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CPS n°43 - 11 mai 2011  

NOTES ÉDITORIALES

Après la chute de Ben Ali et de Mubarak,
les puissances impérialistes s’affairent à colmater la brèche ouverte dans leur domination


L’irruption révolutionnaire des masses qui a bouté hors du pouvoir Ben Ali puis Moubarak n’a pu à cette étape liquider l’appareil d’Etat au sommet duquel trônaient les dictateurs. L’armée conserve les rênes du pouvoir en Egypte (voir article dans ce numéro), et s’est engagée dans une entreprise de rétablissement de l’ordre, appuyée sur le succès du referendum introduisant quelques modifications mineures dans la Constitution de Mubarak, c’est-à-dire la préservant. En Tunisie, les masses n’ont contraint Ghannouchi à la démission que pour voir lui succéder Beji Caid Essebsi, un vieux cacique du Parti Destour, ancien ministre de Bourguiba. Une « haute instance de réalisation des objectifs de la révolution » prépare des élections à une « Constituante » octroyée visant à assurer une « transition démocratique » ne touchant en rien à la domination impérialiste, mais donnant au contraire toute garantie aux « investisseurs ». Peut-on dès lors conclure à la stabilisation de la situation au profit de l’impérialisme?
Mais la « stabilisation » est en réalité bien incertaine. Les masses ne sont pas entrées en mouvement pour accepter que soit rétablie la servitude antérieure rebadigeonnée d’un vernis « démocratique » : les grèves se multiplient en Tunisie et en Egypte, pour des augmentations de salaire, pour la liquidation des dispositions esclavagistes des anciens « codes du travail ». Elles exigent même en Egypte l’annulation des privatisations d’entreprises décidées par Mubarak. L’exigence de l’« épuration » de l’appareil policier, de celui du parti unique est massive (cf. article Egypte). Les masses sont certes confrontées à leurs limites politiques, et d’abord à l’absence de partis révolutionnaires. Mais elles n’ont pas été défaites.

Et puis dans les autres pays, la mobilisation pour en finir avec les régimes militaro‑policiers ne faiblit pas. C’est le cas en Syrie malgré la répression sanguinaire d’Al-Assad. Au Maroc, malgré la volonté des dirigeants – islamistes ou de la mouvance maoïste – de maintenir la mobilisation dans un cadre compatible avec le maintien de la monarchie, c’est bien celle-ci qui est menacée par les manifestants s’en prenant aux locaux du parti de Mohammed VI. En Algérie, si les manifestations initiées par le RCD ont été limitées, c’est surtout la défiance des travailleurs et jeunes algériens envers ce parti – historiquement complice du régime et soumis à l’impérialisme – qui l’explique. Par ailleurs, malgré les annonces bidon de Bouteflika sur la « levée de l’état d’urgence » et des réformes constitutionnelles, agrémentée de quelques distributions de menue monnaie de la manne pétrolière, les manifestations succèdent aux manifestations, les grèves aux grèves confrontées à la police du régime : étudiants, enseignants, jeunes se révoltant contre les conditions de logements, chômeurs etc.

Et c’est bien parce que la situation n’est pas « stabilisée » que les puissances impérialistes ont décidé d’intervenir en Libye.

Libye : sous le maquillage « humanitaire », une intervention impérialiste


Il y a eu hésitation. L’impérialisme allemand a jusqu’au bout refusé de s’associer, s’abstenant sur la résolution de l’ONU, et manifestant à nouveau à quel point l’« Union » européenne n’en est pas une. L’impérialisme US, lui, était pour sous la simple condition que les autres (La France, la Grande Bretagne) fassent l’essentiel du travail. Mais laisser faire Kadhafi en Libye risquait fort de provoquer en Egypte, en Tunisie, mais aussi en Algérie, au Maroc des conséquences immaîtrisables.

Il fallait pour les puissances impérialistes montrer par la force aux yeux des masses du Maghreb et du Moyen Orient leur volonté de reprendre les choses en main. Par ailleurs, à l’inverse de l’Egypte et de la Tunisie, le prolétariat est absent de la révolte libyenne. Sans doute, au point de départ, le mouvement de la jeunesse libyenne contre le dictateur participait du mouvement général de révolte contre les tyrans du Maghreb et du Moyen Orient. Mais très vite, il s’est trouvé sous la direction d’un « Conseil National de transition » dirigé par les anciens ministres et tortionnaires de Kadhafi ayant tourné casaque, et par des agents directs de l’impérialisme, débarqués en toute hâte à Benghazi des Etats Unis et d’Europe. Les « révolutionnaires » ou baptisés tels ne font donc courir aucun risque à l’impérialisme, et en particulier à la possibilité pour celui-ci de piller sans vergogne les ressources pétrolières du pays.
Dans le déclenchement de l’intervention, Sarkozy a joué le rôle du boute feu. Il reconnaît immédiatement le « Conseil National de Transition » quand les autres sont plus prudents. Accompagné de Bernard Henry Levy, clown « philosophe » chargé des moulinets « humanitaires », il promet que la France ira seule, s’il le faut. Lorsqu’il obtient l’aval de l’ONU, il revendique haut et fort la direction des opérations. Las ! Le costume de chef de file de l’intervention impérialiste est un peu grand pour lui, et pour la France, puissance impérialiste de troisième ordre. Il faudra qu’il s’avale la direction de l’OTAN, en maugréant sur sa « mollesse ». Les raisons de Sarkozy sont faciles à comprendre.

