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Après le congrès du PS, malgré l’échec de Ségolène Royal :

Sous les coups répétés des liquidateurs
la décomposition du PS s’amplifie

 

Martine Aubry à la direction du PS


Le 25 novembre 2008,  le conseil national du PS a confirmé l’élection de Martine Aubry comme première secrétaire par 159 voix contre 76 à Ségolène Royal ; il y a eu deux abstentions. Auparavant, le même jour, la « commission de récolement », constituée suite à la contestation par les partisans de Ségolène Royale des résultats du second tour du vote des adhérents du 22 novembre, avait validé l’élection de Martine Aubry : elle avait été déclarée vainqueur avec 102 voix d’avance sur sa rivale Ségolène Royal (Aubry 67 451 voix ; Royal 67 349). Lors du vote sur les quatre motions soumises aux adhérents, le 6 novembre, la motion de Royal avait été placée tête avec 29 % des suffrages exprimés pour une participation de l’ordre de 55 %.  Dés lors, l’aile la plus ouvertement liquidatrice du PS, soutenue sans réserve par les média contrôlés par les capitalistes tels les groupes Bouygues et Lagardère, a tenté un véritable coup de force pour s’emparer de la direction du parti.
Le 11 novembre Royal a déclaré sa candidature au poste de première secrétaire, candidature qu’elle avait mise « au frigidaire » en septembre 2008 pour obtenir le ralliement à sa motion des barons lyonnais et marseillais du PS. Jusqu’à l’élection de Aubry, les liquidateurs, pendant le congrès de Reims du 14 au 16 novembre puis lors de la campagne pour l’élection du premier secrétaire par les adhérents lors du vote des 21 et 22 novembre, n’ont pas hésité à déclencher une guerre sans merci en utilisant les méthodes les plus sordides : tentatives de manipulation de l’information, provocations  verbales et même agressions physiques dans certains cas comme dans l’Hérault.

Pendant plusieurs semaines, Sarkozy, Fillon et l’UMP ont bu du petit-lait.  La crise du PS s’est étalée au grand jour pendant que le gouvernement Sarkozy-Fillon amplifiait son offensive pour faire payer au prolétariat et à la jeunesse le prix de la crise du capitalisme.


De Rennes à Reims


Au soir du 22 novembre, les deux candidates étaient à égalité, à quelques dizaines de voix près. Jouant sur les rivalités de ses adversaires, pour ne pas dire dans certains cas sur leur haine, Royal  a bien failli parvenir à ses fins.
Finalement, lors du conseil national, l’appareil a choisi Aubry. Mais ce n’est  pas pour autant que la crise du PS est surmontée. Tandis que Ségolène Royal a déjà réengagé au lendemain même du 25 novembre sa campagne pour l’élection présidentielle de 2012, les fractions, cliques et écuries des candidats potentiels pour 2012 qui ont soutenu Aubry au sein du conseil national se marquent étroitement à la culotte. Encore plus qu’avant le congrès de Reims, le PS semble ingouvernable.
A bien des égards ce congrès a  rappelé celui de Rennes, en mars 1990, où partisans de Jospin, de Fabius et de Rocard dont les motions avaient recueilli chacune environ un tiers des vote des adhérents, s’étaient étripés. A l’issue de ce congrès, le PS était dans l’impasse, incapable de se doter d’une direction. Mitterrand avait dû intervenir directement pour imposer un cessez-le-feu. Mauroy avait été reconduit, mais de 1990 à 1995, les renversements d’alliances et les révolutions de palais avaient provoqué cinq changements de premier secrétaire, avec successivement Mauroy, Fabius, Rocard, Emmanuelli puis Jospin qui a laissé sa place à Hollande en 1997.

Lors du conseil national du PS du 7 décembre, où Royal était ostensiblement absente, Aubry a présenté la nouvelle composition de la direction et son texte d’orientation a été adopté par 146 voix et 72 abstentions. Les liquidateurs emmenés par Vincent Peillon ont tenté une nouvelle fois de saborder la réunion et ont refusé d’être associés à la direction. Ironiquement, la presse a souhaité « bon courage ! » à Martine Aubry.


Depuis mai 2007,  le dos tourné au combat contre le gouvernement


Au soir même du jour de l’élection de Nicolas Sarkozy, François Hollande donnait la ligne : le PS se comportera en « opposition constructive » et, tirant le bilan de la défaite électorale, il allait s’engager résolument dans une nouvelle phase de sa rénovation pour préparer… 2012.  Avant les élections législatives, Jean-Marc Ayrault se déclarait contre une nouvelle « cohabitation », en clair pour la victoire de l’UMP (le même Ayrault s’était par la suite prononcé pour des accords avec le Modem entre les deux tours). A maintes reprises, Royal a déclaré qu’elle avait la volonté « d’aider » Nicolas Sarkozy tandis qu’en septembre 2007 Fabius déclarait qu’il fallait laisser le gouvernement « faire ses armes ».
Plusieurs dirigeants et personnalités du PS sont passés de l’ « opposition constructive » à la collaboration directe. Besson, Bockel et Kouchner ont rejoint le gouvernement se prêtant aux combines élaborées dans les bureaux de l’Elysée . Parmi ces combines, notons le soutien apporté par Sarkozy à la nomination de Strauss-Kahn a la direction du FMI, nomination dont le PS s’enorgueillit. Rocard a donné sa caution au lancement de la commission Pochard chargé d’organiser la concertation pour la mise en œuvre des contre-réformes de l’enseignement et ne l’a quitté que juste avant qu’elle ne rende son rapport.

