Editorial du numéro 23 nouvelle série de
combattre pour le socialisme – 3 janvier 2006
Enrayer l’offensive du
gouvernement Chirac-Villepin-Sarkozy et du patronat
Il y a plus de 6 mois, au
lendemain de la défaite de Chirac lors du référendum sur la « constitution
européenne », Villepin est devenu premier ministre avec un cap :
« redonner la confiance » à la bourgeoisie française. Cela signifiait
en premier lieu faire en sorte que la classe ouvrière ne puisse exploiter pour
son compte le « non » au référendum du 29 mai en accélérant encore –
notamment via les ordonnances - l’offensive contre les masses.
Le gouvernement Chirac-Villepin-Sarkozy y est parvenu dans les conditions
que nous avons analysées dans notre précédent numéro, renforçant ainsi le
sentiment d’impuissance du prolétariat à peser sur le plan politique.
Plus encore : lors du
premier affrontement sérieux sur le terrain direct de la lutte des classes, à
la SNCM, le gouvernement, mobilisant les forces de répression de l’appareil
d’Etat, appuyé sur la politique traître des directions syndicales, a infligé
une défaite sans appel aux marins, suivie par celle des salariés de la RTM (on
se reportera à l’article que ce numéro consacre à ces grèves), défaites
retentissantes pour tous les travailleurs, modifiant la situation politique
plus encore à l’avantage de la bourgeoisie.
Dans ces circonstances sur
lesquelles nous allons revenir, rien d’étonnant à ce que Villepin puisse
annoncer, tirant le bilan de ses 6 mois à Matignon le 19 décembre dernier,
qu’il entend faire de l’année 2006 une « année utile » - pour les classes possédantes s’entend.
Villepin a en effet annoncé un programme chargé.
D’abord – au nom de la
« bataille pour l’emploi » -
la poursuite du démantèlement des protections collectives de la classe
ouvrière, ce dans quoi s’inscrit l’annonce d’un « contrat de transition
professionnelle », après le C.N.E.
Ensuite, au nom cette fois-ci du
désendettement, une accélération de la « réforme de l’Etat », de la
destruction des statuts des fonctionnaires, avec comme initiative première une
conférence nationale des finances publiques dès janvier à laquelle les
directions syndicales sont conviées à s’associer, ce qui vaudrait, nous y
reviendrons « diagnostic partagé » sur la dette, comme il y en eu un
sur l’assurance-maladie.
A ces deux grands axes, il
convient d’ajouter la liquidation du régime de retraite à la RATP, le projet de
loi de privatisation rampante de la Recherche publique, la marche à la
destruction des ZEP, l’accumulation de lois et mesures antidémocratiques, la
poursuite de l’application systématique de la contre-réforme de
l’assurance-maladie, etc.
Mais il est une question
particulièrement illustrative autant que singulière : la France a en
effet été placée de novembre à début janvier sous Etat d’urgence, dans un
régime d’exception.
Instauration de l’état d’urgence : le signal
d’une accélération de l’offensive anti-ouvrière
La décision prise le 7 novembre
par le tandem Chirac-Villepin de recourir à l’Etat
d’urgence ne tombe donc pas du ciel, mais est un des produits amers des reculs
que le gouvernement a pu imposer aux travailleurs grâce à la complicité des
appareils syndicaux.
L’armée avait été envoyée contre
les travailleurs de la SNCM. Puis c’était un tribunal qui décrétait, à la RTM,
que la grève contre la privatisation de l’entreprise était illégale. A chaque
fois, les huiles du mouvement ouvrier acceptaient sans broncher, ou
approuvaient de facto – ainsi Thibault se rendant chez Villepin au soir de
l’intervention du GIGN contre le Pascal
Paoli.
(Suite page 2)
Quatre petits jours après que la
grève de la SNCM eut été défaite, les cinq directions confédérales qui avaient
mis, selon leurs dires, plus d’un million de personnes dans la rue le 4 octobre
s’étaient fendues d’une déclaration commune demandant… de nouvelles rencontres
avec Villepin, comme ce dernier l’avait d’ailleurs lui-même proposé
publiquement dès le 6 octobre au soir.
Le refus des directions syndicales
de prendre toute initiative pouvant être interprétée comme permettant de
combattre le gouvernement, au lendemain de la défaite cuisante à la SNCM,
quatre mois après que le « non » au référendum ait été retourné en
son contraire, l’absence apparente de toute alternative politique immédiate aux
yeux des masses, tout cela constituait pour le gouvernement une situation
propice pour aller plus loin encore, comme il l’avait expérimenté avec succès
sur le port de Marseille, en maniant à la fois la répression et le dialogue
social.
A cet égard, il faut bien
comprendre que les insultes à répétition de Sarkozy en visite dans des
quartiers populaires dont il entend « nettoyer »
la jeunesse (assimilée globalement à de la « racaille ») au « kärcher »
sont calculées, délibérées, répétées. Il n’y a jamais eu de dérapages, mais une
volonté délibérée de provoquer.
Quand à Clichy-sous-bois, deux
jeunes sont morts parce qu’ils voulaient échapper à un contrôle de police, le
ministre de l’intérieur s’est surpassé : déclarations contradictoires et
mensongères quant au rôle de la police (profitant du silence imposé au
compagnon d’infortune des jeunes électrocutés, imposé car sans papiers), puis
tir d’une grenade lacrymogène de CRS à l’entrée de la mosquée le dernier jour
du ramadan.
