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interview parue dans Cps n°37 de mai 2009

Compte-rendu du congrès national de l'UNEF par deux étudiants

Le congrès national de l'UNEF s'est tenu à Marseille du 23 au 26 avril 2009, dans une situation où la politique des directions syndicales avait d'ores et déjà largement concouru à conduire le mouvement des universités vers la défaite (publication le 25 des décrets sur les statuts des enseignants-chercheurs).

La responsabilité des dirigeants du syndicat restait néanmoins engagée sur la question de la pseudo- « masterisation », dont la direction du syndicat n'a cessé de discuter avec le gouvernement, sans en exiger le retrait. Mais ce congrès a au contraire été l'occasion... d'envoyer au gouvernement un feu vert pour amplifier son offensive.
CPS rend compte du déroulement de ce congrès tel que l'ont vu deux participants issus des AGE de Paris V et de Clermont-Ferrand.

Sous quels auspices s'est ouvert le congrès national de l'UNEF?

Le congrès a été ouvert par un discours de Jean-Baptiste Prévost qui a eu pour particularité de ne pas souffler mot de la participation du syndicat à la mise en œuvre de la « réforme » des concours.
L'exigence du retrait de cette « réforme », exprimée dans les AG, restera un grand tabou de ce congrès, qu'aucune des trois tendances représentées dans le syndicat n'a remis en cause.
En lieu et place d'un appel au combat le gouvernement et sa politique, Prévost a conclu son allocution par un « appel au président de la République » lui enjoignant de « changer de politique sociale et éducative ». Alors que la direction de l'UNEF poursuivait le « dialogue social » avec le gouvernement, il fallait y entendre l'assurance que le syndicat ne dresserait pas les étudiants contre lui.

Mais cette première journée a surtout été marquée par la venue de Martin Hirsch, haut commissaire du gouvernement aux « solidarités actives » et à la jeunesse, qui dans une table ronde aux côtés de représentants politiques du NPA, du PS, du PC... et du Modem, a « expliqué » son plan pour l’emploi des jeunes (voir l'éditorial de ce numéro, ndlr).
Dans les coulisses, nous avons essayé d’expliquer qu’il fallait empêcher Hirsch de parler... Mais les dirigeants de la TUUD (tendance dirigée par les militants du NPA et de l'Union des Etudiants Communistes, ndlr) ont, eux, décidé de « quitter la salle »… Ce qui revenait à déserter le congrès, pour laisser le champ libre au gouvernement.

Dans les faits l'allocution de Hirsch a eu lieu sans accroc : la TUUD est sortie par la porte d’entrée, pas une autre, la plupart de la centaine de délégués se sont levés en silence... Nous avons lancé un mot d’ordre: « Hirsch dégage », expliqué que ce n'était pas à nous de quitter la salle mais à Hirsch de partir. D’autres délégués ont scandé: « C’est pas les immigrés, c’est Hirsch qu’il faut virer »... mais tout le monde sortira. Des dirigeants de la TUUD nous ont même sommés d’arrêter de crier ! Quant à Hirsch, triomphant, il a nargué les délégués sortants en leur lançant : « Vous êtes des lâches ».

Une fois sortie du congrès, la TUUD a décidé d'organiser une réunion de tendance : tout le monde voulait discuter de ce qui venait de se passer... mais pas du tout! Les dirigeants ont dévoilé leur ordre du jour : pas un mot sur la sortie de la salle. La réunion s'est donc tenue autour des scores des congrès locaux.
Dans ces conditions, Hirsch a pu présenter son plan un l'auditoire poli. Quelques jours plus tard, c'est Sarkozy en personne qui a annoncé la mise en œuvre de son plan.
Il est évident que le congrès de l'UNEF a constitué un test décisif: Hirsch et Sarkozy ont reçu un véritable feu vert de la part de la direction de l'UNEF... avec l'assentiment des militants du NPA.

Le congrès avait lieu alors que les universités étaient secouées par un mouvement de grève très profond depuis trois mois. Comment cette situation s'est-elle reflétée au sein du congrès ?

 Pas plus que lors du discours d'ouverture de Prévost, la discussion du rapport d’activité de l’UNEF ne s'est fait l'écho du mouvement. Le leitmotiv commun à tous a été : il faut se mobiliser... pour que nos revendications soient entendues auprès du gouvernement. Les intervenants avaient été répartis par avance entre les dirigeants des trois tendances et il fallait passer par ces derniers pour être autorisé à s'exprimer... La « synthèse » était en quelque sorte effectuée avant même l'ouverture du congrès.
La tonalité a été presque identique lors du débat d'orientation, à l'exception d'un délégué de Clermont-Ferrand qui, seul de tout le congrès, a défendu la perspective du combat contre le gouvernement, de la rupture du « dialogue social ». Il a été vivement applaudi... mais le texte allant dans ce sens n'a pas été soumis au vote.

Les débats sur l'activité et l'orientation n'ont d'ailleurs occupé qu'une faible partie des travaux du congrès. La majeure partie du temps a été consacrée, outre les discours des dirigeants CGT, FO et FSU, à des « ateliers de travail ».