Lang a quasiment coprésidé avec Balladur la commission sur la réforme constitutionnelle. Finalement, le PS a voté contre non sans avoir cherché à trouver un terrain d’entente avec le gouvernement sur la question (un certain nombre de députés et sénateurs du PS, dont Cambadélis, se sont publiquement prononcés pour un vote pour du PS tandis qu’il faut rappeler que cette réforme n’a été adoptée par le congrès qu’à une voie près, celle de Jack Lang, sans que ce dernier ne soit nullement inquiété au sein de son parti !). Par la suite, en réclamant un débat au parlement sur l’Afghanistan ou l’organisation d’un référendum sur la privatisation de la poste, le  PS n’a fait qu’anticiper la mise en oeuvre de la réforme constitutionnelle avant même que les textes d’application ne soient publiés.
Après la défaite de l’UMP aux élections municipales, Hollande s’est empressé de préciser que ce « n’était pas le troisième tour del’élection présidentielle ».
La liste est encore longue et ici non exhaustive : Attali et Charasse (aujourd’hui exclu du PS) ont répondu aux offres de Sarkozy pour l’animation de commissions diverses ; dernièrement, en octobre 2008, Montebourg et Paul, députés PS, ont cosigné avec Devedjian et Copé un « Manifeste pour l’égalité réelle »à l’initiative de Carla Bruni-Sarkozy. Même Pierre Mauroy s’y est collé : il vient d’accepter de participer au comité Balladur chargé de préparer la « réforme » des collectivités locales.


La politique du PS : la voie royale pour les liquidateurs


Sur la plupart des questions essentielles le PS a apporté un soutien « constructif » au gouvernement. En février 2008, il s’est abstenu lors du vote du congrès sur le traité de Lisbonne (40 députés et sénateurs PS n’ont pas pu résister et ont votant pour). En juin 2008,  Hollande a accompagné Sarkozy, avec Buffet et Bayrou, dans un déplacement au Liban dont l’objectif était de soutenir la présence militaire de l’impérialisme français. Le 22 septembre après la communication du gouvernement à l’Assemblée Nationale sur l’Afghanistan, le PS a voté contre le rapport présenté par Fillon sur une ligne de soutien à la participation militaire de l’impérialisme français à l’occupation. L’hebdo des socialistes du 27/09/2008 précise : « Ils (les socialistes ndlr) refusent le glissement vers une guerre d’occupation mais précisent qu’ils n’ont pas voté contre la poursuite car la France ne peut se désengager brutalement d’Afghanistan. Toutefois, le manque de matériel adapté et l’alignement aveugle sur la Stratégie des Etats-Unis ne peuvent, selon eux, que conduire à l’impasse ». Une semaine avant le même hebdomadaire rappelait : « En 2001, en état de légitime défense, les Américains firent tomber avec les Britanniques et l’Alliance du nord Afghane, le régime taliban (…) C’est sous mandat de l’ONU que la participation de la France fut actée, après consultation du Parlement, par Jacques Chirac et Lionel Jospin ».
Sur cette ligne, le PS s’est abstenu le 6 novembre lors du vote du budget 2009 de la défense nationale, en saluant l’augmentation prévue de 10 % des crédits militaires et en appelant le gouvernement à tenir ses engagements.
Le 2 octobre, Le PS s’est abstenu sur le RSA, en se félicitant que le gouvernement se soit approprié son programme. Le 21 octobre, les députés du PS ont voté le projet de loi Borloo sur le Grenelle de l’environnement en expliquant par l’entremise de Ayrault «  Nous avons pris nos responsabilités afin de ne pas affaiblir la position de la France  dans les négociations européennes sur le climat et l’énergie ». Au nom du gouvernement, Borloo s’est extasié « Quelque chose de magique s’est passé » (Le Monde du 23/10/2008). Face au développement de la crise, dans Le Monde du 2/10/2008, François Hollande s’exprimait ainsi : « Nicolas Sarkozysaisit l’occasion de la tourmente  financière pour renoncer à tous ses engagements de campagne ». C’est édifiant ! Car si l’on considère l’avalanche des contre-réformes qui se sont abattues sur les travailleurs et la jeunesse, on peut sans aucun doute affirmer que Sarkozy a assurément tenu la plupart de ses « engagements » au compte des capitalistes.

En réalité l’ « opposition constructive » et d’une manière générale l’orientation de Hollande, jour après jour, a été celle du refus, assumé ouvertement, d’engager le combat contre le gouvernement Sarkozy-Fillon. Cette orientation participe pleinement du processus de décomposition du PS et elle pave la voie de ceux qui en son sein représentent l’aile liquidatrice, c’est-à-dire les partisans de Royal.


