Article paru dans Combattre pour le Socialisme n°77 d'avril 1999

 

Allemagne: après les élections législatives

 

Résultats des élections du 27 septembre 1998: défaite retentissante des partis bourgeois essentiels


Le tableau ci-après donne les résultats de toutes les élections au Bundestag .

 

Année

Participation

Résultats en % d’exprimés

 

Sièges

 

 

SPD

Kpd

Verts

CDU/CSU

FDP

Extdr

Autres

 

Bundestag

SPD

1949

78,5%

29,2%

5,7%

 

31,0%

11,9%

1,8%

20,4%

 

402

131

1953

85,8%

28,8%

2,2%

 

45,2%

9,5%

1,1%

13,2%

 

487

151

1957

87,8%

31,8%

 

 

50,2%

7,7%

1,0%

9,3%

 

497

169

1961

87,7%

36,2%

 

 

45,3%

12,8%

0,8%

4,9%

 

499

190

1965

86,8%

39,3%

 

 

47,6%

9,5%

2,0%

1,6%

 

496

202

1969

86,7%

42,7%

 

 

46,1%

5,8%

4,3%

1,1%

 

496

224

1972

91,1%

45,8%

 

 

44,9%

8,4%

0,9%

 

496

230

1976

90,7%

42,6%

 

 

48,6%

7,9%

0,9%

 

496

214

1980

88,7%

42,9%

 

1,5%

44,5%

10,6%

0,5%

 

497

218

1983

89,1%

38,2%

 

5,6%

48,8%

7,0%

0,4%

 

498

193

1987

84,3%

37,0%

 

8,3%

44,3%

9,1%

1,3%

 

497

186

 

 

 

PDS

 

 

 

 

 

 

 

 

1990

77,8%

33,5%

2,4%

5,0%

43,8%

11,0%

2,1%

2,2%

 

662

239

1994

79,0%

36,4%

4,4%

7,3%

41,4%

6,9%

1,8%

1,8%

 

672

252

1998

82,2%

40,9%

5,1%

6,7%

35,1%

6,2%

3,3%

2,7%

 

669

298

[1]


La CDU (Union chrétienne-démocrate) avec la CSU (Union chrétienne-sociale) en Bavière et le FDP (Parti libéral-démocrate), partis dominants depuis 1949, obtiennent ensemble le minimum historique de suffrages (par rapport aux exprimés comme par rapport aux inscrits).

 

 

La CDU-CSU, parti central de la bourgeoisie s’affaisse. Son résultat reste au-dessus de celui de 1949, mais elle subissait la concurrence du Zentrum et autres.

 

Le FDP, parti propre du capital, craignait le pire, à savoir un score inférieur à 5% qui l’aurait fait pratiquement disparaître de la carte électorale.

L’extrême droite et ‘néo-nazis’ (Republikaner, DVU, NPD) atteignent 3,3%. En avril, la Dvu avait fait une percée époustouflante dans l’élection de Saxe-Anhalt (land de l’ex-RDA) avec 12,9% des exprimés.

 

La signification la plus générale de ces élections : les masses laborieuses ont voté contre les principaux partis bourgeois, elles ont voté ‘‘ A basA bas le gouvernement KohlKohl ’’.

 


 

… victoire, limitée, du SPDProgression marquante du SPD


 

La progression du vieux Parti social-démocrate est particulièrement marquante depuis 1990, lorsque son opposition à la réunification de l'Allemagne s'était traduite par son plus mauvais score depuis 30 ans.

Ses résultats (en % par rapport aux votes exprimés) restent toutefois inférieurs à ceux qu’il a obtenus de 1969 à 1980 et, par rapport à ceux de 1983 et 1987, cette progression reste limitée. Le SPD remporte 298 des 669 sièges du Bundestag.

 

Malgré la dégringolade des partis traditionnels, les partis et organisations bourgeoises restent majoritaires en voix et en sièges.


 

Les Verts et le PDS


, obstacles au regroupement autour du SPD

Les Verts, organisation bourgeoise, (en recul d’une élection à l’autre) restent dans la même fourchette depuis 1983, année où ils ont obtenu leur première représentation au Bundestag.

 

Le Monde (11/2) a montré combien les Verts et le FDP sont très proches :

‘‘ L’expert économique des Verts, O. Metzger, a de quoi séduire les yuppies libéraux allemands. J. Fisher, le ministre des Affaires Etrangères qui accepte l’intervention de l’Otan au Kosovo sans mandat explicite des Nations unies, marche dans les pas du libéral Hans-Dietrich Genscher. Seul le combat antinucléaire, constitutif de l’identité verte, permet d’opposer radicalement les 2 petits partis.. ’’

 

Quant au PDS (‘Parti du socialisme démocratique’), il est l’héritier de la Seddu SED, qui fut, en RDA, fut purement et simplement le parti créé par la bureaucratie stalinienne, un instrument de la dictature qu’elle exerçait sur les masses. Il s’inscrit dans le large éventail des organisations bourgeoises.

Il ne représente rien dans l’ancienne RFA, au-delà du soutien de 'l’‘extrêmel'extrême gauche’ et d’abord de l’organisation pabliste.

‘‘ Il faut construire une ‘nouvelle gauche’ (...) Le PDS peut jouer un rôle clé dans cet objectif, pour autant qu’il ne se limite pas au parlement son rôle d’opposition.. ’’

(Rouge - 1/10/1998, ‘‘ Nouvelles chances pour une nouvelle gauche ’’)

L’importance du PDS touche à la place qu’il occupe dans les Länder de la partie est de l’Allemagne : il y rassemble environ 25% des votes. L’élection régionale qui s’est déroulée le même jour en Mecklembourg-Poméranie est illustrative :

 

 

SPD

34,6%

PDS

24,4%

CDU

30,2%

....

Dvu + Npd

3,9%

 

C’est la politique du SPD qui explique la survivance et les succès du PDS, dont le nom tout-à-fait trompeur a pour but de faire oublier qu’il est l’héritier du SED.

 

En tant que défenseur de l'ordre bourgeois (ce que sont devenus les partis de la deuxième Internationale depuis août 1914), le SPD s'était fixé comme première tâche à partir de la chute du mur de Berlin de s'opposer à la réunification de l'Allemagne pour écarter toute possibilité de mobilisation générale du prolétariat à l'Ouest de l'Allemagne, avant que de s'opposer (et notamment O.Lafontaine) à la concession décidée par Kohl qu'était l'échange des marks au bénéfice des masses de l'est de l'Allemagne.

L’élection régionale qui s’est déroulée le même jour en Mecklembourg-Poméranie est illustrative

 

:

L’extrême droite et ‘néo-nazis’ (Republikaner, Dvu, Npd) atteignent 3,3%. En avril, la Dvu avait fait une percée époustouflante dans l’élection de Saxe-Anhalt (land de l’ex-RDA) avec 12,9% des exprimés.

Le SPD remporte 298 des 669 sièges. Malgré la dégringolade des partis traditionnels, les partis et organisations bourgeoises restent majoritaires en voix et en sièges.


L’obstacle et les limites à la victoire du SPD : le SPD, son programme, sa pratique, G. Schröder


Le ‘camarade des patrons’

G. Schröder a été désigné contre O. Lafontaine, écarté de la candidature par le fait même de son élection à la présidence du SPD (en décembre 1997). Il est élu candidat chancelier en (avril 1998). En Basse-Saxe, le SPD, qu’il dirige, venait de remporter l’élection régionale avec un score ‘triomphal’ (47,9% des voix contre 44,3% en 1994 et 36,5% en 1982). Mais le ‘camarade des patrons’ (comme on le surnomme dans le SPD) n’a pas été plébiscité (93,4% des voix; O. Lafontaine avait obtenu 98,7% en 1990 et même R. Scharping : 95,4% en 1994). Il arbore son futur ministre de l’économie, un certain J. Stollman - non membre du SPD, il déclarera qu’il a bien un exemplaire du programme du SPD chez lui et qu’il le lira un jour ou l’autre (sic !) - emphatiquement présenté comme le ‘Bill Gates’ allemand.

Dans une interview aux Echos (28/7/1998), G. Schröder donne un aperçu du programme du SPD, qu’il a déjà qualifié comme ‘‘ le plus en faveur de l’économie de marché de son histoire ’’ :

‘‘ Dans mon Land de Basse-Saxe [(majorité SPD]), le temps de travail se situe entre 28,5 heures chez Volkswagen et plus de 40 chez les fournisseurs. Cette forme de flexibilité s’imposera (...) Le pacte pour l’emploi est l’un des points centraux de notre programme.. ’’


Et il répond à la question décisive : avec qui gouverner ?

‘‘ La question de savoir si nous aurons une grande coalition avec les chrétiens-démocrates ou une coalition avec les Verts reste complètement ouverte (...) Une chose est sûre : j’exclus de gouverner avec H. Kohl. Et lui aussi.. ’’

Tout cela est glaçant pour le prolétariat et la jeunesse.

 

Le SPD dirige 13 des 16 Länder dont 10 en collaboration avec la CDSU (‘grande coalition’, pour reprendre le nom de la formule utilisée pour désigner le gouvernement Kiesinger CDU/CSU-SPD entre 1966 et 1969), avec le FDP (‘petite coalition’ comme les gouvernements Brandt puis Schmidt-SPD-FDP de 1969 à 1982), les Verts et  un avec le PDS.

Les Länder ont une autonomie de pouvoir par rapport à l’appareil central d’Etat et au gouvernement autrement plus importante que les régions françaises. Il est majoritaire au Bundesrat (le conseil fédéral, composé de délégués des gouverneurs des Länder). Il n’est donc que partiellement dans "l‘opposition". Les masses sont encore moins enclines aux illusions vis-à-vis du SPD qu’elles pourraient l’être, par exemple, en France par rapport au PS (et au PcfPCF) avant l’élection de juin 1997.


… Et la politique des dirigeants syndicaux


 

Les dirigeants syndicaux, pour une diminution systématique du prix de la force de travail..

D. Schulte, président du DGB (Deutscher Gewerkschaftsbund, la confédération ouvrière) interrogé par les Echos (18-19/9/1998), une semaine avant les élections :

‘‘ Le coût du travail est trop élevé en Allemagne. Cela tient aux impôts, aux cotisations sociales et au niveau des salaires. Il nous faut trouver des solutions pour corriger cela. Par exemple, une partie des cotisations sociales, payées moitié-moitié par l’employé et l’employeur, sert à financer des prestations qui devraient être du ressort de l’impôt. Nous voulons ramener les cotisations sociales au-dessous des 40% du salaire (...) Si on diminue les cotisations sociales de 2%, l’employeur pourra être plus compétitif  (...) ’’

D.Schulte se prononce.. pour dles sacrifices "librement consentis" par les travailleurs. A la question

Question : ‘‘ Que voulez-vous intégrer d’autre dans le pacte pour l’emploi ? ’’, il répond:

‘‘ Le dossier des retraites (...) Nous voulons promouvoir le travail à temps partiel (...) soumettre à cotisations sociales les ‘620 marks-jobs’, des petits travaux qui permettent à 5,5 millions de gens de travailler ou d’arrondir les fins de mois (...) Lors d’une négociation salariale, les salariés pourraient renoncer par exemple à 0,5% d’augmentation et affecter cette somme à un fonds commun auquel l’employeur cotiserait aussi (...) préretraites progressives. En ce qui concerne les cotisations maladie, nous voulons les plafonner et augmenter la prise en charge individuelle (...) On peut renoncer à des hausses salariales pour assurer la permanence des postes de travail.. ’’

 

Il faut souligner que le DGB, qui pour la première fois, a engagé une campagne publicitaire (pour un vote ‘‘ pour l’emploi et la justice sociale ’’), refuse de prendre position en faveur du SPD (‘‘ Elle ne sert aucun parti, aucune coalition ’’).

En apparence, les conditions semblent donc à nouveau se réunir pour que le SPD, avec la complicité de la bureaucratie syndicale, ‘échappe’ à nouveau au pouvoir. Une fois de plus, H. Kohl, le ‘géant noir’ (comme la ‘couleur’ du parti clérical) ironise : ‘‘ Mes adversaires gagnent dans les sondages et moi, aux élections ’’. En réalité, l’effondrement de la CDU-CSU et du FDP, le succès - pas de triomphe électoral - du SPD, ont été annoncés dans le grand rassemblement de juin 1996.


 

Juin 96 : " Kohl dehors"!


En novembre 1995, le congrès de l’IG Metall propose un ‘pacte pour l’emploi’. En janvier 1996, un ‘pacte pour l’emploi et le renforcement de la compétitivité’ est adopté par les représentants des syndicats des patrons et le gouvernement.

Le patronat ne se satisfait pas des concessions, pourtant énormes, des appareils. Pour le dirigeant de la BDA (patronat), ‘‘ la priorité est de baisser de 20% le coût du travail en Allemagne’’. Les patrons de la métallurgie proposent, par exemple, le retour aux 40 heures hebdomadaires sans compensation salariale !