A Clichy, la colère légitime de
toute une partie de la jeunesse s’est traduite par des affrontements avec la
police. Ailleurs, le gouvernement a atteint son objectif : créer un climat
de peur dans tout le pays, médiatisant à outrance les actions de quelques
petites bandes – actions dirigées cette fois-ci quasi exclusivement contre la
population laborieuse des quartiers populaires, ainsi contre les écoles. Parler
« d’émeutes » dans ce dernier cas est tout à fait inapproprié. Il
faut noter dans quelques endroits que la population des quartiers a cherché,
souvent en lien avec les élus PS ou PCF, à assurer elle-même sa propre
protection et celle de ce qui lui tient à cœur. C’est en tout cas la solution
que devaient prôner et mettre en œuvre les directions des organisations du
mouvement ouvrier, en particulier le PS et le PCF, pour l’opposer à
l’intervention de la police.
Au lieu de quoi ce ne fut qu’un
cri, ou presque : « encore plus
de police ! » (d’urgence, de
proximité, tout ce qu’on voudra). François Hollande et Julien Dray prirent même
la peine de spécifier qu’il était hors de question pour le PS de demander la
démission de Sarkozy, autrement dit, de pointer même indirectement la
responsabilité écrasante du gouvernement. Le 7 novembre, Villepin n’avait plus
qu’à ramasser la mise en annonçant l’instauration de l’état d’urgence, en
sachant d’ailleurs pertinemment (ainsi que l’a révélé Libération du 10 décembre) que les incidents allaient déjà en
diminuant. Fait remarquable : c’est le Front National qui avait suggéré en
premier le recours à la loi de 1955. Autre fait remarquable : la
progression revendiquée des adhésions au FN et au MPF de Villiers au terme de
cette flambée de violences, ces mouvements ultra-réactionnaires n’auront pas
manqué de se féliciter de voir la politique qu’ils prônent être enfin
appliquée.
Et effectivement, qu’en est-il de
cet état d’urgence ? C’est une loi qui donne les pleins pouvoirs à la
police et éventuellement à l’armée dans les zones où il s’applique. Elle
autorise : perquisitions à volonté, arrestations facilitées en
court-circuitant en tant que de besoin les procédures judiciaires habituelles.
Elle permet d’interdire à discrétion la circulation des personnes et des
véhicules, les réunions publiques, et même la presse. Déjà, durant les
incidents dans les quartiers populaires, des centaines d’arrestations
arbitraires ont eu lieu, suivies de condamnations qui ne le furent pas moins.
Cela donne un aperçu de ce que permet la loi sur l’Etat d’urgence, loi
d’exception, loi brutalement, frontalement, antidémocratique.
Le recours à cette loi s’inscrit
dans la tendance générale au corsetage des sociétés capitalistes dominantes
dans un écheveau de lois liberticides, pour en comprimer les contradictions,
tenter de contrôler les effets de la décomposition sociale que le capitalisme
engendre tant et plus et qui s’accumule dans la société française, et utiliser
ces moyens pour réprimer la lutte de classe du prolétariat.
Et c’est à cette loi que le PS a
dit amen – quand bien même il a
ensuite voté contre sa prolongation – accompagné par les dirigeants Force
ouvrière, les uns comme les autres faisant part de leur
« vigilance ». De leur côté, dirigeants CGT, ou FSU, PCF, LCR, ou encore l’UNEF faisaient part
sous des formes variées de critiques purement platoniques, portant d’ailleurs
sur « l’inutilité » (communiqué PCF/LCR/FSU etc.) de l’Etat d’urgence
– arguant même que « même en 1968 alors que la situation était bien
plus dramatique » (la grève générale est pour eux un drame -
sic !) il n’y avait pas eu besoin de lois d’exceptions.
A cela s’ajoute le fait les
députés PS n’ont pas rejeté le projet de loi prétendument « anti terroriste » de Sarkozy (projet que les sénateurs
PS qualifieront, eux, de liberticide en votant contre, à l’exception de Bockel).
De même, ils n’ont pas protesté
une seconde – pas plus qu’aucune organisation traditionnelle du mouvement
ouvrier - contre les condamnations en rafale autant qu’arbitraires qui ont
rythmé les incidents dans les quartiers sinistrés par le capitalisme.
Signe des temps : avec une arrogance inouïe,
l’UMP célèbre le « rôle positif » de l’oppression coloniale
L’état d’urgence a été créé sous
la 4ème République pour réprimer le combat du peuple algérien pour
son indépendance. Le 29 novembre, le groupe socialiste à l’Assemblée nationale
a déposé une demande d’abrogation d’un article de loi voté en février 2005
intimant aux manuels scolaires de mettre en valeur de « rôle positif de la présence
française outre-mer», et d’abord en Algérie, vu qu’il s’agit d’une loi
portant sur l’indemnisation des harkis (loi dont l’article 1 porte aussi une
appréciation positive du colonialisme).
