Editorial de C.P.S Nouvelle
série n°27 (n°109) – 12 janvier 2007
Le gouvernement UMP Chirac-Villepin-Sarkozy :
« au travail » jusqu’au bout contre les travailleurs
Les
élections présidentielles d’avril et mai prochain occupent chaque jour une
place grandissante dans le paysage politique. Cela n’a rien d’une sorte de
phénomène naturel. C’est un fait politique.
Pour
les travailleurs, la meilleure manière de préparer les échéances électorales,
comme plus généralement leur avenir, serait de combattre directement, avec
leurs propres méthodes et objectifs, pour infliger une défaite décisive au
gouvernement et au patronat.
C’est
cette possibilité qu’avait ouvert la défaite infligée à ces derniers au
printemps 2006 en leur imposant le retrait du Contrat première Embauche. Si
cette possibilité s’était réalisée, alors, la situation politique en aurait été
bouleversée. Les appareils syndicaux, le PS et le PCF ont tout fait pour que
tel ne soit pas le cas.
Aussi,
la place démesurée occupée par la préparation des élections exprime que les
potentialités contenues dans la défaite du gouvernement sur le Contrat Première
Embauche semblent épuisées.
Chirac
lui-même dans ses vœux du 31 décembre l’a exprimé. Pour que, a-t-il dit, le
« débat démocratique » puisse être positif (pour lui et sa classe),
il faut que le gouvernement travaille « jusqu’au bout ».
« D'ici aux élections,
j'aurai une double exigence : que le Gouvernement soit au travail, à votre
service, pour la sécurité, pour l'emploi, pour le pouvoir d'achat et que ces
mois soient aussi des moments de débats ouverts, démocratiques et responsables
et je m'y engagerai pleinement. »
Et,
à couvert du déluge de phrases sur les futures échéances, c’est effectivement
ce qui se produit.
Jusqu’à la dernière minute
La
session parlementaire s’achèvera fin février. Elle est encore chargée, puisque
doivent être examinés une série de textes sur l’essentiel desquels le précédent
numéro de CPS avait exprimé ce qu’il
y avait à en dire, en particulier concernant le projet de loi liberticide et
anti-ouvrier présenté au titre de la lutte « contre la délinquance ».
Les salariés de Thomé Génot,
placés en octobre en liquidation judiciaire, ont pu en goûter la substantifique
moëlle : ils ont été traités comme des
« délinquants » par les CRS et gendarmes venus les évacuer de leur
usine le 9 novembre, dans une atmosphère que la presse a décrite ainsi « scènes d’occupation militaire dans les
Ardennes », ou encore « un
climat de couvre-feu »...
Doit
aussi être adopté un projet qui a, pour l’avenir, une grande importance et qui
représente un nouveau pas vers l’instauration d’un système de cogestion, à
savoir le projet de loi sur le « dialogue social ». Fin octobre, on
pouvait en lire dans un communiqué FO la présentation suivante :
« «Tout projet de réforme
portant sur le dialogue social, les relations individuelles et collectives du
travail, l'emploi et la formation professionnelle fait l'objet d'une
concertation préalable avec les partenaires sociaux en vue de l'ouverture d'une
négociation interprofessionnelle», précise le projet de loi. Dans ce cadre, les
«organisations syndicales et professionnelles les plus représentatives au
niveau national» seront informées de tels projets par le gouvernement, via «un
document d'orientation présentant un diagnostic, les objectifs et les
différentes options et modalités envisagées». Elles sont invitées ensuite à
«faire savoir» si elles engagent ou non des négociations en indiquant «le délai
qui leur serait utile à cet effet». Ces dispositions «ne seront pas applicables
en cas d'urgence avérée».
Le texte prévoit aussi un
rendez-vous annuel entre le gouvernement et les interlocuteurs sociaux. «Chaque
année, les orientations de la politique du gouvernement (…) ainsi que le
calendrier envisagé pour leur mise en œuvre, sont présentés pour l'année à
venir» devant la Commission nationale de la négociation collective (CNNC),
indique le projet de loi. De leur côté, lesdites organisations présenteront,
elles, «l'état d'avancement des négociations interprofessionnelles en cours
ainsi que le calendrier de celles qu'elles entendent mener ou lancer dans
l'année à venir»
Et
la direction confédérale FO de trouver ce texte « acceptable », tandis que celle de la CGT demande pour sa part
son élargissement à d’autres champs, comme les retraites (domaine dans lequel
la concertation est pourtant permanente au sein du Conseil d’Orientation).
Or,
pour bien apprécier ce projet de loi, il faut rappeler le discours de
présentation qu’en avait fait Chirac en octobre dernier devant le Conseil
Economique et Social, comme nous le faisions dans un supplément à CPS en date du 30 octobre dernier :
« Les « partenaires
sociaux » seraient chargés de co-rédiger les projets de loi ou même
d’ordonnance des gouvernements. Qu’est-ce que cela signifie ?
Chirac le dit clairement : « Les syndicats doivent se libérer d'une
ancienne tradition excessivement protestataire qui débouche trop souvent sur
l'affrontement (…) il faut sortir de la logique du conflit (…) fonder une
culture de la négociation ».
Quelle « culture du
conflit » Chirac et l’UMP veulent-ils enterrer, sinon la culture ouvrière
façonnée par la lutte des classes ? Voilà en effet ce que signifierait
cette loi d’association des directions syndicales à la politique des
gouvernements de la Ve République. »
Il
faut en outre rappeler que, durant l’automne, le parlement a continué de
tourner à plein régime, privatisant totalement GDF, alors que ce projet avait
été remis en cause après la défaite gouvernementale sur le CPE. Les éventuelles
remises en cause juridiques, saluées cyniquement par la direction CGT-Energie comme une « victoire », n’y changeront en définitive pas grand-chose. Les
budgets de l’Etat et de la Sécurité Sociale ont été
adoptés sans encombre, eux qui donnent d’une main de nouvelles baisses d’impôts
sur les revenus les plus élevés et des allègements de charges aux entreprises,
et suppriment de l’autre un nombre record
de postes de fonctionnaires, poursuivent les restrictions au droit aux soins.
