Le « pacte de responsabilité » organise le pillage de la Sécurité sociale, une offensive sans précédent contre les services publics, la baisse des salaires des fonctionnaires. Signé par les organisations anti-ouvrières CFDT, CFTC, CGC, il est pris en charge ‑ à travers des semaines de concertation ‑ par les dirigeants CGT, FO, FSU.

À bas le pacte de responsabilité !

Front unique des organisations ouvrières (partis et syndicats)

Rupture immédiate de la collaboration des directions syndicales à la mise en œuvre de ce pacte à travers la concertation


 

Crise mondiale du capitalisme : nouvelles menaces


Le fait que la crise politique en Ukraine (voir page 10) ait pour conséquence immédiate une chute des valeurs boursières, un renchérissement du prix des matières premières en dit assez long sur la santé de l’économie capitaliste mondiale. Ne l’oublions pas : le déclenchement de la crise politique en Ukraine, ce sont les atermoiements de Ianoukovitch sur la signature de l’accord avec l’Union européenne. Il découlait de son refus, la nécessité pour le gouvernement ukrainien de passer sous les fourches caudines de Poutine pour limiter autant que faire se peut la facture pétrolière et gazière, rendue insupportable au vu de l’état des finances de l’Ukraine, de son déficit abyssal.

Avant même l’ouverture de la crise politique de ces dernières semaines, la situation économique de l’Ukraine était catastrophique. Le gouvernement a été contraint d’emprunter à des taux usuraires (au-delà des 10 % pour les obligations à 10 ans). Les réserves de change du pays ont chuté de 20,4 à 17,8 milliards de dollars entre décembre et janvier, soit 2,6 milliards en un mois... La banque nationale a notamment dépensé 1,7 milliard de dollars de réserve de change durant le seul mois de janvier pour défendre la monnaie nationale. «La probabilité d’une dévaluation forcée s’accroît significativement», estimait Standard & Poor’s vendredi 21 février.


Ce qui menace, c’est le défaut de paiement pur et simple, dont évidemment les conséquences dépasseraient de loin les frontières de l’Ukraine. La menace la plus immédiate concerne d’ailleurs la Russie elle-même, dont les banques sont lourdement exposées, sans compter la dette gazière. Voilà pourquoi, la monnaie ukrainienne a d’ores et déjà entraîné dans sa chute le rouble et derrière elle toutes les valeurs des sociétés implantées sur le marché russe.

Mais la situation ukrainienne est loin d’être isolée. Dévaluation de la monnaie et inflation, alourdissement de la dette publique, augmentation des taux directeurs pour tenter de faire face à la fuite des capitaux, renchérissement du crédit pour les entreprises locales dont les dettes libellées dans les monnaies des pays dominants (dollar, euro...) menaçant leur existence même : c’est là le tableau économique qui tend à se généraliser de nombre de pays dits « émergents » : Argentine, Turquie, Brésil, Inde, Indonésie, Afrique du Sud, etc.

La cause immédiate et la plus couramment évoquée de la fuite des capitaux de ces pays est dans la nouvelle politique de la FED de resserrement progressif de l’achat d’actifs (obligations et valeurs liées aux assurances de crédit immobilier), resserrement du reste très relatif : de 85 milliards à 65 milliards mensuels.

(suite page 2)


Les milliards de liquidités dont la FED avait inondé le marché s’étaient en effet largement investis dans ces pays dits « émergents », provoquant une forte valorisation des monnaies de ces pays et compromettant alors leurs exportations, ce dont la FED – et donc l’impérialisme US - n’avait cure. Aujourd’hui, la restriction, même limitée, de cette politique d’achat d’actifs a pour effet le rapatriement massif des capitaux des pays « émergents » vers les métropoles impérialistes. En 2013, les investisseurs ont ainsi retiré plus de 29 milliards de dollars de capitaux des marchés émergents (actions et obligations confondues).

Mais la raison profonde alimentant cette fuite n’est pas le resserrement de la politique monétaire de la FED, mais le fait que ces pays soient progressivement rattrapés par la crise de surproduction mondiale et que le découplage entre l’atonie, voire la récession, des pays capitalistes dominants et la croissance vigoureuse des « émergents « ne pouvait pas durer éternellement. Ces derniers ont pu, dans un premier temps, tirer la croissance mondiale vers le haut, grâce notamment à un recours massif au crédit, favorisé par des taux d’intérêt réels très bas, à la faveur des gigantesques masses de liquidités injectées par les banques centrales, en particulier la FED. De cette croissance à crédit a résulté un surendettement du secteur privé, notamment en Asie, où d’après un article des Echos du 4 mars intitulé « la crise des émergents ne fait que commencer » : « la dette privée a dépassé les 100 % du PIB. On observe notamment une forte augmentation de la dette des ménages supérieure à 80 % en Malaisie, en Thaïlande et à Taïwan, tandis que la Chine se distingue par une explosion de la dette de ses entreprises culminant à plus de 150 % du PNB ». Dans ces conditions, le choc de la crise de surproduction sur les pays « émergents » n’en sera que plus violent et dévastateur.

Le principal canal de transmission de cette crise aux pays « émergents «, c’est le ralentissement économique de la Chine, dans la mesure où cette dernière est vitale pour les pays « émergents » qui l’approvisionnent en matières premières, comme c’est le cas par exemple du Brésil et de l’Afrique du Sud, ou bien en pièces détachées et composants, comme c’est le cas des pays d’Asie du Sud‑Est.

Ainsi « La Chine est le plus grand risque », écrit Ruchir Sherma, responsable des marchés émergents Morgan Stanley Investment (…), et l’économie chinoise, dont on disait qu’elle allait sauver la croissance mondiale, est aujourd’hui l’épicentre de tous les dangers.

