleurs, la meilleure manière de préparer les échéances électorales, comme plus généralement leur avenir, serait de combattre directement, avec leurs propres méthodes et objectifs, pour infliger une défaite décisive au gouvernement et au patronat.

C’est cette possibilité qu’avait ouvert la défaite infligée à ces derniers au printemps 2006 en leur imposant le retrait du Contrat première Embauche. Si cette possibilité s’était réalisée, alors, la situation politique en aurait été bouleversée. Les appareils syndicaux, le PS et le PCF ont tout fait pour que tel ne soit pas le cas.

 

Aussi, la place démesurée occupée par la préparation des élections exprime que les potentialités contenues dans la défaite du gouvernement sur le Contrat Première Embauche semblent épuisées.

 

Chirac lui-même dans ses vœux du 31 décembre l’a exprimé. Pour que, a-t-il dit, le « débat démocratique » puisse être positif (pour lui et sa classe), il faut que le gouvernement travaille « jusqu’au bout ».

« D'ici aux élections, j'aurai une double exigence : que le Gouvernement soit au travail, à votre service, pour la sécurité, pour l'emploi, pour le pouvoir d'achat et que ces mois soient aussi des moments de débats ouverts, démocratiques et responsables et je m'y engagerai pleinement. »

Et, à couvert du déluge de phrases sur les futures échéances, c’est effectivement ce qui se produit.


Jusqu’à la dernière minute


La session parlementaire s’achèvera fin février. Elle est encore chargée, puisque doivent être examinés une série de textes sur l’essentiel desquels le précédent numéro de CPS avait exprimé ce qu’il y avait à en dire, en particulier concernant le projet de loi liberticide et anti-ouvrier présenté au titre de la lutte « contre la délinquance ». Les salariés de Thomé Génot, placés en octobre en liquidation judiciaire, ont pu en goûter la substantifique moëlle : ils ont été traités comme des « délinquants » par les CRS et gendarmes venus les évacuer de leur usine le 9 novembre, dans une atmosphère que la presse a décrite ainsi « scènes d’occupation militaire dans les Ardennes », ou encore « un climat de couvre-feu »...

 

Doit aussi être adopté un projet qui a, pour l’avenir, une grande importance et qui représente un nouveau pas vers l’instauration d’un système de cogestion, à savoir le projet de loi sur le « dialogue social ». Fin octobre, on pouvait en lire dans un communiqué FO la présentation suivante :

« «Tout projet de réforme portant sur le dialogue social, les relations individuelles et collectives du travail, l'emploi et la formation professionnelle fait l'objet d'une concertation préalable avec les partenaires sociaux en vue de l'ouverture d'une négociation interprofessionnelle», précise le projet de loi. Dans ce cadre, les «organisations syndicales et professionnelles les plus représentatives au niveau national» seront informées de tels projets par le gouvernement, via «un document d'orientation présentant un diagnostic, les objectifs et les différentes options et modalités envisagées». Elles sont invitées ensuite à «faire savoir» si elles engagent ou non des négociations en indiquant «le délai qui leur serait utile à cet effet». Ces dispositions «ne seront pas applicables en cas d'urgence avérée».

Le texte prévoit aussi un rendez-vous annuel entre le gouvernement et les interlocuteurs sociaux. «Chaque année, les orientations de la politique du gouvernement (…) ainsi que le calendrier envisagé pour leur mise en œuvre, sont présentés pour l'année à venir» devant la Commission nationale de la négociation collective (CNNC), indique le projet de loi. De leur côté, lesdites organisations présenteront, elles, «l'état d'avancement des négociations interprofessionnelles en cours ainsi que le calendrier de celles qu'elles entendent mener ou lancer dans l'année à venir»

 

Et la direction confédérale FO de trouver ce texte « acceptable », tandis que celle de la CGT demande pour sa part son élargissement à d’autres champs, comme les retraites (domaine dans lequel la concertation est pourtant permanente au sein du Conseil d’Orientation).

Or, pour bien apprécier ce projet de loi, il faut rappeler le discours de présentation qu’en avait fait Chirac en octobre dernier devant le Conseil Economique et Social, comme nous le faisions dans un supplément à CPS en date du 30 octobre dernier :

« Les « partenaires sociaux » seraient chargés de co-rédiger les projets de loi ou même d’ordonnance des gouvernements. Qu’est-ce que cela signifie ? Chirac le dit clairement : « Les syndicats doivent se libérer d'une ancienne tradition excessivement protestataire qui débouche trop souvent sur l'affrontement (…) il faut sortir de la logique du conflit (…) fonder une culture de la négociation ».

Quelle « culture du conflit » Chirac et l’UMP veulent-ils enterrer, sinon la culture ouvrière façonnée par la lutte des classes ? Voilà en effet ce que signifierait cette loi d’association des directions syndicales à la politique des gouvernements de la Ve République. »

Il faut en outre rappeler que, durant l’automne, le parlement a continué de tourner à plein régime, privatisant totalement GDF, alors que ce projet avait été remis en cause après la défaite gouvernementale sur le CPE. Les éventuelles remises en cause juridiques, saluées cyniquement par la direction CGT-Energie comme une « victoire », n’y changeront en définitive pas grand-chose. Les budgets de l’Etat et de la Sécurité Sociale ont été adoptés sans encombre, eux qui donnent d’une main de nouvelles baisses d’impôts sur les revenus les plus élevés et des allègements de charges aux entreprises, et  suppriment de l’autre un nombre record de postes de fonctionnaires, poursuivent les restrictions au droit aux soins.

 

Enfin il faut noter que Chirac s’emploie à s’offrir un dernier relent d’unité nationale en convoquant le congrès pour procéder à des retouches de la constitution sur lesquelles il espère aligner l’ensemble des députés, y compris ceux du PS et du PCF.