Enfin
il faut noter que Chirac s’emploie à s’offrir un dernier relent d’unité
nationale en convoquant le congrès pour procéder à des retouches de la
constitution sur lesquelles il espère aligner l’ensemble des députés, y compris
ceux du PS et du PCF.
Feu roulant contre le corps enseignant, et surtout
contre les statuts de 1950
Evidemment,
la boulimie réactionnaire du gouvernement et de sa majorité UMP dans leur
dernière ligne droite ne s’est pas confinée à l’enceinte du Parlement. Et, une
nouvelle fois, l’enseignement public et ses personnels se sont trouvés dans la
ligne de mire. Non seulement le nombre de suppressions de postes y a atteint
des sommets, mais encore le ministre Robien semble ne pas vouloir laisser la
place sans avoir démoli autant que faire se peut l’enseignement public. Qu’on
en juge : « réforme » des IUFM se traduisant par une nouvelle et
sérieuse aggravation des conditions de formation, l’alignant par anticipation
sur la future polyvalence souhaitée des enseignants. Mise en route dans le
premier degré d’un décret créant des « EPEP », de futurs gros « établissements
publics d’enseignement primaire » regroupant plusieurs écoles, dotés d’une
vraie direction, ce qui constituerait un bouleversement dans le fonctionnement
des écoles communales. Dans le même temps, le ministère a engagé des sanctions
financières contre les directeurs d’école qui poursuivent la grève
administrative en dépit du protocole d’accord signé par le SE-Unsa.
Infatigable, Robien a même annoncé en ce début janvier la mise en application
des conclusions du rapport Hetzel, dont l’essentielle
est la « professionnalisation » accrue des diplômes universitaires,
autrement dit leur déqualification et leur soumission (ainsi que celle des
étudiants) aux besoins immédiats du patronat, appelé à jouer un rôle plus
important que jamais dans la définition des formations et des contenus, au nom
de « l’insertion ».
Mais
ce qui est au centre de cette nouvelle vague d’attaques, c’est la casse des
décrets de 1950 régissant le service des enseignants du second degré. Comme
l’indique un supplément enseignant à CPS du
10 décembre dernier :
« * D’une part ce projet
signifierait pour des dizaines de milliers d’entre eux une baisse brutale de
leur salaire, en restreignant l’accès aux décharges statutaires (première
chaire, heures de laboratoire, …) ou augmentant leurs maxima hebdomadaires
(effectifs réduits,…). C’est un véritable racket qui a pour but de supprimer
des postes, de faire travailler plus les enseignants en les payant moins – alors
que le gouvernement poursuit les baisse d’impôts sur les revenus les plus
hauts, les exonérations de charges.
* D’autre part ce projet
imposerait aux professeurs une plus grande flexibilité, s’inspirant du sort
réservé depuis des années aux TZR. Il généraliserait la polyvalence.
* Enfin, en introduisant dans
la définition des services d’autres tâches que l’enseignement, il mettrait en
place la définition locale des services, arrêtés par une « lettre de
mission » édictée par le chef d’établissement, cette dernière s’inscrivant
dans le cadre de la « contractualisation » entre les établissements
et le rectorat.
Ainsi, avec la destruction des
décrets de 1950 le gouvernement escompte briser un verrou à l’application des
contre-réformes déjà engagées, la loi d’orientation et la « réforme »
des Zep, le décret Robien sur les remplacements, mais
aussi la « réforme » annoncée des IUFM »
Attaqués
sur des points aussi importants, et malgré le poids que pèse encore sur leurs
épaules leur défaite du printemps 2003, les enseignants ont manifesté leur
volonté de réagir. C’est leur pression qui a imposé aux directions syndicales,
les unes après les autres, d’appeler à une grève le 18 décembre dont au départ
elles ne voulaient pas (la direction du SNES s’y est clairement opposée dans un
premier temps à l’occasion des différents congrès locaux qu’elle a tenus début
décembre, comme à Nice ou dans le Pas de Calais). De même, c’est la réaction
des enseignants qui a imposé aux organisations syndicales qu’elles boycottent à
deux reprises l’instance paritaire (Ctpm) saisie du
projet de décret.
Cette
grève, finalement appelée par la totalité des organisations syndicales, a été
importante, sans pour autant revêtir le caractère d’une explosion. Elle posait
et pose encore la question au moment où ces lignes sont écrites, d’un appel uni
à la montée en masse au ministère sur le mot d’ordre du retrait du projet de
décret, et du boycott du Ctpm chargé en ce mois de janvier
d’examiner les suppressions de postes… découlant en grande partie de la refonte
des statuts.
Mais
les appareils syndicaux, s’ils n’ont pu moins faire qu’appeler à la grève, n’en
ont pas pour autant été le moins du monde débordés. Aussitôt passée la journée
du 18, l’intersyndicale se divisait sur la proposition de l’appareil
SNES-FSU… : que tous se rallient à une « manifestation
nationale » sans revendications ni objectif clair qu’elle préparait
d’ailleurs depuis des semaines, sinon des mois. Bien évidemment, les autres
fédérations refusent. La FSU maintient son opération, et l’intersyndicale tombe
d’accord pour « en appeler au
premier ministre »… sans commentaire !
Quant
à la manifestation du 20 janvier, il faut bien en apprécier les
considérants : d’une part, elle noie la revendication sur laquelle les
personnels se sont engagés dans l’unité dans la grève du 18 décembre, à savoir
le retrait sans condition du projet de décret ; d’autre part elle vise, selon
les dirigeants FSU eux-mêmes, à « interpeller
les candidats à la présidentielle ». Ainsi, les bureaucrates syndicaux
de l’enseignement public font leur travail de « bons
citoyens » : à la possibilité de lutte des enseignants sur leur
propre terrain, ils opposent la perspective du « grand débat démocratique » que Chirac appelait de ses vœux le
31 décembre. Qu’est-ce donc que cette politique, sinon un feu vert donné au
gouvernement pour qu’il applique sa politique « jusqu’au
bout » ? Et le fait que le gouvernement puisse le faire pèsera bien
plus sur l’issue des élections que toutes les « interpellations » des
candidats !