 

Le 23 avril, constat de l’‘échec’ du ‘sommet social’. Le 25, H. Kohl présente un plan d'austérité’. Il prévoit la réduction des indemnités de salaire en cas de maladie payées par les patrons pendant 6 semaines ( le remboursement de 100% du salaire net est un acquis depuis 1957, après 17 semaines de grèves). Le plan fixe ces indemnités à 80%, mais aussi le relèvement de l’âge de la retraite pour les femmes de 60 à 65 ans (à partir de l’an 2 000), le blocage de l’allocation-chômage en 1997, d’autres mesures drastiques contre le prolétariat et d’autres encore en faveur du patronat.

 

Dans le prolétariat allemand avait mûri l’aspiration au combat pour défaire et en finir avec le gouvernement Kohl.

L’annonce du plan accélère la mobilisation de larges fractions dans le prolétariat. Bien que corsetée, elle aboutit à une manifestation nationale à Bonn, le 15/6/1996, rassemblant 350 000 personnes, la plus importante depuis la guerre (et donc depuis la prise du pouvoir par Hitler), à l’appel du DGB.

On y dresse des panneaux portant : ‘Kohl dehors !’ et, FO hebdo le rapporte : ‘Grève générale maintenant !

 

L’appareil du DGB - épaulé par le SPD - qui n’a pas pu se dérober à organiser une manifestation centrale, va réussir à s’opposer et à bloquer ce mouvement; c’est ce qu’exige à ce moment la défense du capitalisme allemand.

 

Le 19 juillet, le Bundesrat repousse le ‘volet social’ du plan d’austérité. Le 12 août, la fédération patronale de la métallurgie annonce qu’elle prévoit 120 000 suppressions d’emplois sur un an. La métallurgie et l’électronique auront perdu un quart de ses effectifs en 5 ans !

Le 30 août, la fédération de l’industrie du bâtiment annonce qu’elle remet en cause de manière unilatérale les conventions en cours en ex-RDA, avec l’objectif de ne pas accorder les hausses de salaires prévues.

Le 7 septembre, il y a 250 000 manifestants dans 6 villes à l’appel de la DGB, avec le soutien du SPD et d’une partie de l’église protestante contre le ‘démontage de l’Etat social’

Le 13 septembre, au Bundestag, les 341 députés CDU, CSU et FDP adoptent le volet social du plan d’austérité. La loi abaissant le taux de remboursement à 80% est votée.

 

Contre l’application de la loi, le 26 septembre, des débrayages commencent dans la métallurgie. L’IG Metall et le patronat ouvrent des négociations. Le 10 octobre, le Bundestag adopte le plan de remise en cause des retraites (baisse des pensions, l’âge de retraite des femmes repoussé à 65 ans,..). Le 26, à l’appel de l’IG Metall, forte mobilisation contre la loi : 400 000 métallos débrayent et se rassemblent.

 

Finalement, le 4 décembre, le patronat et la direction d'IG Metall concluent un accord régional en Basse-Saxe: la patronat accepte de maintenir jusqu’en 2002 le remboursement à 100% des indemnités maladie mais à un prix exorbitant pour les travailleurs: les heures supplémentaires et les primes n’entrent plus dans le calcul; la prime de fin d’année sera réduite de 5%; en outre, l’évolution des salaires sera la suivante :  +0,8% en avril 1997 puis 1,9% en avril 1998 !

D’autres accords du même type sont conclus dans 4 Länder, dans les banques, et la chimie, à l’échelle nationale.

 

Pour juger de la politique des appareils syndicaux, il faut savoir que pendant cette épreuve de force, se déroule, un congrès extraordinaire du DGB qui adopte un ‘programme fondamental’, qui remplace celui adopté en 1981. Le Monde (16/11) porte le commentaire suivant : ‘

‘ C’est la première fois que les syndicats abandonnent toute référence à la lutte des classes et reconnaissent les vertus de l’économie de marché ‘système mieux adapté que d’autres à la réalisation des objectifs syndicaux’ (...) La démarche des syndicats rappelle celle du SPD en 1959 : cette année, le Parti social-démocrate avait abandonné toute référence au marxisme (...) ‘L’Etat social n’est pas une corne d’abondance ’’ a ainsi reconnu le président du DGB.. ’’


Manifestations étudiantes


A partir de la fin novembre 1997, les étudiants manifestent, ‘‘exigeant notamment des crédits supplémentaires pour améliorer la situation dans des facultés bien souvent vétustes et surpeuplées ’’ (Le Monde).

‘‘1,9 million d’étudiants pour quelque 970 000 places disponibles. Un score qui n’a rien à envier à la situation française ’’ pour Les Echos (8/12) qui précisent :

‘‘ L’Europe de l’éducation est en crise. De façon diffuse mais persistante, plusieurs universités européennes connaissent des troubles. Oh, certes, rien à voir avec 1968. Il s’agit, pour les étudiants italiens, britanniques et, surtout, allemands, d’obtenir des crédits, et donc des moyens pour travailler. ’’

Ce sont aux mêmes agressions que sont confrontés les étudiants en France et en Allemagne. Le ministre fédéral de l’éducation déclare (Le Monde - 28/11) :

‘‘Il m’apparaît important que nous menions rapidement à terme une réforme structurelle, afin de donner plus d’autonomie et de flexibilité aux universités. Je me suis déjà entretenu avec les Länder (responsables de l’éducation) pour modifier la loi sur les universités, avec un nouveau texte qui entrera en vigueur le 1/4 prochain. Cette réforme de structure permettra aux étudiants d’obtenir des diplômes correspondant aux standards internationaux comme les bachelors, d’une durée de 3 ans, et les masters, qui durent 2 ans de plus. Ceci leur permettra de raccourcir la durée des études, trop longues en Allemagne, et allégera les effectifs. Je compte aussi faire passer cette année une réforme du système des bourses, pour que celles-ci aillent à ceux qui en ont réellement besoin (...) A l’avenir, nous ferons en sorte que le financement des universités soit fonction de leurs performances (...) Dans la loi sur les universités, nous avons donné la possibilité aux universités de choisir elles-mêmes jusqu’à 25% de leurs étudiants. Mais je reste fondamentalement attaché à l’évaluation faite par le baccalauréat allemand.. ’’

 

Comme les Echos, le ministre est serein : ‘‘ Les manifestants ne veulent pas la révolution mondiale ’’. Au bout d’environ un mois de manifestations (le 4/12, 130 000 manifestants à Düsseldorf, et aussi à Berlin, Hanovre, Mayence), le mouvement s’achève, sans rien obtenir. Sans direction, ils ont été ballottés, impuissants, entre le gouvernement et les Länder.


L’année 1990, un bouleversement dans l’histoire de l’après 2ème Guerre Mondiale.


Avec la réunification de l’Allemagne, a cessé la division du prolétariat allemand qui matérialisait la division du prolétariat européen. L’occupation et la division de l’Allemagne (institutionnalisée par la fondation de la RFA et de la RDA) ont été au centre de l’ordre de Yalta et de Postdam, dressé par la Sainte-alliance contre-révolutionnaire entre l’impérialisme et la bureaucratie du Kremlin en Europe.

La réunification a résulté du puissant mouvement qui a mobilisé les masses de la partie est de l’Allemagne. Alors qu’en juin 1953, à Berlin, a commencé à se dérouler la chaîne des insurrections ouvrières du prolétariat et des masses contre la bureaucratie du Kremlin (Hongrie et aussi Pologne en 1956, Tchécoslovaquie en 1968, Pologne des années 70 et en 1980), le mouvement de 1989 ne s’est pas hissé à la révolution politique; l’inexistence du Parti révolutionnaire a été décisive; le prolétariat de la partie ouest n’a pas opposé la question du pouvoir. Les 2 parties du prolétariat allemand ont été réunies dans le cadre accepté de l’Etat bourgeois allemand, la RFA (juridiquement, les 5 nouveaux Länder adhèrent à la RFA, le 3/10/1990, conformément à l’article 5 de la Loi fondamentale; la RDA disparaît). Le pays réunifié est passé de 250 000 km2 à 360 000 km2 et de 61,5 millions à 78 millions d’habitants.

Le capitalisme allemand change de dimension

Cela est vrai sur le plan économique et financier. Il n’est plus le ‘nain politique’ subissant l’ordre de Yalta et de Postdam. Il le manifeste rapidement en impulsant et soutenant la dislocation de la Yougoslavie (indépendance de la Slovénie et de la Croatie) en se dressant contre les intérêts des impérialismes américain, anglais mais surtout français dans cette région. Aujourd’hui, il participe à une guerre formellement pour la première fois depuis la 2ème Guerre mondiale.

En 1994, au cours de son voyage en Allemagne, Clinton l’a intronisé comme l’allié principal en Europe.

Une réunification coûteuse : une mesure politiquement nécessaire pour le capitalisme allemand

C’est le prix des concessions qu’il doit faire au prolétariat allemand et d’abord aux travailleurs de la partie est de l’Allemagne. L’‘unification’ monétaire a lieu au taux de change de 1 pour 1 entre le mark de l’ex-RDA et le deutsche mark, pour les salaires et les ‘petits’ dépôts sur comptes d’épargne (jusquà 2000 marks pour les enfants de moins de 14 ans, 4000 pour les adultes de moins de 60 ans et 6000 au-delà); au début de 1990, le taux de change commercial était de 4,5 pour 1 et sur le marché libre (illégal) de 7 pour 1. Néanmoins, malgré ce taux, les salaires à l’Est n’atteignent qu’un quart de ceux de l’Ouest.

Le prolétariat de l’ex-RDA obtient l’extension partielle et progressive des droits arrachés par la classe ouvrière dans la partie Ouest (conventions collectives, indemnités de chômage..).

Le coût financier est élevé : les transferts publics s’élèvent de 1991 à 1997 à 1181 milliards de marks (bruts) et à 890 (nets des recettes), soit une moyenne annuelle de plus de 4% du Pib. La Treuhand, office chargé de la privatisation des 30 000 entreprises, a laissé un énorme déficit et supprimé plus de 2 emplois sur 3. Les transferts publics ont été fort bien ‘recyclés’ par les entreprises et les banques. Une taxe de ‘solidarité’ de 7,5% de l’impôt sur le revenu a été appliquée à chaque contribuable en 1991 puis à nouveau à partir de 1995. Elle a été ramenée à 5,5% au début de 1998.

 

H. Kohl doit imposer en particulier à la Bundesbank l’unification monétaire aux conditions qu’il a annoncées. Il avouera avoir été ‘surpris’ par les ruines économiques de l’ex-RDA (...). Tout cela, en fait, est infiniment bénéfique pour la bourgeoisie allemande : la découverte de la prétendue dixième économie du monde en ruines, présentée jusqu’alors comme la ‘vitrine du socialisme’ - et du délabrement général de l’URSS et des autres pays d’économie planifiée, et s’engageant dans la restauration du capitalisme - va devenir un formidable argument en faveur des défenseurs du régime capitaliste.

H. Kohl sera surnommé le ‘chancelier de la réunification’. Jusqu’au bout, on lui laissera l’espoir de battre Bismarck en longévité politique ! Le ‘mérite’ en revient d’abord au SPD et à la bureaucratie syndicale.

En tant que défenseur de l’ordre bourgeois (ce qu’est devenue la 2ème Internationale depuis août 1914), le SPD s’est d’abord fixé la tâche de s’opposer à la réunification de l’Allemagne pour écarter toute possibilité de mobilisation générale du prolétariat à l’ouest de l’Allemagne, puis à l’échange des marks au bénéfice des masses de l’est de l’Allemagne (O. Lafontaine s’est particulièrement illustré).

La CDU a, par ricochet, bénéficié de cette nouvelle trahison, mais provisoirement : elle régresse même globalement dans les premières élections (en 1990) de l’Allemagne réunifiée.

C’est la politique du SPD qui explique la survivance et les succès du PDS, dont le nom tout-à-fait trompeur a pour but de faire oublier qu’il est l’héritier du Sed.

 


L’offensive généralisée contre le prolétariat et les appareils syndicaux


Le prolétariat est d’autant plus cyniquement ligoté par les appareils syndicaux au nom de la ‘cogestion’ que le patronat s’engage à remettre en cause les acquis ouvriers.

Ce que sont les lois sur la cogestion (in M. Demotes Mainard, ‘L’économie de la RFA’)

Une véritable cogestion a tout d’abord été instituée dans les industries sidérurgiques et minières de plus de 1 000 salariés par la loi du 21 mai 1951 : le conseil de surveillance y est composé de 5 représentants des actionnaires, de 5 représentants des travailleurs (2 nommés par le comité d’entreprise, 3 par le syndicat), et d’un onzième membre supposé neutre. Un membre du comité est nommé directeur du travail et siège à ce titre au directoire de l’entreprise; il ne peut être nommé contre la volonté de la majorité des travailleurs.