Après l’instauration de l’Etat
d’urgence, cela a fourni l’occasion à la majorité UMP de donner un grand
retentissement à ce qu’elle avait déjà voté beaucoup plus discrètement en
février 2005 – quitte à poser des problèmes diplomatiques à l’impérialisme
français envers ses anciennes colonies.
En février 2005, ni le PS ni le
PCF ne s’en étaient émus, jusqu’à ce que
des enseignants se mettent à protester publiquement. En fait, alors, non
seulement les députés PS et PCF
n’avaient rien trouvé à redire à cet article, mais encore, lors du premier
examen de cette loi, le 11 juin 2004, intervenant au nom du groupe socialiste,
le député fabiusien de l’Hérault K.Mesquida avait salué « l’oeuvre civilisatrice de la France »,
PS comme PCF proposant des amendements à ce projet dont J.Bascou (député PS,
NPS) saluait « les avancées ».
Il est bon de le rappeler
puisque, à l’initiative de D.Strauss-Kahn, une forme fugace de l’Union de la
Gauche, de Taubira et Voynet jusqu’à Besancenot et Laguiller a été réalisée autour d’une
pétition demandant l’abrogation de l’article 4 et … s’adressant pour cela à
Chirac ! Il s’agit là, en plus de camoufler les traces de la position du
groupe PS à l’Assemblée lors de la première lecture, d’une manœuvre
politicienne, dans laquelle l’article 4 n’est que prétexte, et dont on sait par
avance qu’à part des suppliques à Chirac, elle ne débouchera sur aucun combat.
A sa manière, le refus d’Aimé Césaire de rencontrer Sarkozy suite au vote du
parlement – ce qui a entraîné l’annulation de sa visite en Martinique - ne fait
que souligner qu’au contraire, malgré les protestations de pure forme, dans
l’Hexagone, les partis issus du mouvement ouvrier, eux, n’ont en aucune manière
coupé les ponts avec le gouvernement, l’UMP.
Le vote de cette loi, et
notamment de cet article, par lui-même est une insulte faite à tous les
travailleurs, et en particulier aux travailleurs et jeunes issus de
l’immigration.
Mais son sens profond est donné
par les multiples déclarations – à commencer par celles de N.Sarkozy – sur la
fin du temps de la « repentance » pour
l’impérialisme français : l’UMP, principal parti de la bourgeoisie, estime
possible et nécessaire de se montrer telle qu’en elle-même. Les forces
réactionnaires ont le vent en poupe.
Rien d’étonnant à ce que ce soit
la célébration de l’Algérie française qui serve d’étendard à l’UMP.
On peut utilement rappeler ce que
Marx et Engels écrivaient dès 1858 dans un article pour une encyclopédie
américaine (d’autant plus que, lors du débat un député UMP a essayé de les
enrôler sous la bannière de la « colonisation positive »)
« De la première
occupation de l'Algérie par les Français jusqu'à nos jours, ce pays malheureux
a été l'arène de violence, de rapines et de carnages incessants. Chaque ville,
grande ou petite, a été conquise en détail et au prix d'un immense sacrifice de
vies humaines. Les tribus arabes et kabyles, pour qui l'indépendance est chose
précieuse, et la haine de la domination étrangère un principe plus cher que la
vie elle-même, ont été écrasées par les terribles razzias qui brûlèrent et
détruisirent demeures et propriétés, abattirent les récoltes, massacrèrent les
malheureux ou les soumirent à toutes les horreurs de la brutalité et de la
concupiscence.(…)
tout ce que l'on peut dire de l'Algérie, c'est que c'est
une école de guerre pour les soldats et généraux français, dans laquelle tous
les officiers français qui remportèrent des lauriers dans la guerre de Crimée,
reçurent leur éducation et leur entraînement militaire. »
Après ces premiers temps du
colonialisme, et en même temps que, vague après vague, les terres des Algériens
étaient accaparées par et pour les colons, « l’Algérie française »
est restée un régime d’exception, régime dictatorial pour les maghrébins, et a
toujours été un point d’appui et parfois une base arrière aux forces les plus
réactionnaires sévissant sur la scène politique française. D’abord bien sûr,
comme du temps de Marx, à l’Etat- major des armées qui y réalisa ses
« prouesses » tranquillement des années durant. Mais aussi, plus tard
à l’OAS, puis au Front National.
L’ « Algérie
française » est depuis toujours le cri de ralliement de la réaction la
plus sinistre – des tenants de « l’état d’urgence » en permanence.
Une « fenêtre
de tir »
Le Monde du 2 décembre
rapporte les propos d’un conseiller de Villepin :
« Les nuits de violences
ont ouvert une fenêtre de tir". Le même poursuit : "Cela fait longtemps
que le premier ministre voulait faire tomber ces barrières, mais il pensait que
cela ne passerait pas avant 2007. »
Ces propos sont tenus au sujet
des mesures de suppression des allocations familiales (« L’UMP en rêvait » souligne le même
journal). Mais ils s’appliquent parfaitement à toute la politique du
gouvernement, laquelle a rebondi sur les violences urbaines comme sur un
tremplin. Naturellement en premier lieu dans le domaine répressif :
suppressions des prestations sociales, expulsions d’étrangers en situation
régulières, le tout sur fond de campagne ignoble contre la
« polygamie », relayée et prolongée par les Carrère
d’Encausse et autres Finkelkraut.