Quant à l’impérialisme US et son instrument, la FED, il manifeste la même indifférence aujourd’hui à l’égard des conséquences désastreuses pour les pays « émergents « de sa politique plus restrictive que celle qu’il manifestait hier lorsqu’il inondait le marché de liquidités. Dans les deux cas, il s’agit de faire porter aux autres pays le fardeau de la crise, usant pour cela de la place prépondérante du dollar sur le marché mondial. Mais jusqu’à quel point cela garantit-il la santé de l’économie américaine elle-même ? C’est la question à laquelle il faut essayer de répondre rapidement maintenant.

 


Reprise américaine ?


« America is back » (« L’Amérique est de retour ») : ainsi croit pouvoir titrer un exemplaire du Monde de l’Économie reprenant, pour décrire la situation économique aux États-Unis, ce qui était le slogan de Reagan dans les années 80. L’» insolente » reprise américaine ferait un brillant contraste avec la stagnation d’une bonne partie de l’Europe, particulièrement la France.

A l’appui de cette thèse, on cite la réduction du déficit commercial à 34 milliards de dollars (son plus bas niveau depuis novembre 2009), la réduction du déficit de l’État fédéral (de 40 % en 2013 par rapport à 2012), le taux de croissance (à 1,9 % sur les douze derniers mois). Comme illustration de cette « reprise » économique, on cite encore le redressement de l’industrie automobile américaine qui, avec 15,6 millions de véhicules vendus en 2013, aurait retrouvé le niveau de 2007.

Ces données doivent pourtant être sérieusement relativisées. Le chiffre de 1,9 % de croissance sur douze mois est en lui-même des plus modestes. 2014 ne s’annonce pas sous les meilleurs auspices, comme l’indique la forte contraction du secteur manufacturier américain en janvier 2014, à son plus bas niveau depuis huit mois.

Drôle de reprise en vérité que celle vendue par les gazettes économiques à longueur d’articles : en janvier 2014, la production manufacturière des deux premières puissances économiques, les États-Unis et la Chine, s’est contractée (dans le cas de la Chine, pour la première fois depuis 6 mois). La réduction du déficit commercial est due exclusivement à la réduction de la facture énergétique, elle-même due à l’exploitation massive du gaz de schiste, qui permet elle-même de diminuer les coûts de production.

Quant à la réduction du déficit de l’État fédéral, elle n’existe que si l’on ne tient pas compte des achats de la FED, en particulier des achats de produits financiers hypothécaires par lesquels la FED évite la banqueroute des assureurs de crédits immobiliers. Or comme le souligne l’économiste Onubre Einze : « En intégrant les dépenses passées et futures de la FED, nous avons d’abord fait un double constat : les déficits publics estimés par la Maison-Blanche ont augmenté en 2013 et resteront à des niveaux élevés si l’on se donne la peine d’y intégrer les dépenses immobilières de la FED. Les estimations de la Maison-Blanche pour 2013 et 2014 pèchent donc par « omission légitime » ou excès d’optimisme... Il est nécessaire de fondre les données de la FED et de l’État fédéral. Si la FED a acheté des RMBS, ou créances titrisées immobilières, à l’automne 2012, c’était pour soutenir le Trésor alors que la crise de la dette se faisait menaçante ». Il précise : « Après 2012, l’apparent tassement de la progression de la dette totale et de la dette de marché sont donc des illusions comptables qui ne résistent pas au rapprochement des données du Trésor et de la FED. »

Et il conclut :

« 1° il y a bien une amélioration des finances publiques, mais elle n’est pas aussi marquée que ne veulent bien le laisser entendre des commentateurs complaisants ;

2° la reprise américaine reste sujette à caution. Elle est avérée pour partie, car le coût d’un dollar de croissance ‑ calcul du rapport présumé entre croissance et dépense publique, ndlr ‑ baisse lentement sans pour autant atteindre un niveau où la croissance pourrait être dite endogène à l’économie. »

Autrement dit, la « croissance » américaine n’existe que dopée à l’endettement. À cet égard, il est significatif que l’accord se soit fait entre républicains et démocrates pour autoriser l’augmentation de la dette fédérale sans plafonnement jusqu’en mars 2015.

Rappelant que le bilan de la FED s’était multiplié par 5 depuis 2006 (de 800 milliards à 4000 milliards de dollars), le même article explique pourquoi le dégonflage dudit bilan est mission quasi-impossible. Les titres hypothécaires rachetés sont pourris, donc invendables. Quant aux obligations d’État, leur mise en vente provoquerait un effondrement de leur valeur et par conséquent pourrait entraîner une hausse dangereuse des taux d’intérêts sur les nouvelles obligations mises sur le marché.

Sans doute il serait vain de nier que, dans le cadre de l’approfondissement de la crise mondiale du système capitaliste, le capitalisme américain s’en tire un peu moins mal que les autres, et ce pour deux raisons essentielles.

D’une part, il garde, grâce à la place du dollar dans les échanges, l’aptitude à reporter sur les autres pays le poids de sa propre crise.

D’autre part, Obama a pu, grâce à la pleine collaboration des dirigeants syndicaux de l’AFL-CIO, porter les coups les plus violents au prolétariat, détruire massivement le capital jugé insuffisamment productif, baisser brutalement le coût de la force de travail, et ainsi, jusqu’à un certain point, rétablir la compétitivité de l’économie américaine. Entre 2007 et 2013, 300000 postes de travail ont été supprimés dans l’automobile. Le Monde du 30 janvier indique que désormais le coût de production d’un kilo de fil est moindre aux États-Unis qu’en Chine ! Et que la valeur réelle du SMIC a diminué de 30 % depuis 1968 ! Récemment, c’est sur injonction de l’appareil central du syndicat que les travailleurs de Boeing ont dû accepter les plus brutales remises en cause de leur système de retraites et d’assurances sociales ! Quant à l’ « affrontement » républicains/démocrates sur le budget fédéral, il s’est conclu par un accord incluant de nouvelles attaques contre l’indemnité du chômage et Medicare - le système de couverture Santé minimum des personnes âgées.