Le PS et la crise : soutien au plan du gouvernement


Face à la crise, avant de présenter le plan de sauvetage des banques à l’Assemblée nationale,  Fillon a appelé à l’union nationale. Répondant à Fillon, François Hollande a déclaré avec légèreté « L’union nationale, chiche ! ». En réalité il s’en ait fallu de peu pour que le PS approuve le plan du gouvernement octroyant 360 milliards aux capitalistes. La veille du vote, les dirigeants du PS ont répondu à l’invitation de Sarkozy en se rendant à une « consultation préalable » à l’Elysée. Sur le perron de l’Elysée, Jean-Pierre Bel, président du groupe PS au sénat déclarait « Sans parler d’union nationale, les socialistes devront prendre leurs responsabilités » tandis qu’ Ayrault, président du groupe PS à l’Assemblée nationale indiquait « Je n’imagine pas qu’on puisse voter contre ce projet de sauvetage ». Comme l’indique Le Monde du 16/10/2008 « Le PS s’est divisé avant de s’abstenir sur le plan d’urgence ». L’objet de la discorde était de prendre position  … entre l’approbation et l’abstention. Hollande a convoqué le groupe parlementaire en squeezant le bureau national du PS, provoquant l’ire de Pierre Mauroy. Lors de la discussion au sein du groupe parlementaire PS avant le vote, les proches de Delanoë, dont Moscovici, ont milité pour l’approbation. Suite à la décision de s’abstenir Valls, l’un des chiens de garde de Royal a déploré « Un grand parti d’opposition n’aurait pas dû prôner l’abstention sur un projet qui voit l’Europe jouer enfin son rôle et se doter d’un véritable outil opérationnel…il manque des hommes d’Etat aujourd’hui au Parti Socialiste » (Le Monde du 16/10/2008).
Son maître à penser avant qu’il ne se mette au service de Royal, Rocard, à la question « Auriez-vous voté le plan de soutien de Nicolas Sarkozy ? » a répondu sans hésitation « Naturellement, tout en disant qu’il ne résout pas les problèmes de fond. Je ne supporte pas l’opposition systématique ».
Le 29 septembre, Le PS avait publié les grandes lignes de son plan pour surmonter la crise ; les grands axes en étaient les suivants : permettre l’accès au crédit des PME et des accédants à la propriété par la mise en place d’un fonds national de garantie ; stimuler l’investissement des entreprises ; soutenir le pouvoir d’achat ; stimuler l’investissement public par les dotations aux collectivités locales ; convoquer un Conseil européen pour redéfinir les règles du système financier ; mise en place d’un nouveau Bretton Woods.  Un copier-coller du plan Sarkozy.

Alors que la discussion préparatoire au congrès de Reims battait son plein, aucun des leaders des quatre motions soumises au vote n’a exprimé son opposition, tous sur la ligne définie par L’Hebdo des socialistes du 18/10/2008 :
« En autorisant les recapitalisations des banques en cas de faillite et la garantie des prêts interbancaires, ce plan répond en partie aux attentes des socialistes. Mais ces mesures doivent s’accompagner de garanties économiques et éthiques (sic !). Ainsi, dans chaque conseil d’administration des banques, la présence d’un représentant de l’Etat est une condition obligatoire pour garantir l’utilisation des financements ».

Lors du vote sur le plan Sarkozy-Fillon, le PS s’est donc finalement abstenu à l’Assemblée nationale et au Sénat.  Seul un député, Marc Dolez, et un sénateur, Jean-Luc Mélenchon, ont voté contre. On comprend pourquoi Cambadélis, sur son blog a précisé « La direction du parti a voulu jouer la carte de l’opinion publique, rassurer les épargnants, mais elle a été rattrapée par le congrès. L’union nationale a été évitée in extremis ».


La nouvelle déclaration de principes


Alors que c’est un événement pour un parti politique, la nouvelle déclaration de principes a été adoptée dans l’indifférence: seuls 45,7% des adhérents à jour de leurs cotisations ont participé au vote du 29 mai 2008. Le texte a été adopté par près de 83% (7,4% contre et 9,8% d’abstention). Lors de la convention nationale du 14 juin, la déclaration de principe a été adoptée par 518 voix, soit 94,5 %, avec 3 contre et 17 abstentions. Après ce résultat, visiblement fier de rapporter son os à la classe capitaliste, Hollande à déclaré « Depuis le temps que l’on (sic!) nous demandait de faire notre aggiornamento ou notre Bad Godesberg, voilà qui est fait ! ». En réalité, l’essentiel du travail avait été réalisé avant le congrès de Rennes en 1990. CPS ancienne série n°31 de janvier 1990 indiquait :

« Lors du Comité Directeur des 13 et 14 janvier 1990, les chefs de file de toutes les motions qui sont présentées aux militants pour le prochain congrès ont été unanimes pour réviser la déclaration de principe introduisant les statuts du PS. En particulier le passage de cette "déclaration de principe" qui affirme:
«Parce qu'ils sont des démocrates conséquents, les socialistes estiment qu'il ne peut exister de démocratie réelle dans la société capitaliste. C'est en ce sens que le Parti Socialiste est un parti révolutionnaire»  disparaît.
La nouvelle proposition adoptée à l'unanimité s'inspire largement des propositions faites par Rocard au congrès de Toulouse d'octobre 1985 et que Jospin, soutenu par le bureau exécutif sortant déjà unanime sur cette question avait à nouveau tenté de faire adopter sans succès au congrès de Lille d'avril 1987. Son contenu d'ensemble peut être résumé par le passage suivant:
«Le Parti Socialiste est un parti de transformation sociale. La faillite des sociétés bureaucratiques ne lui fait pas oublier que le capitalisme développe les inéga­lités, accentue les déséquilibres mondiaux, exploite les richesses du Tiers-monde et maintient dans de nom­breux pays chômage et exclusions. Les socialistes sont donc favorables à une société d'économie mixte qui, sans méconnaître les règles du marché, fournira à la puissance publique et aux acteurs sociaux les moyens de réaliser des objectifs conformes à l'intérêt général». ».