Les appareils syndicaux pavent la voie au
gouvernement : Finances, SNCF, …
Il
n’y a pas que dans l’enseignement public que les bureaucraties syndicales se
sont employées à ouvrir la voie au gouvernement. C’est entre autres le cas au
ministère des Finances, particulièrement touché, lui aussi, à la fois par des
suppressions de postes très importantes, et par un véritable plan de
restructuration continu. Ainsi, dans le secteur des Douanes, sous couvert d’un
plan de « modernisation des opérations de dédouanement », la
fermeture de la moitié environ des bureaux départementaux était prévue, entraînant
de 1500 à 2000 suppressions de postes qui viendraient s’ajouter aux 638 déjà
prévues sur deux ans, le tout sur un effectif de quelques milliers de
fonctionnaires !
A
plusieurs reprises, en juin, en octobre, puis enfin le 28 novembre, les
journées d’actions et manifestations appelées par les directions syndicales ont
rencontré un écho certain de la part d’agents dont les conditions non seulement
de travail, mais d’existence, se voient brutalement menacées. Comme dans
l’enseignement, les dirigeants syndicaux durent même quitter les CTPM convoqués
par l’administration pour organiser la fermeture (« à titre
expérimental » ose dire le gouvernement !) de bureaux des opérations
commerciales dans 13 régions. Ces journées d’action à répétition ont été accompagnées
dans une demande permanente de « l’ouverture de réelles
négociations », bref, de la recherche d’un accord.
Mais
surtout, les agents des douanes ont été isolés des autres fonctionnaires du
ministère.
Or,
aux impôts, une vive opposition des travailleurs s’est manifestée contre une
réforme des procédures de mutation, qui vise, dans le prolongement de la
réforme de la notation, à généraliser les « postes à profil » contre
les garanties statutaires des agents. Une pétition intersyndicale demandant le
retrait de la note de service procédant à cette modification a été signée par
la majorité des agents. Là aussi, les dirigeants syndicaux ont suspendu pour un
temps les rencontres habituelles avec les représentants du gouvernement. Et ils
ont appelé à une journée d’action… le 14 novembre, quinze jours avant celle des
agents des Douanes, journée relativement suivie par les personnels, puis une
seconde, le 30 novembre … deux jours après! Pour finir le travail, les
dirigeants des syndicats du Trésor appelèrent à une journée d’action en forme
de voiture-balai, le 15 décembre, avec comme résultat, atteint, de lasser les
agents. C’est un véritable sabotage, pour écarter la possibilité d’une
véritable mobilisation mettant en danger le gouvernement.
Alors
que, durant toute cette période, le budget de l’Etat
et en particulier du ministère, était discuté au parlement, jamais il ne fut
question pour les appareils syndicaux d’appeler à centraliser la force des
agents en une puissante manifestation centrale et nationale à l’Assemblée, contre ce budget qui concentre la politique à laquelle
les travailleurs de ce ministère sont confrontés.
A
la SNCF aussi, les conducteurs entrés en grève dans certains dépôts au moment
du passage à l’horaire d’hiver sont
restés isolés, sans qu’aucune perspective de combat d’ensemble ne soit avancée
par la fédération CGT, décisive. Pourtant, il s’agissait bien d’enjeux
nationaux, comme la direction de la SNCF l’expliquait elle-même dans les
colonnes du Figaro du 8 décembre, ce
journal renchérissant dans la haine anti-ouvrière :
« Changement de services...
Sous cette appellation se cache l'adaptation annuelle des horaires des trains à
la fréquentation des voyageurs. En même temps, la direction de l'entreprise,
elle ne s'en cache pas, en profite pour faire plus de productivité. « Nous
essayons, explique-t-on à la SNCF, de faire en sorte que le même nombre de
cheminots conduisent plus de trains, tout en restant dans les limites du temps
réglementaire quotidien, soit huit heures par jour pour les conducteurs avec
une amplitude maximum de onze heures. » La direction préfère donc employer les
cheminots de la manière la plus efficace possible afin qu'ils travaillent
plutôt sept heures que trois pendant leur temps de présence... »
Confrontés
région par région à l’alourdissement de leur charge de travail, à la remise en
cause, également, de leur progression de carrière, les conducteurs ont été
battus les uns après les autres. Là aussi, un peu comme dans l’éducation, les
dirigeants des fédérations de cheminots ont organisé une manifestation
nationale pour le 8 février, afin de se faire entendre… mais point trop
bruyamment tout de même puisqu’ils n’ont même pas jugé bon d’appeler pour ce
jour à la grève ! Pendant ce temps, la libéralisation du fret est devenue totale,
et c’est le régime spécial de retraite qui se trouve dorénavant sur la
sellette.
Cette
liste n’est pas limitative : à la RATP, les dirigeants syndicaux, en
premier lieu ceux de la CGT, ont accompagné en douceur l’allongement des horaires
de service sur les week-end, et ont ravalé illico le mot d’ordre de retrait de
cette mesure qui leur avait échappé dans la foulée de la défaite du
gouvernement sur le CPE– cf. l’intervention publiée
dans le précédent numéro. La mesure est entrée en vigueur.
Le
régime des retraites de la Banque de France a été « réformé » en
novembre. Celui de la Poste doit être à son tour, comme avant lui celui de la
RATP, « adossé » au régime général. Dans ce secteur, il faut
mentionner la grève lancée par SUD pour l’augmentation des salaires dans les
centres de tri, qui, dans les circonstances politiques, était une aventure promise
à un fiasco.
Il
est enfin un domaine dans lequel les dirigeants syndicaux, à l’instar du PS et
du PCF, apportent un soutien complet au gouvernement UMP, celui des nouvelles
expéditions coloniales dans lesquelles il s’est engagé en Afrique et au
Liban.