Ainsi, le seul « secret » de la compétitivité dans le cadre de l’exacerbation de la concurrence inter-capitaliste provoquée par la crise de surproduction tient dans cet impératif : s’en prendre toujours plus violemment aux conditions d’existence des masses laborieuses, augmenter le taux d’exploitation, diminuer le coût de la force de travail. C’est là ce qui détermine toute la politique du gouvernement Hollande-Ayrault-Duflot-Pinel en France, confronté à une dégradation qui ne se dément pas de la situation du capitalisme français.


Situation du capitalisme français : tous les indicateurs catastrophiques !


Le capitalisme français va de mal en pis. C’est là un fait dont attestent tous les chiffres. Le déficit commercial atteint 61 milliards, sa légère réduction provenant non des gains à l’exportation... mais de la diminution des importations. La comparaison avec l’Allemagne et ses 200 milliards d’excédents est accablante. Le poids économique de la France est désormais largement inférieur à la moitié de celui de l’Allemagne. L’investissement continue de baisser. Le Monde du 28 janvier dresse un tableau du désastre : « L’essentiel des sites date soit d’avant-guerre, soit des années de forte croissance, entre 1945 et 1975... L’exemple des robots est particulièrement parlant. En 2013, la France ne compte que 33000 robots industriels dans ses usines contre 58600 en Italie et... 165800 en Allemagne... Aucun redressement n’est en vue. Après une remontée en 2010 – 2011, les commandes de machines-outils et autres équipements de production sont reparties à la baisse depuis la mi-2012. Elles ont chuté de 25 % en 2013. »

Un des représentants autorisés du capitalisme français explique : « Dans l’immédiat, un redémarrage paraît improbable. Il y a peu d’incitation à investir : les marges bénéficiaires sont faibles, la croissance aussi, les usines sont déjà en surcapacité. En outre, les défaillances remontent.... »

La baisse astronomique des IDE (Investissements directs à l’étranger), de – 77 % pour la seule année 2013, est un autre élément s’inscrivant dans le tableau du désastre.

Quant aux déficits, malgré les attaques contre les services publics et la Sécurité sociale, ils ne baissent guère faute de croissance économique, et le gouvernement français a de nouveau essuyé d’humiliantes remontrances de Bruxelles. La dette continue à grimper et devrait atteindre 97 % du PIB en 2015.

La situation de PSA est emblématique. PSA – qui annonce la fermeture d’une chaîne de production à Poissy - essaie de se sauver au prix d’un accord avec le chinois Donfeng. Ce dernier entre dans le capital à hauteur de 14 %... en même temps que l’État qui, pour « sauver » PSA, soutirera 800 millions d’euros du budget de l’État, c’est-à-dire de la poche des travailleurs. Ici ou là, on s’inquiète de cet accord. Donfeng ne va-t-il pas utiliser les compétences technologiques de PSA pour, dans un second temps, l’évincer sans ménagement du marché chinois ? Quoi qu’il en soit, c’est la fin de la domination de la famille Peugeot et du modèle du capitalisme familial et national.

 

 


Chômage massif, plans de licenciement


C’est le prolétariat qui paie le marasme du capitalisme français. Le chômage ne cesse d’enfler, dépassant largement – officiellement – les 5 millions de chômeurs. La jeunesse est vouée massivement au chômage ou au mieux aux « stages » (1,6 million de stagiaires soit 1 million de plus qu’en 2006), c’est-à-dire à un travail quasi gratuit, à l’aumône des « gratifications » que l’Assemblée a récemment légalisées avec le soutien bruyant des appareils syndicaux.

Les plans de licenciements succèdent aux plans de licenciements avec le même sinistre scénario : « contre-plan » de licenciements proposés par les dirigeants syndicaux, puis « lutte » ‑ agrémentée parfois de séquestration de quelques heures de représentants patronaux ‑ pour une meilleure indemnisation du chômage. Et lorsque quelques miettes sont obtenues, bruyants communiqués de « victoire » des mêmes dirigeants syndicaux.

Et lorsque les travailleurs tentent de résister comme pour l’entreprise de camionnage Mory‑Ducros en bloquant les dépôts, les mêmes dirigeants syndicaux qui se flattent de ne pas avoir appelé à ces blocages appellent unanimement (CGT comprise) à la reprise pour « ne pas compromettre le plan de reprise de l’entreprise » (3000 licenciements sur 5000 !). Enfin, lorsque confrontés à l’indignation des travailleurs les responsables syndicaux de l’entreprise - CFDT comprise - se trouvent dans l’incapacité de signer l’infâme accord, ce sont les responsables nationaux qui viennent le signer en lieu et place de ceux-là.

Ainsi se manifeste jusqu’à son terme le soutien des appareils syndicaux aux exigences du capital français aux abois. Mais rien ne l’indique mieux que la politique de ces mêmes appareils sur la mise en œuvre du « pacte de responsabilité » du gouvernement.


« Pacte de responsabilité ». Cazeneuve, ministre du Budget :
« Nous voulons faire en sorte que les entreprises restaurent leurs marges »


Ainsi que l’indique le ministre Cazeneuve, le sens du « pacte de responsabilité » est transparent. Pour faire 30 milliards de cadeaux aux capitalistes, le gouvernement Hollande-Ayrault-Duflot-Pinel porte une attaque d’une violence inédite contre la Sécurité sociale en supprimant les cotisations patronales, salaire différé, sur la branche « Famille », en même temps qu’il annonce des coups d’une brutalité sans précédent contre les services publics, la fonction publique d’État comme les collectivités territoriales.