Après l’orientation désastreuse pour les intérêts français adoptée en Tunisie, il faut essayer de rétablir la situation de l’impérialisme français en Afrique du Nord, terre historique de sa domination.
Chaque jour qui passe donne pourtant raison à ceux qui, au sein des puissances impérialistes, prônaient la prudence. Chasser Kadhafi réclamerait autre chose que des bombardements, d’autant que l’armée des « révolutionnaires » n’a pas tardé à montrer son insigne faiblesse. Il faudrait une intervention massive au sol, une véritable armée d’occupation. Déjà, la France et la Grande Bretagne envoient des « experts » chargés d’encadrer les insurgés. Mais dans le même temps, Rasmussen, le chef de l’OTAN ne cesse de répéter qu’il n’y a pas de solution militaire mais seulement politique ; bref qu’il faut trouver un accord sous une forme ou sous une autre avec Kadhafi. La vérité est que la situation devient de jour en jour plus inextricable.

Une intervention impérialiste permise et protégée en France par l’union nationale


Mais si Sarkozy a eu, et continue à avoir maille à partir avec les autres dirigeants impérialistes, il a par contre bénéficié en France d’une véritable union nationale. Le PS, Mélenchon, le PCF dans un langage à peine différent, les directions syndicales par leur silence assourdissant : tous ont contribué activement à rendre possible cette intervention. Ayrault pour le PS « salue l’engagement français ». Mélenchon la soutient bruyamment puisque, dit il, « les intérêts de mon pays et de la révolution coïncident ». Le PCF au Parlement par la bouche de Roland Muzeau prétendait se tenir en dehors de l’unanimisme dans le soutien à l’intervention. Mais dans le même temps il demandait qu’on s’en tienne à la résolution 1973 de l’ONU. Cela ne devrait pas gêner beaucoup Sarkozy puisque celle-ci autorise l’utilisation de « tous les moyens pour protéger les populations civiles » (bien sûr !). Et à l’extrême gauche de l’union nationale, le comité exécutif du NPA signait l’« Appel pour une intervention solidaire de l’Union Européenne en Méditerranée » qui pressait alors l’Union européenne d’intervenir . Et si le POI (parti ouvrier indépendant) fait exception, c’est à l’usage exclusif des lecteurs de son journal Informations Ouvrières. Car dans les syndicats – où les militants du POI occupent parfois des positions importantes, ceux‑ci respectent scrupuleusement la loi du silence imposée par les appareils.

Loi du silence dont témoigne par exemple l’appel commun au 1er Mai signé par l’ensemble des organisations syndicales sauf FO – qui ne se distingue en rien des autres sur cette question :
« Les organisations CFDT – CGT-FSU- Solidaires – UNSA expriment leur soutien aux peuples des pays arabes qui se soulèvent pour la dignité et la liberté. ». Pendant ce temps, l’aviation française bombarde. Mais apparemment, les directions syndicales ne se sentent pas concernées et regardent ailleurs. Silence complice…


Côte d’Ivoire : l’armée française installe Ouattara


Même silence complice des directions syndicales sur la Côte d’Ivoire. Car dans le même temps, l’armée française intervient aussi en Côte d’ivoire pour les mêmes intérêts. On ne saurait par parenthèse oublier non plus la présence en Afghanistan, avec son cortège de violence et de barbarie contre la population au moment où se multiplient les manifestations pour le départ des troupes d’occupation.
Si l’on en revient à la Côte d’Ivoire, il est vrai que formellement le PCF a demandé « l’arrêt immédiat de l’intervention militaire », sans toutefois demander le retrait de la Licorne de Côte d’Ivoire. Mais il faut ajouter qu’il lui a opposé la convocation du Conseil de Sécurité de l’ONU ; alors même que l’ONU, cette « caverne de brigands » pour reprendre la formule qu’employait Lénine à propos de la Société des Nations, a donné au gouvernement français tous les mandats qu’il voulait pour intervenir.

L’ONU : c’est encore la bannière dont se réclame la direction du PS qui avec une parfaite hypocrisie, soutenait l’intervention de la Licorne… à condition que celle-ci n’installe pas directement Ouattara. Mais par une mise en scène qui n’abusait que ceux qui voulaient l’être, après que l’armée française a eu bombardé massivement les positions de Gbagbo et mis ce dernier hors d’état de résister, elle a laissé les troupes d’Ouattara arrêter elles même Gbagbo.
Du reste, le gouvernement français lui-même ne fait même pas semblant de croire à sa propre mise en scène. « Nous sommes intervenus pour rétablir la démocratie » déclare Juppé. « Dans la mesure où il s’agit de défendre la démocratie, nous ne pouvons que l’approuver » déclare Aubry en écho.
La démocratie ? Qui ne voit que les élections présidentielles en Côte d’Ivoire dans un pays divisé en deux parties contrôlées par des forces ennemies, et où dans chacune des parties, chacun des candidats rafle la quasi unanimité des « suffrages » sont une pure mascarade ?