Mais il serait réducteur de ne
voir que l’accélération en ce seul domaine. La « fenêtre de tir » s’est ouverte plus largement. Les annonces Villepin-Chirac ont ainsi comporté l’annonce de nouvelles
zones franches, de nouveaux contrats précaires à destination des jeunes des
cités. Mais ils se sont notablement
concentrés sur l’école, contre le droit à l’instruction.
Dans un premier temps, c’est la
mesure d’apprentissage dès 14 ans qui a été annoncée. Cette mesure ne doit
tromper personne : il s’agit ni plus ni moins de faire reculer l’âge de la
scolarité obligatoire dans ce pays, sous couvert d’apprentissage
« junior ».
Puis ce sont
les ZEP dont le « dynamitage » pour reprendre le mot de la direction
du SNES a été lancé.
Avant d’en dire plus, soulignons
tout de même à quel point l’opposition Sarkozy/Villepin relève du marketing.
L’un est présenté comme voulant en finir avec le « modèle
social » français, l’autre voulant le préserver. Sur les ZEP, même
discours du premier « il faut déposer le bilan des ZEP » alors que le
second prétend au contraire les « renforcer ». Mais en fait, il
suffit d’écouter De Robien pour comprendre que « renforcer » dans la
bouche de Villepin, ça veut dire liquider. Interviewé par le Monde du 14 décembre, Robien explique en effet : « Plutôt que de s'attacher à la notion de
zone, il s'agit de s'intéresser aux élèves (…) Nous allons créer trois
niveaux parmi les dispositifs de l'éducation prioritaire », l’une
étant labellisée « ambition réussite », et mise en réseaux, Robien
précisant :
« Les réseaux de réussite
feront l'objet d'une contractualisation pour quatre ou cinq ans entre
l'établissement et l'inspecteur d'académie. Ils seront soumis à une évaluation
régulière des résultats fondée sur un baromètre de la réussite scolaire. »
Un autre de ces
« niveaux » concerne les établissements… ayant « vocation à sortir en trois ans »
des zones d’Education prioritaire. C’est décidément d’un véritable dépeçage
dont il s’agit. C’est également le prolongement de toute la logique de la loi
Fillon d’orientation : l’individualisation, la contractualisation, comme
moyen de casser encore une fois tout ce qui unifie, qui soude les personnels.
Dans une telle situation on ne
peut s’étonner que l’agression d’une enseignante par un de ses élèves ait été
l’occasion pour De Robien de proposer, autre vieux rêve de l’UMP, que la police
tienne ses permanences dans les établissements scolaires (voir à ce sujet la
réaction d’enseignants dans la rubrique : On nous communique).
Et cela – comme pour le reste de
ses mesures – dans la « concertation ».
La politique des appareils syndicaux fraye la voie au
gouvernement
On l’a mentionné : après la
journée d’actions éparpillées du 4 octobre, les appareils confédéraux ont
attendu que la déroute de la grève SNCM soit totale – ce dont ils portent
l’entière responsabilité. Ensuite de quoi ils ont demandé à Villepin ce que
lui-même avait proposé dès le 6 au soir. Evidemment, les dits entretiens se
sont situés totalement sur le terrain de la poursuite de la politique
gouvernementale.
C’est dans ce cadre que peut être
comprise la succession rapprochée de journées d’actions dispersées : un
véritable travail de déminage déblayant la voie du gouvernement en vérifiant
que plus aucun obstacle ne s’y dresse.
- Le 7 novembre : journée
« d’action » de la seule CGT dans la métallurgie, à l’occasion d’une
nouvelle rencontre dans la branche entre patronat et syndicats sur la question
des classifications. Dans cette discussion, le dernier projet patronal,
présenté en septembre, « fait sauter 80 %
des acquis gagnés depuis les années soixante-dix », selon Daniel Pellet-Robert,
secrétaire fédéral de la CGT des métaux. Mais la CGT continue, comme les autres
fédérations, des discussions placées sous de tels augures !
- Le 8 novembre : EDF,
journée d’action dérisoire au vu de la trahison des agents lors de la
discussion du projet de loi Sarkozy en 2004 qui a ouvert la voie à la
privatisation, journée qui ne fera que donner plus de relief encore à la
victoire politique qu’est cette mise sur le marché pour le gouvernement.
- Le 21 novembre au soir :
SNCF. Cette journée d’action est la sixième depuis le début de l’année – après
le 4 octobre, dans certains dépôts, la grève avait été fugacement reconduite.
Mais cette fois, les principaux syndicats de conducteurs appellent à la grève
« reconductible » (les
guichetiers ayant été appelés à la grève … le 8 novembre).