Mais même sous sa dernière forme, il restait encore dans la déclaration de principes de 1990 quelques « scories » que les dirigeants du PS, toutes tendances confondues, y compris le sénateur Mélenchon qui a participé au comité de rédaction et qui s’est finalement abstenu sur le projet final, ont jugé nécessaire d’éliminer. Ainsi Le MondeDiplomatique  de novembre 2008 commente :
 « La dernière déclaration de principes, datée de 1990, maintenait  « les mutations incessantes et profondes des sociétés contemporaines n’ont pas éliminé les oppositions de classes et groupes sociaux ». Des vestiges à détruire d’urgence. C’est  en ce printemps 2008 que se déroula le nettoyage final. Dans le nouveau texte, le mot « classe » a disparu ».

Le supplément au Monde du 8/11/2008 indique : « Le projet de déclaration ne fait plus mention des « rapports de classe » et, pour la première fois, s’abstient désormais de toute allusion au terme de « révolution ». Dernière précision qui a son importance, le PS entend rassembler non pas toutes les forces de gauche mais « toutes les cultures de la gauche. Il ne se résigne pas aux divisions héritées du passé ». Une formulation habile qui suggère qu’un élargissement de sa stratégie d’alliances ne serait pas impie. ». Tandis que l’article premier affirme « Le but de l’action socialiste est l’émancipation complète de la personne humaine », l’article 22 définit le PS comme « un parti populaire ancré dans le monde du travail. Il est le produit des combats politiques et des luttes sociales menées depuis le XIXe siècle pour plus de justice et d’égalité sociales. Ouvert sur la société, il entend exprimer l’intérêt général du peuple français. ».Un « parti populaire » dévoué à « l’intérêt général » voilà qui, sans aucun doute, fait le bonheur de Royal !
En résume, telle quelle, la nouvelle déclaration de principe pourrait convenir à tout parti bourgeois en formation. Il convient de le souligner : c’est à l’unanimité des leaders des motions d’orientations soumises au congrès de Reims que cette déclaration a été adoptée. C’est leur credo. Sont révolus les temps, où manœuvrant pour s’emparer de la direction du PS, François Mitterrand déclarait à la tribune du congrès d’Epinay (juin 1971) :
« Celui qui n’accepte pas la rupture avec l’ordre établi, avec la société capitaliste, celui-là, je vous le dis, il ne peut pas être adhérent au Parti socialiste ».


Les motions : toutes issues de la même coulée….


 Le 23 septembre 2008, 6 motions ont été déposées et soumises au vote des militants. Les motions B, issue « du pôle écologique du PS » et F, promue par le regroupement Utopia, dont le principal dirigeant Franck Pupunat a décidé de rejoindre le Parti de la Gauche de Mélenchon, peuvent être quasiment ignorées.
La motion A, « Clarté, courage, créativité : une gauche conquérante pour redonner l’espoir à la France », était présentée par Delanoë associé à Hollande et Moscovici. La motion C, « Un monde d’avance, reconstruire l’espoir à gauche », était conduite par Benoît Hamon et Emmanuelli ; du fait du ralliement de Jean-Luc Mélenchon, Marc Dolez et Gérard Filoche, elle était censée représenter la « gauche » du PS. Martine Aubry a pris la tête de la motion D « Changer la gauche pour changer la France », produit d’un compromis entre les partisans de Fabius et ceux de Strauss-Kahn, représentés par Cambadélis, unis dans l’objectif premier et commun de tenter de faire barrage à Delanoë et Royal, candidats potentiels à la candidature pour 2012. Enfin Royal conduisait la motion E « L’espoir à gauche, Fier(e)s d’être socialistes », soutenue par les barons lyonnais et marseillais, Gérard Collomb et Jean-Noël Guérini, flanquée des chiens de garde que sont Peillon, Valls et Dray, « brillant » porte-parole de Hollande depuis le congrès du Mans. 
Sur le fond, rien ne distingue fondamentalement les quatre motions. Face à la crise du capitalisme, qui est traitée d’une manière presque anecdotique, c’est la même orientation avec quelques nuances de second ordre : la nécessité de réguler et de faire jouer ce rôle à l’Etat et aux institutions internationales. Toutes sont muettes sur les initiatives à caractère colonialistes de l’impérialisme français. Pour le reste, les motions sont pour l’essentiel des potions insipides construites à partir de généralités et d’abstractions. On peut trouver, pêle-mêle : « l’urgence écologique », « le développement durable », « la solidarité », « la formation et l’éducation », « la démocratie sociale »,  «la citoyenneté », « l’urgence sociale », « la redistribution des richesses »,« la sécurité par la justice », etc.
Fait significatif, mis à part Sarkozy, et encore très peu, Fillon, Darcos, Bachelot, Larcher, Hortefeux et leurs contre-réformes réactionnaires sont totalement absents des textes présentés. Les institutions de la cinquième République ne sont pas remises en cause si ce n’est formellement par la motion Hamon qui prône «Une 6éme République qui réhabilite la responsabilité politique ». Enfin sur la question de l’Union européenne, c’est seulement en termes très édulcorés que seule la motion Hamon suggère que  le traité de Lisbonne  « doit  être déclaré caduc ».
En définitive, quand Hamon déclare, très œcuménique : « Sur les alliances et refus d’un  rapprochement avec le centre, Delanoë est parfait. Sur les réponses à la crise financière, Royal est très bien. Et Aubry est crédible sur le retour de la puissance publique et la redistribution des richesses. Je les écoute tous. Sans exception. », il résume assez bien la situation.  Toutes les motions, dans la droite ligne de la nouvelle déclaration de principes se situent sur le terrain de refuser d’offrir toute perspective concrète  au combat contre le gouvernement Sarkozy-Fillon.  Aucune d’entre elles ne peut être considérée comme cristallisant une hypothétique « gauche » au sein du PS.