Et d’ailleurs depuis quand l’impérialisme français se soucie de « démocratie » en Françafrique, alors que depuis des décennies au Togo, au Gabon, au Cameroun, au Tchad, au Burkina etc. les gouvernements français ont toujours soutenu sans sourciller des tyrans, pour peu que ceux-ci soient compréhensifs envers les intérêts des grands groupes capitalistes français qui pillent leur pays !
La raison qui a conduit la France à lâcher Gbagbo, après des années de fructueuse collaboration – fructueuse pour Bouygues, Bolloré et consorts – n’a rien à voir avec le fait que Gbagbo soit un tyran sanguinaire . Le choix d’Ouattara, dont les hommes de main n’ont rien à envier à ceux de Gbagbo en termes de massacres des populations (des centaines d’assassinats à Duekoué sur la simple base de l’appartenance à l’ethnie Guéré), s’explique par le simple fait qu’Ouattara aujourd’hui, à l’inverse de Gbagbo, donne toute garantie à l’impérialisme français. Son passé témoigne pour lui. Le Monde du 13 avril explique ainsi l’« amitié » de Sarkozy et d’Ouattara : « L’histoire de cette amitié commence en 1990. M.Ouattara (…) négocie la privatisation de la gestion de l’eau et de l’électricité en Côte d’Ivoire. Il choisit d’en confier la concession pour quinze ans à Martin Bouygues, ami intime de Nicolas Sarkozy, avocat d’affaires… En 1993, M .Ouattara, chef du gouvernement ivoirien aide son homologue français Edouard Balladur, dont M. Sarkozy est le ministre du budget à procéder à la douloureuse dévaluation du franc CFA. ».
Quant à Gbagbo, c’est une tribune libre du Monde du 16 avril qui nous livre une part des motifs de sa disgrâce (Wilson Saintelmy . Derrière l’ingérence, la rivalité avec Pékin) : « Il s’agissait pour M.Gbagbo d’affranchir son pays de sa dépendance systémique historique envers la France. Il s’est alors tourné vers la Chine. En moins d’une décennie, le volume des échanges entre la Côte d’Ivoire et la Chine explose. D’une cinquantaine de millions d’euros en 2002, il oscille autour du demi milliard d’euros en 2009 ». Et de conclure à « l’instrumentalisation du droit d’ingérence humanitaire par la géopolitique française… pour mieux camoufler ses intérêts géopolitiques. »

Autrement dit, l’impérialisme français défend en Côte d’Ivoire son « pré carré » : c’est aussi simple que cela !
L’alignement honteux des dirigeants du mouvement ouvrier sur les intérêts de l’impérialisme français explique qu’ils se partagent entre silence et approbation. Il impose à contrario à quiconque se prétend attaché aux intérêts ouvriers un combat intransigeant pour la rupture de l’union nationale, pour le retrait immédiat et sans condition des troupes françaises. C’est le combat qu’ont mené à la mesure de leurs forces les militants du Groupe regroupés autour de « Combattre Pour le Socialisme ». Pour la même raison, nous publions aussi dans ce bulletin toute position allant dans ce sens quelles qu’en soient les initiateurs.


Pourrissement accéléré du mode de production capitaliste


Les interventions militaires et guerres impérialistes accompagnent aujourd’hui inévitablement le pourrissement accéléré du mode de production capitaliste. De ce pourrissement accéléré, la catastrophe qui s’est abattue sur le Japon a donné un aperçu effroyable et saisissant. Car si sans doute, le capitalisme n’est pas la cause du tremblement de terre et du tsunami eux même, il en a décuplé les conséquences. L’article publié dans ce CPS montre à l’évidence comment la TEPCO, en osmose avec le gouvernement japonais ont délibérément sacrifié la sécurité et la vie de dizaines de milliers d’êtres humains sur l’autel du profit. Et après avoir envoyé à une mort probable des dizaines de « liquidateurs » pour une poignée de yens, ils annoncent une baisse de 20 % des salaires des travailleurs de l’entreprise pour éponger les frais occasionnés par la catastrophe. Il ne s’agit pas de telle ou telle firme qui par exception sacrifierait avec cynisme la vie de centaines de milliers d’être humains au profit. Ce qui se passe avec la TEPCO reproduit à une échelle plus large ce qui s’était passé avec BP et l’« accident » du forage en eau profonde dans le Golfe du Mexique. Ce n’est que la conséquence particulière de l’application de la loi d’airain du système capitaliste : celle du profit maximum.

Il faut ajouter que, par certains aspects, les épouvantables destructions, résultat du tremblement de terre, sont une bonne nouvelle pour les capitalistes. Elles offrent comme l’a dit délicatement Warren Buffet à la tête d’un des plus grands fonds d’investissement « de bonnes opportunités ». La reconstruction ouvre la perspective de profits juteux. Mais dans le même temps, elle ne peut être financée que par une nouvelle augmentation de la dette qui atteint déjà le sommet vertigineux de 200 % du PIB. Le gouvernement japonais s’apprête à faire payer le prolétariat du pays.
La catastrophe japonaise va au delà même du Japon constituer un accélérateur de la crise. D’ores et déjà, elle a pour effet de paralyser en partie la production automobile à l’échelle mondiale. Mais c’est aujourd’hui au cœur même de la citadelle impérialiste, aux Etats Unis, que les montagnes de dettes accumulées menacent l’ensemble du système d’une catastrophe majeure.

Par leur endettement, les Etats Unis peuvent être mis dans la même catégorie que la Grèce, l’Irlande, ou le Portugal. Le déficit y est d’ailleurs à quelques décimales près le même que celui de la Grèce. Il dépasse les 10 % du PIB. Il n’a pourtant pas les mêmes conséquences en terme de taux d’intérêts des bons du Trésor US, qui demeurent, même s’ils tendent à monter, plus de quatre fois moins élevés que les taux grecs (qui, il est vrai, atteignent 15 % !). Dans La Tribune, Marc Fiorentino explique par quel tour de passe passe : « La FED est venue prêter au Trésor américain… Mais la FED et le Trésor, c’est pareil ! C’est de l’argent qui sort d’une poche pour entrer dans l’autre, avec deux poches qui, aujourd’hui, sont percées. On a appris cette semaine, sans surprise, mais tout de même avec effroi, que la FED était passée devant la Chine et était devenu le plus gros détenteur d’emprunts d’Etat américains ! »
La FED achète des bons du trésor… en faisant tourner la planche à billets. Mais –nous renvoyons au CPS n° 42 – ce n’est pas sans conséquences : afflux de liquidités, baisse relative du dollar par rapport au yen et à l’euro, spéculation effrénée sur le pétrole, les matières premières, les produits alimentaires, famines et inflation. En Chine cette dernière atteint 5,4 % en un an, avec une augmentation de plus de 11 % en un an sur les produits alimentaires. C’est une menace immédiate contre la survie des masses chinoises. Mais c’est aussi une menace contre l’appareil d’Etat vertébré par le PC Chinois qui craint comme la peste le vigoureux prolétariat chinois qui, malgré la répression contre toute tentative d’organisation, a souvent arraché des augmentations de salaires significatives.