La loi sur la cogestion des salariés du 4 mai 1976 a voulu élargir ce principe aux grandes entreprises (plus de 2 000 salariés) des secteurs autres que la métallurgie et les mines (y compris secteur public).Les représentants du capital et des travailleurs siègent en nombre égal dans le conseil de surveillance, mais les différentes catégories de salariés, et notamment les cadres supérieurs, sont représentées en proportion de leur présence dans l’entreprise. Le président et le vice-président doivent être élus à la majorité des deux tiers : sinon le président, qui a voix prédominante, est choisi par les représentants des actionnaires, et le vice-président par ceux des salariés. Le directeur du travail, chargé des questions de personnel et sociales, est nommé à la majorité simple.

Dans la pratique, cette loi de 1976, fruit d’un compromis politique, accorde beaucoup moins de pouvoir aux salariés que celle de 1951. Pourtant une trentaine d’associations d’employeurs et 9 grandes firmes, la jugeant incompatible avec le droit de propriété privée inscrit dans la constitution, ont déposé plainte devant la Cour suprême de Karlsruhe. Le tribunal a jugé que la loi n’était pas inconstitutionnelle, dès lors qu’il y avait prépondérance des employeurs dans le conseil de surveillance.

Dans les entreprises industrielles de moins de 2 000 salariés, la loi de 1952 qui accorde aux représentants du capital 2 fois plus de sièges qu’à ceux des travailleurs reste en vigueur : il n’existe pas de directeur du travail. Le pouvoir des salariés y est donc pratiquement nul.

Il n’y a pas de ‘cogestion’, mais acceptation des appareils syndicaux de se faire les domestiques du capital, les maîtres d’oeuvre de leurs décisions contre le prolétariat.

Ils acceptent de réduire la portée (ou de retarder l’application) des conventions collectives dans les länder de l’Est. Volkswagen , ‘laboratoire social’ de G. Schröder, est le précurseur d’‘accords’ à grande échelle de flexibilité, préretraites, ‘salaires contre embauches de jeunes’ aux droits plus ou moins restreints. En novembre 1995, le congrès de l’IG Metall propose un ‘pacte pour l’emploi’. En janvier 1996, un ‘pacte pour l’emploi et le renforcement de la compétitivité’ est adopté par les représentants des syndicats des patrons et le gouvernement.


Kohl dehors !


Le patronat ne se satisfait pas des concessions, pourtant énormes, des appareils. Pour le dirigeant de la Bda (patronat), ‘‘ la priorité est de baisser de 20% le coût du travail en Allemagne ’’. Les patrons de la métallurgie proposent, par exemple, le retour aux 40 heures hebdomadaires sans compensation salariale !

Le 23/4, constat de l’‘échec’ du ‘sommet social’

Le 26/4, H. Kohl présente un plan d'austérité’. Il prévoit la réduction des indemnités payées par le patrons pendant 6 semaines ; le remboursement de 100% du salaire net est un acquis depuis 1957, après 17 semaines de grèves. Le plan fixe ces indemnités à 80% , mais aussi le relèvement de l’âge de la retraite pour les femmes de 60 à 65 ans (à partir de l’an 2 000), le blocage de l’allocation-chômage en 1997, d’autres mesures drastiques contre le prolétariat et d’autres encore en faveur du patronat.

Dans le prolétariat allemand, a mûri l’aspiration au combat pour défaire et en finir avec le gouvernement Kohl.

L’annonce du plan accélère la mobilisation de larges fractions dans le prolétariat. Bien que corsetée, elle aboutit à une manifestation nationale à Bonn, le 15/6/1996, rassemblant 350 000 personnes, la plus importante depuis la guerre (et donc depuis la prise du pouvoir par Hitler), à l’appel du DGB. Les dirigeants du SPD sont présents mais aussi les Verts et jusqu’à quelques membres de l’aile ‘gauche’ de la CSU. On y dresse des panneaux portant : ‘Kohl dehors !’ et FO hebdo le rapporte : ‘Grève générale maintenant !’ L’appareil du DGB - épaulé par le SPD - qui n’a pas pu se dérober à organiser une manifestation centrale, va réussir à s’opposer et à bloquer ce mouvement; c’est ce qu’exige à ce moment la défense du capitalisme allemand.

Le 19/7, le Bundesrat repousse le ‘volet social’ du plan d’austérité.

Le 12/8, la fédération patronale de la métallurgie annonce qu’elle prévoit 120 000 suppressions d’emplois sur un an. La métallurgie et l’électronique auront perdu un quart de ses effectifs en 5 ans !

Une rupture de contrat exceptionnelle :

Le 30/8, la fédération de l’industrie du bâtiment annonce qu’elle remet en cause de manière unilatérale les conventions en cours en ex-RDA, avec l’objectif de ne pas accorder les hausses de salaires prévues.

Le 7/9, 250 000 manifestants dans 6 villes à l’appel de la DGB, avec le soutien du SPD et d’une partie de l’église protestante contre le ‘démontage de l’Etat social’

Le 13/9, au Bundestag, les 341 députés CDU, CSU et FDP adoptent le volet social du plan d’austérité.

Un acquis considérable de la classe ouvrière, arraché en 1957, après 16 semaines de grève, le remboursement à 100% par le patron des indemnités maladie, pendant 6 semaines, est remis en cause : la loi abaissant le taux de remboursement à 80% est votée.

Contre l’application de la loi, le 26/9, des débrayages commencent dans la métallurgie. L’IG Metall et le patronat ouvrent des négociations. Le 10/10, le Bundestag adopte le plan de remise en cause des retraites (baisse des pensions, l’âge de retraite des femmes repoussé à 65 ans,..). Le 26/10, à l’appel de l’IG Metall, forte mobilisation contre la loi : 400 000 métallos débrayent et se rassemblent. La production est arrêtée dans plusieurs usines de Mercedes, Bosch, Audi; dans la plupart des aciéries de la Ruhr, tout est bloqué pendant toute la journée. 20 000 participants à un meeting chez Mercedes-Benz à Sindelfingen..

Finalement, le 4/12, le patronat et IG Metall concluent un accord régional en Basse-Saxe : la patronat accepte de maintenir jusqu’en 2002 le remboursement à 100% des indemnités maladie mais à un prix exorbitant pour les travailleurs : les heures supplémentaires et les primes n’entrent plus dans le calcul; la prime de fin d’année sera réduite de 5%; en outre, l’évolution des salaires sera la suivante :  +0,8% en avril 1997 puis 1,9% en avril 1998 !

D’autres accords du même type sont conclus dans 4 Etats. Accord aussi dans le secteur bancaire et dans la chimie, à l’échelle nationale..

Pour juger de la politique des appareils syndicaux, il faut savoir que pendant cette épreuve de force, se déroule, un congrès extraordinaire du DGB qui adopte un ‘programme fondamental’, qui remplace celui adopté en 1981. Le Monde (16/11) porte le commentaire suivant : ‘‘ C’est la première fois que les syndicats abandonnent toute référence à la lutte des classes et reconnaissent les vertus de l’économie de marché ‘système mieux adapté que d’autres à la réalisation des objectifs syndicaux’ (...) La démarche des syndicats rappelle celle du SPD en 1959 : cette année, le Parti social-démocrate avait abandonné toute référence au marxisme (...) ‘L’Etat social n’est pas une corne d’abondance ’’ a ainsi reconnu le président du DGB.. ’’


Manifestations étudiantes


A partir de la fin novembre 1997, les étudiants manifestent, ‘‘ exigeant notamment des crédits supplémentaires pour améliorer la situation dans des facultés bien souvent vétustes et surpeuplées ’’ (Le Monde).

‘‘ 1,9 million d’étudiants pour quelque 970 000 places disponibles. Un score qui n’a rien à envier à la situation française ’’ pour Les Echos (8/12) qui précisent :

‘‘ Turbulences universitaires

L’Europe de l’éducation est en crise. De façon diffuse mais persistante, plusieurs universités européennes connaissent des troubles. Oh, certes, rien à voir avec 1968. Il s’agit, pour les étudiants italiens, britanniques et, surtout, allemands, d’obtenir des crédits, et donc des moyens pour travailler. ’’

Ce sont aux mêmes agressions que sont confrontés les étudiants en France et en Allemagne. Le ministre fédéral de l’éducation déclare (Le Monde - 28/11) : ‘‘ Il m’apparaît important que nous menions rapidement à terme une réforme structurelle, afin de donner plus d’autonomie et de flexibilité aux universités. Je me suis déjà entretenu avec les Länder (responsables de l’éducation) pour modifier la loi sur les universités, avec un nouveau texte qui entrera en vigueur le 1/4 prochain. Cette réforme de structure permettra aux étudiants d’obtenir des diplômes correspondant aux standards internationaux comme les bachelors, d’une durée de 3 ans, et les masters, qui durent 2 ans de plus. Ceci leur permettra de raccourcir la durée des études, trop longues en Allemagne, et allégera les effectifs. Je compte aussi faire passer cette année une réforme du système des bourses, pour que celles-ci aillent à ceux qui en ont réellement besoin (...) A l’avenir, nous ferons en sorte que le financement des universités soit fonction de leurs performances (...) Dans la loi sur les universités, nous avons donné la possibilité aux universités de choisir elles-mêmes jusqu’à 25% de leurs étudiants. Mais je reste fondamentalement attaché à l’évaluation faite par le baccalauréat allemand.. ’’

Comme les Echos, le ministre est serein : ‘‘ Les manifestants ne veulent pas la révolution mondiale ’’. Au bout d’environ un mois de manifestations (le 4/12, 130 000 manifestants à Düsseldorf, et aussi à Berlin, Hanovre, Mayence), le mouvement s’achève, sans rien obtenir. Sans direction, ils ont été ballottés, impuissants, entre le gouvernement et les Länder


Le choix des capitalistes allemands pour les élections


 ‘‘ En Allemagne, nous avons une très grande stabilité depuis 16 ans ’’,

déclarait le président du BDIdi (confédération des industriels allemands) dans Le Monde (19-20/4/1998),

‘‘ mais nous avons au gouvernement de M. Kohl une coalition des défenseurs du social (...) Les choses commencent à bouger à la CDU. Les partisans du social vont s’affaiblir, tandis que ceux de l’économique vont se renforcer. Il est aussi essentiel que le FDP reste au Parlement pour empêcher la constitution d’une coalition SPD-Verts. (...)

L’urgence - le chômage, les caisses vides, la débâcle du système social - et l’euro vont contraindre la France, l’Italie et l’Allemagne à entreprendre les réformes nécessaires. L’obligation de respecter durablement les critères de Maastricht va rendre nos pays plus compétitifs. Ce sera le principal effet positif de l’euro et il peut contribuer, à terme, à résoudre le problème du chômage. L’Angleterre, les Pays-Bas, les Etats-Unis, remplissent les critères de Maastricht : ils ont su faire baisser le chômage de manière substantielle (...)

(Le) modèle (allemand de négociations) était valable il y a 20 ans, quand il y avait des grèves ininterrompues en Grande-Bretagne, en France et en Italie. Aujourd’hui, tous ces pays connaissent la paix sociale sans ce système de négociation, qui n’a plus de sens (...) Il faut autoriser la conclusion d’accords salariaux au niveau de l’entreprise (...)

 

Le même dans Les Echos (1/9) :

Question : quels points positifs dans le programme de la coalition CDU/CSU et FDP ?

‘‘ Ils veulent élargir et accélérer les efforts faits ces dernières années. Des textes très importants ont été votés, notamment la réforme des retraites, la réduction des indemnités maladie et la suppression de la protection des licenciements pour les petites entreprises. Nous avions réclamé ces réformes tout comme la réforme fiscale, qui a été bloquée au Bundesrat, où le SPD détient la majorité. C’était des bons débuts mais trop tardifs. ’’

 

- Etes-vous en accord avec la totalité du programme du chancelier ?

‘‘ Le programme du parti libéral est certainement plus proche de nos revendications. Celui de la CDU/CSU est acceptable aussi, mais il n’est pas aussi clairement positif. ’’

 


Après les élections, les injonctions du patronat


 

Après les élections, les injonctions du patronatEn septembre 1997, un éminent représentant des industriels allemands s’écriait : ‘‘ Nous n’avons pas besoin d’un T. Blair, mais d’une M.Thatcher !’’. Mais après les élections et la déconfiture de ses partis propres, la défense de l’impérialisme est assurée par un gouvernement dirigé par un parti de ce type. Pour L. Trotsky (1931), ‘‘ la partie la plus pourrie de l’Europe capitaliste est constituée par la bureaucratie sociale démocrate ’’.

 

 

Le président de la BDAda (patronat), interviewé par les Echos (2-3/10),

‘‘ exige une politique économique assurant la poursuite de la reprise actuelle et de nouvelles créations d’emplois. Il leur faut pour cela impérativement renoncer à leur projet de revenir sur les dernières réformes du gouvernement Kohl : limitation des indemnités maladies, facilités de licenciement pour les entreprises de moins de 10 salariés et réforme des retraites. ’’

- Est-ce réaliste d’attendre un recul de la part de la nouvelle majorité (SPD-Verts)?