Le but du « pacte de responsabilité » est clair : il faut rattraper, en matière d’attaques contre les masses, le retard pris par rapport aux capitalismes concurrents.

Le « pacte de responsabilité » n’est lui-même qu’un début. Il n’en marque pas moins un changement de cadence dans l’offensive contre les conditions d’existence des masses laborieuses.

Quant aux prétendues « contreparties », elles n’existent pas, et ne sont évoquées que pour permettre aux dirigeants syndicaux de justifier leur présence à la « concertation » permettant la mise en œuvre du pacte. Du reste, de quoi parle‑t‑on lorsqu’on parle de contreparties ? On parle de développement du « dialogue social » - incluant tout de même les garanties sur la « carrière » des « militants syndicaux » et le financement des syndicats, autrement dit l’engraissement des appareils syndicaux. On parle de développement de l’alternance et de l’apprentissage, autrement dit du développement de la surexploitation de la jeunesse. En clair, ces « contreparties » sont plutôt des compléments aux attaques contenues dans le pacte lui-même. En tout état de cause, accepter même de discuter des « contreparties », c’est entériner le coup majeur porté à la Sécurité sociale ; c’est entériner celui porté aux services publics à travers les 50 milliards de réduction budgétaire.

Sur ce dernier point, sous la direction de Hollande lui-même, flanqué de quelques ministres et éclairé par le même cabinet conseil qui sévissait déjà sous Sarkozy (le cabinet MacKinsey, qui facture ses services à plus de 250 millions d’euros – mais dans ce cas, on ne compte pas à la dépense !), a été mis en place un Conseil stratégique sur la dépense publique. Il a commencé à distiller quelques-unes de ses « solutions » pour atteindre les fameux 50 milliards d’économies.

Ce qui porterait à 75 milliards d’euros les coupes budgétaires sur tout le quinquennat. Le gouvernement a ciblé trois « gros viviers d’économie » selon ses propres termes : la fonction publique d’État, la protection sociale, où il vise 5 milliards d’économies par an sur le dos de l’assurance maladie en attaquant notamment l’hôpital, et les collectivités locales à travers la décentralisation.

Pour parvenir à de telles restrictions budgétaires, il va falloir briser le statut des fonctionnaires, faire baisser leurs salaires. C’est le message de Moscovici quand il déclare qu’il faudra « voir comment la masse salariale globale – effectifs, salaires, primes – peut être redéployée » et c’est ce qu’a révélé l’annonce faite début février par Peillon de la remise en cause générale des règles d’avancement de carrière dans la fonction publique. Le même Peillon démentit ensuite. Les directions syndicales, comme celle la FSU, ont joué la surprise. Pourtant dans le même temps d’après Les Échos du 6 février, Lebranchu, « a engagé le chantier de la « révision » du statut des fonctionnaires avec les syndicats ». Le journal patronal, sous le titre « Certains sujets clos ou tabous sont désormais sur la table », explique : «La question des recrutements dans la fonction publique est sur la table, tout comme celle de l’avancement automatique, mais aussi celle des primes, indique-t-on au sein de l’exécutif. Rien n’est écarté. C’est tout l’intérêt de la démarche. Mais il faut d’abord poser la question de l’effort global demandé aux fonctionnaires. Puis de ce qui est faisable, et dans quel calendrier».

Dans une lettre aux fédérations syndicales le Premier ministre prétend, pour donner le change, qu’il n’y aura pas de baisse du pouvoir d’achat des fonctionnaires, pour sauver l’essentiel : « pouvoir compter sur le sens des responsabilités des organisations représentatives de fonctionnaires pour s’engager durablement dans cette démarche de modernisation de notre fonction publique », c’est-à-dire comment faire participer les fonctionnaires « aux efforts de redressement du pays »

Idem pour la « fuite » évoquant les 10 milliards de réduction des dotations de l’État aux collectivités locales. La ministre Lebranchu ne confirme pas le chiffre... mais confirme que la réduction de cette dotation est bien à l’étude. Et bien d’autres projets encore : soumission à l’impôt de la totalité de la CSG, attribution sous conditions de ressources des allocations familiales, etc. Certes, rien ne sera annoncé avant les municipales, mais ensuite tout ira très vite puisque dès avril le « pacte de responsabilité » sera devant le Parlement sous forme de l’engagement de la responsabilité du gouvernement.

 

 


PS : des « protestations » qui demeurent dans le cadre de l’orientation du gouvernement


Le « pacte de responsabilité » est si brutalement anti-ouvrier, si grossièrement pro-patronal, qu’il ne pouvait pas ne pas susciter des réactions à l’intérieur du Parti socialiste. C’est le sens du texte signé par un certain nombre de responsables de la dite « gauche » socialiste (Maurel, Emanuelli, Quilès, Lieneman, Dray, etc.). Ce texte déclare notamment : « En dépit de la salutaire rupture avec l’ère Sarkozy, l’orientation en matière de politique économique suscite des désaccords et des inquiétudes dans nos rangs. Nous ne nous reconnaissons pas dans le discours qui tend à faire de la baisse des « charges » et du « coût du travail » la condition d’un retour de la croissance. Il n’y a pas de « charges » mais des cotisations sociales qui sont en réalité du salaire différé. Et nous sommes inquiets quand nous découvrons que la baisse des cotisations promise aux entreprises s’accompagne d’une réduction de 50 milliards d’euros des dépenses publiques en trois ans, sans même savoir quels sont ceux qui en supporteront les conséquences... Les préconisations avancées jusqu’à présent sont déséquilibrées. Les socialistes se sont toujours refusés à opposer offre et demande, production et redistribution, bonne gestion des comptes publics et relance de l’économie. Les propositions contenues dans le « pacte de responsabilité » semblent s’écarter de cette position d’équilibre. L’objectif de baisse accélérée des dépenses publiques comporte des risques majeurs. Le Président de la République s’est engagé à ne pas toucher au modèle social français. Néanmoins, la priorité accordée aux 50 milliards d’euros d’économies en trois ans nous fait craindre une réduction du périmètre d’intervention de l’État, nuisible aux politiques sociales existantes et au fonctionnement des services publics ».