Feu roulant contre le corps enseignant, et surtout contre les statuts de 1950


Evidemment, la boulimie réactionnaire du gouvernement et de sa majorité UMP dans leur dernière ligne droite ne s’est pas confinée à l’enceinte du Parlement. Et, une nouvelle fois, l’enseignement public et ses personnels se sont trouvés dans la ligne de mire. Non seulement le nombre de suppressions de postes y a atteint des sommets, mais encore le ministre Robien semble ne pas vouloir laisser la place sans avoir démoli autant que faire se peut l’enseignement public. Qu’on en juge : « réforme » des IUFM se traduisant par une nouvelle et sérieuse aggravation des conditions de formation, l’alignant par anticipation sur la future polyvalence souhaitée des enseignants. Mise en route dans le premier degré d’un décret créant des « EPEP », de futurs gros « établissements publics d’enseignement primaire » regroupant plusieurs écoles, dotés d’une vraie direction, ce qui constituerait un bouleversement dans le fonctionnement des écoles communales. Dans le même temps, le ministère a engagé des sanctions financières contre les directeurs d’école qui poursuivent la grève administrative en dépit du protocole d’accord signé par le SE-Unsa. Infatigable, Robien a même annoncé en ce début janvier la mise en application des conclusions du rapport Hetzel, dont l’essentielle est la « professionnalisation » accrue des diplômes universitaires, autrement dit leur déqualification et leur soumission (ainsi que celle des étudiants) aux besoins immédiats du patronat, appelé à jouer un rôle plus important que jamais dans la définition des formations et des contenus, au nom de « l’insertion ».

 

Mais ce qui est au centre de cette nouvelle vague d’attaques, c’est la casse des décrets de 1950 régissant le service des enseignants du second degré. Comme l’indique un supplément enseignant à CPS du 10 décembre dernier :

« * D’une part ce projet signifierait pour des dizaines de milliers d’entre eux une baisse brutale de leur salaire, en restreignant l’accès aux décharges statutaires (première chaire, heures de laboratoire, …) ou augmentant leurs maxima hebdomadaires (effectifs réduits,…). C’est un véritable racket qui a pour but de supprimer des postes, de faire travailler plus les enseignants en les payant moins – alors que le gouvernement poursuit les baisse d’impôts sur les revenus les plus hauts, les exonérations de charges.

* D’autre part ce projet imposerait aux professeurs une plus grande flexibilité, s’inspirant du sort réservé depuis des années aux TZR. Il généraliserait la polyvalence. 

 

* Enfin, en introduisant dans la définition des services d’autres tâches que l’enseignement, il mettrait en place la définition locale des services, arrêtés par une « lettre de mission » édictée par le chef d’établissement, cette dernière s’inscrivant dans le cadre de la « contractualisation » entre les établissements et le rectorat.

 

Ainsi, avec la destruction des décrets de 1950 le gouvernement escompte briser un verrou à l’application des contre-réformes déjà engagées, la loi d’orientation et la « réforme » des Zep, le décret Robien sur les remplacements, mais aussi la « réforme » annoncée des IUFM »

 

Attaqués sur des points aussi importants, et malgré le poids que pèse encore sur leurs épaules leur défaite du printemps 2003, les enseignants ont manifesté leur volonté de réagir. C’est leur pression qui a imposé aux directions syndicales, les unes après les autres, d’appeler à une grève le 18 décembre dont au départ elles ne voulaient pas (la direction du SNES s’y est clairement opposée dans un premier temps à l’occasion des différents congrès locaux qu’elle a tenus début décembre, comme à Nice ou dans le Pas de Calais). De même, c’est la réaction des enseignants qui a imposé aux organisations syndicales qu’elles boycottent à deux reprises l’instance paritaire (Ctpm) saisie du projet de décret.

Cette grève, finalement appelée par la totalité des organisations syndicales, a été importante, sans pour autant revêtir le caractère d’une explosion. Elle posait et pose encore la question au moment où ces lignes sont écrites, d’un appel uni à la montée en masse au ministère sur le mot d’ordre du retrait du projet de décret, et du boycott du Ctpm chargé en ce mois de janvier d’examiner les suppressions de postes… découlant en grande partie de la refonte des statuts.

 

Mais les appareils syndicaux, s’ils n’ont pu moins faire qu’appeler à la grève, n’en ont pas pour autant été le moins du monde débordés. Aussitôt passée la journée du 18, l’intersyndicale se divisait sur la proposition de l’appareil SNES-FSU… : que tous se rallient à une « manifestation nationale » sans revendications ni objectif clair qu’elle préparait d’ailleurs depuis des semaines, sinon des mois. Bien évidemment, les autres fédérations refusent. La FSU maintient son opération, et l’intersyndicale tombe d’accord pour « en appeler au premier ministre »… sans commentaire !

Quant à la manifestation du 20 janvier, il faut bien en apprécier les considérants : d’une part, elle noie la revendication sur laquelle les personnels se sont engagés dans l’unité dans la grève du 18 décembre, à savoir le retrait sans condition du projet de décret ; d’autre part elle vise, selon les dirigeants FSU eux-mêmes, à « interpeller les candidats à la présidentielle ». Ainsi, les bureaucrates syndicaux de l’enseignement public font leur travail de « bons citoyens » : à la possibilité de lutte des enseignants sur leur propre terrain, ils opposent la perspective du « grand débat démocratique » que Chirac appelait de ses vœux le 31 décembre. Qu’est-ce donc que cette politique, sinon un feu vert donné au gouvernement pour qu’il applique sa politique « jusqu’au bout » ? Et le fait que le gouvernement puisse le faire pèsera bien plus sur l’issue des élections que toutes les « interpellations » des candidats !