Quels étaient les sujets de ces ateliers et comment se sont-ils déroulés ?

Un certain nombre d'ateliers étaient consacrés à l'étude des contre-réformes gouvernementales : « plan licence », « réforme » des concours enseignants, « réforme » des lycées. Les délégués ont été invités à y écouter des intervenants issus d'associations, de syndicats... mais aussi de représentants du gouvernement, invités à animer les « ateliers » centrés sur leurs propres « réformes ».Bernard Dizambourg, président du comité de suivi du « plan licence » de Pécresse, a ainsi présidé l'atelier sur la « réforme des premiers cycles ». Pire encore: Richard Descoings, nommé par Sarkozy pour relancer la « réforme » des lycées, combattue par les lycéens et les enseignants, était l'invité-vedette de l'atelier consacré ce sujet.

L'atelier sur la « réforme » de la formation des enseignants était lui animé par Claudie Martens, du SNES-FSU, et par Christian Chevalier du SE-UNSA. Les représentants syndicaux ont martelé qu'il y avait accord pour une réforme, même si la réforme actuelle « n’était pas bonne ». L’UNSA nous a appris que 12 commissions allaient avoir lieu pour en discuter... Nous sommes intervenus sur le fait que le SNES, la FSU et l’UNEF ne devaient pas se rendre à ces commissions et se prononcer pour le retrait définitif de la « réforme ». Les intervenants de la TUUD ont, eux, expliqué que, si cette réforme n’était pas la bonne, il en fallait une, quand bien même le niveau licence devait être maintenu. Là encore, leur ligne de conduite a été d'éviter la rupture avec l'appareil de l'UNEF, alors que les étudiants réclamaient le retrait de la « réforme » dans toutes les AG.
C'est donc contre nous et contre ces derniers que l'atelier a effectué sa « synthèse ».

Tous les délégués de Clermont-Ferrand étaient avec nous lors de la commission présidée par Descoings, ainsi que d'autres délégués que nous avions convaincus d'interdire son intervention. Il a ainsi été accueilli au cri de « Descoings dehors! » et « Retrait de la réforme des lycées! ».
Un dirigeant de l'UNEF nous a alors invités à quitter les lieux... ce que nous n'avons pas accepté. Le service d'ordre de l'UNEF a dû entrer en action pour assurer la protection de Descoings. J.B. Prevost, le dirigeant national, lui a présenté ses excuses. Les dirigeants de l'UNEF ont protégé l'envoyé du gouvernement ! Mais malgré cette protection, et le fait que deux dirigeants de la TUUD aient cherché à engager le « dialogue » avec Descoings, seule une poignée d'interventions, de courte durée, a pu avoir lieu.

Comment les dirigeants de la TUUD , du NPA, se sont-ils positionnés par rapport à votre intervention?

 A partir du moment où la venue de Descoings n'a pas pu se tenir dans les conditions voulues par la direction de l'UNEF, leur ton à notre égard a changé. En réunion de tendance, un dirigeant a tenté de dénoncer notre attitude... il s'est retrouvé isolé.  Dans leur majorité, les militants de la TUUD ont considéré que c’était ce qu’il fallait faire. Ils en ont déduit qu’il aurait fallu rester dans la salle quand Hirsch est intervenu. Mais les dirigeants de la TUUD ne l'ont pas entendu pas de cette oreille.
Le lendemain, il y a eu des consignes claires : le service d’ordre s'est resserré autour de nous et des camarades de Clermont. Et lors des réunions qui ont suivi, il n'a plus été question de soumettre au vote le texte de l'AGE de Clermont demandant la rupture du « dialogue social », le retrait des contre-réformes et l'appel à un front uni contre Sarkozy...
Il est clair que, pour la direction de la TUUD, la ligne de rupture avec les dirigeants de l'UNEF, pour que l'UNEF engage le combat effectif contre le gouvernement et ses « réformes », est une ligne rouge qu'il est hors de question de franchir. Un fait significatif : alors que la « majorité nationale » a repris le contrôle de deux AGE de façon très contestable, les dirigeants de la TUUD ont négocié leur capitulation... en échange de quelques postes au Bureau National.

Quel bilan tirez-vous de ce congrès ?

Ce congrès a permis à la direction de l'UNEF de tourner définitivement le dos aux revendications exprimées par les étudiants pendant la mobilisation des universités. Il a également constitué un feu vert envoyé au gouvernement pour la poursuite des contre-réformes.
 La direction de l'UNEF est clairement apparue comme le garde du corps du gouvernement – littéralement quand il s'est agi de protéger Descoings. Ils affirmaient dans leurs interventions : « Il faut que l’on soit un mur face à ce gouvernement »... Oui ils sont un mur : un rempart pour le gouvernement, un mur entre le gouvernement et la jeunesse, un mur à faire péter.

En définitive, la direction de l'UNEF n'a pas été inquiétée lors de ce congrès – notamment en raison de l'attitude des dirigeants de la TUUD.

Mais nous retirons de notre combat l'idée qu'il est indispensable de construire une force organisée, nationale chez les étudiants, pour imposer que l'UNEF reprenne à son compte les revendications des étudiants et rompe avec ce gouvernement.

 

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