Dès la première lecture, on voit à quel point, la « critique » de la politique du gouvernement est pour le moins mesurée. Passons sur la « salutaire rupture avec l’ère Sarkozy » ! Où dont ont-ils vu cela ? Et quel autre sens peut avoir cette phrase, sinon celui d’une allégeance renouvelée à Hollande ? Quant à « l’équilibre » entre « production et redistribution, bonne gestion des comptes publics et relance de l’économie », dans le meilleur cas c’est le songe creux de concilier les intérêts de classe antagoniques.

Mais le simple fait de rappeler qu’il n’y a pas de charges mais des cotisations qui sont du salaire différé, la simple manifestation de la « crainte d’une réduction (…) nuisible au fonctionnement des services publics », c’en était vraiment trop pour Hollande et le gouvernement. Voilà pourquoi lors d’un séminaire du PS sur le « pacte de responsabilité » organisé le 10 février, les signataires du texte furent fermement conviés... à se taire, la parole étant monopolisée par les apologètes du pacte et la fonction dudit séminaire réduite à la promotion de celui-ci.

On peut tirer de ce fait deux leçons essentielles. La première est que, totalement appuyé sur les institutions de la Ve République, Hollande entend bien réduire le PS au parti godillot, le « parti du président ».

La seconde : quelle que soient les limites (oh combien étroites !) des « critiques » dans le PS du « pacte de responsabilité », elles manifestent le fait que le PS demeure un parti d’origine ouvrière, parti « ouvrier-bourgeois » selon la formule de Lénine, c’est-à-dire 100 % bourgeois du point de vue de sa politique, mais conservant un lien avec le prolétariat – dans le cas du PS un lien de nature exclusivement électoral en l’occurrence. Or cette appréciation est loin d’être secondaire. Elle nous permet d’entrevoir qu’en cas de surgissement du prolétariat sur le terrain de la lutte des classes directe, la contradiction entre la politique du gouvernement et l’existence d’une majorité PS-PCF à l’Assemblée se manifesterait au grand jour sous la forme d’une crise politique dans laquelle la classe ouvrière pourrait s’engouffrer sur ses propres objectifs.

Tel n’est évidemment pas le cas aujourd’hui. Et cela pour au moins une raison décisive : les directions syndicales font tout ce qui est en leur pouvoir pour éviter un tel surgissement du prolétariat. C’est ce que révèle la position qu’elles ont adoptée dès le lendemain de l’annonce du « pacte de responsabilité ».


Déclaration commune CFDT-CGT-FSU-UNSA : « dans le cadre du pacte de responsabilité »


C’est avant même la conférence de presse de Hollande annonçant l’agenda de l’adoption du « pacte de responsabilité » - et pour le garantir de leur soutien -, que les dirigeants CFDT-CGT-FSU-UNSA adoptaient un texte commun dont la dernière phrase résume l’orientation :

« Les organisations signataires porteront ces revendications et objectifs communs lors des discussions qui se dérouleront dans le cadre du pacte de responsabilité ».

Évidemment, s’inscrire dans une discussion « dans le cadre du « pacte de responsabilité » est incompatible avec toute revendication ouvrière. Mais précisément la lecture de ce qui précède indique que toute revendication ouvrière est écartée : pas un mot contre les plans de licenciement. Et lorsque la déclaration aborde la question du pouvoir d’achat dans la fonction publique, il s’agit d’un faux-semblant puisque le « pacte de responsabilité » que les signataires acceptent implique au contraire une nouvelle offensive contre les salaires des fonctionnaires.

Berger, dirigeant CFDT, met les points sur les i : «Nous avons signé un texte qui dit que nous allons porter ensemble des propositions dans le cadre du pacte de responsabilité, en demandant des contreparties sur l’emploi, l’apprentissage, etc. Cela signifie ne pas le dénoncer a priori. »

La direction de la CGT comme celle de la FSU doivent, certes à usage interne, tenir un langage un peu différent. On peut trouver, noyées au milieu d’autres considérations, des phrases réaffirmant que les cotisations patronales sont du salaire et condamnant vaguement leur suppression. Mais, à vrai dire, ces phrases ne changent rien.



Le Paon déclare : « Il nous siffle et il faudrait qu’on arrive »... suite à quoi.... il arrive !


La preuve, c’est la participation pleine et entière de la direction CGT comme celle de FO aux concertations qui ont commencé le 28 février et qui continuent. C’est en toute conscience que les directions syndicales jouent le rôle de béquille du gouvernement et du MEDEF. C’est ce dont témoigne l’interview de Lepaon au Figaro :

« Le président de la République signe son deal avec Pierre Gattaz, puis on nous demande de nous rencontrer entre organisations patronales et syndicales. Il nous siffle et il faudrait qu’on arrive ! On a l’impression d’être utilisés, c’est assez désagréable. »

Utilisés au service du gouvernement et du MEDEF, sans aucun doute. Mais apparemment, Lepaon est de taille à surmonter le « désagrément » puisqu’il annonce tout de go : « Nous participerons aux discussions... Nous ne pratiquons pas la politique de la chaise vide » quitte à dire plus loin : « Nous ne rentrons pas dans le système des contreparties car nous récusons le pacte ».