Le « gouvernement au travail » pour défendre
les positions de l’impérialisme français.
Le
28 novembre, après avoir procédé au renforcement préalable de ses troupes,
l’armée française est passée à l’offensive simultanément aux côtés des troupes
centrafricaines et tchadiennes confrontées à des mouvements armés opérant sur
leur sol, venus vraisemblablement d’un Soudan déchiré depuis que le pétrole y
coule à flots. Le 30 novembre, Villepin venait à N’Djamena en chef de guerre
assurer le tortionnaire notoire Idriss Deby de son
soutien. Pendant ce temps, quelques discrètes dépêches d’agence informaient des
méthodes de « guerre » du gouvernement de Bozizé
en Centrafrique, relatant les propos d’un officiel de l’ONU :
« Les forces
gouvernementales incendient des villages et les gens se réfugient dans la
brousse", a rapporté le responsable onusien sans pouvoir préciser si ces
incendies faisaient des victimes. "La population s'enfuit dans la forêt
dès qu'elle aperçoit des véhicules, car la présence de véhicules est souvent
associée dans cette zone à des exactions que le gouvernement
commet". »
C’est
en soutien à ce gouvernement barbare que les avions et soldats français sont
entrés en action. Selon l’opposition centrafricaine, les bombardements des
Mirage français ont engendré des « massacres », le quotidien le Citoyen titrant quant à lui « Silence ! La France tue dans la région
nord-est ». A noter : cet été, le gouvernement tchadien a dénoncé
brutalement les contrats d’exploitation de son pétrole qu’il avait passés avec Chevron-Texaco et la compagnie malaise Petronas,
suite à un différent financier, peu de temps après l’annonce par la ministre
Girardin d’une importante aide financière au Tchad (aide qui servira entre autres
à financer notamment de nouveaux contrats pour … Suez et Véolia),
et quatre mois après qu’une première intervention française ait sauvé la peau
du régime face à une offensive militaire rebelle.
Le
« pré carré » africain de l’impérialisme français est devenu depuis
plus de dix ans un bateau ivre qui tangue et prend l’eau (cf . CPS nouvelle série n°19). Pour preuve :
l’incapacité du gouvernement à imposer et faire triompher ses solutions en Côte
d’Ivoire, pays d’une grande importance économique,
toujours coupé en deux et occupé par l’armée française depuis maintenant plus
de 4 ans.
Dans
le dispositif français, le Tchad occupe une place qui dépasse la question de
ses ressources pétrolières. Véritable « porte avion du désert » pour
les généraux, c’est à partir des bases militaires que l’aviation et les troupes
françaises peuvent intervenir rapidement partout en Afrique subsaharienne.
Profondément gangrené, déstabilisé, décomposé, comme la plupart des pays
d’Afrique qui subissent la domination française, il pourrait s’effondrer sous
les coups de quelques centaines d’hommes armés et décidés. D’où l’intervention
militaire française, « loin des
regards indiscrets de la presse » pour reprendre l’expression du journal
centrafricain déjà cité. Sans doute cette intervention ne fait que repousser un
effondrement inéluctable. Elle n’en est pas moins ignoble, sanglante, et menée
de bout en bout au compte des plus grands groupes capitalistes français qui
écrasent l’Afrique pour en extraire profits et rente.
Or,
si Le Monde du 6 décembre a titré son
éditorial à ce sujet « guerre muette » en référence à la discrétion
extrême de Chirac et Villepin, le silence le plus assourdissant est celui
qu’ont fait entendre PS, PCF, et dirigeants syndicaux, silence qui seul autorise
celui du gouvernement Chirac-Villepin-Alliot Marie.
De
même qu’il y a une profonde unité de la politique gouvernementale, des crimes
commis en Afrique à la destruction des acquis des ouvriers, des enseignants, en
passant par les expulsions et la chasse à l’enfant ouverte sous l’égide de
Nicolas Sarkozy, de même il y a une profonde continuité dans la politique du
PS, du PCF, des dirigeants syndicaux, qui tous peuvent se voir jeter à la face
l’exclamation de ce journal centrafricain : « on tue : silence ! »
Ces
interventions militaires expriment assurément les difficultés de l’impérialisme
à maintenir l’ordre dans son arrière cour africaine, tout comme la décision
d’aller occuper le sud-Liban a été motivée par la
peur d’y perdre l’influence décisive qui y est la sienne. Deux sommets, l’un
sur le Liban fin janvier, l’autre avec les chefs d’Etats
africains à la mi-février, vont avoir lieu dans l’objectif de raffermir
l’étreinte française dans ces zones qui lui sont traditionnellement inféodées.
Mais
il faut constater et souligner que c’est dans tous les domaines que
l’impérialisme français rencontre des difficultés croissantes face à ses
concurrents et face à ses propres limites, et pas seulement en Afrique.
La situation du capitalisme français ne cesse de se
dégrader
Au
troisième trimestre, la croissance économique a été nulle. Autant pour les
prévisions officielles. Mais cette interruption momentanée de la croissance
économique ne fait que souligner un décrochage de plus en plus marqué de l’impérialisme français face à ses principaux
rivaux en Europe, à commencer par l’impérialisme allemand. Non seulement la
croissance française semble être passée durablement en dessous de celle de la
zone euro, mais d’autres signes sont alarmants, à commencer par le déficit
maintenant persistant du commerce extérieur, et la stagnation de la production
industrielle, entraînée à la baisse tout particulièrement par le secteur de
l’automobile.
Pour
la classe ouvrière, cela se traduit par de suppressions d’emploi en cascade, et
d’abord chez les intérimaires et chez les sous-traitants. Record en la
matière : Airbus, dont la direction fait payer cash ses difficultés en
prenant des mesures qui vont entraîner des dizaines de milliers de suppressions
d’emplois, de licenciements.