Trois jours avant la grève, à
l’unisson les voilà qui déclarent:
« « La grève n’est pas
inéluctable », ont affirmé, hier, unanimes les fédérations CGT, FO, SUD et
FGAAC de cheminots qui ont déposé un préavis reconductible à compter de lundi
21 novembre 20 heures. « La direction de la SNCF peut se saisir de la réunion
bipartite prévue par le Code du travail dans le cadre d’un mouvement de grève
et qui se déroule aujourd’hui, pour ouvrir de véritables négociations. Nous étions
disponibles le week-end du 11 novembre pour négocier, nous le restons, y
compris ce week-end », a ainsi déclaré le secrétaire général de la CGT, Didier
Le Reste. »
Le week-end, la nuit… La veille de la
grève on apprend:
« Un porte-parole de la FGAAC a dit que son syndicat n'excluait
pas de lever le préavis. "Pour le moment il est maintenu, en attendant le
résultat des consultations de notre bureau fédéral, mais on ne l'exclut
pas", a-t-il dit à Reuters. »
Quant à Le Reste (CGT) il
spécifie qu’il ne veut surtout pas de la grève:
« "J'espère que la grève sera d'une durée limitée, mais tout
ne m'appartient pas", a-t-il dit. »
Il fera le maximum en ce sens. A
peine la grève engagée – et suivie malgré tout par les conducteurs bien que les
taux de participation soient plus faibles que lors des précédentes journées –
les négociations continuent sans cesse.
Dans la mesure où aucune
revendication claire et nette n’a été mise en avant, les dirigeants syndicaux
vont sortir de celles-ci en affirmant avoir obtenu ce qu’ils voulaient !
0,3% d’augmentation des salaires… pour l’essentiel et une prime de 120 euros
inférieure à ce que la direction avait budgétisé au titre de l’intéressement
avant que l’absence d’accord fasse que cette prime ne soit pas versée. La CFTC ironise sur
cette "démonstration de faiblesse":
« La grève a fait
'pschitt', la CFTC l'avait prévu", a déclaré Bernard Aubin, secrétaire
fédéral CFTC Transports. » (Reuters)
Dès le mercredi 23 « Eric Falempin,
de FO-cheminots, a annoncé pour sa part "la reprise (du travail) un peu
partout, sauf quelques dépôts à Marseille (décidément ! – Ndlr) et un dépôt sur
Reims". »
Le 24, sur France 2, Luis Gallois
se laisse aller :
« "Les syndicats ne vont pas relancer un mot d'ordre de grève
d'ici quelques temps parce qu'ils n'ont pas franchement réussi
mardi", (…) C’est une très mauvaise performance des syndicats. »
La grève de décembre sur la ligne
D du RER d’Île de France justifiera cette arrogance de la direction. Partis en
grève contre l’alourdissement considérable de leur charge de travail, les
conducteurs y ont subi un échec cuisant et pesant, vu le caractère national, de
punition exemplaire, donné à ce mouvement (depuis les tracts de la direction de
la SNCF dénonçant les cheminots jusqu’à
l’intervention de Chirac contre la grève). A noter encore une
fois durant cette grève:
« Les syndicats, qui
réclament des aménagements du temps de travail, nécessitant une hausse des
effectifs, ont affirmé avoir "revu à la baisse (leurs)
revendications". »(AFP)
- Le 23, à la RATP, la direction
CGT a lancé un appel « à se mobiliser » à l’occasion de la
tenue du comité d’entreprise qui porte sur les décrets détruisant le régime de
retraite Ratp (voir les interventions militantes dans ce numéro). Cet
appel est évidemment peu suivi, et de toute façon l’essentiel est que la
direction CGT-RATP participe à cette réunion, dernière étape de la
« concertation » à la RATP avec le Conseil d’Administration du 25. La
voie de la destruction du régime de retraite spécifique à l’entreprise est
quasi inéluctablement ouverte.
- Le 24, dans l’enseignement
secondaire, la direction du SNES appelle à la grève, seule ou presque, contre
les mesures d’application de la loi Fillon. Résultat prévisible, vu les
circonstances, et tout à fait conforme à ce qu’en attendaient les dirigeants
syndicaux, plus préoccupés par les élections professionnelles de début
décembre, et dont l’objectif n’est en rien de susciter un réel combat
d’ensemble contre l’application des décrets sur les remplacements.
- Le 29, c’est aux Finances que
se déroule une journée d’action avec manifestation centrale à Bercy, laquelle
rassemblera peu d’agents. Comme l’écrit le supplément Finances à CPS diffusé dans la manifestation :
« Les directions
fédérales conçoivent le 29 comme un moyen de pression sur le prochain CTPM du
16 décembre, et demandent « l’ouverture de réelles
négociations ».
Dans un tract du 24 novembre,
les directions fédérales CGT, FDSU et UNSA reprochent même au
gouvernement ceci : « Bercy se place donc dans une véritable logique
de confrontation et d’affrontement » … C’est le monde à
l’envers !
Ce sont précisément les
directions syndicales dont la responsabilité est d’entrer, elles, dans une
« logique d’affrontement » avec ce gouvernement ! »
Le 24 au soir:
« Bernard Thibault, le
secrétaire général de la CGT, constate jeudi l'impossibilité à l'heure actuelle
d'une "action interprofessionnelle coordonnée" devant le refus des
autres centrales, même s'il ne renonce pas à cette perspective, dans un
entretien accordé à l'AFP. »
Le gouvernement a le champ libre.
« M. de
Villepin rêve d'un pacte avec les syndicats »
Le 12 décembre, après maintes
rencontres bilatérales officielles et officieuses, Villepin se rend à Grenelle.