…. avec une ligne de fracture : l’avenir du PS


Lors de la préparation du congrès, puis dans le congrès lui-même le débat s’est centré sur la question des alliances, en particulier avec le Modem. Sur cette question, la motion Delanoë indiquait « Les alliances(…) doivent être à gauche(…). Quant au centre, constatons lucidement qu’il n’est pas à gauche .. en l’état actuel des choses, le Modem et son leader ont les yeux rivés sur 2012, misant sur l’échec de Nicolas Sarkozy et sur le nôtre ». La  motion Hamon se prononçait nettement « Un préalable : le refus de l’alliance au centre(…) faute d’avoir élaboré une position sur le sujet, les équations locales l’ont emporté, comme au bon vieux temps de la SFIO ». Quant à la motion Aubry, elle indiquait « Nous voulons des alliances claires et nous réaffirmons notre attachement au rassemblement de la gauche. Ces derniers temps la confusion a régné sur le plan stratégique(…) Avec nous c’est clair : il n’y aura pas de renversement d’alliances au profit du centre »

Sur cette question, la motion Royal se différenciait nettement : « Notre stratégie consiste d’abord à rassembler la gauche, toute la gauche. (…) A partir de là il est possible et nécessaire de réunir toutes les gauches rassemblées au soir du premier tour, tous les démocrates qui partagent des valeurs communes avec nous ». Dans Libération du 5/09/2008, Peillon, partisan de Royal, avait été beaucoup plus clair « Si l’on veut battre la droite de Sarkozy, il faudra bien entrer dans un débat sincère qui devrait à terme, déboucher sur un contrat de gouvernement avec le Modem ». De plus personne n’a oublié que, à l’insu de la direction du PS, entre les deux tours de l’élection présidentielle, allant jusqu’à faire le pied de grue en bas de chez Bayrou comme elle l’a elle-même « élégamment » relaté, Royal lui a proposé d’être son premier ministre en échange de son soutien pour le second tour.
On sait ce que valent les motions de congrès : dés la clôture prononcée, elles sont remisées aux archives. Aubry l’a démontré à Lille en s’alliant avec le Modem tandis que Delanoë lui-même ne s’est prononcé qu’après le second tour des élections municipales contre une alliance…une fois assuré qu’elle ne lui était pas nécessaire pour conserver la mairie de Paris.

Mais en réalité le débat sur la question des alliances cachait une question plus fondamentale, celle de l’avenir du PS. A la différence des autres motions, la motion Royal se prononçait pour ouvrir largement le parti en généralisant la cotisation à 20 €, en décentralisant les instances de direction au niveau des fédérations et surtout en proposant que les candidats du PS aux élections, et notamment le candidat pour l’élection présidentielle soient désignés par des primaires allant au-delà des frontières du PS, sorte de primaire « à l’américaine ». Il est clair que le modèle de Royal, c’est celui du Parti Démocrate en Italie. La motion Royal précisait :
«  Dans le cadre de l’ouverture du parti socialiste et afin de renforcer ses capacités de mobilisation, un effort stratégique sera accompli en direction d’une augmentation massive du nombre de ses adhérents. Parallèlement, un collège électoral de désignation du candidat sera mis en place en direction des ces sympathisants. L’organisation de ces primaires de masse sera soumise à une procédure validée par les adhérents du PS. ».
 Cette perspective, se situant sur une orientation de liquidation du PS, a été massivement rejetée par l’appareil. Cela de la même manière que la tentative de Rocard en 1993 de transformer le PS « en mouvement » (orientation soutenue à l’époque par Mélenchon et …Royal qui était alors furtivement sortie de l’ombre à cette occasion), combinée avec l’échec aux élections européennes de 1994, avait précipité la chute de celui-ci de la tête du PS.

Contre Royal, les autres motions se prononçaient pour le maintien d’un parti de « militants », les apparatchiks élus à tous les niveaux craignant pour une part de perdre le contrôle de la reconduction de leur mandat.


Le vote sur les motions : Royal minoritaire 


Le 6 novembre, les adhérents ont voté. Il faut noter qu’à la veille du vote, Royal a tenté une ultime manœuvre : permettre aux adhérents qui n’étaient pas à jour de leur cotisations de prendre part au vote, les instances du parti étant invitées à les régulariser.  Elle savait que le résultat ne lui serait pas favorable. En effet,  le résultat a été le suivant : motion A (Delanoë) 32 942 voix, soit 25,24 % ; motion C (Hamon) 24 162 voix, soit 18,52 % ; motion D (Aubry) 31 941 voix, soit 24,32 % ; motion E (Royal) 37 941 voix, soit 29,08 %.Fait notable, la participation n’a été que d’environ 55 %. Pour une raison simple, la majeure partie des adhérents de 2006, ceux à 20 €, les « groupies » de Ségolène, se sont volatilisés. Sur Environ 233 000 adhérents répertoriés, seuls environ 168 000 étaient autorisés à voter. On comprend mieux la misérable manœuvre de Royal le 5 novembre.