‘‘ Je l’exige (...) Quant à la grande coalition, j’ai toujours été opposé à ce type de solution. ’’

- Que pensez-vous d’un pacte pour l’emploi ?

‘‘ Je suis très favorable à de telles négociations entre employeurs et syndicats (...) Nous allons prendre part aux discussions (...) Il ne faut pas attendre de nous quelque promesse que ce soit en matière d’emploi (...) Il faut intensifier les réformes engagées par le gouvernement d’Helmut Kohl (...) Le futur ministre du Travail, W. Riester (...) un pragmatique, un partenaire fiable (...) Il faut impérativement éviter la création d’impôts nouveaux.. ’’

 


Sous le drapeau du "nouveau centre" …


Le SPD s'est engagé clairement pour la satisfaction des ces "exigences", en situant sa campagne sous le signe du "nouveau centre". Le 20 octobre 1998, le SPD et les Verts concluent un accord de gouvernement, qui permet l'élection le 27 de G. Schröder, comme chancelier par le Bundestag (351/287, 27 abstentions). Dans son discours d'investiture, il rend hommage à H. Kohl, et, regrettant que les élections aient été marquées par une ‘‘campagne de polarisation et une tentative de diviser notre pays en 2 camps’’, il déclare:

‘‘Le nouveau centre a triomphé et le SPD a renoué avec la victoire (...) Notre concept a été de tendre vers un nouveau centre (...) Nous ne sommes pas pour une politique de droite ou de gauche. Mais pour une politique moderne d’économie sociale de marché.. ’’

Dans l’interview aux Echos (28/7/1998) déjà citée :

Question : comment pouvez-vous vous définir : orthodoxe, social-démocrate, libéral de gauche ?

‘‘ Je suis un homme. Je veux qu’on me juge sur ce que je fais (...) Je me situe clairement dans un système de valeurs sociales-démocrates, mais je veux formuler et mener une politique très pragmatique.. ’’

- Pensez-vous que la querelle idéologique est définitivement morte entre droite et gauche ? Etes-vous sur la ligne d’un B. Clinton, d’un T. Blair ou d’un R. Prodi ?

‘‘ Je pense que ceux que vous avez nommés sont sur la bonne voie. Je ne suis pas de ceux qui pleurent sur la fin des idéologies. Avant on était de gauche quand on était pour la propriété publique ou collective des biens de production et de droite quand on était contre. Aujourd’hui, cette querelle a été réglée par l’histoire avec l’échec du collectivisme. La gauche doit en tirer les conclusions qui s’imposent : son système de valeurs doit s’adapter à un système de propriété privée.. ’’

 

La référence à Clinton, Blair et Prodi doit être éclairée par les initiatives prises par Blair, dont le précédent numéro de CPS a traité. A la tribune du congrès des socialistes européens, chargé de préparer la campagne des élections ‘européennes’ (1-2/3/1999), T.Blair a vigoureusement poursuivi sa croisade en faveur d’une politique à la Clinton et de la ‘culture d’entreprise’.

 

Quelle que soit leurs affinités, une différence fondamentale distingue Blair et le dirigeant de la superpuissance, Clinton (quant à Prodi, c’est un représentant direct de la bourgeoisie italienne, qui vient d'être propulsé par Blair président de la Commission européenne): Blair dirige le parti ouvrier bourgeois, le parti en Angleterre du prolétariat que les masses ont utilisé, en mai 1997, pour chasser du pouvoir les Tories bourgeois. En France, en Italie, en Allemagne, et au total, dans 13 des 15 gouvernements de l’UE, les partis sociaux-démocrates (PDS compris) dirigent ou participent au gouvernement. Cela donne toute son importance à la campagne entreprise par les dirigeants sociaux-démocrates dans toute l'Europe, dont T.Blair est la pointe avancée. Le ‘nouveau centre’ de Schröder s’inscrit dans le même objectif.

 

Depuis la disparition de l’URSS et la restauration du capitalisme et tout ce qui l’a accompagnée, les partis qualifiés de socialistes et de sociaux-démocrates, flanqués des PC, ont champ libre pour se débarrasser toute référence, même ténue, au socialisme, au combat du prolétariat contre le régime capitaliste. Ils constituent les forces des plus acharnées à anéantir dans la conscience du prolétariat toute autre perspective que le régime capitaliste.


… un gouvernement au service du capitalisme allemand


Le gouvernement comprend 12 ministres SPD, avec des postes clés pour les 2 précédents présidents du SPD (O. Lafontaine aux Finances et R. Scharping à la Défense), 3 Verts ainsi qu’un ‘sans-parti’. L’‘oiseau rare’ déniché par G. Schröder avait choisi a préféré renoncer. La place vacante est occupée par un autre ‘sans-parti’, ancien dirigeant du groupe Veba.

 

L’accord de gouvernement du SPD et des Verts pour la législature est ordonné par les besoins du capitalisme allemand. Le gouvernement n’a nulle intention de remettre en cause la suprématie de l’impérialisme américain.

‘‘ Le gouvernement considère le Pacte atlantique comme un instrument indispensable à la stabilité et à la sécurité de l’Europe (...) La participation, garantie par l’Alliance, des EU et leur présence en Europe restent les conditions nécessaires à la sécurité sur le continent (...) L’étroite et amicale relation avec les EU (est) une constante indispensable de la politique étrangère allemande.. ’’

 

Mais l’accord fait ressortir les ambitions de l’impérialisme allemand :

‘‘ La participation des forces armées allemandes aux actions pour le maintien de la paix  (...) L’Allemagne saisira l’occasion de devenir un membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies quand la réforme du Conseil (...) sera réalisée et si jusque-là le siège européen au Conseil de sécurité, que l’on doit préférer par principe, ne peut être assuré ’’(à l’intention de la France et de l’Angleterre !).

 

Le terrain privilégié d’expansion reste l’approfondissement et l’élargissement de l’Union européenne vers l’Europe centrale et orientale. Alors que les 11 célèbrent l’entrée en vigueur de l’euro, l’Allemagne a déjà dégainé.


Le capitalisme allemand donne de la voix à la mesure de sa puissance


L’Allemagne est la troisième puissance économique au monde.

Comparaison du Produit intérieur brut en 1997, évalué en milliards de dollars US (aux changes de 1997)

Etats-Unis

7 819

Japon

4 223

Allemagne

2 115

France

1 394

Royaume-Uni

1 278

Italie

1 146

L’Allemagne représente économiquement 50% de plus que la France. Sur le plan industriel, le rapport est écrasant en faveur de l’Allemagne (environ +75%) !

Sa puissance financière : le mark  ‘était’ la deuxième monnaie de réserve du monde (13½% des réserves en devises de l’ensemble des banques centrales, mais 16½% pour les pays industrialisés), certes loin derrière le roi dollar (respectivement 59% et 55½% )

Autre donnée significative : en 1995, l’Allemagne détenait 15,8% des parts de marché dans les ‘pays industrialisés’ devant 13,9% pour les Etats-Unis, 9,1% pour la France, 8,8% pour le Japon, ,.. En 1997, les Etats-Unis devaient la dépasser. Quant à la balance commerciale, bon indicateur de la productivité d’un pays, le gigantesque excédent de 1998 (430 milliards de marks) tout près du record ‘historique’ de 1989!

Elle a quasiment annexé les pays du centre et de l’Est de l’Europe. Elle y dispose de près de 35% de parts de marché (en 1997). Une seule exception : la Pologne où les EU sont un concurrent de taille.

Machiavel et Mitterrand, avec l’appui de M. Thatcher, au compte de l’impérialisme anglais, avaient cherché à empêcher la réunification. Dès novembre 1990, le ministère des Finances français prenait acte que, vers la fin du siècle, ‘‘ l’Allemagne sera(it), plus encore qu’aujourd’hui, la puissance économique dominante en Europe ’’. Mitterrand et l’italien Andreotti crurent mettre au point une ingénieuse formule politique pour juguler la puissance économique et financière de l’Allemagne. Cps 75 a rappelé que l’initiative qui se conclura par l’union monétaire (euro, Banque centrale européenne, ‘critères de Maastricht’) aboutira à renforcer l’emprise de l’impérialisme allemand.

 

La bourgeoisie français pointe avec effroi la puissance agressive du ‘partenaire’ allemand

Rédigée alors que les résultats ne sont pas encore connus, la Lettre de l’Expansion, (datée du 28/9) donne la ligne éditoriale des chroniqueurs français, sous le titre ‘‘ Le temps des intérêts ’’ :

‘‘ Kohl-Schröder ? Qu’importe le chancelier, c’est l’Allemagne qui compte (...) Une nouvelle ère commence. Certains diront qu’elle a déjà commencé. En 1982, H. Kohl disait à F. Mitterrand : Je suis le dernier chancelier pro-européen (...) Autres temps, autres moeurs, rien ne se décidait autrefois sans un accord (ou un désaccord) Paris-Bonn. Aujourd’hui, l’Allemagne émancipée, réunifiée, a soldé ses complexes et ses remords. Elle ne s’encombre plus de la jurisprudence antérieure, Ce sera encore plus vrai demain (...) La liste simplifiée des dossiers sensibles s’allonge entre Paris et Bonn.

Le nucléaire : Siemens, partenaire de Framatome dans les réacteurs du futur, flirte avec le britannique Bnfl sur le combustible.

En aéronautique civile et militaire, les intérêts britanniques et allemands contrecarrent la volonté de leadership français (une autre fois, la Lettre écrira : ‘‘ Dasa rêve de prendre les commandes d’Airbus..’’)

Dans la finance, le rapprochement boursier Londres-Francfort..

Le patron de Daimler-Benz installe sa domination sur le monde automobile, grâce à la fusion avec Chrysler (...) Au moment où se prépare l’ouverture du capital du Crédit lyonnais, la pieuvre Allianz installe sa prééminence financière sur l’Europe. premier assureur, premier banquier, Allianz a ingéré les Agf. ’’

Cette énumération n’est pas exhaustive ! ‘‘ L’offensive allemande ’’, ‘‘ L’Allemagne industrielle de nouveau conquérante ’’ et aussi ‘‘ Opa allemande sur la finance d’Euroland ? ’’... Les titres de la presse française sont clairs !


Un gouvernement au service du capitalisme allemand


Le 20/10, le SPD et les Verts concluent un accord de gouvernement.

Le ‘nouveau centre’

Le 27, G. Schröder, élu chancelier par le Bundestag (351/287, 27 abstentions), rend hommage à H. Kohl, et, regrettant que les élections aient été marquées par une ‘‘ campagne de polarisation et une tentative de diviser notre pays en 2 camps ’’, il déclare : ‘‘ Le nouveau centre a triomphé et le SPD a renoué avec la victoire (...) Notre concept a été de tendre vers un nouveau centre (...) Nous ne sommes pas pour une politique de droite ou de gauche. Mais pour une politique moderne d’économie sociale de marché.. ’’

Dans l’interview aux Echos (28/7/1998) déjà citée :

Question : comment pouvez-vous vous définir : orthodoxe, social-démocrate, libéral de gauche ?

‘‘ Je suis un homme. Je veux qu’on me juge sur ce que je fais (...) Je me situe clairement dans un système de valeurs sociales-démocrates, mais je veux formuler et mener une politique très pragmatique.. ’’

- Pensez-vous que la querelle idéologique est définitivement morte entre droite et gauche ? Etes-vous sur la ligne d’un B. Clinton, d’un T. Blair ou d’un R. Prodi ?

‘‘ Je pense que ceux que vous avez nommés sont sur la bonne voie. Je ne suis pas de ceux qui pleurent sur la fin des idéologies. Avant on était de gauche quand on était pour la propriété publique ou collective des biens de production et de droite quand on était contre. Aujourd’hui, cette querelle a été réglée par l’histoire avec l’échec du collectivisme. La gauche doit en tirer les conclusions qui s’imposent : son système de valeurs doit s’adapter à un système de propriété privée.. ’’

La référence à Clinton, Blair et Prodi doit être éclairée par les initiatives prises par Blair. De retour de visite à B. Clinton à Washington, il révélait au Gardian (7/2/1998) le projet de créer une internationale de ‘centre-gauche’, basée sur une relation privilégiée entre le Labour et le Parti démocrate. Le 21/9, un forum réunira à New-York B. Clinton, T. Blair, R. Prodi et le président bulgare. A la tribune du congrès des socialistes européens, chargé de préparer la campagne des élections ‘européennes’ (1-2/3/1999), il a vigoureusement poursuivi sa croisade en faveur d’une politique à la Clinton et de la ‘culture d’entreprise’.