Le Monde titre M. de Villepin rêve d'un pacte avec les syndicats et
souligne :
« Le choix du lieu est
ainsi censée refléter l'ambition de M. de Villepin. Il veut parvenir à un
accord avec les syndicats, dont il estime qu'ils sont confrontés à la même
exigence que les politiques face aux citoyens : se fixer des objectifs et
obtenir des résultats concrets. "Les Français croient toujours à l'utilité
de leurs syndicats mais ils veulent désormais que leur action soit constructive
et qu'elle débouche sur des résultats" analyse-t-on à Matignon, (…)
M. de Villepin se
propose donc d'"aider" les organisations syndicales à présenter une
feuille de route, en ouvrant plusieurs chantiers assortis d'un calendrier de
négociation. »
Les deux principaux
« chantiers » ouverts ce jour par Villepin concernent les salaires,
d’une part, et d’autre part la création d’un nouveau « contrat », le
Contrat de Transition Professionnelle.
Concernant les salaires, alors
que le ministre Larcher annonce que les branches professionnelles ont conclu
leurs négociations, Villepin ressort des tiroirs la loi préparée par le
gouvernement précédent sur la participation, qui complète les dites
négociations de branches puisqu’une telle loi sert à aider les patrons à
refuser des augmentations de salaires pérennes pour y opposer les primes d’intéressement,
l’association capital-travail sous toutes ses formes.
Concernant les fonctionnaires,
c’est aussi le mépris : les premières « négociations » ont vu le
ministre arriver les mains vides et ne pas le cacher. Une telle outrecuidance
pousse les dirigeants des fédérations à claquer la porte… avant de renouer
immédiatement des contacts bilatéraux.
Mais la mesure la plus
importante, expérimentée dans la foulée dans 6 villes, est celle du Contrat de
transition Professionnelle. Maryse Dumas pour la CGT en dresse les
caractéristiques principales :
« - le salarié licencié signera un contrat avec un groupement
d’intérêt public (structure à créer).
- Ce groupement pourra mettre le salarié à la disposition d’entreprises
publiques ou privées où il exercera une activité.
- Le salarié aura droit à une formation.
- Il touchera « quasiment » son salaire (France Inter annonçait 80%).
- Le groupement percevra les allocations chômage à la place du salarié.
Il percevra également le prix facturé aux entreprises utilisant le salarié.
- Si cela ne suffit pas, l’Etat prendra en charge la différence. »
C’est une nouvelle attaque
sérieuse contre les garanties existant dans le droit du travail : les
chômeurs sont ainsi non seulement sortis des statistiques, mais encore et surtout
mis à la disposition de tous les employeurs qui en font la demande sans toucher
pour cela un seul centime de plus que ses allocations, captées au passage par
un nouveau groupement dit « d’intérêt public ». Un nouveau bond en
avant dans la précarité.
Il faut noter que même le
patronat a été pris de vitesse, Laurence Parisot se déclarant « choquée » de découvrir dans le
journal du matin les détails de ce nouveau « contrat » inventé pour
mettre en pièces les contrats de travail – d’autant qu’il vient s’ajouter, en
allant plus loin, au dispositif de Convention de Reclassement Personnalisé
signé par les confédérations (sauf la CGT) et le patronat au printemps dernier.
Villepin, zélote du bonapartisme qu’il est, a pratiqué en matière de
destruction des contrats de travail de la même manière qu’en instaurant l’état
d’urgence : au pas de charge.
Pour autant, l’appel au
« dialogue social » lancé une nouvelle fois
par Villepin est tout sauf formel. Une série de décisions visant à renforcer la
concertation « en amont de la décision publique », « pour
prévenir le conflit », sont mises en chantier.
Dans l’immédiat, le gouvernement
s’appuiera sur l’accord négocié par le patronat et syndicats sur les seniors –
qui crée un « contrat-vieux »
après les contrats-jeunes, CDD renouvelable jusqu’à trois ans. Villepin
a annoncé une conférence nationale sur les seniors dès février. De même,
Villepin a annoncé qu’il validerait l’accord sur l’Unedic.
Cet accord, il faut le préciser,
est un accord à double fond. Dans un
premier temps, il réduit la durée d’indemnisation des futurs chômeurs, en
changeant les filières d’indemnisation. Dans un second temps, l’accord prévoit
une « remise à plat du système » pour 2006. C’est un jalon de plus
vers la destruction de toute l’assurance-chômage, à mettre en relation avec le
nouveau « Contrat » inventé par Villepin-Borloo.
Après avoir hésité, la
confédération FO n’a pas signé cet accord, signature qu’il aurait été difficile
de faire « passer » à l’intérieur de la confédération. Elle a mis ce
refus au compte d’un non-respect de la part du Medef d’engagements pris dans la
nuit sur la taxation du travail précaire.
Mais cette non-signature (celle
sur les seniors étant toujours en suspens) ne doit pas masquer le cours
politique suivi par Mailly, comme en témoigne cette réponse à une question du Figaro du 30 décembre :
« Ce refus de signer vous éloigne du champ du dialogue dans lequel
vous vouliez replacer FO. »
Réponse de Mailly :
« Mais nous avons
négocié! (…) Nous n'étions pas là pour faire de la surenchère (…) C'est nous
qui avons fait toutes les propositions, notamment en ouvrant la discussion sur
les filières. J'appelle ça du dialogue et de la négociation. »
C’est donc la délégation FO qui a
proposé l’idée de réaménager les filières d’indemnisation, idée qui a abouti
sur la diminution de la durée d’indemnisation.