Les appareils syndicaux pavent la voie au gouvernement : Finances, SNCF, …


Il n’y a pas que dans l’enseignement public que les bureaucraties syndicales se sont employées à ouvrir la voie au gouvernement. C’est entre autres le cas au ministère des Finances, particulièrement touché, lui aussi, à la fois par des suppressions de postes très importantes, et par un véritable plan de restructuration continu. Ainsi, dans le secteur des Douanes, sous couvert d’un plan de « modernisation des opérations de dédouanement », la fermeture de la moitié environ des bureaux départementaux était prévue, entraînant de 1500 à 2000 suppressions de postes qui viendraient s’ajouter aux 638 déjà prévues sur deux ans, le tout sur un effectif de quelques milliers de fonctionnaires !

 

A plusieurs reprises, en juin, en octobre, puis enfin le 28 novembre, les journées d’actions et manifestations appelées par les directions syndicales ont rencontré un écho certain de la part d’agents dont les conditions non seulement de travail, mais d’existence, se voient brutalement menacées. Comme dans l’enseignement, les dirigeants syndicaux durent même quitter les CTPM convoqués par l’administration pour organiser la fermeture (« à titre expérimental » ose dire le gouvernement !) de bureaux des opérations commerciales dans 13 régions. Ces journées d’action à répétition ont été accompagnées dans une demande permanente de « l’ouverture de réelles négociations », bref, de la recherche d’un accord.

 

Mais surtout, les agents des douanes ont été isolés des autres fonctionnaires du ministère.

 

Or, aux impôts, une vive opposition des travailleurs s’est manifestée contre une réforme des procédures de mutation, qui vise, dans le prolongement de la réforme de la notation, à généraliser les « postes à profil » contre les garanties statutaires des agents. Une pétition intersyndicale demandant le retrait de la note de service procédant à cette modification a été signée par la majorité des agents. Là aussi, les dirigeants syndicaux ont suspendu pour un temps les rencontres habituelles avec les représentants du gouvernement. Et ils ont appelé à une journée d’action… le 14 novembre, quinze jours avant celle des agents des Douanes, journée relativement suivie par les personnels, puis une seconde, le 30 novembre … deux jours après! Pour finir le travail, les dirigeants des syndicats du Trésor appelèrent à une journée d’action en forme de voiture-balai, le 15 décembre, avec comme résultat, atteint, de lasser les agents. C’est un véritable sabotage, pour écarter la possibilité d’une véritable mobilisation mettant en danger le gouvernement.

Alors que, durant toute cette période, le budget de l’Etat et en particulier du ministère, était discuté au parlement, jamais il ne fut question pour les appareils syndicaux d’appeler à centraliser la force des agents en une puissante manifestation centrale et nationale à l’Assemblée, contre ce budget qui concentre la politique à laquelle les travailleurs de ce ministère sont confrontés.

 

A la SNCF aussi, les conducteurs entrés en grève dans certains dépôts au moment du passage à l’horaire d’hiver  sont restés isolés, sans qu’aucune perspective de combat d’ensemble ne soit avancée par la fédération CGT, décisive. Pourtant, il s’agissait bien d’enjeux nationaux, comme la direction de la SNCF l’expliquait elle-même dans les colonnes du Figaro du 8 décembre, ce journal renchérissant dans la haine anti-ouvrière :

« Changement de services... Sous cette appellation se cache l'adaptation annuelle des horaires des trains à la fréquentation des voyageurs. En même temps, la direction de l'entreprise, elle ne s'en cache pas, en profite pour faire plus de productivité. « Nous essayons, explique-t-on à la SNCF, de faire en sorte que le même nombre de cheminots conduisent plus de trains, tout en restant dans les limites du temps réglementaire quotidien, soit huit heures par jour pour les conducteurs avec une amplitude maximum de ­onze heures. » La direction préfère donc employer les cheminots de la manière la plus efficace possible afin qu'ils travaillent plutôt sept heures que trois pendant leur temps de présence... »

 

Confrontés région par région à l’alourdissement de leur charge de travail, à la remise en cause, également, de leur progression de carrière, les conducteurs ont été battus les uns après les autres. Là aussi, un peu comme dans l’éducation, les dirigeants des fédérations de cheminots ont organisé une manifestation nationale pour le 8 février, afin de se faire entendre… mais point trop bruyamment tout de même puisqu’ils n’ont même pas jugé bon d’appeler pour ce jour à la grève ! Pendant ce temps, la libéralisation du fret est devenue totale, et c’est le régime spécial de retraite qui se trouve dorénavant sur la sellette.

 

Cette liste n’est pas limitative : à la RATP, les dirigeants syndicaux, en premier lieu ceux de la CGT, ont accompagné en douceur l’allongement des horaires de service sur les week-end, et ont ravalé illico le mot d’ordre de retrait de cette mesure qui leur avait échappé dans la foulée de la défaite du gouvernement sur le CPE– cf. l’intervention publiée dans le précédent numéro. La mesure est entrée en vigueur.

 

Le régime des retraites de la Banque de France a été « réformé » en novembre. Celui de la Poste doit être à son tour, comme avant lui celui de la RATP, « adossé » au régime général. Dans ce secteur, il faut mentionner la grève lancée par SUD pour l’augmentation des salaires dans les centres de tri, qui, dans les circonstances politiques, était une aventure promise à un fiasco.

 

Il est enfin un domaine dans lequel les dirigeants syndicaux, à l’instar du PS et du PCF, apportent un soutien complet au gouvernement UMP, celui des nouvelles expéditions coloniales dans lesquelles il s’est engagé en Afrique et au Liban. 


Le « gouvernement au travail » pour défendre les positions de l’impérialisme français.