Quelle que soit leur affinité, une différence fondamentale distingue Blair et le dirigeant de la superpuissance, Clinton (quant à Prodi, c’est un représentant direct de la bourgeoisie italienne, propulsé par Blair président de la Commission européenne) : Blair dirige le parti ouvrier bourgeois, le parti en Angleterre du prolétariat que les masses ont utilisé, en mai 1997, pour chasser du pouvoir les Tories bourgeois.

L’‘Europe rose’

Juin 1997, en France, le prolétariat se tourne vers le PS (et le Pcf) pour infliger la défaite qu’on connaît au gouvernement Chirac-Juppé. Et en octobre 1998, c’est au tour de l’Allemagne (depuis, A. d’Alema, à la tête du PDS a pris la direction du gouvernement italien). Au total, dans 13 des 15 gouvernements de l’UE, les partis sociaux-démocrates (PDS compris) dirigent ou participent au gouvernement. Cps 68, 71.. ont donné toute son importance à la ‘rénovation’ entreprise contre le Labour en particulier depuis Kinnock mais surtout amplifiée par Blair. L. Jospin et la ‘génération Jospin’, en prenant en main le PS ont poursuivi un processus similaire. Le ‘nouveau centre’ de Schröder s’inscrit dans le même objectif.

En ce qui concerne le SPD, le congrès de Bad-Godesberg semblait avoir adopté le ‘programme’ le plus adapté possible au régime capitaliste; ainsi, le SPD ‘‘ après avoir été un parti de la classe ouvrière est devenu un parti du peuple ’’ (Volkspartei, comme la CDU-CSU !); ‘‘ Le socialisme démocratique plonge ses racines dans l’éthique chrétienne, dans l’humanisme et dans la philosophie classique.. ’’

Les conditions permettent aux appareils contre-révolutionnaires de voir plus loin encore. Depuis la disparition de l’URSS et la restauration du capitalisme et tout ce qui l’a accompagnée, les partis qualifiés de socialistes et de sociaux-démocrates, flanqués des PC, ont champ libre pour se débarrasser toutes références, qui ne sont plus que ténues, au socialisme, au combat du prolétariat contre le régime capitaliste. Ils constituent les forces des plus acharnées à anéantir dans la conscience du prolétariat toute autre perspective que le régime capitaliste. Une étape décisive serait atteinte avec la disparition pure et simple des partis ouvriers bourgeois. Pour autant, ces partis (même le New Labour de T. Blair) n’ont pas subi le saut qualitatif qui les transformerait en partis bourgeois.

En septembre 1997, un éminent représentant des industriels allemands s’écriait : ‘‘ Nous n’avons pas besoin d’un T. Blair, mais d’une M. Thatcher ! ’’. Mais après les élections et la déconfiture de ses partis propres, la défense de l’impérialisme est assurée par un gouvernement dirigé par un parti de ce type. Pour L. Trotsky (1931), ‘‘ la partie la plus pourrie de l’Europe capitaliste est constituée par la bureaucratie sociale démocrate ’’.

 

Elever le rang de l’impérialisme allemand

Le gouvernement comprend 12 ministres SPD, avec des postes clés pour les 2 précédents présidents du SPD (O. Lafontaine aux Finances et R. Scharping à la Défense), 3 Verts ainsi qu’un ‘sans-parti’. L’‘oiseau rare’ déniché par G. Schröder avait choisi a préféré renoncer. La place vacante est occupée par un autre ‘sans-parti’, ancien dirigeant du groupe Veba.

L’accord de gouvernement du SPD et des Verts pour la législature est ordonné par les besoins du capitalisme allemand.

Le gouvernement n’a nulle intention de remettre en cause la suprématie de l’impérialisme américain. ‘‘ Le gouvernement considère le Pacte atlantique comme un instrument indispensable à la stabilité et à la sécurité de l’Europe (...) La participation, garantie par l’Alliance, des EU et leur présence en Europe restent les conditions nécessaires à la sécurité sur le continent (...) L’étroite et amicale relation avec les EU (est) une constante indispensable de la politique étrangère allemande.. ’’

Mais l’accord fait ressortir les ambitions de l’impérialisme allemand : ‘‘ La participation des forces armées allemandes aux actions pour le maintien de la paix  (...) L’Allemagne saisira l’occasion de devenir un membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies quand la réforme du Conseil (...) sera réalisée et si jusque-là le siège européen au Conseil de sécurité, que l’on doit préférer par principe, ne peut être assuré ’’(à l’intention de la France et de l’Angleterre !). C’est la même politique que le gouvernement précédent exprimait sans détour : ‘‘ Nos partenaires sont convaincus d’avoir trouvé en nous un partenaire fiable pour servir la paix et la sécurité.... En poursuivant cette politique, nous ne servons pas uniquement la paix, nous servons au mieux nos propres intérêts. ’’ (K. Kinkel, le 21/4/1995)

Le terrain privilégié d’expansion reste l’approfondissement et l’élargissement de l’Union européenne vers l’Europe centrale et orientale. Alors que les 11 célèbrent l’entrée en vigueur de l’euro, l’Allemagne a déjà dégainé.


‘Le chéquier allemand’


Quelques jours après les élections, G. Schröder est en visite à Paris, rencontre Chirac pour la première fois, en lui décernant, devant L. Jospin, un brevet de ‘social-démocrate modéré’.

‘‘ Conscient de la relation franco-allemande, ce n’est pas un hasard si je suis ici avant même d’entamer les négociations pour former une coalition ’’.

 Simultanément, le futur ministre de la Défense, R. Scharping, s’adresse à Blackpool, au Labour :

‘‘ Nous voulons que le gouvernement britannique soit une force dirigeante au sein de l’Union européenne ’’.

 

Il s’agit pour les dirigeants allemands d’en finir avec la prétention des Français de pérenniser le ‘moteur franco-allemand’ à la tête de l’Union européenne.

Le 10/12, G. Schröder déclare devant le Bundestag,  :

‘‘ Nous ne pouvons ni ne voulons résoudre les problèmes de l’Europe avec le carnet de chèques allemand ! (nous réclamons) une répartition plus juste (des contributions au budget de l’UE en préalable à tout élargissement) ’’.

 

L’Allemagne a versé en 1997 au budget 72 milliards de francsF de plus qu’il ne lui reverse, la France 5, les Pays-Bas 15 et l’Angleterre 12 .. (l’Espagne gagne 39 milliards de F). Elle demande une réforme de la PAC (politique agricole commune), dont la France est le principal bénéficiaire (devant l’Allemagne), épargnant les agriculteurs allemands, autrement dit, que le budget de la France contribue plus (‘cofinancement’) à aider les paysans riches de France et la chaîne capitaliste de l’agro-alimentaire. C’est une première (dans l’histoire de l’Union européenne) que le capitalisme allemand cherche à dominer les contradictions des capitalismes d’Europe sur le dos de la France. Et elle a les meilleurs atouts.

Les media français font alors ressortir que l’Allemagne est le principal contributeur parce que l’industrie allemande est la principale intéressée de l’‘Europe’

‘‘ Finalement, le marché intérieur à portée des entreprises allemandes sera passé de 60 millions de consommateurs au milieu du 20ème siècle à plus de 200 millions. L’expansion n’est pas terminée : l’élargissement de l’Union européenne à de nouveaux membres concernent avant tout des clients de l’industrie allemande (...) De nouveau, il s’agit de réaliser une opération dont l’industrie allemande sera l’un des principaux bénéficiaires au moindre coût pour les intérêts allemands. Les agriculteurs allemands ne doivent pas y perdre un centime des substantielles subventions qu’ils perçoivent au titre de la Pac.. ’’ (L’européen - Oct 1998).

 

La France sait qu’elle devra reculer (‘dégressivité’), d’autant que les intérêts ‘français’ sont eux aussi contradictoires. Elle a commencé néanmoins à résister en menaçant de bloquer le calendrier de l’élargissement de l’Union européenne.


Le capitalisme allemand donne de la voix à la mesure de sa puissance


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La question nucléaire

L’énergie nucléaire représente 1/3 de l’électricité consommée en Allemagne. ‘‘ L’abandonner  serait une catastrophe pour l’économie ’’, avait prévenu le président du BDI (confédération des industriels allemands).

Le ministère vert à peine a-t-il établi un projet de loi proclamant la fin du nucléaire civil, l’interdiction du retraitement des combustibles irradiés d’ici un an, et l’augmentation (multiplication par 10) de la contribution des producteurs d’électricité, que G.Schröder, ayant rencontré les patrons concernés, annonce l’ajournement du projet et qu’il renonce à interdire le retraitement des déchets.

Les Verts n’en ont pas fini avec les déconvenues.


Les élections en Hesse, quel ‘avertissement’ ?


Comme l’indique le tableau indiquant les voix exprimées dans les élections du land de Hesse, le SPD progresse - sans retrouver le score de 1993 (Le Monde évoque une comparaison avec la mobilisation de la réaction en 1984 sur la question de l’école, en France !). Dans le fief de J. Fisher et D. Cohn-Bendit, les Verts dégringolent. Le FDP aussi. Mais le résultat obtenu par la CDU confirme que les élections de septembre n’annonçaient certainement pas sa décomposition.

 

SPD

Verts

CDU

FDP

20/01/1993

40,8%

8,8%

40,2%

7,4%

19/02/1995

38,0%

11,2%

39,2%

7,4%

07/02/1999

39,4%

7,4%

43,4%

5,1%

Aussi coûteuse qu'ait été la réunification, son résultat est que l'impérialisme allemand n'est plus le ‘nain politique’ subissant l’ordre de Yalta et de Postdam. Il l'a manifesté rapidement en impulsant et soutenant la dislocation de la Yougoslavie (indépendance de la Slovénie et de la Croatie) en se dressant contre les intérêts des impérialismes américain, anglais mais surtout français dans cette région. Aujourd’hui, il participe à une guerre formellement pour la première fois depuis la 2ème Guerre mondiale.

 

L’Allemagne est la troisième puissance économique au monde. Elle  représente économiquement 50% de plus que la France. Sur le plan industriel, le rapport est écrasant en faveur de l’Allemagne (environ +75%) !

Sur le plan financier, le mark  ‘était’ la deuxième monnaie de réserve du monde (13½% des réserves en devises de l’ensemble des banques centrales, mais 16½% pour les pays industrialisés), certes loin derrière le roi dollar (respectivement 59% et 55½% ).

 

Autre donnée significative : en 1995, l’Allemagne détenait 15,8% des parts de marché dans les ‘pays industrialisés’ devant 13,9% pour les Etats-Unis, 9,1% pour la France, 8,8% pour le Japon, ,.. En 1997, les Etats-Unis devaient la dépasser. Quant à la balance commerciale, bon indicateur de la productivité d’un pays, le gigantesque excédent de 1998 (430 milliards de marks) tout près du record ‘historique’ de 1989!

Elle a quasiment annexé les pays du centre et de l’Est de l’Europe. Elle y dispose de près de 35% de parts de marché (en 1997). Une seule exception : la Pologne où les EU sont un concurrent de taille.

 

En 1989-90, Machiavel-Mitterrand, avec l’appui de M. Thatcher, au compte de l’impérialisme anglais, avait cherché à empêcher la réunification. Dès novembre 1990, le ministère des Finances français prenait acte que, vers la fin du siècle,

‘‘l’Allemagne sera(it), plus encore qu’aujourd’hui, la puissance économique dominante en Europe ’’. Mitterrand et l’italien Andreotti crurent mettre au point une ingénieuse formule politique pour juguler la puissance économique et financière de l’Allemagne. Cps 75 a rappelé que l’initiative qui se conclura par l’union monétaire (euro, Banque centrale européenne, ‘critères de Maastricht’) aboutira à renforcer l’emprise de l’impérialisme allemand.

 

Aujourd'hui, la bourgeoisie français pointe avec effroi la puissance agressive du ‘partenaire’ allemand. La Lettre de l’Expansion, datée du 28/9, donne la ligne éditoriale des chroniqueurs français, sous le titre ‘‘ Le temps des intérêts ’’ :

‘‘ Kohl-Schröder ? Qu’importe le chancelier, c’est l’Allemagne qui compte (...) Une nouvelle ère commence. Certains diront qu’elle a déjà commencé. En 1982, H. Kohl disait à F. Mitterrand : Je suis le dernier chancelier pro-européen (...) Autres temps, autres moeurs, rien ne se décidait autrefois sans un accord (ou un désaccord) Paris-Bonn. Aujourd’hui, l’Allemagne émancipée, réunifiée, a soldé ses complexes et ses remords. Elle ne s’encombre plus de la jurisprudence antérieure, Ce sera encore plus vrai demain (...) La liste simplifiée des dossiers sensibles s’allonge entre Paris et Bonn.

Le nucléaire : Siemens, partenaire de Framatome dans les réacteurs du futur, flirte avec le britannique Bnfl sur le combustible.

En aéronautique civile et militaire, les intérêts britanniques et allemands contrecarrent la volonté de leadership français (une autre fois, la Lettre écrira : ‘‘ Dasa rêve de prendre les commandes d’Airbus..’’)