Conférence nationale des finances publiques : une
échéance d’importance
Deux jours après avoir fixé un
cap aux directions syndicales réunies rue de Grenelle, Villepin est intervenu à
la télévision et y a annoncé une autre initiative plus rapprochée encore à
laquelle il compte associer les directions syndicales : une conférence
nationale des finances publiques, pour fin janvier.
Le gouvernement avait
préalablement organisé, notamment par la voix de Thierry Breton, un plan de
communication catastrophiste sur l’ampleur de la dette française dont on
découvrirait d’un coup qu’elle serait ingérable (cette dette rappelons-le
dépasse les 60% du PIB, du même ordre de grandeur que les Etats-Unis ou
l’Allemagne, nettement moins que l’Italie – 109% de son P .I.B. – sans
parler du Japon, deuxième puissance économique mondiale, qui culmine à 175% de
son P.I.B. – selon le Fmi).
A l’appui de ces propos, le
rapport commandité au sieur Pébereau, remis le 14 décembre. Inutile de
détailler exagérément ses propositions : couper brutalement dans les
dépenses pour revenir à l’équilibre et, notamment, réaliser la « réforme
de l’Etat » en profitant des départs massifs en retraite.
Les « contraintes européennes »
ont été mises en avant par Villepin. N’y croiront que ceux qui le veulent bien.
En réalité, la question de la dette est saisie par le gouvernement vu les
circonstances politiques favorables comme un levier de la « réforme de
l’Etat », précisément l’année où la « Lolf »
entre en application. Or rappelons-le, la logique de la « Lolf » est en fin de compte d’appliquer aux dépenses
publiques les critères d’évaluations des entreprises privées, de la
concurrence.
Le Figaro paru le jour de la
sortie du rapport Pébereau reprenait l’exemple instructif du Canada, loué pour
avoir en quelques années diminué sa dette.
Sous le titre : « La recette du Canada : supprimer un poste de
fonctionnaire sur cinq », ce quotidien soulignait
« Cette réforme de l'État canadien a débuté avec une «revue de
programme» qui a permis d'évaluer tous les grands projets et services du
gouvernement au sein de chaque ministère (…) Dans un certain nombre de cas, le
gouvernement a estimé qu'il n'avait plus à prendre en charge les services qui
pouvaient être assurés par le secteur privé. »
Soulignant au passage qu’ « une
partie des excédents budgétaires dégagés depuis 1997 ont été réinvestis dans la
défense et la sécurité » (ce n’est pas la rigueur pour tout le monde),
Le Figaro conclut :
« Dans un souci de plus
grande rigueur financière, la nouvelle présentation du budget français (Lolf) s'inspire de l'exemple d'Ottawa puisque les dépenses
ne sont plus affectées par ministère mais par «mission». »
Il s’agit bien pour le
gouvernement au moyen de la dette de porter des coups brutaux aux
fonctionnaires. Dès le 27 octobre, dans son point de presse mensuel, Villepin
avait ouvert ce « chantier » :
« extension des horaires d’ouverture, allongement du temps de
travail, casse des corps statutaires sous prétexte de « mobilité »,
substitution de primes d’intéressement et de productivité aux augmentations
générales de salaires, et dans ce sens faire noter les agents par les
« usagers »… » (supplément Finances à CPS
du 26 novembre).
C’est en application d’une telle
orientation que Yvon Jacob, le ministre de la fonction publique, s’est autorisé
de recevoir les fédérations de fonctionnaires le 6 décembre pour … ne rien leur
proposer du tout en matière d’augmentation salariale, sinon, évidemment trouver
des mécanismes pour en finir avec les augmentations générales du point
d’indice. Au terme de cette réunion, le ministre commentait, serein :
« «Personne n'a claqué la
porte. Maintenant, on va se revoir en bilatérales »
Voilà la politique à laquelle la
« conférence nationale sur les finances publiques » veut associer,
voire ligoter, les organisations syndicales, au nom de la dette.
Aussi est-il nécessaire
d’intervenir contre toute participation des directions confédérales ou des
fédérations à cette conférence.
C’est aussi l’occasion de
souligner que la « dette publique » ne vient pas de ce qu’il y aurait
trop d’enseignants, d’infirmières, ou d’agents dans les ministères. Elle est le
produit cumulé d’années et d’années d’exonérations de charges sociales, de
baisse des impôts aussi, qui ont bénéficié aux plus
grands exploiteurs et aux plus grandes fortunes de ce pays.
La dette publique provient aussi
d’années de dépenses militaires exorbitantes, dont en particulier la récente
loi de programmation. Il devrait aller de soi pour tout dirigeant d’une
organisation syndicale ouvrière que cette dette n’est pas celle des
travailleurs, et que ce n’est pas aux travailleurs et à la jeunesse de payer
pour la gabegie des bourgeois, ce n’est pas au prolétariat de payer somme toute
une deuxième fois l’argent qui a déjà été détourné par les gouvernements
successifs au compte des plus gros groupes capitalistes à commencer par ceux du
secteur de l’armement. On peut encore
ajouter que les intérêts de la dette alimentent les parasites de la finance et
de la spéculation boursière, les grands groupes financiers.