« Il est temps de se rendre à l’évidence : La Grèce ne paiera pas » (Éditorial des Echos du 18 avril)


C’est donc bien peu dire que de dire comme le dit Strauss Khan que « la crise n’est pas finie». La vérité est qu’elle s’approfondit. Elle s’approfondit aussi en Europe avec des conséquences majeures pour le capitalisme français. Les plans d’austérité en Grèce, au Portugal, en Espagne ont pour le commerce extérieur français des conséquences désastreuses. La surévaluation de l’euro par rapport au dollar gêne peu l’Allemagne, mais beaucoup la France. Les perspectives peu réjouissantes de l’énergie nucléaire, à la suite du désastre japonais, frappent de plein fouet un des rares secteurs où le capitalisme français pouvait se targuer d’une position très importante.
Et le contexte qui s’annonce est pire. En saignant à blanc son prolétariat, la Grèce a réussi à baisser son déficit… à 10,4 %. Mais les plans d’austérité, réduisant drastiquement le pouvoir d’achat des masses, précipitent le pays dans la récession. De sorte que la dette continue à augmenter par rapport au PIB, et a dépassé les 150 %. « Le remède va-t-il tuer le malade ? » interroge Le Monde de l’Economie. Mais peut être n’y a-t-il pas de remède parce que la maladie est congénitalement celle du système capitaliste qui, au moment même où il a besoin d’un marché indéfiniment élargi, ne peut que prendre des mesures qui le restreignent davantage. Et rodent au chevet de l’agonisant les usuriers qui proposent des prêts à 15 % à l’Etat grec. En envisageant le rééchelonnement de la dette grecque, Schaüble, le ministre allemand a divulgué un secret de polichinelle : la Grèce ne pourra pas payer ! Les conséquences seront majeures pour les banques françaises très exposées à la dette grecque.
Même tableau au Portugal dont les dirigeants n’ont cessé de proclamer pendant des mois : «Nous n’avons pas besoin d’aide. Le Portugal n’est pas la Grèce ! Nous n’avons pas triché sur nos comptes ! Il n’y a pas chez nous de fraude fiscale etc. ». Las ! Après les rodomontades, vient l’heure de demander l’« aide » du trio UE /BCE /FMI. Le PSD (le parti bourgeois principal du Portugal) a précipité la crise en refusant de voter le quatrième plan d’austérité proposé par le PSP au pouvoir. L’explication donnée a le mérite de la franchise. « Nous n’avons aucun désaccord avec votre plan » ont dit en substance les dirigeants du PSD au premier ministre PSP Socrates – « le problème est que votre gouvernement est incapable de le mener à bien. ». Incapable pourquoi ? Parce que la CGT Portugaise a du renoncer à signer le pacte qui lui était proposé – sur le modèle de celui signé par les dirigeants syndicaux en Espagne. Et pourquoi les dirigeants de la CGT Portugaise n’ont pu le signer ? Parce que, en dehors même de la décision des dirigeants syndicaux qui ont du cependant s’y rallier, des centaines de milliers de travailleurs et jeunes ont manifesté, notamment à Lisbonne contre la politique du gouvernement. La direction de la CGTP a estimé qu’il y avait un risque si elle signait que la situation ne lui échappe…

Aujourd’hui, les dirigeants de l’Union Européenne, ceux du FMI proposent un prêt au Portugal. Mais comme en Grèce, comme en Irlande, il est conditionné à l’acceptation d’un « plan d’ajustement » - privatisations, mesures de flexibilité du marché du travail, diminution de salaires et des pensions - qui doit lui-même recevoir l’assentiment de toutes les formations politiques portugaises. Autrement dit, la condition politique, c’est l’union nationale.
Mais les dirigeants de l’UE, du FMI sont eux même saisis d’effroi. Car le pays suivant sur la liste, c’est l’Espagne. Et là, on change d’échelle. Le Fonds d’Intervention Européen n’y suffirait pas. Alors Strauss Khan, dirigeant du FMI, tout en félicitant le gouvernement Zapatero sur sa réforme des retraites (voir CPS précédent), l’invite à aller plus loin, vers la liquidation totale des conventions collectives. Car, certes « L’Espagne n’est pas le Portugal » - comme le Portugal n’était pas la Grèce ! – mais si l’Espagne s’effondre, c’est l’euro et avec lui l’Union Européenne qui s’effondrent.


USA : le prolétariat tente de combattre,
mais les appareils traîtres du mouvement ouvrier lui bloquent toute issue


 Dans ce contexte d’offensive brutale contre les conditions d’existence des masses, qu’en est-il de la réaction du prolétariat dans les citadelles impérialistes, aux USA et en Europe en particulier ?
Il faut évidemment accorder une importance toute particulière à ce qui s’est passé aux USA, en particulier au Wisconsin. Car depuis 2008, les coups pleuvent dru sur le prolétariat américain. A plusieurs reprises dans CPS, nous sommes revenus en particulier sur les défaites encaissées par le prolétariat américain, en particulier dans l’automobile avec la pleine et entière coopération des dirigeants syndicaux qui signent des accords liquidant les droits en matière d’assurance sociale et de retraites, réduisant les salaires, organisant les plans de licenciement, avec pour couronner le tout des clauses décrétant la grève illégale. Certes le prolétariat n’est pas resté amorphe et le refus des ouvriers de Ford d’entériner l’accord anti grève que les dirigeants syndicaux leur proposaient d’adopter manifestait qu’il conservait d’énormes potentialités.
La mobilisation du prolétariat et de la jeunesse du Wisconsin, faisant explicitement référence à l’Egypte (« debout comme les Egyptiens ») l’a montré de manière éclatante. L’offensive du gouverneur Walker, récemment élu dans le cadre du triomphe républicain au « midterm », comprenait deux volets. D’une part au nom de la lutte contre les déficits –sachant qu’il venait de faire adopter de nouvelles exonérations d’impôts dans l’Etat pour les plus fortunés et les entreprises – il décidait notamment une augmentation massive de cotisations payées par les salariés pour leur retraite et assurance maladie. D’autre part, il remettait en cause le droit de négocier des syndicats.