Ces résultats doivent être comparés à ceux  de novembre 2006 lors du vote pour la désignation du candidat à l’élection présidentielle. Face à Fabius et Strauss-Kahn, Royal avait obtenu au premier tour 107 743 voix, soit 60,7% des exprimés. La participation avait été de 82,3 %. Ainsi d’un vote à l’autre, Royal passe, par rapport aux inscrits de 49,95 % à  21,5 %. Pour elle c’était bel et bien une gifle politique. Pour Delanoë aussi, ce dernier bénéficiant du soutien d’un plus grand nombre de secrétaires fédéraux. Dés lors le PS a été littéralement pilonné par la presse et les média. La presse n’y a pas été de main morte : « Ségolène l’indestructible » ; « En plaçant en tête la motion de Ségolène Royal, les adhérents du PS appellent au renouveau » ; « Ségolène ou la guerre éternelle », « le récit d’un grand retour » etc. Les radios, les chaînes de télévision et les journaux ont jour après jour stigmatisé le « TSS » (Tout Sauf Ségolène).
La bourgeoisie a, après la 6 novembre, tenté de propulser Royal comme l’incontournable future dirigeante du PS.
En deuxième position, devançant de peu Martine Aubry, Delanoë a été le grand perdant dans l’affaire. Il payait cher sa déclaration de mai 2008 « je suis socialiste et libéral »,cela d’autant plus qu’il était équipé d’un bien piètre attelage avec Hollande, Rocard et Moscovici.  Ses concurrents Aubry et Hamon n’ont eu de cesse de rappeler avant le  6 novembre les déclarations de Delanoë.

Par contre, Aubry et Hamon ont tiré leur épingle du jeu en gauchissant leurs discours dans le contexte de la crise (mais l’une des principales référence de Hamon lors des réunions de campagne était Barak Obama).


Le pouvoir des barons


Le résultat du vote sur les motions marque par ailleurs une évolution notable au sein du PS. 21 % des votants proviennent de quatre fédérations sur 102 : les Bouches-du-Rhône, le Pas-de-Calais, le Nord et Paris. 22% des suffrages obtenus par Royal proviennent de quatre fédérations : Bouches-du-Rhône, Hérault, Aude et Paris ; pour Delanoë, un quart des suffrages obtenus provient de cinq fédérations : Paris, le Pas-de-Calais, la Haute-Garonne, la Gironde et le Nord ; 37 % des voix qui se sont portées sur la motion Aubry sont enregistrées dans cinq fédérations : le Nord, le Pas-de-Calais, la Seine-Maritime et la Seine-Saint-Denis.  Il est significatif qu’aucune des têtes de listes des quatre grandes motions ne soit élue à l’Assemblée nationale. Les grands barons du PS, maires de grandes villes ou présidents de région, ont en quelque sorte remplacé les « éléphants » qui dirigeaient le PS  en s’appuyant d’abord sur leur position au sein du groupe parlementaire et en tant que chef de « courants ». Sans aspirer forcément à prendre la direction du PS pour eux-mêmes, ces barons entendent être les « faiseurs de roi » afin de préserver leur position. Toutefois, au-delà de leurs rivalités, les unit le fait qu’ils ne sont élus que parce qu’ils se présentent aux élections sous la « marque » PS.

Le PS est de plus en plus un club d’élus qui dirigent aujourd’hui 350 villes de plus de 15000 habitants, sur un total de 627 (c’est d’ailleurs par ce canal que le PS garde un certain contact avec les masses), et la totalité des régions à l’exception de deux. Il faudrait ajouter dans le compte les conseils généraux, etc. Royal s’est d’ailleurs faite la championne de ce « socialisme » municipal, départemental et régional, celui du « parler vrai » et des « gens d’en bas ». Le Monde du 24/09/2008 trace le portrait de ces barons, Gérard Collomb, l’un de ceux qui se sont engagés avec Royal :
« L’amateur de gros cigares n’a jamais craint de s’afficher à Megève et à Saint-Tropez avec les belles fortunes lyonnaises. Anciennes ou nouvelles, tel Richard Brumm, cet avocat d’affaires lyonnais à la Ferrari rouge, sarkosyste affiché, dont il a fait son adjoint aux finances. Lorsqu’il se déplace à  l’étranger, c’est à la manière des chefs d’Etat, avec une escouade de chefs d’entreprise. Comme en juin dernier à Dubaï : réception somptueuse chez un cheik, randonnée en 4x4 dans le désert, dîner sous la tente et souper au sommet d’un building avec…Cécilia Sarkozy et Richard Attias. Médusés, les chefs d’entreprises lyonnais n’en sont toujours pas revenus ». Bref un « socialiste » à Julien Dray comme les aime Royal et…réciproquement !