Mais
la bourgeoisie française s’inquiète. Par exemple, entre le deuxième trimestre
2005 et septembre 2006, en France, la production industrielle a cru de 0,5%, la
production automobile a baissé de 12,8%. En Allemagne, la production
industrielle a grimpé de 8,4% sur la même période, et même la production
automobile (+2,8%) !
Le
taux de marge des entreprises françaises a atteint début 2006 son plus bas
niveau depuis 20 ans. Et les déficits du commerce extérieur ne font qu’exprimer
une dure réalité : la perte de parts de marchés à l’exportation.
Pour
2007, à en croire la dernière note de
conjoncture de l’Insee, ça ne devrait pas s’arranger : le
ralentissement américain, et japonais, la moindre croissance du commerce
mondial, l’augmentation de la TVA en Allemagne, tout cela entraînerait que «les exportations de la France devraient
décélérer, entraînant la production industrielle sur un rythme plus ralenti
début 2007 »
On
comprend que « l’euro fort » soit plus facilement digéré par les
capitalises allemands, mais au-delà il faut comprendre que c’est cette
situation spécifique et difficile qu’exprime l’isolement total d’un Thierry
Breton, le 27 novembre, lors de la réunion des ministres des Finances de
la zone euro, pour prôner la baisse de l’euro.
Cette
situation permet de mesurer l’importance pour la bourgeoisie française de la
prochaine échéance électorale : il s’agit pour elle d’en faire un tremplin
pour prendre les mesures nécessaires au redressement de sa situation.
Voilà
le sens, le contenu, de toutes les propositions qui fusent depuis le
gouvernement, l’UMP, le Medef.
La bourgeoisie, le patronat, ont engagé la bataille
politique des présidentielles
Les
vœux que Chirac a formulés, et notamment ceux qu’il a prononcés devant les
« forces vives de la nation » (patronat, directions syndicales) ne se
sont pas bornés à l’affirmation que le gouvernement continuerait de sévir
jusqu’au bout. Il a annoncé, avec l’approbation marquée de Laurence Parisot, pour
qui « il a montré la bonne
direction » les axes sur lesquels selon lui le prochain gouvernement
aurait à agir pour bien servir les vrais maîtres de la France, les barons de
l’industrie et de la finance.
Au
premier rang des préoccupations de Chirac et, donc, de Parisot, encore et
toujours la « sécurité sociale professionnelle ».
« Il faut bâtir un nouvel
instrument de combat contre le chômage et pour l'emploi, à partir, disons-le
clairement, de la fusion de l'ANPE et de l'UNEDIC.
« La sécurité sociale
professionnelle aura quatre missions : le versement des allocations chômage,
l'accompagnement personnalisé pour la recherche d'emploi, l'aide à la mobilité
professionnelle, et la formation tout au long de la vie : elle devra porter les
droits individuels à la formation des salariés, majorés pour ceux qui ont un faible
bagage initial ou qui ont besoin de se reconvertir.
Dans l'esprit du contrat de
transition professionnelle, un véritable lien contractuel, fait de droits et
d'obligations, unira les salariés sans emploi et la sécurité sociale
professionnelle. Dans la ligne de la réforme du dialogue social, il reviendra
aux partenaires sociaux, aux côtés de l'État, de gérer ce nouvel
ensemble. »
« L’esprit »
du « contrat de transition professionnelle », nous avons l’occasion
de le dire à plusieurs reprises dans notre bulletin, c’est un
« esprit » de destruction de la notion de contrat de travail, lié à
des garanties collectives inscrites dans les conventions collectives. Remplacer
l’assurance-chômage par un « lien contractuel » incluant, on le sait, la possibilité de travailler pour différentes
entreprises, c’est en fait supprimer le droit à l’indemnisation. C’est ce que
dans d’autres pays on appelle « l’activation des dépenses passives ».
Bien entendu, Chirac propose que les directions syndicales soient engagées jusqu’au
cou dans cette « sécurité sociale professionnelle » dont le concept,
faut-il le rappeler, fut fourni par la direction confédérale CGT.
D’ailleurs
d’une manière générale, Chirac a insisté sur la place que devaient prendre les
« partenaires sociaux », ce qui exige pour lui d’aller vers la
réforme de la représentativité :
« Les partenaires sociaux
sont pleinement associés à la gestion de la sécurité sociale. Ils doivent
maintenant devenir des acteurs de la réforme, les promoteurs du nouveau modèle
social français. Pour cela, il faut renforcer la légitimité de la démocratie
sociale. Sur la base des travaux du Conseil économique et social, il faudra
confronter la représentativité des syndicats, la conforter indiscutablement en
actualisant les règles qui sont vieilles de plus de 40 ans. »
Heureuse
coïncidence : un avis du Conseil Economique et Social vient de donner au futur
gouvernement les moyens de s’y prendre, en organisant des élections
périodiques… à la nouvelle « sécurité sociale
professionnelle » ?
Autre
préoccupation de Chirac qui renvoie aussi à la volonté d’association capital-travail : le renforcement, encore, de la
participation, qualifiée de « projet
de société », et qu’il a présentée comme une réponse aux problèmes du
pouvoir d’achat… contre les augmentations de salaire, donc, mais aussi comme un
moyen de baisser davantage l’impôt sur les sociétés, qu’il a proposé de faire
passer de 33% actuellement à 20% sur cinq ans, et carrément à 10% en cas
d’accord d’intéressement réservant autant aux salariés qu’aux actionnaires.
Il
faut relever la réaction de Mailly, qui, tout en s’opposant à la baisse de
l’impôt sur les sociétés, a déclaré :
"Le président de la
République est dans son rôle quand il dresse des pistes", mais "ce
qui manque selon moi, ce sont des décisions rapides et concrètes", a réagi
jeudi le secrétaire général de Force ouvrière Jean-Claude Mailly au sujet des
voeux de Jacques Chirac aux Forces vives.