Il faut le noter, le mouvement qui a conduit cent cinquante mille travailleurs et jeunes à manifester, envahissant le palais du gouverneur le 9 Mars, a totalement débordé le dispositif des dirigeants syndicaux. C’est indépendamment d’eux et contre eux que s’est manifestée l’aspiration à la grève générale, puisque dans de nombreux états des offensives similaires se développaient (Au Michigan voisin, à Détroit tous les enseignants seront licenciés fin Juillet, une partie devant être réembauchée à la rentrée 2011 en fonction des classes subsistant !)
Par ailleurs, les médias ont présenté l’affaire comme une agression commise contre les travailleurs des gouverneurs républicains brutaux, à l’opposé des « bons » démocrates, qui à l’inverse, auraient soutenu les travailleurs, en arguant du fait que les élus démocrates ont même fui l’Etat du Wisconsin pour empêcher le gouverneur d’obtenir le quorum pour son projet de loi. Ce dernier fait est exact. Mais l’issue de cette mobilisation éclaire la véritable divergence entre les uns et les autres. Trahissant la mobilisation des travailleurs, les dirigeants syndicaux étroitement inféodés au Parti Démocrate ont signé un accord incluant toutes les attaques du gouverneur… sauf celles concernant la négociation collective avec les syndicats. Là est la vraie divergence entre démocrates et républicains. Les uns et les autres sont d’accord pour tailler violemment dans les budgets de l’éducation, de la Santé comme en témoigne le projet de budget fédéral d’Obama lui-même. Mais là où les républicains veulent passer par-dessus la tête des appareils syndicaux, liquidant à l’occasion leur position sociale, les démocrates, quant à eux veulent atteindre les mêmes fins en coopérant étroitement avec les mêmes appareils syndicaux. Quels que soient les prolongements de ce qui s’est passé au Wisconsin, la leçon des événements est claire : le prolétariat américain devra imposer que soit rompue l’inféodation des syndicats au Parti Démocrate et à Obama. Il devra constituer ses propres organes de direction de la lutte et soumettre les dirigeants syndicaux à ses propres décisions.


Grande Bretagne : une manifestation massive contre le gouvernement Cameron
cadenassée par les dirigeants syndicaux et le Labour


Le prolétariat britannique pour défaire le gouvernement Cameron est confronté aux mêmes problèmes politiques. Le 26 Mars, 500 000 manifestants déferlaient à Londres, la plus importante manifestation depuis celle qui avait vu les travailleurs anglais se dresser contre la « poll tax » de Margareth Thatcher.
500 000 : c’est aussi le nombre de fonctionnaires qui doivent disparaître d’ici 2015. Les fonctionnaires qui ont vu leurs salaires ponctionnés largement depuis le début de la crise, et qui en avril verront encore ceux-ci diminués par l’augmentation des cotisations retraites quand dans le même temps les nouveaux embauchés devront travailler jusqu’à 65 ans. Mais le rapport Hutton (un ancien secrétaire d’Etat du gouvernement Brown) préconise d’aller encore beaucoup plus loin. Ajoutons à cela un plan de liquidation – privatisation du NHS (système de santé publique), le triplement des droits d’inscription dans les facultés (voir CPS précédent) etc.

Mais si massive que soit la manifestation, si révélatrice qu’elle soit de la disponibilité du prolétariat au combat, elle ne résout aucun de ses problèmes. L’offensive Cameron peut continuer à se développer, même si celui-ci a dû se livrer à une manœuvre purement tactique : retarder de quelques mois la mise en œuvre du plan de privatisation de la NHS. Car il faut noter que, de manière délibérée, les dirigeants syndicaux anglais ont laissé seuls les étudiants qui ont cherché à affronter le pouvoir en décembre dernier, et par conséquent laissé le parlement adopter les augmentations de droits d’inscription, retardant de plusieurs mois la convocation de la manifestation. D’autre part, c’est sous le signe d’une « journée pour les alternatives » que les dirigeants syndicaux ont convoqué cette manifestation. Miliband, le dirigeant du Labour prenant la parole à l’issue de cette manifestation, en a donné le contenu : "Tout le monde sait aujourd’hui que le pays connaît des temps difficiles. Mais nous savons aussi qu’il y a d’autres voies. (...) Nous avons besoin de faire des choix difficiles, et quelques coupes. Mais ce gouvernement va trop loin et trop vite en détruisant le ciment de notre société".
En somme, l’alternative, ce sont d’autres coupes dans le budget, d’autres attaques contre le prolétariat. Il est important de remarquer que Miliband a été copieusement sifflé par les manifestants.
Tout comme les dirigeants irlandais avaient été copieusement sifflés dans la manifestation à Dublin. Mais partout en Europe, on doit bien constater qu’on assiste au même scénario. Espagne, Portugal, Grèce, Irlande, Grande Bretagne : depuis l’automne 2010, on assiste partout à des manifestations massives qui témoignent sans doute d’une aspiration au combat. Mais partout aussi les dirigeants syndicaux font en sorte, avec succès pour l’instant, que l’affrontement avec le gouvernement n’ait pas lieu, en imposant aux masses que ces manifestations se tiennent sur l’orientation inoffensive d’« autres réformes », d’alternatives etc. La volonté manifestée par les étudiants anglais, italiens, grecs de briser ce cadre s’est exprimée avec une certaine force à la fin de l’année 2010. Pour le moment, les appareils réactionnaires à la tête des syndicats ont réussi à l’isoler et la faire refluer.