Le 28 novembre, après avoir procédé au renforcement préalable de ses troupes, l’armée française est passée à l’offensive simultanément aux côtés des troupes centrafricaines et tchadiennes confrontées à des mouvements armés opérant sur leur sol, venus vraisemblablement d’un Soudan déchiré depuis que le pétrole y coule à flots. Le 30 novembre, Villepin venait à N’Djamena en chef de guerre assurer le tortionnaire notoire Idriss Deby de son soutien. Pendant ce temps, quelques discrètes dépêches d’agence informaient des méthodes de « guerre » du gouvernement de Bozizé en Centrafrique, relatant les propos d’un officiel de l’ONU :

« Les forces gouvernementales incendient des villages et les gens se réfugient dans la brousse", a rapporté le responsable onusien sans pouvoir préciser si ces incendies faisaient des victimes. "La population s'enfuit dans la forêt dès qu'elle aperçoit des véhicules, car la présence de véhicules est souvent associée dans cette zone à des exactions que le gouvernement commet". »

C’est en soutien à ce gouvernement barbare que les avions et soldats français sont entrés en action. Selon l’opposition centrafricaine, les bombardements des Mirage français ont engendré des « massacres », le quotidien le Citoyen titrant quant à lui « Silence ! La France tue dans la région nord-est ». A noter : cet été, le gouvernement tchadien a dénoncé brutalement les contrats d’exploitation de son pétrole qu’il avait passés avec Chevron-Texaco et la compagnie malaise Petronas, suite à un différent financier, peu de temps après l’annonce par la ministre Girardin d’une importante aide financière au Tchad (aide qui servira entre autres à financer notamment de nouveaux contrats pour … Suez et Véolia), et quatre mois après qu’une première intervention française ait sauvé la peau du régime face à une offensive militaire rebelle.

 

Le « pré carré » africain de l’impérialisme français est devenu depuis plus de dix ans un bateau ivre qui tangue et prend l’eau (cf . CPS  nouvelle série n°19). Pour preuve : l’incapacité du gouvernement à imposer et faire triompher ses solutions en Côte d’Ivoire, pays d’une grande importance économique, toujours coupé en deux et occupé par l’armée française depuis maintenant plus de 4 ans.

 

Dans le dispositif français, le Tchad occupe une place qui dépasse la question de ses ressources pétrolières. Véritable « porte avion du désert » pour les généraux, c’est à partir des bases militaires que l’aviation et les troupes françaises peuvent intervenir rapidement partout en Afrique subsaharienne. Profondément gangrené, déstabilisé, décomposé, comme la plupart des pays d’Afrique qui subissent la domination française, il pourrait s’effondrer sous les coups de quelques centaines d’hommes armés et décidés. D’où l’intervention militaire française, « loin des regards indiscrets de la presse » pour reprendre l’expression du journal centrafricain déjà cité. Sans doute cette intervention ne fait que repousser un effondrement inéluctable. Elle n’en est pas moins ignoble, sanglante, et menée de bout en bout au compte des plus grands groupes capitalistes français qui écrasent l’Afrique pour en extraire profits et rente.

 

Or, si Le Monde du 6 décembre a titré son éditorial à ce sujet « guerre muette » en référence à la discrétion extrême de Chirac et Villepin, le silence le plus assourdissant est celui qu’ont fait entendre PS, PCF, et dirigeants syndicaux, silence qui seul autorise celui du gouvernement Chirac-Villepin-Alliot Marie.

 

De même qu’il y a une profonde unité de la politique gouvernementale, des crimes commis en Afrique à la destruction des acquis des ouvriers, des enseignants, en passant par les expulsions et la chasse à l’enfant ouverte sous l’égide de Nicolas Sarkozy, de même il y a une profonde continuité dans la politique du PS, du PCF, des dirigeants syndicaux, qui tous peuvent se voir jeter à la face l’exclamation de ce journal centrafricain : « on tue : silence ! »

Ces interventions militaires expriment assurément les difficultés de l’impérialisme à maintenir l’ordre dans son arrière cour africaine, tout comme la décision d’aller occuper le sud-Liban a été motivée par la peur d’y perdre l’influence décisive qui y est la sienne. Deux sommets, l’un sur le Liban fin janvier, l’autre avec les chefs d’Etats africains à la mi-février, vont avoir lieu dans l’objectif de raffermir l’étreinte française dans ces zones qui lui sont traditionnellement inféodées.

 

Mais il faut constater et souligner que c’est dans tous les domaines que l’impérialisme français rencontre des difficultés croissantes face à ses concurrents et face à ses propres limites, et pas seulement en Afrique.


La situation du capitalisme français ne cesse de se dégrader


Au troisième trimestre, la croissance économique a été nulle. Autant pour les prévisions officielles. Mais cette interruption momentanée de la croissance économique ne fait que souligner un décrochage de plus en plus marqué de l’impérialisme français face à ses principaux rivaux en Europe, à commencer par l’impérialisme allemand. Non seulement la croissance française semble être passée durablement en dessous de celle de la zone euro, mais d’autres signes sont alarmants, à commencer par le déficit maintenant persistant du commerce extérieur, et la stagnation de la production industrielle, entraînée à la baisse tout particulièrement par le secteur de l’automobile.

 

Pour la classe ouvrière, cela se traduit par de suppressions d’emploi en cascade, et d’abord chez les intérimaires et chez les sous-traitants. Record en la matière : Airbus, dont la direction fait payer cash ses difficultés en prenant des mesures qui vont entraîner des dizaines de milliers de suppressions d’emplois, de licenciements.

 

Mais la bourgeoisie française s’inquiète. Par exemple, entre le deuxième trimestre 2005 et septembre 2006, en France, la production industrielle a cru de 0,5%, la production automobile a baissé de 12,8%. En Allemagne, la production industrielle a grimpé de 8,4%  sur la même période, et même la production automobile (+2,8%) !