"Pour les mois à venir,
il n'y a pas de décisions concrètes. Cela nous renvoie un peu aux calendes
grecques", a-t-il remarqué sur France-Inter, alors que le chef de l'Etat a
présenté des propositions pour les cinq années à venir. »
En
plus d’inciter Chirac a passer aux « décisions concrètes », la
direction FO participe aux trois groupes de travail mis en place par le
patronat dans le cadre de la « délibération sociale » qui portent
précisément sur l’assurance-chômage, le contrat de travail et la
« sécurité sociale professionnelle ». Or ces groupes doivent rendre
fin février un premier état des lieux de leurs travaux, et peser ainsi à leur
tour durant la campagne électorale à la mise en place de cette même politique
que dessine Chirac.
Une nouvelle offensive s’annonce contre tous les
régimes de retraite
Chirac,
le Medef, ne sont pas les seuls à mettre sur la table les exigences du grand
capital pour la nouvelle étape politique qui s’annonce. Le Conseil d’Orientation des retraites, dans lequel siègent les
directions syndicales, mais également le PS et le PCF (ainsi Maxime Gremetz),
vient de rendre son rapport sur le « rendez-vous de 2008 » instauré
par la loi Fillon de 2003.
Ses
conclusions incitent à engager une nouvelle étape de remise en cause du droit à
la retraite.
Une
dépêche d’agence les résume :
« Le Conseil juge donc
"indispensable de poursuivre la réflexion sur les dispositions qui
limitent l'augmentation de la durée effective de cotisation sur laquelle est
fondée la réforme de 2003". En clair, revenir sur les mesures de départ
anticipé pour carrières longues décidées en 2003 pour que les seniors
travaillent plus longtemps.
Le rapport juge par ailleurs
"nécessaire" l'examen d'"hypothèses alternatives" de
financement des régimes de retraite. Il prône une "mise à plat des
différentes niches fiscales et surtout sociales" liées aux dispositifs d'épargne-retraite.
Le COR met enfin l'accent sur
la nécessité d'assurer "l'égalité de traitement" entre les cotisants.
Dans ce cadre, il aborde la question explosive des régimes spéciaux, laissée de
côté en 2003. Les régimes spéciaux concernent aussi bien les agents d'EDF-GDF,
de la SNCF, de la RATP et la Banque de France que les marins, mineurs et clercs
de notaire, qui jouissent toujours d'une durée de cotisation réduite.
Le rapport plaide pour un
"allongement des durées d'activité et des durées d'assurance" de ces
régimes avec "un objectif d'équilibre financier à l'horizon de 2020".
"Nous proposons (...) que
les régimes soient examinés au cas par cas", a expliqué Raphaël Hadas-Lebel après la remise du rapport. "Il ne s'agit
pas de voir les choses globalement. Chaque régime a ses particularités
historiques."
Le président du COR a évoqué
une "harmonisation" des régimes spéciaux avec le régime général
"en ce qui concerne l'âge de départ à la retraite, les avantages
familiaux, les modes d'indexation". »
Le
jour même de la remise de ce rapport, Villepin, dans les Echos, renchérit :
« Les assurés devront
"travailler plus longtemps" pour assurer la "pérennité des
retraites" et plaide pour un examen "au cas par cas" des régimes
spéciaux, prôné jeudi par le Conseil d'orientation des retraites (COR). »
Fillon
devenu entre-temps conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, n’avait pas tenu
d’autre langage.
Les
prémisses d’une nouvelle et violente offensive, poursuivant celle de la loi
Fillon, sont donc là : le grand capital entend baisser encore notablement
sa part dans le financement des régime de retraites, et le fait bruyamment
savoir (on pourra relever en passant que le canard
enchaîné du 3 janvier a publié un article montrant que toutes les
prévisions démographiques qui avaient servi de base à la « réforme »
de 2003 sont déjà totalement caduques, comme d’ailleurs toute prévision portant
sur les évolutions à 40 ans).
Mailly
a déclaré :
« La CGT Force Ouvrière
tient à souligner que sa participation aux travaux du C.O.R. ne la conduit pas
pour autant à partager l’intégralité des recommandations formulées dans le
rapport qui devrait servir à éclairer le Gouvernement dans la perspective des
rendez-vous de 2008. En la matière comme dans d’autres, le diagnostic partagé
n’existe pas. »
La
CGT s’est exprimé dans le même sens. Mais si ce n’est pour cautionner ce genre
de rapports, et participer à l’application jusqu’au bout de la loi Fillon,
pourquoi diable les dirigeants confédéraux CGT et FO, ceux de la FSU, siègent-ils
au conseil d’orientation des retraites ?
Pour la bourgeoisie, l’enjeu essentiel: lancer
une nouvelle vague d’assaut anti-ouvrière
Chirac,
le Medef, le COR, … on peut encore ajouter à la liste de ceux qui entendent
alimenter le « grand débat démocratique » Thierry Breton, lequel
propose de privatiser le recouvrement de l’impôt sur le revenu en le
transférant « à la source », c’est-à-dire aux patrons (dont on sait
déjà le peu de cas il font souvent du paiement des cotisations sociales).
Tous
dessinent à grands traits le programme que le vainqueur de la présidentielle aura, selon eux, à
mettre en œuvre.
Ce
programme commun aux représentants directs des grands groupes capitalistes
français n’exclut pas que des divergences puissent agiter l’UMP,
et se manifester comme prétextes aux efforts que le clan chiraquien fait pour
continuer à exister après que leur chef aura quitté l’Elysée, au delà de la
dernière salve de nominations que celui-ci tire et d’éventuels coups fourrés
dont il est friand.
Par
exemple, ce n’est pas un mystère, et surtout pas depuis la visite rendue par
Sarkozy à Washington : le candidat de l’UMP
envisage un alignement plus étroit sur l’impérialisme américain – mais en la
matière, entre Blair et Merkel, la concurrence en
Europe sera rude !
Mais
il serait vain de chercher des divergences de principe au sein de l’UMP, ou des partis bourgeois. Si, nécessairement, les
luttes de clans au sein de l’UMP et alentour font
surgir les questions réelles que se posent l’ensemble des capitalistes français,
la politique finalement menée ne dépendra d’abord que des circonstances et des
nécessités du moment.