Mais peu importent pour le gouvernement et le MEDEF les phrases dont la direction de la CGT accompagne sa participation. Les uns et les autres savent qu’elles ne visent qu’à donner le change. Gouvernement et MEDEF n’ont besoin que d’une chose : que les directions participent. Hollande ne l’a pas caché dans ses « vœux aux partenaires sociaux » le 21 janvier : « le pacte de responsabilité ne suppose pas nécessairement l’accord de tous et je le comprends. Mais il appelle la participation de tous. ». C’est ce que fait la direction de la CGT, comme celle de FO en l’accompagnant de sa petite musique propre.


L’appareil FO n’a pas signé la déclaration CFDT-CGT-FSU-UNSA,
mais il défend fondamentalement la même orientation


L’association de la direction de la CGT à la CFDT « dans le cadre du pacte de responsabilité » permet à la direction de FO d’adopter sans aucun risque pour le gouvernement un langage apparemment plus radical.

« Force Ouvrière ne s’associera pas à ce que nous continuons à appeler un « marché de dupes ». Qui plus est, « avaler » ce pacte c’est avaler 50 milliards d’euros de réduction des dépenses publiques et sociales, ce qui aura à coup sûr un effet récessif donc négatif sur l’emploi, la protection sociale, les services publics et le pouvoir d’achat », indique Mailly dans son édito du 4 mars.

Pourtant le 21 janvier, dans une interview au journal Les Echos, le même Mailly adopte une étrange argumentation :

« Les contreparties évoquées par François Hollande sont illusoires. Une entreprise n’embauche que si son carnet de commande le lui permet ».

Ainsi, pour Mailly, le droit au travail de l’ouvrier est subordonné au « carnet de commande » de l’entreprise. Or précisément, dans le cadre de la crise de surproduction qui caractérise aujourd’hui le capitalisme, les « carnets de commande » sont, sinon vides, du moins très insuffisamment pleins. Et c’est bien pourquoi, à PSA, à Mory‑Ducros, à Michelin les capitalistes licencient à tour de bras... avec l’aval des dirigeants FO dans les deux premiers cas cités notamment. Sous un vernis radical, ce que révèle l’argumentation de Mailly, c’est la soumission totale aux impératifs de l’économie capitaliste. À cet égard, la base sur laquelle est appelée la journée d’action du 18 mars - journée d’action dont la direction FO se flatte d’être à l’initiative - est éclairante.


L’appel à la journée d’action du 18 mars : le complément « de lutte »
à la participation des dirigeants syndicaux au « pacte de responsabilité »


Selon un scénario bien rodé, l’appel se fait sur les bases les plus floues et générales possible :

« Elles invitent à rechercher l’unité d’action la plus large pour exiger des mesures urgentes en faveur des salaires, de l’emploi, de la protection sociale et du service public. »

Certes, la déclaration commune ne peut tout de même éviter totalement d’évoquer ledit pacte, mais les formules sont adroitement ciselées pour critiquer les « annonces liées au pacte » sans exiger le retrait du pacte.

« Nos organisations considèrent que les annonces liées au «Pacte de responsabilité», et en particulier les 50 milliards d’euros d’économies programmées, répondent d’une logique inacceptable d’austérité et attaquent inévitablement le financement des services publics, de la protection sociale et de la solidarité nationale alors que les besoins sociaux augmentent. »

En clair, il s’agit à toute force d’éviter l’affrontement avec le gouvernement, affrontement qui ne pourrait que se nouer sur le mot d’ordre : à bas le pacte de responsabilité ! Du reste, la forme rejoint le contenu : manifestations locales, pas d’appel central à la grève, etc. En ce sens, la journée d’action du 18 s’inscrit parfaitement dans la politique de « concertation » avec le gouvernement. Et cela indépendamment du fait que les travailleurs répondront ou non à cet appel, ce que personne ne peut dire...


Autres aspects de l’offensive


Fort de la soumission des directions syndicales au cadre du pacte, le MEDEF pousse à fond son avantage, notamment dans la négociation sur l’indemnisation du chômage : modulation de l’indemnité chômage selon le taux de chômage, ce qui signifie en réalité que l’indemnité chômage cesse d’être un droit mais est complètement soumise aux aléas de l’économie capitaliste, suppression pure et simple du statut des intermittents du spectacle. Sur ce dernier point, le gouvernement fait mine de protester, mais il faut y regarder de plus près. Le Monde du 18 février indique que Filipetti, ministre de la Culture, après avoir « dénoncé l’attitude agressive et scandaleuse du MEDEF » ... « avance aussi des pistes pour réformer le système de l’intermittence... ». Elle cite « le plafonnement du cumul possible entre rémunérations d’activité et périodes de chômage » et conclut : « Je demande juste au MEDEF d’examiner ces propositions. ».

Dans l’offensive gouvernementale, il faut aussi accorder une place centrale à l’offensive contre les enseignants du secondaire (après celle contenue dans le décret « rythmes scolaires » pour ceux du primaire) et leur statut concentré dans les décrets de 50. Le corps enseignant doit, pour le gouvernement, être défait : c’est aussi une condition pour engager de la même manière l’attaque générale contre le statut général de la fonction publique incluse dans les 50 milliards de restrictions budgétaires programmées. (voir article Enseignant dans ce numéro de CPS).

Enfin et de manière continue, le gouvernement fait la guerre à l’Hôpital Public : fermetures de service - comme celui des urgences à l’Hôtel-Dieu de Paris, et partout dans les hôpitaux, plans de suppressions de postes au nom du « retour à l’équilibre », plans pilotés directement à partir du ministère. Les lourdes menaces contre la possibilité des étudiants infirmiers d’obtenir leur diplôme suite au boycott des cliniques privées de leur stage font partie de cette offensive. Mais il faut ajouter que le gouvernement lui-même a décidé de réduire considérablement le nombre de place ouvertes au concours, lorsqu’il n’a pas, dans certaines régions,... fermé le concours cette année ! La mobilisation des étudiants infirmiers pour la défense de leur diplôme se mène au compte du droit à la santé de l’ensemble de la population laborieuse.