Le taux de marge des entreprises françaises a atteint début 2006 son plus bas niveau depuis 20 ans. Et les déficits du commerce extérieur ne font qu’exprimer une dure réalité : la perte de parts de marchés à l’exportation.

 

Pour 2007, à en croire la dernière note de conjoncture de l’Insee, ça ne devrait pas s’arranger : le ralentissement américain, et japonais, la moindre croissance du commerce mondial, l’augmentation de la TVA en Allemagne, tout cela entraînerait que «les exportations de la France devraient décélérer, entraînant la production industrielle sur un rythme plus ralenti début 2007 »

 

On comprend que « l’euro fort » soit plus facilement digéré par les capitalises allemands, mais au-delà il faut comprendre que c’est cette situation spécifique et difficile qu’exprime l’isolement total d’un Thierry Breton, le 27 novembre, lors de la réunion des ministres des Finances de la zone euro, pour prôner la baisse de l’euro.  

 

Cette situation permet de mesurer l’importance pour la bourgeoisie française de la prochaine échéance électorale : il s’agit pour elle d’en faire un tremplin pour prendre les mesures nécessaires au redressement de sa situation.

Voilà le sens, le contenu, de toutes les propositions qui fusent depuis le gouvernement, l’UMP, le Medef.


La bourgeoisie, le patronat, ont engagé la bataille politique des présidentielles


Les vœux que Chirac a formulés, et notamment ceux qu’il a prononcés devant les « forces vives de la nation » (patronat, directions syndicales) ne se sont pas bornés à l’affirmation que le gouvernement continuerait de sévir jusqu’au bout. Il a annoncé, avec l’approbation marquée de Laurence Parisot, pour qui « il a montré la bonne direction » les axes sur lesquels selon lui le prochain gouvernement aurait à agir pour bien servir les vrais maîtres de la France, les barons de l’industrie et de la finance.

Au premier rang des préoccupations de Chirac et, donc, de Parisot, encore et toujours la « sécurité sociale professionnelle ».

« Il faut bâtir un nouvel instrument de combat contre le chômage et pour l'emploi, à partir, disons-le clairement, de la fusion de l'ANPE et de l'UNEDIC.

« La sécurité sociale professionnelle aura quatre missions : le versement des allocations chômage, l'accompagnement personnalisé pour la recherche d'emploi, l'aide à la mobilité professionnelle, et la formation tout au long de la vie : elle devra porter les droits individuels à la formation des salariés, majorés pour ceux qui ont un faible bagage initial ou qui ont besoin de se reconvertir.

Dans l'esprit du contrat de transition professionnelle, un véritable lien contractuel, fait de droits et d'obligations, unira les salariés sans emploi et la sécurité sociale professionnelle. Dans la ligne de la réforme du dialogue social, il reviendra aux partenaires sociaux, aux côtés de l'État, de gérer ce nouvel ensemble. »

 

« L’esprit » du « contrat de transition professionnelle », nous avons l’occasion de le dire à plusieurs reprises dans notre bulletin, c’est un « esprit » de destruction de la notion de contrat de travail, lié à des garanties collectives inscrites dans les conventions collectives. Remplacer l’assurance-chômage par un « lien contractuel » incluant, on le sait,  la possibilité de travailler pour différentes entreprises, c’est en fait supprimer le droit à l’indemnisation. C’est ce que dans d’autres pays on appelle « l’activation des dépenses passives ». Bien entendu, Chirac propose que les directions syndicales soient engagées jusqu’au cou dans cette « sécurité sociale professionnelle » dont le concept, faut-il le rappeler, fut fourni par la direction confédérale CGT.

D’ailleurs d’une manière générale, Chirac a insisté sur la place que devaient prendre les « partenaires sociaux », ce qui exige pour lui d’aller vers la réforme de la représentativité :

« Les partenaires sociaux sont pleinement associés à la gestion de la sécurité sociale. Ils doivent maintenant devenir des acteurs de la réforme, les promoteurs du nouveau modèle social français. Pour cela, il faut renforcer la légitimité de la démocratie sociale. Sur la base des travaux du Conseil économique et social, il faudra confronter la représentativité des syndicats, la conforter indiscutablement en actualisant les règles qui sont vieilles de plus de 40 ans. »

Heureuse coïncidence : un avis du Conseil Economique et Social vient de donner au futur gouvernement les moyens de s’y prendre, en organisant des élections périodiques… à la nouvelle « sécurité sociale professionnelle » ?

 

Autre préoccupation de Chirac qui renvoie aussi à la volonté d’association capital-travail : le renforcement, encore, de la participation, qualifiée de « projet de société », et qu’il a présentée comme une réponse aux problèmes du pouvoir d’achat… contre les augmentations de salaire, donc, mais aussi comme un moyen de baisser davantage l’impôt sur les sociétés, qu’il a proposé de faire passer de 33% actuellement à 20% sur cinq ans, et carrément à 10% en cas d’accord d’intéressement réservant autant aux salariés qu’aux actionnaires.

 

Il faut relever la réaction de Mailly, qui, tout en s’opposant à la baisse de l’impôt sur les sociétés, a déclaré :  

"Le président de la République est dans son rôle quand il dresse des pistes", mais "ce qui manque selon moi, ce sont des décisions rapides et concrètes", a réagi jeudi le secrétaire général de Force ouvrière Jean-Claude Mailly au sujet des voeux de Jacques Chirac aux Forces vives.