France : un gouvernement archi minoritaire, un président haï
qui pourtant frappent encore


La situation en France est marquée pour les masses par la même impuissance des masses à se libérer des entraves mises à leurs pieds par les appareils du mouvement ouvrier.
Et pourtant le gouvernement et d’abord Sarkozy atteignent des sommets d’impopularité.
Inutile d’évoquer les sondages. Les élections cantonales ont donné une idée du discrédit de l’UMP, le parti du président : l’UMP perd plus d’un million de voix par rapport à 2004 (où son score avait déjà été calamiteux !) à quoi il faut rajouter les 500 000 perdus par les « divers droite ». Elle rassemble 16,97 % des suffrages exprimés – soit moins de 7,5 % des inscrits. Même si on y rajoute le « Nouveau Centre » et les « divers droite », on en reste à 29,5 % des exprimés et moins de 13 % des inscrits ! Une partie importante de l’électorat de Sarkozy en 2007 s’est reporté sur le vote Front National, y compris là où celui-ci n’a même pas l’ombre d’un appareil politique local. La montée du FN est certes limitée en valeur absolue (en nombre de suffrages global, il perd même 100 000 voix par rapport au premier tour de 2004 !), mais si on tient compte du fait qu’il a présenté 400 candidats de moins, le nombre de voix par candidat, lui, progresse sensiblement !
Le résultat du score calamiteux de l’UMP est d’ouvrir une crise en son sein. Le départ de Borloo de l’UMP manifeste comme l’a dit Juppé que « nous sommes ramenés dix ans en arrière ». En 2002, la bourgeoisie avait cru pouvoir rassembler en un seul parti le RPR et l’UDF. Tel était le sens de la création de l’UMP. C’est de cette tentative que les cantonales sonnent le glas. Ajoutons à cela le retour du FN marginalisé par Sarkozy en 2007. Sans aucun doute, la politique du gouvernement Sarkozy Fillon sur la sécurité, sa politique d’une violence inouïe contre les travailleurs immigrés – les déclarations de Copé et de Guéant instaurant un véritable racisme d’Etat – a consisté à donner en continu du carburant au FN. Mais il faut ajouter (voir plus bas) : le soutien total du PS et du PCF aux attaques de la bourgeoisie contre le prolétariat, la participation des dirigeants syndicaux, via le dialogue social, aux mêmes attaques, ont conduit une frange significative du prolétariat, sans parler du sous prolétariat à conclure qu’il n’y avait rien à espérer des sommets du mouvement ouvrier : c’est la raison du vote d’une partie significative des ouvriers et chômeurs pour le Front National.

Et pourtant malgré son score calamiteux, malgré son discrédit massif, le gouvernement ne dévie pas d’un pouce dans son attaque contre les masses. Il annonce que le rythme de 30000 suppressions de poste par an dans la Fonction Publique sera poursuivi (en fait par le biais de la LOLF, bien davantage !). Il annonce que les salaires des fonctionnaires seront bloqués. Il se targue de ses succès contre l’hôpital et la santé publique puisque pour la première année le niveau des dépenses est même resté en deçà du niveau de l’ONDAM (objectif national de dépense de l’assurance maladie) et que l’hôpital public a perdu des milliers de postes. Et il prépare une réforme fiscale dont le pourtant très peu révolutionnaire économiste, spécialiste de la fiscalité Piketty dit : « C’et le plus énorme cadeau fiscal aux plus riches du quinquennat ! On remplace un cadeau fiscal, le bouclier, par un autre cadeau fiscal, trois à quatre fois plus gros. ». Alors comment expliquer qu’il puisse ainsi frapper ?


Quand Parisot et le MEDEF approuvent le projet du PS…


Dans une interview du 17 avril au Monde, la patronne du MEDEF fournit sans doute une bonne partie de l’explication
Question : « Le Parti socialiste a rendu public sont projet pour 2012. A-t-il pris la mesure des contraintes qui s’imposent au pays ? » Réponse : « Il me semble que oui. Toutefois, son projet est encore vague et il faudra attendre les programmes des candidats pour juger. »
En effet ! L’affirmation première dudit programme consiste à dire qu’il faut réduire les déficits. Autrement dit que les masses doivent payer pour les cadeaux faits aux banques et aux patrons ; qu’ils doivent payer pour les bombes de Libye et les troupes d’Afghanistan. Pour le reste, le projet du PS ne comprend pas la satisfaction de la moindre des revendications ouvrières, et pour cause. A moins de considérer qu’une nouvelle fournée d’« emplois jeunes » en tienne lieu ! Quant à la prise de position du projet sur les retraites, c’est une pure escroquerie. Il parle certes de retraite à 60 ans. Mais Martine Aubry précise : « Nous n’avons jamais dit : retraite à 60 ans pour tous et à taux plein. Nous parlons simplement de la possibilité de choisir ». Autrement dit, le travailleur peut choisir de partir à 60 ans… à la soupe populaire ! Mais du reste, il est inutile de prendre au sérieux un seul instant un tel programme puisqu’il est précisé qu’il appartiendra au candidat d’établir dans ce programme quelles sont ses priorités ; autrement dit qu’il lui appartiendra… de le mettre à la poubelle si cela lui chante. Et voilà pourquoi, Strauss Kahn en tête, tous les candidats putatifs l’« approuvent ».
Du reste, avant même que ne sorte le projet du PS, les travailleurs pouvaient avoir une idée assez claire de son programme. Le soutien plein et entier apporté par Martine Aubry à Athènes au gouvernement grec lors de la réunion européenne des PS d’Europe en tient lieu. La promotion, à grands coups de sondages de la candidature de Strauss Kahn, qui réclame des gouvernements dans toute l’Europe qu’ils en fassent plus contre leur classe ouvrière en dit assez. Il n’est pas étonnant que dans ces conditions la débâcle de l’UMP aux cantonales ne s’accompagne nullement, bien au contraire, d’une victoire du PS. Lui aussi perd un million de voix par rapport à 2004.