Pour l’ensemble des étudiants et leurs familles, en raison de la baisse de la dotation de l’État aux universités qui asphyxie littéralement certaines d’entre elles, ce qui se profile, c’est une hausse généralisée des frais d’inscription dans la foulée de celle que vient d’entériner le gouvernement pour les écoles d’ingénieurs publiques des Mines : + 1000 euros pour les étudiants européens, + 3000 euros pour les étudiants non-européens.

 

 


Union nationale en soutien à l’intervention de l’impérialisme français en Afrique


Réaction sur toute la ligne à l’intérieur ; réaction sur toute la ligne à l’extérieur. Le gouvernement français vient de faire adopter à la quasi-unanimité la prolongation de l’opération Sangaris en Centrafrique. N’est-il pas extraordinaire que la seule opposition soit venue d’un quarteron de députés UMP (Lemaire, Wauquiez) pour des raisons qui n’ont évidemment rien à voir avec l’anti-impérialisme ! Soutien du PS et du PCF, silence total des organisations syndicales, tel est le sombre tableau de la situation. L’alibi de l’intervention est d’éviter les massacres interethniques et religieux. La réalité, c’est que l’intervention française les a décuplés. Hier, les troupes de la Seleka pillaient et massacraient les populations dites « chrétiennes ». Aujourd’hui, ce sont les milices « anti-Balaka » qui massacrent méthodiquement la population musulmane sous l’œil indifférent des troupes françaises. Et pour cause ! Ces milices sont structurées par Bozize et ses partisans, lequel Bozize, ancien dictateur du pays, était l’homme lige de l’impérialisme français.

Par ailleurs en RCA, comme du reste au Mali où la situation antérieure à l’intervention française tend à se rétablir, le succès de l’entreprise de l’armée pourrait tourner au désastre. D’autant que les autres puissances impérialistes n’ont nullement l’intention de s’engager, laissant à la France le soin de faire le travail.

En tout état de cause, les militants de notre Groupe (voir interventions militantes) sont les seuls, dans les syndicats, dans la CGT et la FSU en particulier, à combattre avec constance contre les appareils dirigeants sur la ligne de l’internationalisme prolétarien :

Retrait immédiat des troupes françaises d’Afrique, en particulier de RCA et du Mali !

 


Municipales : aucune possibilité pour le prolétariat d’exprimer un vote de classe


C’est dans ce contexte qu’auront lieu les élections municipales. La politique du gouvernement, la soumission de la majorité de députés PS-PCF à l’Assemblée, tout va concourir à une abstention massive des couches populaires. Ajoutons que cette politique, à laquelle il faut ajouter celle des directions syndicales, créent un terrain idéal pour une progression sensible du Front national. Quant à l’UMP, sa crise récurrente, avec récemment encore les affaires Copé et Buisson, lui interdiront sans doute de profiter à fond de la déconfiture promise aux listes dans lesquelles figurent les candidats du PS et du PCF.

Pour les travailleurs, confrontés à des listes incluant à côté de représentants du PS et du PCF des personnalités bourgeoises présentées sous diverses étiquettes (« écologiste », « citoyens », « société civile »), ils ne pourront donc exprimer un vote de classe sauf, à rayer les dites personnalités bourgeoises avec pour effet que le vote sera comptabilisé comme nul. Il faut noter que, dans la plupart des villes, le PCF se présente dans le cadre de ces listes « union de la gauche », ce qui indique son degré de soumission à la politique de Hollande. Mais le Parti de Gauche de Mélenchon, qui peste contre la politique du PCF, n’hésite pas, partout où cela ne lui est pas refusé, à se présenter avec EELV... composante bourgeoise du même gouvernement Hollande. Quant aux diverses listes dites d’« extrême gauche » (NPA, LO), elles se gardent bien de mettre au centre ce que ferait une véritable organisation révolutionnaire dans les élections, à savoir le combat pour défaire le gouvernement Hollande-Ayrault et pour cela la réalisation du front unique des organisations ouvrières, la rupture du dialogue social. C’est pourquoi elles ne constituent pas une réelle alternative.



Le prolétariat muselé


Il est incontestable que la situation présente en France est marquée par une offensive de la bourgeoisie qui semble se développer sans résistance significative du prolétariat et de la jeunesse. À cet égard, le contrôle des appareils syndicaux s’exerce sans accroc à quelques exceptions près pour paralyser le prolétariat.

Deux ans après son élection, la majorité PS-PCF qui concrétise la défaite des partis bourgeois, n’a certes pas disparu. Mais la classe ouvrière ne peut s’en saisir. Par ailleurs, les organisations syndicales (CGT, FO, FSU) demeurent des organisations ouvrières, et la contradiction avec l’appareil bourgeois qui les dirige n’a pas disparu : l’intervention des militants révolutionnaires, là où ils le peuvent, la fait resurgir. Nous devons ainsi considérer comme significatif que dans un congrès départemental CGT près d’un tiers des délégués se prononcent contre le « pacte de responsabilité », pour la rupture de la concertation, comme sont significatives les prises de positions d’établissements exigeant de la direction du SNES qu’elle rompe son soutien au projet Peillon de destruction du statut des enseignants. Mais à cette étape, le mouvement de la classe ouvrière n’a pas surgi. Le désarroi, l’écœurement dominent et limitent considérablement l’ampleur de l’intervention qui peut être celle des militants regroupés autour de Combattre pour le Socialisme.

 

 


Quelle orientation avancer ?


Il n’en est que plus indispensable d’indiquer à l’échelle de nos forces la seule voie pour permettre au prolétariat et à la jeunesse d’échapper à la misère, la précarité, le chômage de masse qui est le seul avenir que leur réserve le capitalisme en crise.