"Pour les mois à venir, il n'y a pas de décisions concrètes. Cela nous renvoie un peu aux calendes grecques", a-t-il remarqué sur France-Inter, alors que le chef de l'Etat a présenté des propositions pour les cinq années à venir. »

 

En plus d’inciter Chirac a passer aux « décisions concrètes », la direction FO participe aux trois groupes de travail mis en place par le patronat dans le cadre de la « délibération sociale » qui portent précisément sur l’assurance-chômage, le contrat de travail et la « sécurité sociale professionnelle ». Or ces groupes doivent rendre fin février un premier état des lieux de leurs travaux, et peser ainsi à leur tour durant la campagne électorale à la mise en place de cette même politique que dessine Chirac.


Une nouvelle offensive s’annonce contre tous les régimes de retraite


Chirac, le Medef, ne sont pas les seuls à mettre sur la table les exigences du grand capital pour la nouvelle étape politique qui s’annonce. Le Conseil d’Orientation des retraites, dans lequel siègent les directions syndicales, mais également le PS et le PCF (ainsi Maxime Gremetz), vient de rendre son rapport sur le « rendez-vous de 2008 » instauré par la loi Fillon de 2003.

Ses conclusions incitent à engager une nouvelle étape de remise en cause du droit à la retraite.

Une dépêche d’agence les résume :

« Le Conseil juge donc "indispensable de poursuivre la réflexion sur les dispositions qui limitent l'augmentation de la durée effective de cotisation sur laquelle est fondée la réforme de 2003". En clair, revenir sur les mesures de départ anticipé pour carrières longues décidées en 2003 pour que les seniors travaillent plus longtemps.

Le rapport juge par ailleurs "nécessaire" l'examen d'"hypothèses alternatives" de financement des régimes de retraite. Il prône une "mise à plat des différentes niches fiscales et surtout sociales" liées aux dispositifs d'épargne-retraite.

Le COR met enfin l'accent sur la nécessité d'assurer "l'égalité de traitement" entre les cotisants. Dans ce cadre, il aborde la question explosive des régimes spéciaux, laissée de côté en 2003. Les régimes spéciaux concernent aussi bien les agents d'EDF-GDF, de la SNCF, de la RATP et la Banque de France que les marins, mineurs et clercs de notaire, qui jouissent toujours d'une durée de cotisation réduite.

Le rapport plaide pour un "allongement des durées d'activité et des durées d'assurance" de ces régimes avec "un objectif d'équilibre financier à l'horizon de 2020".

"Nous proposons (...) que les régimes soient examinés au cas par cas", a expliqué Raphaël Hadas-Lebel après la remise du rapport. "Il ne s'agit pas de voir les choses globalement. Chaque régime a ses particularités historiques."

Le président du COR a évoqué une "harmonisation" des régimes spéciaux avec le régime général "en ce qui concerne l'âge de départ à la retraite, les avantages familiaux, les modes d'indexation". »

 

Le jour même de la remise de ce rapport, Villepin, dans les Echos, renchérit :

« Les assurés devront "travailler plus longtemps" pour assurer la "pérennité des retraites" et plaide pour un examen "au cas par cas" des régimes spéciaux, prôné jeudi par le Conseil d'orientation des retraites (COR). »

 

Fillon devenu entre-temps conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, n’avait pas tenu d’autre langage.

Les prémisses d’une nouvelle et violente offensive, poursuivant celle de la loi Fillon, sont donc là : le grand capital entend baisser encore notablement sa part dans le financement des régime de retraites, et le fait bruyamment savoir (on pourra relever en passant que le canard enchaîné du 3 janvier a publié un article montrant que toutes les prévisions démographiques qui avaient servi de base à la « réforme » de 2003 sont déjà totalement caduques, comme d’ailleurs toute prévision portant sur les évolutions à 40 ans).

 

Mailly a déclaré :

« La CGT Force Ouvrière tient à souligner que sa participation aux travaux du C.O.R. ne la conduit pas pour autant à partager l’intégralité des recommandations formulées dans le rapport qui devrait servir à éclairer le Gouvernement dans la perspective des rendez-vous de 2008. En la matière comme dans d’autres, le diagnostic partagé n’existe pas. »

La CGT s’est exprimé dans le même sens. Mais si ce n’est pour cautionner ce genre de rapports, et participer à l’application jusqu’au bout de la loi Fillon, pourquoi diable les dirigeants confédéraux CGT et FO, ceux de la FSU, siègent-ils au conseil d’orientation des retraites ?


Pour la bourgeoisie, l’enjeu essentiel: lancer une nouvelle vague d’assaut anti-ouvrière


Chirac, le Medef, le COR, … on peut encore ajouter à la liste de ceux qui entendent alimenter le « grand débat démocratique » Thierry Breton, lequel propose de privatiser le recouvrement de l’impôt sur le revenu en le transférant « à la source », c’est-à-dire aux patrons (dont on sait déjà le peu de cas il font souvent du paiement des cotisations sociales).

Tous dessinent à grands traits le programme que le vainqueur  de la présidentielle aura, selon eux, à mettre en œuvre.

Ce programme commun aux représentants directs des grands groupes capitalistes français n’exclut pas que des divergences puissent agiter l’UMP, et se manifester comme prétextes aux efforts que le clan chiraquien fait pour continuer à exister après que leur chef aura quitté l’Elysée, au delà de la dernière salve de nominations que celui-ci tire et d’éventuels coups fourrés dont il est friand.

Par exemple, ce n’est pas un mystère, et surtout pas depuis la visite rendue par Sarkozy à Washington : le candidat de l’UMP envisage un alignement plus étroit sur l’impérialisme américain – mais en la matière, entre Blair et Merkel, la concurrence en Europe sera rude !

 

Mais il serait vain de chercher des divergences de principe au sein de l’UMP, ou des partis bourgeois. Si, nécessairement, les luttes de clans au sein de l’UMP et alentour font surgir les questions réelles que se posent l’ensemble des capitalistes français, la politique finalement menée ne dépendra d’abord que des circonstances et des nécessités du moment.