Tout cela met en évidence à quel
point il est scandaleux de la part du gouvernement Chirac-Villepin-Sarkozy,
lui qui s’est particulièrement distingué dans les exonérations de charges, dans
les baisses d’impôts pour les plus riches et
dans les dépenses militaires, d’utiliser la question de sa dette pour
tenter d’associer les directions d’organisations syndicales à la « réforme
de l’Etat » et à de nouvelles coupes budgétaires, etc.
La responsabilité des directions syndicales, c’est de boycotter cette
« conférence ».
Pour enrayer l’offensive du gouvernement et du
patronat,
militer pour briser la politique de collaboration avec
lui menée par les bureaucraties syndicales
« Nous allons accélérer » a promis Chirac lors de ses vœux du 31
décembre, placés sous le signe du « patriotisme ».
Il a ajouté aux axes de combat mentionnés jusqu’ici celui d’une
« réforme » des cotisations sociales aboutissant bien entendu à
alléger le « coût du travail », proposition encore vague mais
pourtant accueillie avec « intérêt » par les dirigeants CGT comme FO.
Au terme de cet éditorial, on ne peut être surpris d’une telle tonalité.
La situation politique pour les
travailleurs, la jeunesse, n’a pas à être embellie. Selon Le Monde, en 2004, le nombre de jours de grèves était tellement bas
qu’il faudrait remonter à la fin du 19ème siècle pour trouver des
comparaisons. Certes, l’année 2004 fut dominée par les conséquences immédiates
de la défaite de 2003 sur les retraites, et il se peut que pour 2005 les choses
soient légèrement différentes, notamment au vu des grèves du premier semestre
sur les questions salariales.
Mais les modifications négatives
intervenues dans les rapports entre les classes depuis l’annihilation des
conséquences du référendum sur le plan intérieur pour la bourgeoisie française
ne peuvent être niées. Les coups portés aux travailleurs des transports,
notamment, eux qui avec les enseignants furent ces dernières décennies à la
pointe des combats menés contre les gouvernements de la 5ème
république, doivent être appréciés. Ainsi, à la RATP, il faut constater que
sauf évènement imprévu la destruction du régime particulier des retraites sera
passée sans même croiser en chemin une réelle journée de grève.
Pour autant, tout ce qui précède,
ainsi que les interventions militantes qui suivent cet éditorial, montre avec
netteté que la possibilité demeure que le prolétariat intervienne et combatte
sur son propre terrain.
Aujourd’hui, des tractations au
sommet ont commencé entre les partenaires de l’ex- « gauche
plurielle » flanqués par moment de la LCR pour discuter des élections de
2007 et d’éventuelles alliances de gouvernement.
Tout le PS, après avoir réalisé
la synthèse derrière la direction qui a appelé à voter « oui » à
Chirac le 29 mai dernier, est orienté sur cette perspective. Les
« forums » lancés par le PCF pour
associer autour de lui le prétendu
« formidable mouvement du non de gauche » s’avèrent être une
nouvelle déconfiture – mais indiquent le même objectif que le PS, à savoir
préparer les élections de 2007.
Mais pour les travailleurs, il ne
peut s’agir aujourd’hui de se résigner à n’avoir d’autre horizon que les
élections présidentielles et législatives de 2007. Des échéances pressantes et
menaçantes sont à l’ordre du jour dès cette année, et tout faire pour enrayer
l’offensive du gouvernement UMP Chirac-Villepin-Sarkozy
est la seule orientation possible, et c’est d’ailleurs sur celle-ci que les
élections de 2007 pourraient se charger d’un contenu positif pour le
prolétariat.
Le présent éditorial a donné les
grandes lignes de l’offensive gouvernementale et patronale. Il a aussi montré
que les mettre en échec exigera le combat pour en finir avec l’association
étroite des directions syndicales, et sur leur plan du PS et du PCF, à la
politique ultra-réactionnaire que développe le gouvernement.
En ce sens il faut accorder une
certaine importance à ce qui s’est déroulé en Grande-Bretagne à l’automne.
Confrontés à une contre-réforme des retraites pour le secteur public devant
faire passer l’âge de la retraite de 60 à 65 ans, « les treize syndicats concernés, qui représentent 3 millions de salariés
du public, promettaient une grève d'une ampleur comparable à la grève générale
de 1926. Leur menace a payé » selon Le Monde du 19 octobre.
Certes, si le gouvernement Blair
a renoncé à son projet, ce n’est pas sur sa totalité ni pour toujours, et les
situations politiques ne sont pas comparables (cf. le précédent numéro de CPS); néanmoins, c’est une
confirmation : en dressant face au gouvernement à la solde du capital le
front uni des organisations ouvrières pour le combattre et le vaincre, il est
possible d’enrayer son offensive.
Telle est décidément, en France,
la tâche de l’heure, dans laquelle s’inscrivent les interventions communiquées
ci après, et à laquelle Combattre pour le
Socialisme appelle à s’atteler. C’est dans ce combat que peuvent se réunir
les conditions de la construction du parti révolutionnaire qui manque aux travailleurs
et jeunes.