Si la baisse du PCF est un peu moins importante, le déclin continue, à peine masquée par l’alliance avec le Parti de Gauche dans le « front de gauche ». Le PCF est promis à une agonie convulsive, la candidature de Mélenchon aux présidentielles, entérinée par l’appareil, ne pouvant que relancer la crise en son sein. Mais aucune des différentes factions qui s’affrontent ne propose une orientation qui représenterait le moins du monde une rupture avec le gouvernement Sarkozy Fillon et encore moins du capitalisme. Surement pas Chassaigne, député PCF que d’aucuns voudraient mettre en travers du chemin de Mélenchon, que l’on voit en photographie sur le journal local La Montagne respectueusement incliné devant Sarkozy lors de la visite de ce dernier à Issoire, en Auvergne.
Le sentiment est largement partagé que la direction du PS et à sa manière, celle du PCF, sont toute disposées à continuer la même politique violemment anti ouvrière du gouvernement Sarkozy Fillon. Le soutien d’ores et déjà affirmé de ces partis aux croisades impérialistes de ce même gouvernement, la proposition faite à nouveau à l’UMP d’une alliance de « front républicain », et l’appel à voter UMP contre le FN : tout cela contribue largement à boucher toute perspective de combat contre ce gouvernement. 


Directions syndicales : signature tous azimuts avec le gouvernement et le MEDEF,
prise en charge de sa politique et « actions » d’accompagnement de celle ci


Les directions syndicales ont aussi constitué leur « front républicain ». A propos de la présence de quelques membres du FN dans leurs rangs, CGT, CFDT, UNSA, Solidaires se sont fendus d’un communiqué commun, indiquant que le « FN n’est pas un parti comme les autres »... « ses valeurs sont incompatibles avec celles du syndicalisme ». Ce qui est une façon de dire que l’UMP est, elle, un parti comme les autres, et que ses valeurs sont, elles, parfaitement compatibles avec celles du syndicalisme. Par ailleurs, prenant appui sur la défaite des retraites dont les directions syndicales portent elles même l’entière responsabilité (voir CPS 41) et profitant du désarroi des masses ainsi engendré, elles manifestent de la manière la plus décomplexée leur soutien au gouvernement. Il faut remarquer que la plupart des « journées d’action » convoquées par les appareils – dont l’affluence est d’ailleurs confidentielle – sont littéralement calquées sur l’offensive gouvernementale. Voyons par exemple les premières lignes de l’appel à manifester le 2 avril sur la question de la « dépendance » :
« Le 12 mai 2009, le Président de la République annonce un projet de loi sur la création d’un « cinquième risque » afin de prendre en charge la « dépendance ». Le 16 novembre 2010, il réitère sa volonté de promulguer une loi avant fin 2011. Ainsi a-t-il fait naître l’espoir que les personnes en situation de handicap quel que soit leur âge bénéficieraient enfin du droit commun en matière de protection sociale. »
L’entreprise de destruction de la Sécurité Sociale sous couvert de dépendance : un « espoir » selon les appelants - tous les syndicats sauf FO, mais aussi le PS, le PCF, le NPA, LO !
Voyons l’appel du 28 avril sur la « pénibilité » (le thème se suffit d’ailleurs à lui-même !) : « L’influence de la pénibilité du travail sur l’espérance de vie a été reconnue par la loi réformant les retraites de 2003 en prévoyant dans son article 12 une négociation au niveau interprofessionnel. Toutes les organisations syndicales ont porté un dispositif permettant à la fois de prévenir les mauvaises conditions de travail et de compenser les effets liés à l’exposition aux pénibilités entre autres, par un départ anticipé…La réforme des retraites du 9 novembre 2010 ne répond pas à l’un des objectifs fixé par les organisations syndicales : permettre à des salariés usés prématurément à cause de leurs mauvaises conditions de travail et ayant une espérance de vie réduite, de vivre une retraite en bonne santé d’une durée équivalente à d’autres salariés non exposés ». Soutien à la réforme de 2003, dont les dirigeants réclament une « vraie » mise en œuvre. Et sous couvert de pénibilité pour certains, ratification de la liquidation de la retraite à 60 ans pour tous les autres « non exposés »
 Mais quid de FO, qui n’est signataire d’aucun de ces appels ? FO pourtant a droit, elle aussi, aux félicitations de Parisot, à deux reprises. Félicitations méritées. FO a tout signé dans les dernières semaines, jetant par-dessus bord la posture faussement radicale adoptée sur les retraites à l’automne dernier. FO signe sur les retraites complémentaires, signature qui valide la contre réforme. FO signe sur l’assurance chômage qui prévoit, certes sous conditions, la baisse des cotisations patronales (Parisot se félicite particulièrement de cette signature ci). FO signe sur l’insertion des jeunes dans le marché du travail (une nouvelle mouture de l’alternance). Et enfin FO signe sur le protocole précarité dans la Fonction Publique.