Pour la bourgeoisie, l’essentiel c’est : garder le pouvoir, tenir directement les leviers de contrôle de l’Etat entre les mains. Aujourd’hui, pour le grand capital, il est clair que la solution la plus favorable serait la victoire de celui qui fut caractérisé de « Zidane » du Medef par Ernest-Antoine Seillière, Nicolas Sarkozy de Nagy-Bocsa, et qu’ainsi les élections présidentielles servent de rampe de lancement pour engager le plus efficacement et brutalement les « réformes » dont le capitalisme français a besoin, en matière de retraites, de contrat de travail, et de baisse des taxes diverses sur le capital et les grande fortunes.

 

Tel est pour eux l’enjeu des élections présidentielles et des législatives qui suivront.

 

A l’inverse, à moins que le prolétariat puisse faire irruption sur la scène avant les présidentielles, ce qui est de moins en moins probable du fait de la politique des appareils, exploités et opprimés, salariés, jeunes, vont cherche inévitablement à signifier sur le terrain des élections, leur condamnation de la politique ultra-réactionnaire menée depuis 2002, comme ils l’ont fait aux régionales de 2004 ou lors du référendum de 2005.

 

Et pour ce faire, ils vont tout aussi inévitablement se tourner vers la candidate du Parti Socialiste, Marie-Ségolène Royal.


Le principal obstacle à la volonté de battre l’UMP et les candidats de la bourgeoisie :
Marie-Ségolène Royal et son programme


Un article de ce numéro de CPS apprécie en détail ce qu’a signifié la désignation de Mme Royal comme candidate par le Parti Socialiste : une véritable OPA sur le parti, elle qui a été « élue » si l’on peut dire parles grands groupes de presse et d’opinion, matraquant avec leurs sondages qu’elle seule serait en mesure d’effacer l’humiliation pour le PS que fut le 21 avril 2002.

 

Ainsi les adhérents du PS ont voté en bloc pour la candidate aux propos les plus ostensiblement réactionnaires, à commencer par ceux sur l’allongement du temps de travail des enseignants qui ont fait bondir ce secteur, qui vote largement pour les candidats PS.  Ils ont aussi désigné, il faut le dire car cela peut jouer un rôle dans la campagne, une candidate qui est particulièrement sujette aux gaffes et aux déclarations intempestives – la voici maintenant, auréolée de « bravitude », qui revient de Chine en louant la rapidité de la « justice » chinoise !

 

Ils ont enfin désigné une candidate qui, après avoir obtenu le ralliement du MRC et du PRG moyennant des circonscriptions gagnables va n’avoir de cesse que se démarquer autant que possible du PS.

Son premier meeting à Strasbourg était aux couleurs de son fan-club (« désir d’avenir »), et le Monde n’a pas manqué de rapporter l’existence de tensions entre ces clubs et le Parti Socialiste, tandis que chaque intervention publique de François Hollande se voit immédiatement « recadrée » par l’état-major de campagne « royaliste ».

 

Plus le temps passera, plus les positions réactionnaires de Royal risquent de faire obstacle à la volonté évidente d’une grande partie de la population laborieuse de se servir du vote pour la candidate du PS pour battre l’UMP et Sarkozy. Mais n’est-ce pas dans cette perspective que, lors de la pré-campagne socialiste, tant les chiraquiens que les sarkozystes marquaient leur préférence pour la « madone des sondages » ?

 

Mais il faut dire que pour la grande majorité des travailleurs, pour la jeunesse, il n’y a guère d’alternative.


A la « gauche de la gauche » : pas d’alternative saisissable pour le prolétariat


Bien qu’une certaine affluence ait marqué les quelques meetings des « collectifs unitaires » issus des comités unitaires constitués pour le « non de gauche » au référendum de 2005, ce rassemblement s’est achevé comme il était prévisible par une débandade générale.

Comment eût-il pu en être autrement ? Les membres de ces collectifs ont en fin de compte exigé du PCF qu’il leur serve de tremplin, sinon de paillasson, prétendant s’appuyer sur la dizaine de milliers de personnes qui s’y sont regroupés, parmi lesquels… un grand nombre sont au PCF, à la LCR, sinon au PS !  Le PCF de son côté espérait à l’inverse sans doute récupérer à son compte « l’aura » du dit « non de gauche »… comme parachute pour tenter de freiner le processus inéluctable qui mène à sa marginalisation, sa disparition.

Il en est pour ses frais puisque la nomination de Buffet comme représentant les « collectifs » n’a pas eu lieu. Cela ne l’empêche cependant pas de présenter M-G. Buffet comme étant la candidate d’un rassemblement plus large que le PCF, une candidature « ouverte »...

 

Les choses ne pouvaient pas se passer autrement puisque ces collectifs n’ont jamais été l’expression d’un mouvement plus profond, dont il faudrait être aux aguets, à savoir celui des masses cherchant, même dans la confusion, à se doter d’un nouveau parti et exerçant une pression en conséquence sur les organisations existantes.

 Or au contraire les processus à l’œuvre sont inverses. Le caractère « ouvert » de la candidature du PCF et les nouvelles secousses qui ont frappé ce parti le manifestent, c’est la décomposition des organisations traditionnelles du mouvement ouvrier qui progresse, sans que dans le même temps s’engage une quelconque recomposition.

 

D’ailleurs il faut noter que, sous réserves d’autres rebondissements à la « gauche de la gauche », la LCR aussi sort en crise de cette opération dans laquelle elle s’était engagée, chacun des courants qui la composent menant sa propre politique, jusqu’à promouvoir la candidature de Bové contre celle de Besancenot … qui n’est pas du tout certain de pouvoir se présenter.