Pour
la bourgeoisie, l’essentiel c’est : garder le pouvoir, tenir directement
les leviers de contrôle de l’Etat entre les mains.
Aujourd’hui, pour le grand capital, il est clair que la solution la plus
favorable serait la victoire de celui qui fut caractérisé de « Zidane » du Medef par Ernest-Antoine
Seillière, Nicolas Sarkozy de Nagy-Bocsa, et qu’ainsi
les élections présidentielles servent de rampe de lancement pour engager le
plus efficacement et brutalement les « réformes » dont le capitalisme
français a besoin, en matière de retraites, de contrat de travail, et de baisse
des taxes diverses sur le capital et les grande fortunes.
Tel
est pour eux l’enjeu des élections présidentielles et des législatives qui
suivront.
A
l’inverse, à moins que le prolétariat puisse faire irruption sur la scène avant
les présidentielles, ce qui est de moins en moins probable du fait de la
politique des appareils, exploités et opprimés, salariés, jeunes, vont cherche
inévitablement à signifier sur le terrain des élections, leur condamnation de
la politique ultra-réactionnaire menée depuis 2002,
comme ils l’ont fait aux régionales de 2004 ou lors du référendum de 2005.
Et
pour ce faire, ils vont tout aussi inévitablement se tourner vers la candidate
du Parti Socialiste, Marie-Ségolène Royal.
Le principal obstacle à la volonté de battre l’UMP et les candidats de la bourgeoisie :
Marie-Ségolène Royal et son programme
Un
article de ce numéro de CPS apprécie
en détail ce qu’a signifié la désignation de Mme Royal comme candidate par le
Parti Socialiste : une véritable OPA sur le parti, elle qui a été « élue »
si l’on peut dire parles grands groupes de presse et d’opinion, matraquant avec
leurs sondages qu’elle seule serait en mesure d’effacer l’humiliation pour le
PS que fut le 21 avril 2002.
Ainsi
les adhérents du PS ont voté en bloc pour la candidate aux propos les plus
ostensiblement réactionnaires, à commencer par ceux sur l’allongement du temps
de travail des enseignants qui ont fait bondir ce secteur, qui vote largement
pour les candidats PS. Ils ont aussi
désigné, il faut le dire car cela peut jouer un rôle dans la campagne, une
candidate qui est particulièrement sujette aux gaffes et aux déclarations
intempestives – la voici maintenant, auréolée de « bravitude »,
qui revient de Chine en louant la rapidité de la « justice »
chinoise !
Ils
ont enfin désigné une candidate qui, après avoir obtenu le ralliement du MRC et
du PRG moyennant des circonscriptions gagnables va n’avoir de cesse que se
démarquer autant que possible du PS.
Son
premier meeting à Strasbourg était aux couleurs de son fan-club (« désir
d’avenir »), et le Monde n’a pas
manqué de rapporter l’existence de tensions entre ces clubs et le Parti
Socialiste, tandis que chaque intervention publique de François Hollande se
voit immédiatement « recadrée » par l’état-major de campagne
« royaliste ».
Plus
le temps passera, plus les positions réactionnaires de Royal risquent de faire
obstacle à la volonté évidente d’une grande partie de la population laborieuse
de se servir du vote pour la candidate du PS pour battre l’UMP
et Sarkozy. Mais n’est-ce pas dans cette perspective que, lors de la pré-campagne socialiste, tant les chiraquiens que les sarkozystes marquaient leur préférence pour la
« madone des sondages » ?
Mais
il faut dire que pour la grande majorité des travailleurs, pour la jeunesse, il
n’y a guère d’alternative.
A la « gauche de la gauche » : pas
d’alternative saisissable pour le prolétariat
Bien
qu’une certaine affluence ait marqué les quelques meetings des
« collectifs unitaires » issus des comités unitaires constitués pour
le « non de gauche » au référendum de 2005, ce rassemblement s’est
achevé comme il était prévisible par une débandade générale.
Comment
eût-il pu en être autrement ? Les membres de ces collectifs ont en fin de
compte exigé du PCF qu’il leur serve de tremplin, sinon de paillasson,
prétendant s’appuyer sur la dizaine de milliers de personnes qui s’y sont
regroupés, parmi lesquels… un grand nombre sont au PCF, à la LCR, sinon au PS ! Le PCF de son côté espérait à l’inverse sans
doute récupérer à son compte « l’aura » du dit « non de
gauche »… comme parachute pour tenter de freiner le processus inéluctable
qui mène à sa marginalisation, sa disparition.
Il
en est pour ses frais puisque la nomination de Buffet comme représentant les
« collectifs » n’a pas eu lieu. Cela ne l’empêche cependant pas de
présenter M-G. Buffet comme étant la candidate d’un rassemblement plus large
que le PCF, une candidature « ouverte »...
Les
choses ne pouvaient pas se passer autrement puisque ces collectifs n’ont jamais
été l’expression d’un mouvement plus profond, dont il faudrait être aux aguets,
à savoir celui des masses cherchant, même dans la confusion, à se doter d’un
nouveau parti et exerçant une pression en conséquence sur les organisations
existantes.
Or au contraire les processus à l’œuvre sont
inverses. Le caractère « ouvert » de la candidature du PCF et les
nouvelles secousses qui ont frappé ce parti le manifestent, c’est la
décomposition des organisations traditionnelles du mouvement ouvrier qui
progresse, sans que dans le même temps s’engage une quelconque recomposition.
D’ailleurs
il faut noter que, sous réserves d’autres rebondissements à la « gauche de
la gauche », la LCR aussi sort en crise de cette opération dans laquelle
elle s’était engagée, chacun des courants qui la composent menant sa propre
politique, jusqu’à promouvoir la candidature de Bové
contre celle de Besancenot … qui n’est pas du tout
certain de pouvoir se présenter.