Les dirigeants CGT et FO prennent en charge la liquidation du statut général de la Fonction Publique ; résistances dans la FSU qui ne peut signer


Nous renvoyons sur ce dernier point à ce qui est écrit dans l’article enseignement à ce propos et qui indique qu’en réalité, il s’agit d’une attaque majeure contre le statut de la Fonction Publique. Notons tout de même que les dirigeants CGT et FO n’ont pu signer que par un coup de force à l’intérieur même des fédérations concernées. La CGT Collectivités territoriales, première concernée par l’accord, était contre. La consultation des syndiqués n’a été qu’un simulacre. Et là où ils ont pu se saisir de la question, ils se sont prononcés contre l’accord. Dans FO, tout s’est décidé dans le secret de l’appareil. Remarquons que dans FO, il n’y a pas trace d’un combat ouvert des militants du POI qui y occupent pourtant des positions importantes. Remarquons encore que, très prolixe contre l’accord avant la signature de FO, Informations Ouvrières, le journal du POI, après la signature de l’accord devient … muet comme une carpe, n’a aucune position et se contente… d’une revue de presse sur l’accord !

 C’est parce que le fonctionnement de la FSU rend très difficile une décision dans les mêmes conditions que celles qui prévalent dans la CGT et dans FO (en particulier du fait de l’existence du droit de tendance), que l’appareil n’a pu passer par-dessus l’opposition virulente d’un certain nombre de syndicats (administratifs, enseignement supérieur, recherche, assistants sociaux, notamment).


Une question centrale aujourd’hui : la question des salaires


Dans une situation marquée par la défaite de l’automne dernier, il est néanmoins une question où la classe ouvrière a commencé à engager des combats significatifs : celui des salaires. Et pour cause ! Les chiffres officiels de l’inflation sont bidonnés. Pour les familles ouvrières, l’augmentation énorme des produits alimentaires, du gaz, de l’électricité, au moment où De Margerie, le patron de Total annonce pour bientôt le super à 2 euros, prend les travailleurs à la gorge. Les déclarations de Trichet, de la BCE, contre toute augmentation de salaires, au nom de la lutte contre l’inflation !, de Blanchard, du FMI pour la diminution des salaires en Europe indiquent avec cynisme qui doit payer pour les spéculateurs, véritables fauteurs de l’inflation.

Des grèves parfois massives, parfois longues se sont développés et se développent pour les augmentations de salaire : Eiffage, Toyota, Carrefour.
Mais là encore, même si, ici ou là, les travailleurs peuvent arracher des concessions, les combats sont cadenassés par l’appareil. Carrefour constitue un exemple typique. Souvent la grève a été délibérément limitée par l’appareil à quelques heures, le dirigeant CFDT indiquant ouvertement que le but n’était pas « de mettre en difficulté l’entreprise ». FO a signé pour 2 % tout de suite et une prime de 220 euros quand les travailleurs réclamaient 5 % (le patron proposait lui-même 2 % en deux fois dans l’année).

Par ailleurs aucune direction syndicale n’avance le mot d’ordre que la situation impose, et qui permet la centralisation du combat contre le gouvernement et le patronat : celui de l’échelle mobile des salaires ; alors même que le gouvernement dans son propre domaine de responsabilité a décidé le gel du point d’indice pour la Fonction Publique en 2012. Mieux même, les dirigeants syndicaux négociant depuis des mois avec le patronat sur le terrain du « partage de la valeur ajoutée » ont facilité l’opération Sarkozy sur la prétendue « prime » dans les entreprises où les dividendes des actionnaires sont en augmentation. Cette prime sera, pour peu qu’elle existe, payée par l’Etat via les exonérations fiscales. Et, alibi commode au refus de toute augmentation générale, elle sera un instrument de baisse du salaire réel. Mais il faut dire que, négocier le « partage de la valeur ajoutée », qu’est ce d’autre que soumettre les revendications de salaire à la bonne marche de l’entreprise et au-delà à la bonne marche du capitalisme ? Une telle négociation est donc parfaitement contradictoire à tout combat pour les salaires.


Armer politiquement une avant-garde pour les combats de classe à venir


Il faut dire la vérité. Pour le moment, en Europe, le prolétariat reste cadenassé par les appareils, et c’est encore plus vrai en France même. L’onde de choc qui s’est produite en Egypte, en Tunisie, qui se propage aujourd’hui en Syrie ne s’est pas encore répercutée dans la vieille Europe. L’unité mondiale de la lutte de classes n’exclut pas les inégalités dans son développement.
Mais, puisque l’avenir prévisible est celui d’une brutale aggravation des conditions d’existence pour les masses comme conséquence immédiate d’une nouvelle étape de la crise ou d’une nouvelle vague d’attaques anti – ouvrières – ou de leur combinaison – chômage, vie chère -, le prolétariat et la jeunesse seront poussés à réagir avec force et à briser le carcan constitué par les appareils syndicaux et les partis ouvriers contre révolutionnaires.
 C’est dans la perspective de cette modification qu’il faut agir. Et pour cela, il faut combattre en premier lieu contre l’« union nationale » en défense de l’impérialisme français, de ses interventions guerrières en Libye, en Côte d’Ivoire, en Afghanistan. L’ennemi est dans notre propre pays. L’ennemi, c’est le gouvernement Sarkozy Fillon Préparer l’affrontement avec ce gouvernement pour le vaincre et le chasser, c’est aujourd’hui combattre partout de manière à chaque fois adaptée à la situation concrète pour imposer aux dirigeants syndicaux la rupture du dialogue social avec ce même gouvernement et le MEDEF.

Ce combat est inséparable de celui visant à mettre en évidence l’actualité du combat pour le socialisme. Jamais autant qu’aujourd’hui, n’était apparu aussi clairement le fait que l’impérialisme, c’est « la réaction sur toute la ligne » (Lenine). Du Japon aux Etats Unis, du Portugal à la Grèce, la leçon des événements est claire : il faut en finir avec le capitalisme ; il faut combattre pour le socialisme !

Le 28 avril 2011.

 

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