Dans la finance, le rapprochement boursier Londres-Francfort.

Le patron de Daimler-Benz installe sa domination sur le monde automobile, grâce à la fusion avec Chrysler (...) Au moment où se prépare l’ouverture du capital du Crédit lyonnais, la pieuvre Allianz installe sa prééminence financière sur l’Europe. premier assureur, premier banquier, Allianz a ingéré les Agf. ’’

 

Cette énumération n’est pas exhaustive! ‘‘L’offensive allemande’’, ‘‘L’Allemagne industrielle de nouveau conquérante’’ et aussi ‘‘Opa allemande sur la finance d’Euroland ? ’’... Les titres de la presse française sont clairs!


La démission d’Oskar Lafontaine du gouvernement ...


C’est à la surprise générale et sans donner d’explications, comme atteint d’‘une grosse fatigue’, que le ‘numéro 2’ du gouvernement, le ministre des finances a démissionné de son poste. L’annonce faite le 11 mars déchaîne l’enthousiasme des ‘marchés financiers’ - la bourse de Francfort enregistre en cours de séance une hausse de plus de 7%, un record depuis la guerre -, parce qu’ils prévoient ‘‘ moins de dépenses et moins de déficit en Allemagne ’’

Les Echos rapportent que, le 10 mars, lors du Conseil des ministres, Gerhard Schröder avait tapé du poing sur la table, déclarant qu’il n’était ‘pas prêt à mener une politique contre les milieux économiques’. Lafontaine passait pour le champion, à un poste clé, d’une politique de ‘relance’ budgétaire. La politique de Lafontaine est fondamentalement une politique de défense du capitalisme (elle s’accommode d’une résurgence éventuelle de l’inflation qui annulerait toute augmentation des salaires et, en fait, ferait fondre et reculer le pouvoir d’achat de ces salaires). Mais elle ne répond pas aux nécessités actuelles du grand capital (l’exemple du Japon, où cette politique dite keynésienne, à moins qu’elle ne soit néo-keynésienne, montre que, dans une autre situation, elle pourrait revenir parfaitement à l’ordre du jour). Son porte-parole, ce sont les dirigeants de la Bundesbank et de la Banque centrale européenne, ou encore le Conseil des ministres des Finances des quinze fustigeant le ‘plan de stabilité’ du gouvernement allemand, la réduction du déficit budgétaire trop peu ‘ambitieuse’, etc.

 

Oskar Lafontaine n’a pas démissionné seulement du gouvernement, il a abandonné aussi la direction du SPD.


.. et de la direction du SPD


Le ‘Thatcher du SPD’ c’est ainsi que la ‘gauche’ surnommait Lafontaine au moment de l’élection de son prédécesseur, R. Scharping, à la tête du parti, comme le rappelle dans Libération (13-14/3) un membre du SPD, présenté comme expert, qui ajoute :

‘‘ Il n’est pas totalement exact que Lafontaine soit vraiment l’homme de la base. Lafontaine était très apprécié par les couches intermédiaires du parti, les ‘fonctionnaires’ du parti qui forment les gros bataillons de délégués aux congrès. A la base, chez les ouvriers notamment, il est toujours resté une certaine méfiance envers Lafontaine... ’’

Et Le Monde (13/3) ajoute: quand il était secrétaire général du SPD, il affirmait que le SPD devait

‘‘ s’ouvrir à de nouvelles couches de la population nées de la troisième révolution industrielle : travailleurs indépendants, entrepreneurs.. ’’.

Le premier à défendre la flexibilité contre la revendication traditionnelle de réduction du temps de travail, c’est lui aussi - la presse bourgeoise l’avait qualifié d’‘éclaireur’.

 

C’est Schröder qui s’est présenté et a été élu président du SPD par 23 voix contre 6 et 3 abstentions (vote à confirmer par le congrès extraordinaire du 12 avril).

Pour Le Monde (13-14/3):

‘‘ il aurait été inimaginable que M. Schröder puisse prendre la tête de ce parti, ne serait-ce qu’il y a une semaine [mais ce vote est aussi mauvais parce que le SPD] ne fait pas massivement bloc derrière le chancelier ’’.

 

Le départ de Lafontaine n’exprime pas un ‘coup de barre à droite’ de la direction du SPD, parce qu’il n’y a jamais eu de contradiction entre elle et ‘Oskar’. Alors que les patrons font le siège de Schröder contre les mesures fiscales que Lafontaine leur assénerait, menaçant de ‘délocaliser’ (mesures d’ailleurs votées après la démission de Lafontaine), il plaide non coupable : ‘Nous avons allégé les impôts des Pme de 5 milliards de marks !’’. Quant à Daimler(-Chrysler) qui s’est directement adressé à G. Schröder, on rappelle qu’il ne paie pas d’impôt depuis 1995.

‘‘ Sans Lafontaine, Gerhard Schröder ne serait jamais arrivé au pouvoir. Le président du SPD a assuré la discipline du parti et mobilisé l’électorat traditionnel de la social-démocratie en faveur du candidat Schröder. ’’ (Le Monde - 13/3)

L’affaire Lafontaine signifie à l’adresse des masses : il n’y a qu’une politique possible, épouser le plus étroitement possible les besoins du capital.

 

La CDU avait mis au centre de sa campagne le refus du projet gouvernemental du code de la nationalité. Il ouvrait la possibilité de naturalisation au bout de 8 ans au lieu de 15, en conservant la nationalité d’origine. Cette loi n’aurait rien à voir avec la mesure accoRDAnt tous les droits, politiques compris, à tout prolétaire immigré. C’est un projet contre lequel, pourtant, la CDU a engagé une campagne réactionnaire de pétition sur l’axe Oui à l’intégration, non à la double nationalité’.

En perdant la majorité (54/56) de ce land, le gouvernement perd sa majorité absolue au Bundesrat et G. Schröder déclare que le gouvernement va présenter un autre projet, qui puisse recueillir une majorité au Bundesrat !

La cinglante défaite que les masses ont infligée, lors des élections législatives, à la CDU, CSU et au FDP n’ont pas laissé d’autre choix au SPD pour constituer un gouvernement bourgeois que de faire alliance avec les Verts. S’il est prématuré d’envisager sérieusement un gouvernement ‘petite coalition’ (avec les Libéraux du FDP, sans parler d’‘une grande coalition’ avec la CDU-CSU), d’ores et déjà, la direction du SPD justifie sa politique de défense du capitalisme par une prétendue nécessité de réaliser le ‘consensus’ au Bundesrat. Le durcissement de la ‘réforme’ du code de la nationalité est un premier exemple.


Le gouvernement à l'œuvre


Le gouvernement a annoncé, en application de l’accord de gouvernement, le rétablissement du remboursement à 100% des indemnités maladie. En fait, 30% des salariés sont concernés par la réduction des indemnités maladies. Dans de nombreuses conventions collectives, le patronat a négocié aveca obtenu de l’appareil syndical, contre le maintien du remboursement à 100% du salaire,

sans les baisser à 80% ‘‘ comme la loi nous le permettait ’’, rappelait aux Echos (2-3/10/1998) le président du patronat, ‘‘ mais nous avons négocié des compensations. Par exemple, les heures supplémentaires ou les primes de vacances ou de Noël ne sont plus prises en compte et nous les avons réduites.. ’’

(le président du patronat, dans Les Echos  des 2-3/10/1998)

 

D’autres mesures ont été décidées, comme la réduction, relativement symbolique, du ticket modérateur pour l’achat des médicaments - l’intention du gouvernement est de procéder à une prétendue ‘réforme’ du système de santé sur le même axe que les remises en cause successives du gouvernement Kohl -; le rétablissement, dans les PmeP.M.E. de 5 à 10 salariés, du bénéfice de la loi sur la protection des salariés.

Quant à la ‘réforme’ des retraites, l’accord de gouvernement ne prétend pas annuler mais suspendre les mesures prises :

‘‘ la première mesure sera d’interrompre la réduction du montant des retraites décidée par l’ancien gouvernement (...) Nous voulons garantir l’avenir des retraites sur 4 piliers : l’assurance-vieillesse prévue par la loi restera le pilier décisif de la retraite (...) L’assurance-vieillesse de l’entreprise, (...) l’assurance-vieillesse privée doivent être renforcées. Comme nouveau pilier, nous voulons une participation plus forte des salariés au capital productif et aux bénéfices des entreprises ’’.

 

Au cœur de son programme, le gouvernement a placé le ‘pacte pour l’emploi, la formation et la compétitivité’.

 ‘‘ Il doit permettre des accords sur (...) une organisation flexible et efficace du temps de travail, par exemple travail à temps partiel, temps partiel selon l’âge, temps partiel à l’entrée de la vie active pour les plus jeunes; réduction effective des heures supplémentaires.. ’’

 

‘‘ Toutes les parties prenantes doivent apporter leur contribution équitablement : savoir prendre et donner ’’,

 avait prévenu le gouvernement. Le gouvernement sait en effet ‘donner’ : il a promis aux ‘entreprises’ pour ‘‘ renforcer leur capacité d’investissement ’’ une baisse de l’impôt sur le revenu de 45% à 35%, la réduction des charges sociales.

Satisfaction du patronat qui ‘‘ sait prendre ’’. A l’issue de la première réunion de discussions, le 7/12, enjouement chez les ‘partenaires’ : ‘‘ Nous avons pris un bon départ ’’ (G. Schröder), ‘‘ la discussion a été très intensive et positive ’’ (le président des patrons), ‘‘ on peut être raisonnablement optimiste ’’ (le responsable du DGB).

 

Mais le calendrier amène une suspension des discussions. Les conventions collectives salariales dans la métallurgie, la fonction publique et d’autres branches, arrivent à échéance. Et l’appareil syndical tient a besoin d'à afficher que les salaires ne se négocient pas - au niveau de la branche - contre de la flexibilité, c’est-à-dire plus d’exploitation.

 


Les grandes manœuvres


Les négociations se mènent au niveau des branches. L’IG Metall revendique une hausse de 6,5% des salaires (à propos de cette revendication, il faut avoir en tête que le pouvoir d’achat des travailleurs a été fortement atteint, ces dernières années, par les augmentations d’impôt et de cotisations, s’ajoutant à l’inflation, même limitée). Le patronat de la métallurgie (Gesamtmetall) propose +2% et 0,5%, quand les ‘résultats’ de l’entreprise le permettent ! Devant une telle ‘provocation’ (ses propres termes), la direction du syndicat reste la bureaucratie contre-révolutionnaire dont l’objectif déterminant est d’empêcher toute mobilisation générale qui dresserait les métallos en fer de lance du prolétariat allemand.

 

C’est donc le processus classique qu’elle déclenche : La négociation ne concerne pas formellement les 3,4 millions de salariés; elle se déroule land par land et cette année, c’est le Bade-Wurtemberg qui est choisi comme land pilote. Tout est calculé, y compris le choix du land, réputé constituer un bastion.

Une période de ‘paix sociale’ doit prolonger de 4 semaines la fin du précédent accord salarial : elle est respectée, pendant que les négociations se sont poursuivies, ici et dans d’autres länder; puis 4 jours de débrayages.

Les arrêts de travail d’avertissement ont concerné un million de travailleurs.

Le patronat modifie sa proposition : ce sera +2,3% (+0,5% dans les entreprises ‘en bonne santé’). Les négociations sont interrompues. Le 11/2, la commission régionale de Rhénanie du Nord-Westphalie proclame l’échec des négociations salariales. Cela suffit pour demander à la direction de l’IG Metall (qui décide des lieux et donc de la stratégie) de mettre en place la procédure de consultation des syndiqués. Rappelons que la réglementation de la grève procède essentiellement de la décision de l’appareil syndical. Ainsi le vote préalable de 75%, et même des 2/3 des syndiqués en cas de nouvelles propositions, a été inscrit librement dans le statut de la plupart des syndicats.

G. Schröder écrit au patronat et à l’IG Metall pour les pousser à un règlement négocié et le 14, l’IG Metall accepte la proposition du patronat d’une ‘médiation spéciale’ qui vise à éviter le déclenchement de la grève, mais non la consultation et le vote de la grève (alors que la ‘médiation normale’ fonctionne quand la grève a commencé).

 

Le 19/2, l’accord (‘de la dernière chance’) est conclu. Il porte sur 14 mois: les 840 000 travailleurs du Bade-Wurtemberg recevront une prime de 350 marks Dem pour janvier et février, puis 3,2% au 1/3 + une prime de 1%. Le 23, la grande commission salariale de l’IG Metall du Bade-Wurtemberg entérine l’accord (4 des 210 membres de CE et DP l’ont refusé). IG Metall ‘recommande’ d’adopter le même accord ‘région par région’.