Il faut, partout où c’est possible, œuvrer au regroupement politique pour la rupture des directions syndicales avec le gouvernement Hollande et le MEDEF :

 

Il y a deux ans les travailleurs ont élu une majorité PS-PCF à l’Assemblée nationale. Celle-ci n’a pas cessé depuis deux ans de se prosterner devant toutes les mesures anti-ouvrières du gouvernement. On ne peut qu’en conclure : seule la mobilisation des masses pourra les contraindre à rompre cette soumission. Le gouvernement a dit sa volonté d’engager sa responsabilité en avril sur le « pacte de responsabilité ». La responsabilité des directions syndicales est d’appeler alors à une manifestation centrale à l’Assemblée sur la ligne : Députés PS-PCF, refusez d’adopter le « pacte de responsabilité » ! Refusez de voter la « confiance » au gouvernement !

 

 


La classe ouvrière, seule classe révolutionnaire


Aux sceptiques qui ne manqueront pas d’objecter la faiblesse des réactions du prolétariat, il faut répondre : la classe ouvrière est une réalité mondiale. Elle n’a pas cessé, elle ne cesse pas de combattre. Des centaines de grèves ont lieu chaque jour en Chine pour les salaires, contre les licenciements ! Au Cambodge, les ouvrières bravent le couvre-feu pour affronter le gouvernement des patrons qui leur impose des salaires de 50 euros par mois !

En Égypte, ceux qui imaginent que la dictature militaire de Sissi a réussi à rétablir purement et simplement la situation antérieure à 2011 vont être détrompés. À nouveau, les ouvriers du textile de Mahalla et avec eux d’autres secteurs de travail (ceux qui par leur grève en 2008 avaient donné le point de départ de la mobilisation conduisant à la chute de Mubarak) se sont mis en grève contre les salaires de misère. Malgré les trahisons (le dirigeant du syndicat qu’ils ont constitué est maintenant ministre de Sissi !), le prolétariat égyptien relève la tête.

En Europe, en Bosnie, à Tuzla d’abord puis à Sarajevo, les ouvriers se sont mis en grève contre les privatisations. Ils ont pris d’assaut les bâtiments du pouvoir. Or, on le sait, la Bosnie, il y a 20 ans étaient ravagée par la guerre menée par les diverses factions nationalistes serbes, croates, « musulmanes » dressées les unes contre les autres par les impérialismes rivaux. Il n’en est que plus significatif que les manifestations de la classe ouvrière et de la jeunesse se rassemblent sous le mot d’ordre : « À bas les nationalismes ! «, exprimant sa volonté de se rassembler par-delà les divisions ethniques entretenues.

Certes, le fait dominant n’en demeure pas moins le désarroi, comme le montrent à nouveau les dramatiques événements d’Ukraine. Ce désarroi a ses racines historiques profondes, dans le rétablissement du capitalisme en Russie et en Chine, après des décennies de domination stalinienne qui d’ailleurs le préparait. Mais d’ores et déjà la réalité est contradictoire. D’ores et déjà, les combats ouvriers dans de nombreux pays manifestent la volonté de le surmonter.

La question décisive demeure cependant celle des instruments politiques dont peut disposer le prolétariat, en particulier celle du Parti ouvrier révolutionnaire, de l’Internationale ouvrière révolutionnaire. L’exemple de la Bosnie est particulièrement éclairant. Le mouvement est un mouvement prolétarien. Il tend à établir ses propres organes de pouvoir en constituant un « Plenum ». Mais faute de parti et d’organisation, ce sont les forces bourgeoises et petites-bourgeoises qui y imposent leur vue, se prononcent pour un « gouvernement d’experts », en appellent à l’Union européenne. C’est là une vieille leçon depuis le XIXe siècle : tant que le prolétariat n’est pas organisé, il se fait immanquablement voler ses propres victoires.

C’est la raison pour laquelle ce numéro de CPS accorde une telle importance aux tentatives aujourd’hui à l’œuvre en Afrique du Sud pour constituer un Parti ouvrier (comme notre numéro précédent l’avait fait pour la Bolivie). Qu’une fédération syndicale rassemblant plusieurs centaines de milliers de membres se prononce pour la rupture avec le gouvernement Zuma, pour la constitution d’un « mouvement socialiste » est d’une extrême importance, même si on ne peut évidemment faire aucun pronostic sur l’avenir d’une telle tentative. Que cela se produise dans un pays où depuis deux ans et la grève de Marikana n’ont cessé de se développer de puissants mouvements de classe du prolétariat noir ne doit bien sûr rien au hasard.

Ce qui se passe en Afrique du Sud indique que tôt ou tard, le prolétariat tendra à nouveau à s’organiser sur l’axe de la révolution prolétarienne. C’est sur cette tendance qui inévitablement va resurgir en relation avec de nouveaux développements de la lutte des classes que notre Groupe modestement entend faire fond, en s’appuyant sur les acquis historiques du mouvement prolétarien cristallisés dans les acquis politiques des Ire, IIe, IIIe et IVe Internationales, comme dans ceux du Comité pour la construction du POR et de l’IOR dirigé par Stéphane Just.

Nous invitons nos lecteurs à s’associer à ce combat


 

 

Le 6 mars 2014

 

 

N.B. : Au moment où nous bouclons cet article, nous apprenons que CFDT-CGC-CFTC ont signé le pacte, la CGT et FO refusant de signer. Comme l’a indiqué le gouvernement lui- même, la signature était accessoire. L’essentiel était de participer. Ce qui fut fait. La question essentielle, c’est que les directions syndicales CGT-FO-FSU se prononcent pour le retrait pur et simple du pacte ! Ce que justement elles se refusent à faire !

 

 

 

 

 

«