Mélenchon vote Royal


Au soir du 6 novembre, Jean-Luc Mélenchon et Etienne Dolez ont annoncé qu’ils quittaient le PS pour constituer un nouveau parti, le Parti de la Gauche. Le 10 novembre Mélenchon déclarait sur I-Tele : « Ségolène Royal a gagné. Elle a envoyé tous les autres au tapis, qui ne méritaient pas mieux. Je salue son opiniâtreté et son courage. Mes camarades n’ont pas l’air d’avoir compris ça. Ils croient qu’ils vont pouvoir la manipuler. Mais c’est un fait. Elle a gagné, et c’est autour d’elle que va se faire la synthèse. Le parti est à 80 % sur une ligne de centre gauche. Il faut admettre cette réalité ». Il ajoutait : « La vérité est que la gauche a perdu la moitié de ses effectifs. Dans les deux précédents congrès, elle pesait 40 %, la voilà réduite de moitié ». Par cette déclaration, Mélenchon votait Royal.

Pour justifier son départ, Mélenchon explique que la gauche du PS est passée de 40% à un peu moins de moitié, c’est-à-dire le score de la motion Hamon qu’il avait ralliée avec Dolez. Il s’agit d’un tour de passe-passe.
En effet, Mélenchon se réfère au résultat des votes des motions pour le congrès du Mans en novembre 2005.  Il additionne dans la « gauche » d’alors les scores des motions NPS de  Montebourg, Peillon et Emmanuelli, et Rassembler à gauche conduite par Fabius.  
Quelle « gauche » en effet ! En réalité, l’initiative de Mélenchon et Dolez avait été préparée bien avant le 6 novembre. Les arguties sur l’affaiblissement de la gauche au sein PS ne servent qu’à tenter de masquer une manière en définitive honteuse de quitter le PS, honteuse en ce qu’elle cherche à interdire que soit tiré un bilan de leur propre activité durant des décennies au sein du PS et notamment au sein du gouvernement de la « gauche plurielle ». CPS reviendra sur le « Parti de Gauche ».


Du congrès de Reims à l’élection du premier secrétaire


Avant le congrès de Reims qui s’est tenu du 14 au 16 novembre, Royal a ressorti du « frigidaire » sa candidature à la direction du PS. Ses partisans sont montés en première ligne pour tenter de faire admettre aux leaders des autres motions que, puisqu’elle était arrivée en tête lors du vote, c’était à elle de constituer la direction du PS. Evidemment, Delanoë, Aubry et Hamon ne pouvaient l’accepter, chacun d’entre eux espérant rallier sur son nom une majorité contre Royal.
Le congrès, dont les débats ont finalement tourné autour de la question de l’alliance avec le centre et celle des frontières du parti, a donné lieu à une foire d’empoigne non seulement entre les partisans de Royal et ceux des autres motions mais aussi, essentiellement entre les partisans de Delanoë et ceux d’Aubry. Finalement, avant la clôture du congrès, qui s’est terminé dans la plus grande confusion, Delanoë a renoncé. Il n’y  pas eu de rassemblement sur une motion majoritaire et Royal, Aubry et Hamon ont confirmé leur candidature au poste de premier secrétaire.

L’élection du premier secrétaire après le congrès, directement par les militants a été instaurée par Jospin. Elle visait à calquer toujours plus le fonctionnement du PS sur celui des institutions de la cinquième République (un secrétaire du PS « bonaparte » élu par-dessus les courants ; Jospin pensait ainsi préparer son destin présidentiel).
Mais l’un des préalables au fonctionnement du système Jospin était qu’une forte majorité se dégage du congrès. Ce qui n’a pas été le cas.

Avant le vote des militants des 21 et 22 novembre, Delanoë s’est rallié à Aubry. Menacé de tout perdre, il a au préalable négocié que les partisans d’Aubry soutiendraient l’un de ses poulains à la direction de la fédération de Paris du PS. Lors du premier tour le 21 novembre, les résultats ont été les suivants : Royal 43,1% ; Aubry 34,5 % ; Hamon 22,4 %.
Le Monde du 22/11/2008 relève : « Mme Royal, qui a amélioré son score de quatorze points par rapport au vote des motions du 6 novembre, a été la principale bénéficiaire  de la légère augmentation de la participation (59,9 % contre 55 %, soit 37 741 votants). Elle est parvenue à capter près de la moitié du vote exprimé en faveur de Bertrand Delanoë, en particulier grâce à l’apport des fédérations où les amis de François Hollande sont les mieux implantés , notamment en Corrèze, le département du premier secrétaire ». Après le premier tour, Hamon a appelé à voter Aubry.
Le 22 novembre s’est déroulé le second tour. Au petit matin du 23, les décomptes donnaient Aubry victorieuse par 42 voix. Ce résultat à 50/50 ne semble pas cohérent avec celui du vote sur les motions. Mais il s’explique en partie par le fait que les affrontements du passé, au-delà des nuances sur l’orientation qui est fondamentalement la même, ont cristallisé des haines de clans et de cliques.

A titre d’exemple, pour nombre d’adhérents, Aubry reste celle qui fut directrice générale adjointe de Jean Gandois, patron de Péchiney et du MEDEF, qui plus est, chargée des  « relations humaines » ; celle qui, avec les lois qui portent son nom,  a permis que s’engage l’offensive généralisée pour la liquidation du code du travail. Ou encore, il est inconcevable pour d’anciens partisans de Jospin, de voter pour une candidate soutenue par Fabius.