 

Par ailleurs, la ligne politique de ce dernier est une ligne centrée sur la dénonciation de tout accord avec le PS, orientation presque comique de la part d’une organisation qui n’a pas hésité à appeler au vote Chirac en 2002. Mais une ligne qui dresse des obstacles à l’aspiration inévitable des masses qu’un gouvernement arrive au pouvoir pour mener une politique conforme à leurs besoins immédiats et leurs aspirations, gouvernement qui ne peut se concevoir, au stade actuel, en en excluant d’avance le Parti Socialiste.

 

Lutte Ouvrière, elle, semble en mesure de présenter Arlette Laguiller sur une orientation assez acrobatique, qui voudrait épouser l’aspiration populaire à « battre la droite » tout en se préparant à appeler à l’abstention en cas de second tour PS-UMP ! Enfin, le Parti des Travailleurs, lui, ne se présentera pas. Il apporte son soutien à un élu membre du groupe PS au conseil général de l’Aude, Gérard Schivardi, dont les premières déclarations auront été de dire qu’il fallait « mettre le PT de côté », précisant qu’il était soutenu par des « maires de droite », et que si Fabius avait été désigné par le PS, il ne serait pas présenté lui-même!

La dégénérescence politique du « Courant Communiste Internationaliste », qui dirige le PT, sur la ligne de la « reconquête de la démocratie » et de la « défense de la Nation » (cf. aussi l’article sur l’Algérie dans ce numéro) l’entraîne clairement dans une pantalonnade grotesque !


Pour le front uni des organisations issues du mouvement ouvrier, partis, syndicats,
contre le gouvernement UMP, sa politique, contre les candidats bourgeois


La façon dont la question du logement a surgi durant la « trêve des confiseurs » est illustrative de la situation politique. Une association fondée par des petits-bourgeois parisiens désoeuvrés, s’est emparée médiatiquement de ce problème angoissant pour tout le prolétariat, à commencer par ces nombreux ouvriers précaires ou non qui dorment à la rue. En plantant quelques dizaines de tentes ici et là, cette association a réussi à braquer les feux des medias sur elle. Elle a alors avancé une « charte » faite de mesurettes, au bout desquelles figurait le « droit au logement opposable ». Toutes les organisations politiques, jusqu’à l’extrême gauche, sommées par la « vox mediati », ont signé ce morceau de papier, et Chirac et Villepin ont eu beau jeu d’approuver bruyamment et de lancer un projet de loi sur le « droit opposable au logement».

A la suite de quoi la dite association a appelé à lever les camps sans autre forme de procès, à la stupeur et l’indignation des authentiques sans logis qui s’étaient fait embarquer dans cette affaire. Problème réglé ? C’est proprement écoeurant ! Il y a en France des centaines de milliers de logements vides, dont plus de cent mille rien qu’à Paris. Il y a un gouvernement qui s’enorgueillit des nouvelles constructions qu’il a lancé, mais omet de mentionner les dizaines de milliers de logements détruits dans le même temps dans le cadre du plan Borloo – et qui favorise outrageusement « l’accession à la propriété » contre le logement social. Il y a, enfin, un processus de privatisation croissante des logements sociaux, alors que plus d’un million ( !) de demandes restent en souffrance.

 

Résoudre la question du logement, en finir avec la spéculation immobilière, les loyers exorbitants, l’impossibilité de se loger, nécessite quelques mesures simples, à commencer par l’expropriation des logements laissés volontairement vides par les grands propriétaires, la mise en chantier sur une toute autre échelle de logements sociaux modernes, et un blocage immédiat des loyers.

 

Sur cette question comme sur les autres, il s’agit ni plus ni moins que de s’en prendre aux intérêts des capitalistes, lesquels se sont grassement enrichis ces dernières en investissant dans la pierre, et qui profitent de la rareté de l’offre entretenue délibérément par la politique du gouvernement pour dicter des conditions souvent humiliantes à ceux qui cherchent à se loger.

 

Pour assurer le droit au logement, le droit aux soins, le droit au travail, le plus précieux de tous, il n’est d’autre politique qu’une politique d’affrontement avec la bourgeoisie, une politique rompant avec la loi du profit, allant vers l’expropriation du capital.

C’est cette politique anticapitaliste qu’il s’agit de défendre, en toutes circonstances, et particulièrement à l’occasion des prochaines échéances électorales.

 

Elle ne serait cependant qu’un couteau sans lame si elle n’incluait pas les moyens de son application, à savoir la réalisation du front uni des organisations syndicales (CGT, FO, FSU), et politiques (PS, PCF), issues du mouvement ouvrier.

Front unique contre le gouvernement et sa politique, pour le combattre et le vaincre dès que possible, y compris lors des élections, contre les partis bourgeois.

D’un gouvernement issu de ce front unique, les masses exigeraient qu’il prenne les mesures urgentes qu’appelle la situation difficile dans laquelle se trouve la population travailleuse, la jeunesse.

 

C’est sur cette orientation qu’il faut intervenir, sans s’en remettre aux échéances électorales, mais également à l’occasion des prochaines échéances électorales.

Le mouvement des masses engageant le combat pour leurs objectifs, pour défendre leurs conditions de travail et d’existence, revendiquer le rattrapage du pouvoir d’achat perdu, … peut bouleverser la situation politique.

En tendant à dicter leurs exigences aux organisations auxquelles ils se réfèrent, travailleurs et jeunes pourront s’ouvrir une issue, et les conditions pour la construction d’un nouveau parti, du parti ouvrier révolutionnaire se réuniront.

 

C’est sur cette perspective, celle du socialisme, de la reconstruction du mouvement ouvrier sur un nouvel axe, que se situe le Cercle pour la construction du parti ouvrier révolutionnaire, de l’internationale ouvrière révolutionnaire.

Le 12 janvier 2007


 

 

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