 

L’appareil annonce que c’est une augmentation de 4,2% qui a été obtenue sur 14 mois. Le patronat déclare que cela fait 3,6% sur 12 mois, bien loin de la revendication de 6,5% ! Si l’accord est déjà étendu à la Bavière et au nord de l’Allemagne, dans le Mecklembourg-Poméranie (Est), la prime de 1% n’est calculée que sur 11 mois; la prime foRFAitaireforfaitaire est divisée par 2 (soit 175 marks) et les métallos travailleront 3 heures de plus par semaine. En outre, la date de versement de cette prime pourra être négociée dans les entreprises.

Le Gesamtmetall recommande aux autres régions de ‘‘ continuer à négocier et d’obtenir au moins quelques changements ’’. Pour la bourgeoisie, c’est trop. Il s’agit de concessions économiquement excessives, mais c’est, pour la majorité des capitalistes allemands, le prix à payer pour permettre aux appareils de museler le prolétariat allemand, prolétariat décisif d’Europe.

 

 


La cogestion


Le prolétariat allemand est le plus massif prolétariat industriel en Europe: les effectifs s’élèvent à 5,9 millions dans l’industrie manufacturière (en 1996). Par comparaison, 2,8 millions en France.

C'est un prolétariat puissamment organisé dans les organisations syndicales : 11,8 millions d’adhérents dans la centrale ouvrière en 1991 (après la réunification), dont 30% dans l’IG Metall, le plus grand syndicat de branche au monde. Mais la chute des effectifs a été rapide; en 1997, les syndiqués sont de 8,6 millions.

 

Il est d’autant plus cyniquement ligoté par les appareils syndicaux au nom de la ‘cogestion’ que le patronat s’engage à remettre en cause les acquis ouvriers.

 

Ce que sont les lois sur la cogestion (in M. Demotes Mainard, ‘L’économie de la RFA’)

 

Une véritable cogestion a tout d’abord été instituée dans les industries sidérurgiques et minières de plus de 1 000 salariés par la loi du 21 mai 1951 : le conseil de surveillance y est composé de 5 représentants des actionnaires, de 5 représentants des travailleurs (2 nommés par le comité d’entreprise, 3 par le syndicat), et d’un onzième membre supposé neutre. Un membre du comité est nommé directeur du travail et siège à ce titre au directoire de l’entreprise; il ne peut être nommé contre la volonté de la majorité des travailleurs.

La loi sur la cogestion des salariés du 4 mai 1976 a voulu élargir ce principe aux grandes entreprises (plus de 2 000 salariés) des secteurs autres que la métallurgie et les mines (y compris secteur public).Les représentants du capital et des travailleurs siègent en nombre égal dans le conseil de surveillance, mais les différentes catégories de salariés, et notamment les cadres supérieurs, sont représentées en proportion de leur présence dans l’entreprise. Le président et le vice-président doivent être élus à la majorité des deux tiers : sinon le président, qui a voix prédominante, est choisi par les représentants des actionnaires, et le vice-président par ceux des salariés. Le directeur du travail, chargé des questions de personnel et sociales, est nommé à la majorité simple.

Dans la pratique, cette loi de 1976, fruit d’un compromis politique, accorde beaucoup moins de pouvoir aux salariés que celle de 1951. Pourtant une trentaine d’associations d’employeurs et 9 grandes firmes, la jugeant incompatible avec le droit de propriété privée inscrit dans la constitution, ont déposé plainte devant la Cour suprême de Karlsruhe. Le tribunal a jugé que la loi n’était pas inconstitutionnelle, dès lors qu’il y avait prépondérance des employeurs dans le conseil de surveillance.

Dans les entreprises industrielles de moins de 2 000 salariés, la loi de 1952 qui accorde aux représentants du capital 2 fois plus de sièges qu’à ceux des travailleurs reste en vigueur : il n’existe pas de directeur du travail. Le pouvoir des salariés y est donc pratiquement nul.

 

Il n’y a pas de ‘cogestion’, mais acceptation des appareils syndicaux de se faire les domestiques du capital, les maîtres d'œuvre de leurs décisions contre le prolétariat.


Pour le patronat, comment en finir avec les conventions collectives ?


Cette revendication centrale, les patrons ont tenté de la faire passer lors des négociations salariales, comme l’explique l’Usine nouvelle (4 février) qui annonçait :

‘‘Le patronat de la métallurgie revendique une plus grande autonomie des entreprises dans la définition de leur politique salariale. ’’

‘‘ Le modèle social plie. Va-t-il rompre ? La question se pose aujourd’hui en Allemagne, à l’occasion de la négociation salariale engagée dans la métallurgie (...) Le conflit se focalise autour d’une disposition à première vue anodine mais qui, si elle était adoptée, pourrait bouleverser l’équilibre - historique - de la politique tarifaire allemande. Le patronat propose, en effet, en plus des 2%, une rallonge optionnelle de 0,5%, accordée ou non en fonction de la situation financière des entreprises. Idem pour la prime de Noël. Dans ces conditions, le Conseil d’entreprise, présidé par un représentant des salariés, se substituerait à la branche pour juger de l’opportunité d’augmenter les salaires. ‘Nous voulons plus de flexibilité et d’individualisation, négociée au niveau de l’entreprise, explique un dirigeant de Gesamtmetall (patronat). Or IG Metall refuse un renforcement du pouvoir du conseil d’entreprise’. La prééminence de la branche dans la négociation salariale est déjà contestée depuis plusieurs années. Mais IG Metall veut dissuader à tout prix le patronat d’enfoncer un coin dans la politique tarifaire.. ’’

 

On le sait, le patronat a dû renoncer à la clause liant une partie de l’augmentation salariale à la situation de chaque entreprise, devant le refus de l’IG Metall. Mais jusqu’à quand ? s’interroge le même organe patronal, 3 semaines plus tard.

 

Sous le titre ‘‘ Comment les entreprises allemandes se débrouillent... ’’ on lit:

‘‘ Depuis 10 ans, pour sauvegarder leur compétitivité, les industriels font des entorses à la règle de la convention collective. Et souvent sur le terrain, en collaboration avec les représentants d’IG Metall, dans les conseils d’entreprise et les Länder !’’.

Et l’Usine nouvelle d’illustrer significativement comment la ‘‘ négociation descend dans les entreprises ’’, les ‘entorses’ aux conventions collectives que les ‘partenaires sociaux’ autorisent aux patrons (flexibilité, annualisation, baisse des salaires contre actions ou pas, départs anticipés..).

Plus de la moitié des entreprises ne relèvent plus de la convention collective, près des ¾ dans les Länder de l’Est. L’appareil syndical a démontré jusqu’à présent qu’il savait conserver le contrôle du prolétariat, en faisant respecter notamment l’interdiction de toute grève, hors du cadre de la branche. Les patrons ne l’oublient pas et quant à ceux qui quittent l’organisation de branche, l’Usine nouvelle en illustre les risques, en choisissant comme exemple telle entreprise où 100% des travailleurs sont syndiqués à l’IG Metall : ‘Opération délicate’, conclut l’hebdomadaire. Vous avez dit : euphémisme ?

L’appareil a refusé l’‘anodine proposition’ du patronat et sa logique d’affrontement avec la classe ouvrière. Le patronat - sachant qu’il a toujours été payé de retour - n’a pas cherché l’épreuve de force.

 

Le 25 février, après la conclusion de l’accord salarial en question, c’est la reprise des réunions sur le ‘pacte pour l’emploi, la formation et la compétitivité’. Le discours de patrons de l’industrie est net :

‘‘ L’économie allemande se trouve face à 2 scénarios. Soit nous évoluons à l’image de la Grande-Bretagne thatchérienne, dont le pays paie encore le prix, soit nous évoluons à la hollandaise. C’est cette deuxième voie que je préconise ’’, a déclaré le président de la Confédération de l’industrie, ‘‘ pourtant connu pour ses critiques sévères envers les blocages du modèle social allemand ’’ (Les Echos - 26-27/2).

 

Ce que le patronat allemand craint, c’est qu’une tentative ‘thatchérienne’ aboutisse à une radicalisation et à une issue victorieuse pour le prolétariat allemand avec tous les enchaînements qui s’ensuivraient. C’est le ‘pacte à la hollandaise’ qui fait aujourd’hui référence en Europe, avec la flexibilité très poussée des salaires, les rémunérations au mérite, des records en matière d’emplois à temps partiel, la prise en compte de la spécificité de l’entreprise ... et un minimum de grèves.


La puissance du prolétariat allemand


Il s’agit du plus massif prolétariat industriel en Europe : les effectifs s’élèvent à 5,9 millions dans l’industrie manufacturière (en 1996). Par comparaison, 2,8 millions en France.

Un prolétariat puissamment organisé dans les organisations syndicales : 11,8 millions d’adhérents dans la centrale ouvrière en 1991 (après la réunification), dont 30% dans l’IG Metall, le plus grand syndicat de branche au monde. Mais la chute des effectifs a été rapide; en 1997, les syndiqués sont de 8,6 millions.

Le patronat a l’habitude, plaidant pro domo, de publier des statistiques qui doivent prouver que le ‘coût du travail’ en Allemagne est un handicap qu’il faut éliminer. C’est ainsi que le ‘coût du travail’ dans le secteur automobile y serait plus élevé de 44% par rapport à la France (1996); cet écart serait de 21% dans l’industrie en général (insignifiant dans le secteur financier..). Pour les capitalistes allemands, le Standort Deutschland (l’Allemagne comme lieu de ‘production’) est en jeu ! Leur cri d’alarme (et leur menace de délocaliser massivement) a été relayé par le président même de la RFA (dont le rôle n’est pas comparable au président de la République, en France), R. Herzog, s’inquiétant de ‘‘ la perte de dynamisme économique ’’, dans un discours d’avril 1997, dont on dit qu’il est resté fameux.

Malicieusement, la presse française apporte plus que des bémols. C’est ainsi que Le Monde (29/10/1997) écrivait :

‘‘ Il est un lieu en Europe où le smic n’existe pas et où l’on peut le plus légalement du monde travailler 15 heures par semaine, pour gagner au maximum l’équivalent de 2 055 F par mois, sans payer la moindre cotisation sociale (maladie, retraite, chômage). Non, ce pays du travail noir officiel n’est pas l’Angleterre victime du thatchérisme, c’est l’Allemagne, tant louée pour son modèle social et ses hauts salaires (...) Avec la hausse du chômage et le niveau prohibitif des charges sociales pesant sur les salaires ‘normaux’, le nombre de ces emplois, baptisés billigjobs (on pourrait dire en français ‘petits boulots mal payés’) s’envole (...) Parallèlement, le nombre des emplois ‘normaux’ s’est réduit de 36,5 millions début 1992 à moins de 34 millions aujourd’hui.. ’’

Officiellement, 9,1% des travailleurs sont au chômage. Un sur cinq dans les länder de l’Est.

Le gouvernement Schröder-SPD-Verts a décidé de ne pas remettre en cause l’existence de ces billigjobs.

Ce n’est pas une situation paradoxale. Les salaires relativement (aux autres pays) élevés d’une partie importante des masses laborieuses en Allemagne, un ensemble d’acquis qui n’est dépassé nulle part ailleurs n’est pas incompatible avec un haut degré d’exploitation, bien au contraire.


Pour le patronat, comment en finir avec les conventions collectives ?


Cette revendication centrale (cf. déclaration au Monde des 19-20/4/1998, déjà citée), les patrons ont tenté de la faire passer, lors des négociations salariales, comme l’explique l’Usine nouvelle (4/2) qui annonçait : ‘‘ Le patronat de la métallurgie revendique une plus grande autonomie des entreprises dans la définition de leur politique salariale. ’’

‘‘ Le modèle social plie. Va-t-il rompre ? La question se pose aujourd’hui en Allemagne, à l’occasion de la négociation salariale engagée dans la métallurgie (...) Le conflit se focalise autour d’une disposition à première vue anodine mais qui, si elle était adoptée, pourrait bouleverser l’équilibre - historique - de la politique tarifaire allemande. Le patronat propose, en effet, en plus des 2%, une rallonge optionnelle de 0,5%, accordée ou non en fonction de la situation financière des entreprises. Idem pour la prime de Noël. Dans ces conditions, le Conseil d’entreprise, présidé par un représentant des salariés, se substituerait à la branche pour juger de l’opportunité d’augmenter les salaires. ‘Nous voulons plus de flexibilité et d’individualisation, négociée au niveau de l’entreprise, explique un dirigeant de Gesamtmetall (patronat). Or IG Metall refuse un renforcement du pouvoir du conseil d’entreprise’. La prééminence de la branche dans la négociation salariale est déjà contestée depuis plusieurs années. Mais IG Metall veut dissuader à tout prix le patronat d’enfoncer un coin dans la politique tarifaire.. ’’

On le sait, le patronat a dû renoncer à la clause liant une partie de l’augmentation salariale à la situation de chaque entreprise, devant le refus de l’IG Metall. Mais jusqu’à quand ? s’interroge le même organe patronal, 3 semaines plus tard.