Conduits par Valls, les partisans de Royal ont engagé une furieuse bataille pour contester : menace de porter l’affaire devant les tribunaux, appels à des rassemblements devant les bureaux du PS rue de Solferino ; appels à la presse toujours aussi prête à servir les liquidateurs, revendication de l’organisation d’un nouveau vote, etc. Dans le langage châtié qui le sien, Mennucci, puissant patron de la fédération des Bouches-du-Rhône résumait la situation :
« C’est à cause de ce connard de Jospin qu’on en est là ! Quand il était premier ministre, il a fait le quinquennat et l’inversion du calendrier électoral. Résultat : Sarko nous a baisé. Et lorsqu’il dirigeait le parti, Jospin a imposé l’élection du premier secrétaire au suffrage universel. Résultat : on est  dans la merde ! ».
Pour en sortir, les grands élus locaux ont incité Royal à retenir ses chiens. En effet, le petit jeu des dénonciations des truandages des votes, pratiqués dans tous les camps et parfois sur la base d’accords entre les parties adverses, aurait pu conduire à une situation incontrôlable. Il y a eu accord pour confier à un homme de l’art, l’ancien ministre de l’intérieur Daniel Vaillant, la présidence une commission de « récolement ». Son verdict confirmé par la suite par le conseil national issu du congrès de Reims : Aubry élue avec 102 voix d’avance sur Royal.


Une situation instable


Lors du conseil National du PS du  6 décembre, Aubry a présenté la nouvelle direction. En se référant aux  résultats du vote du 22 novembre, Royal et ses partisans ont revendiqué le poste de « numéro 2 » pour Vincent Peillon et celui de la direction de la Fédération Nationale des Elus Socialistes et Républicains FNESR pour Royal. Bien entendu Aubry ne pouvait pas accepter. Du coup, les partisans de Royal ont décidé de ne pas participer à la plus haute instance de direction, le secrétariat national. Un tel cas de figure, où la minorité s’exclut de la direction, est une situation inédite au PS.

Qu’elle le reconnaisse ou non Royal a été rejetée par l’appareil du PS. Elle a échoué dans sa tentative d’en prendre la direction. Dirigeante de second rang au sein du PS, elle a été placée sous les feux de la rampe après sa victoire aux élections régionales de 2004 face à Raffarin (voir sur sa « carrière politique »  dans CPS n° 27 nouvelle série (109) de janvier 2007). Propulsée par la bourgeoisie et profitant d‘une situation où aucun autre leader n’était capable de s’imposer, elle a réussi à être désignée candidate contre Sarkozy en 2007. Après l’élection de Sarkozy, très rapidement les choses se sont gâtées dans ses rapports avec l’appareil dont une grande partie a considéré qu’elle avait perdu une élection « imperdable ». Les révélations sur ses tentatives, dans le dos du PS, de trouver un accord avec Bayrou, ses déclarations sur son désaccord avec le programme défendu par le PS pendant la campagne puis son exigence déjà en juin 2007 d’être désignée candidate du PS lors du prochain congrès, celui de Reims, ont suscité méfiance et rejet au sein d’une partie de l’appareil, points sur lesquels ses rivaux potentiels, malgré leurs divisions, ont su en partie s’organiser pour lui faire barrage.

De plus en plus, Royal a été perçue comme mettant en péril l’existence du PS au profit de ses ambitions présidentielles, d’autant qu’elle a multiplié avec son organisation Désir d’Avenir les initiatives en dehors du parti. Sa déclaration lors de l’université du PS fin août 2008 « Aimez-vous les uns les autres ou disparaissez » ou l’organisation du grand show de sa « fête de la fraternité » en septembre » font qu’elle est considérée comme un corps étranger. Cela d’autant plus qu’elle et ses principaux lieutenants, Valls et Peillon, se sont à maintes reprises illustrés sur la ligne qu’elle rappelle dans un interview au journal Le Monde du 20/11/2008, répondant à la question « Quel type d’opposition préconisez-vous à Nicolas Sarkozy ? » : « Une opposition constructive. Cela nécessite de bien identifier dans la politique de Nicolas Sarkozy ce qui marche et ce qui ne marche pas », ceci après avoir déclaré « J’ai un contact particulier avec le peuple. Cela fait ma force et en intrigue certains ».

Le refus des Royal et Cie. d’être  associés à la direction annonce ses intentions : à la fois en dehors du PS et dans le PS poursuivre l’offensive liquidatrice de ce parti au service de son ambition personnelle démesurée.

Probablement confrontée en permanence aux mauvais coups de Royal, et à la tête d’une équipe issue d’un équilibre entre les partisans de Fabius, Strauss-Kahn, Delanoë et Hamon, la situation d’Aubry est instable. Mais cette instabilité est le produit de la situation dans laquelle est le PS. Ce parti, qui n’a pas changé de nature avec ce congrès, reste pour les masses le seul parti issu du mouvement ouvrier au travers duquel, hors circonstances exceptionnelles, la question du pouvoir puisse être posée.

Mais dans le même temps sa décomposition politique est telle que, même s’il n’a pas été détruit, il réunit lui-même les conditions de sa propre liquidation, en étant fondamentalement incapable, quelles que soient les phrases de « gauche » qui jailliront des bouches d’Aubry ou d’Hamon, d’offrir une alternative politique même de façade au programme de Sarkozy et de son gouvernement. A cela s’ajoute que, sous le fouet de la crise mondiale du capitalisme, tôt ou tard de nouvelles contradictions se développeront au sein du PS en relation avec ce qui vient d’être dit.

Toutes les conditions sont réunies pour que la crise du PS connaisse d’autres développements de grande importance.


8 décembre 2008

 

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