Par
ailleurs, la ligne politique de ce dernier est une ligne centrée sur la dénonciation
de tout accord avec le PS, orientation presque comique de la part d’une
organisation qui n’a pas hésité à appeler au vote Chirac en 2002. Mais une
ligne qui dresse des obstacles à l’aspiration inévitable des masses qu’un
gouvernement arrive au pouvoir pour mener une politique conforme à leurs
besoins immédiats et leurs aspirations, gouvernement qui ne peut se concevoir,
au stade actuel, en en excluant d’avance le Parti Socialiste.
Lutte
Ouvrière, elle, semble en mesure de présenter Arlette Laguiller sur une
orientation assez acrobatique, qui voudrait épouser l’aspiration populaire à « battre
la droite » tout en se préparant à appeler à l’abstention en cas de second
tour PS-UMP ! Enfin, le Parti des Travailleurs, lui, ne se présentera pas.
Il apporte son soutien à un élu membre du groupe PS au conseil général de
l’Aude, Gérard Schivardi, dont les premières
déclarations auront été de dire qu’il fallait « mettre le PT de côté », précisant qu’il était soutenu par des
« maires de droite », et
que si Fabius avait été désigné par le PS, il ne serait pas présenté lui-même!
La
dégénérescence politique du « Courant Communiste Internationaliste »,
qui dirige le PT, sur la ligne de la « reconquête
de la démocratie » et de la « défense
de la Nation » (cf. aussi l’article sur
l’Algérie dans ce numéro) l’entraîne clairement dans une pantalonnade grotesque
!
Pour le front uni des organisations issues du mouvement ouvrier, partis, syndicats,
contre le gouvernement UMP, sa politique, contre les candidats bourgeois
La
façon dont la question du logement a surgi durant la « trêve des confiseurs »
est illustrative de la situation politique. Une association fondée par des
petits-bourgeois parisiens désoeuvrés, s’est emparée médiatiquement de ce
problème angoissant pour tout le prolétariat, à commencer par ces nombreux
ouvriers précaires ou non qui dorment à la rue. En plantant quelques dizaines
de tentes ici et là, cette association a réussi à braquer les feux des medias
sur elle. Elle a alors avancé une « charte » faite de mesurettes, au bout desquelles figurait le « droit au
logement opposable ». Toutes les organisations politiques, jusqu’à
l’extrême gauche, sommées par la « vox mediati »,
ont signé ce morceau de papier, et Chirac et Villepin ont eu beau jeu
d’approuver bruyamment et de lancer un projet de loi sur le « droit
opposable au logement».
A
la suite de quoi la dite association a appelé à lever les camps sans autre
forme de procès, à la stupeur et l’indignation des authentiques sans logis qui
s’étaient fait embarquer dans cette affaire. Problème réglé ? C’est
proprement écoeurant ! Il y a en France des centaines de milliers de
logements vides, dont plus de cent mille rien qu’à
Paris. Il y a un gouvernement qui s’enorgueillit des nouvelles constructions
qu’il a lancé, mais omet de mentionner les dizaines de milliers de logements
détruits dans le même temps dans le cadre du plan Borloo
– et qui favorise outrageusement « l’accession à la propriété »
contre le logement social. Il y a, enfin, un processus de privatisation
croissante des logements sociaux, alors que plus d’un million ( !) de
demandes restent en souffrance.
Résoudre
la question du logement, en finir avec la spéculation immobilière, les loyers
exorbitants, l’impossibilité de se loger, nécessite quelques mesures simples, à
commencer par l’expropriation des logements laissés volontairement vides par
les grands propriétaires, la mise en chantier sur une toute autre échelle de
logements sociaux modernes, et un blocage immédiat des loyers.
Sur
cette question comme sur les autres, il s’agit ni plus ni moins que de s’en
prendre aux intérêts des capitalistes, lesquels se sont grassement enrichis ces
dernières en investissant dans la pierre, et qui profitent de la rareté de
l’offre entretenue délibérément par la politique du gouvernement pour dicter
des conditions souvent humiliantes à ceux qui cherchent à se loger.
Pour
assurer le droit au logement, le droit aux soins, le droit au travail, le plus
précieux de tous, il n’est d’autre politique qu’une politique d’affrontement
avec la bourgeoisie, une politique rompant avec la loi du profit, allant vers
l’expropriation du capital.
C’est
cette politique anticapitaliste qu’il s’agit de défendre, en toutes
circonstances, et particulièrement à l’occasion des prochaines échéances
électorales.
Elle
ne serait cependant qu’un couteau sans lame si elle n’incluait pas les moyens
de son application, à savoir la réalisation du front uni des organisations
syndicales (CGT, FO, FSU), et politiques (PS, PCF), issues du mouvement
ouvrier.
Front
unique contre le gouvernement et sa politique, pour le combattre et le vaincre
dès que possible, y compris lors des élections, contre les partis bourgeois.
D’un
gouvernement issu de ce front unique, les masses exigeraient qu’il prenne les
mesures urgentes qu’appelle la situation difficile dans laquelle se trouve la
population travailleuse, la jeunesse.
C’est
sur cette orientation qu’il faut intervenir, sans s’en remettre aux échéances
électorales, mais également à l’occasion des prochaines échéances électorales.
Le
mouvement des masses engageant le combat pour leurs objectifs, pour défendre
leurs conditions de travail et d’existence, revendiquer le rattrapage du
pouvoir d’achat perdu, … peut bouleverser la situation politique.
En
tendant à dicter leurs exigences aux organisations auxquelles ils se réfèrent,
travailleurs et jeunes pourront s’ouvrir une issue, et les conditions pour la
construction d’un nouveau parti, du parti ouvrier révolutionnaire se réuniront.
C’est
sur cette perspective, celle du socialisme, de la reconstruction du mouvement
ouvrier sur un nouvel axe, que se situe le Cercle pour la construction du parti
ouvrier révolutionnaire, de l’internationale ouvrière révolutionnaire.
Le 12 janvier 2007