 

‘‘ Comment les entreprises allemandes se débrouillent... ’’

‘‘ Depuis 10 ans, pour sauvegarder leur compétitivité, les industriels font des entorses à la règle de la convention collective. Et souvent sur le terrain, en collaboration avec les représentants d’IG Metall, dans les conseils d’entreprise et les Länder ! ’’. Et l’Usine nouvelle d’illustrer significativement comment la ‘‘ négociation descend dans les entreprises ’’, les ‘entorses’ aux conventions collectives que les ‘partenaires sociaux’ autorisent aux patrons (flexibilité, annualisation, baisse des salaires contre actions ou pas, départs anticipés..).

Plus de la moitié des entreprises ne relèvent plus de la convention collective, près des ¾ dans les Länder de l’Est. L’appareil syndical a démontré jusqu’à présent qu’il savait conserver le contrôle du prolétariat, en faisant respecter notamment l’interdiction de toute grève, hors du cadre de la branche. Les patrons ne l’oublient pas et quant à ceux qui quittent l’organisation de branche, l’Usine nouvelle en illustre les risques, en choisissant comme exemple telle entreprise où 100% des travailleurs sont syndiqués à l’IG Metall : ‘Opération délicate’, conclut l’hebdomadaire. Vous avez dit : euphémisme ?

L’appareil a refusé l’‘anodine proposition’ du patronat et sa logique d’affrontement avec la classe ouvrière. Le patronat - sachant qu’il a toujours été payé de retour - n’a pas cherché l’épreuve de force.

Le 25/2, après la conclusion de l’accord salarial en question, c’est la reprise des réunions sur le ‘pacte pour l’emploi, la formation et la compétitivité’. Le discours de patrons de l’industrie est net :

‘‘ L’économie allemande se trouve face à 2 scénarios. Soit nous évoluons à l’image de la Grande-Bretagne thatchérienne, dont le pays paie encore le prix, soit nous évoluons à la hollandaise. C’est cette deuxième voie que je préconise ’’, a déclaré le président de la Confédération de l’industrie, ‘‘ pourtant connu pour ses critiques sévères envers les blocages du modèle social allemand ’’ (Les Echos - 26-27/2).

Ce que le patronat allemand craint, c’est qu’une tentative ‘thatchérienne’ aboutisse à une radicalisation et à une issue victorieuse pour le prolétariat allemand avec tous les enchaînements qui s’ensuivraient. C’est le ‘pacte à la hollandaise’ qui fait aujourd’hui référence en Europe, avec la flexibilité très poussée des salaires, les rémunérations au mérite, des records en matière d’emplois à temps partiel, la prise en compte de la spécificité de l’entreprise ... et un minimum de grèves.


La démission d’Oskar Lafontaine du gouvernement ...


C’est à la surprise générale et sans donner d’explications, comme atteint d’‘une grosse fatigue’, que le ‘numéro 2’ du gouvernement, le ministre des finances a démissionné de son poste. L’annonce faite le 11/3 déchaîne l’enthousiasme des ‘marchés financiers’ - la bourse de Francfort enregistre en cours de séance une hausse de plus de 7%, un record depuis la guerre -, parce qu’ils prévoient ‘‘ moins de dépenses et moins de déficit en Allemagne ’’

Lafontaine passait pour le champion, à un poste clé, d’une politique de ‘relance’ budgétaire.

On le rend même responsable de la ‘générosité’ des accords salariaux. Il faut préciser que s’il a, semble-t-il, approuvé la revendication initiale des dirigeants de l’IG Metall (+6,5%, ramenée à 3,6 ou 4,2% au moment de la signature), il a surtout rappelé à l’ordre les syndicats de fonctionnaires (‘‘ Le service public (...) doit montrer plus de modération ’’).

La politique de Lafontaine est fondamentalement une politique de défense du capitalisme (elle s’accommode d’une résurgence éventuelle de l’inflation qui annulerait toute augmentation des salaires et, en fait, ferait fondre et reculer le pouvoir d’achat de ces salaires). Mais elle ne répond pas aux nécessités actuelles du grand capital (l’exemple du Japon, où cette politique dite keynésienne, à moins qu’elle ne soit néo-keynésienne, montre que, dans une autre situation, elle pourrait revenir paRFAitement à l’ordre du jour). Son porte-parole, ce sont les dirigeants de la Bundesbank et de la Banque centrale européenne, ou encore le Conseil des ministres des Finances des quinze fustigeant le ‘plan de stabilité’ du gouvernement allemand, la réduction du déficit budgétaire trop peu ‘ambitieuse’, etc.

Les Echos rapportent que, le 10/3, lors du Conseil des ministres, Gerhard Schröder avait tapé du poing sur la table, déclarant qu’il n’était ‘pas prêt à mener une politique contre les milieux économiques’. Oskar Lafontaine n’a pas démissionné seulement du gouvernement, il a abandonné aussi la direction du SPD.


.. et de la direction du SPD


Le ‘Thatcher du SPD’ c’est ainsi que la ‘gauche’ surnommait  Oscar Lafontaine au moment de l’élection de son prédécesseur, R. Scharping, à la tête du parti, comme le rappelle dans Libération (13-14/3) un membre du SPD, présenté comme expert, qui ajoute : ‘‘ Il n’est pas totalement exact que Lafontaine soit vraiment l’homme de la base. Lafontaine était très apprécié par les couches intermédiaires du parti, les ‘fonctionnaires’ du parti qui forment les gros bataillons de délégués aux congrès. A la base, chez les ouvriers notamment, il est toujours resté une certaine méfiance envers Lafontaine... ’’

Et Le Monde (13/3) : quand il était secrétaire général du SPD, il affirmait que le SPD devait ‘‘ s’ouvrir à de nouvelles couches de la population nées de la troisième révolution industrielle : travailleurs indépendants, entrepreneurs.. ’’. Le premier à défendre la flexibilité contre la revendication traditionnelle de réduction du temps de travail, c’est lui aussi - la presse bourgeoise l’avait qualifié d’‘éclaireur’ -.

C’est Schröder qui s’est présenté et a été élu président du SPD par 23 voix contre 6 et 3 abstentions (vote à confirmer par le congrès extraordinaire du 12 avril). Pour Le Monde (13-14/3), ‘‘ il aurait été inimaginable que M. Schröder puisse prendre la tête de ce parti, ne serait-ce qu’il y a une semaine (mais ce vote est aussi mauvais parce que le SPD) ne fait pas massivement bloc derrière le chancelier ’’. Le départ de Lafontaine n’exprime pas un ‘coup de barre à droite’ de la direction du SPD, parce qu’il n’y a jamais eu de contradiction entre elle et ‘Oskar’. Alors que les patrons font le siège de Schröder contre les mesures fiscales que Lafontaine leur assénerait, menaçant de ‘délocaliser’ (mesures d’ailleurs votées après la démission de Lafontaine), il plaide non coupable : ‘Nous avons allégé les impôts des Pme de 5 milliards de marks !’’. Quant à Daimler(-Chrysler) qui s’est directement adressé à G. Schröder, on rappelle qu’il ne paie pas d’impôt depuis 1995.

‘‘ Sans Lafontaine, Gerhard Schröder ne serait jamais arrivé au pouvoir. Le président du SPD a assuré la discipline du parti et mobilisé l’électorat traditionnel de la social-démocratie en faveur du candidat Schröder. ’’ (Le Monde - 13/3)

L’affaire Lafontaine signifie à l’adresse des masses : il n’y a qu’une politique possible, épouser le plus étroitement possible les besoins du capital.

Les élections en Hesse, quel ‘avertissement’ ?


Comme l’indique le tableau indiquant les voix exprimées dans les élections du land de Hesse, le 7 février dernier, le SPD progresse - sans retrouver le score de 1993 (Le Monde évoque une comparaison avec la mobilisation de la réaction en 1984 sur la question de l’école, en France !). Dans le fief de J. Fisher et D. Cohn-Bendit, les Verts dégringolent (après avoir essuyé une sévère rebuffade sur leur projet d'abandon du nucléaire, que le gouvernement, sous l'injonction du patronat, à proprement enterré).

 

Le FDP dégringole aussi. Mais le résultat obtenu par la CDU confirme que les élections de septembre n’annonçaient certainement pas sa décomposition.

 

SPD

Verts

CDU

FDP

20/01/1993

40,8%

8,8%

40,2%

7,4%

19/02/1995

38,0%

11,2%

39,2%

7,4%

07/02/1999

39,4%

7,4%

43,4%

5,1%

 

La CDU avait mis au centre de sa campagne le refus du projet gouvernemental du code de la nationalité. Il ouvrait la possibilité de naturalisation au bout de 8 ans au lieu de 15, en conservant la nationalité d’origine. Cette loi n’aurait rien à voir avec la mesure accordant tous les droits, politiques compris, à tout prolétaire immigré. C’est un projet contre lequel, pourtant, la CDU a engagé une campagne réactionnaire de pétition sur l’axe Oui à l’intégration, non à la double nationalité’.

 

En perdant la majorité (54/56) de ce land, le gouvernement perd sa majorité absolue au Bundesrat et G. Schröder déclare que le gouvernement va présenter un autre projet, qui puisse recueillir une majorité au Bundesrat !

 

La cinglante défaite que les masses ont infligée, lors des élections législatives, à la CDU, CSU et au FDP n’ont pas laissé d’autre choix au SPD pour constituer un gouvernement bourgeois que de faire alliance avec les Verts. S’il est prématuré d’envisager sérieusement un gouvernement ‘petite coalition’ (avec les Libéraux du FDP, sans parler d’une grande coalition’ avec la CDU-CSU), d’ores et déjà, la direction du SPD justifie sa politique de défense du capitalisme par une prétendue nécessité de réaliser le ‘consensus’ au Bundesrat. Le durcissement de la ‘réforme’ du code de la nationalité est un premier exemple.

 

*


Pour un gouvernement du seul SPD


 

En 1996, face à l’offensive généralisée de la bourgeoisie et de son gouvernement, la question du pouvoir a commencé à affleurer, dans le prolétariat, dans les termes : il faut chasser le gouvernement Kohl !

 

Lors des les élections de 1998, les masses laborieuses ont fourni la réponse possible avec l’organisation dont elles disposent, le SPD : vote massif en faveur du SPD; les partis bourgeois sont défaits et le gouvernement Kohl chassé.

Le SPD a immédiatement constitué, avec les Verts, un gouvernement au service du capital qui s’est rapidement mis en ordre de bataille. Cela pèse sur les masses, d’autant que cela apparaît comme un engrenage inévitable pour la classe ouvrière en Europe.

Pour se défendre contre les remises en cause de ses conditions d’existence qu’exige la défense du mode de production capitaliste et arracher les revendications, le prolétariat aura à combattre et battre ce gouvernement. Dans ces affrontements, pour les préparer, il lui faudra se dresser contre les appareils syndicaux, les dirigeants du DGB, leur imposer qu’ils rompent avec le gouvernement et le patronat - qu’ils soutiennent sans réserve -, avec la ‘cogestion’ sous toutes ses formes, et d’abord leur imposer la rupture des ‘négociations’ préparant le ‘pacte de solidarité’.

Compte tenu des relations politiques, le prolétariat sera poussé à contraindre le SPD à rompre avec les partis bourgeois, des Verts au CDU et FDP (et PDS !), à tous les niveaux, à revendiquer qu’il forme un gouvernement du seul SPD, soutenu par le DGB, avec la volonté d’obtenir que ce gouvernement satisfasse les revendications.

Il faut lui ouvrir cette voie.

 

Mais le prolétariat n’ira réellement de l’avant que, quand Ddans la lutte de classe et les conflits inévitables avec les appareils syndicaux et le SPD, pour une nouvelle génération de militants issue des rangs de la classe ouvrière, mais surtout de la jeunesse, la question du parti révolutionnaire nécessaire à un véritable gouvernement ouvrier, un gouvernement révolutionnaire, reviendra à l’ordre du jour.


 

Le 2 avril 1999

 

 

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[1] Ce que recouvre la colonne ‘autres’ :

¨    Les partis ‘allemand’, ‘panallemand’, ‘expulsés’, ‘bavarois’.. obtiennent 8,5% en 1949, 12% en 1951 et 8% en 1957. Ils participent alors pour l’essentiel aux gouvernements de ‘grande coalition’. Ils ne recueillent plus que 2,8% en 1961.

¨    le vieux parti Zentrum recueille 3,1% en 1949, 0,8% en 1951.

¨    Les autres organisations représentent peu : 2,9%, en 1949, en faveur d’une ‘union pour le développement économique’; 3,8%. pour les indépendants. Une ‘Union pour la paix’ obtient 1,9% en 1961 et 1,3% en 1965. Le Kpd a été interdit en 1961.

En 1998, c’est une poussière de listes hétéroclites de ‘Vieux’, ‘Femmes’, ‘Familles’, ‘Amis de la nature’, ‘Amis des animaux’, ainsi qu’un Pro DM : 0,9%