Accueil
Textes constitutifs  
Liens
Abonnement &
Contact

 

France

Situation française

Défense des acquis ouvriers

Echéances électorales

Enseignement public

Etudiants, Lycéens

Interventions, Suppléments

Leçons des luttes de classe

Syndicats, partis


International

Situation Internationale

Situation économique

Afrique

Amériques

Asie

Balkans

Europe

Guerres impérialistes

Moyen-Orient

URSS, Russie, Europe orientale

Article paru dans Combattre pour le Socialisme  n°61  de janvier 1996

 

le courant communiste internationaliste, le parti des travailleurs
et le mouvement de novembre-décembre 1995

 

 le “programme de transition” et le mouvement de novembre-décembre




On ne juge pas d’une organisation d’après ce qu’elle dit d’elle-même, mais par son action politique et particulièrement, lorsqu’il s’agit d’une organisation qui se réclame de la lutte des classes, de la révolution prolétarienne, du socialisme. Les grands moments de la lutte des classes, comme la grève, le mouvement de novembre-décembre sont à cet égard décisifs. Le “Courant Communiste Internationaliste” prétend être la “section française de la IVe Internationale” qui, à son initiative, aurait été reproclamée. Il prétend donc construire une Internationale qui se fixe la tâche de diriger la révolution prolétarienne mondiale, de prendre le pouvoir à l’échelle de la planète. Pour savoir ce qu’il en est, il faut lui appliquer la méthode évoquée ci-dessus.

“Le programme de transition” qui s’intitule “L’agonie du capitalisme et les tâches de la IVe Internationale” reste officiellement celui dont se réclame le “Courant Communiste Internationaliste”. Il spécifie :

«La tâche stratégique de la IVe Internationale ne consiste pas à réformer le capitalisme mais à le renverser. Son but politique est la conquête du pouvoir par le prolétariat pour réaliser l’expropriation de la bourgeoisie».

Plus haut ce programme explique :

«Il faut aider les masses dans le processus de leurs luttes quotidiennes, à trouver le pont entre leurs revendications actuelles et le programme de la révolution socialiste. Ce pont doit consister en un système de REVENDICATIONS TRANSITOIRES, partant des conditions actuelles et de la conscience actuelle de larges couches de la classe ouvrière et conduisant invariablement à une seule et même conclusion “la conquête du pouvoir par le prolétariat”».

La grève et le mouvement de novembre-décembre 1995 ont créé une situation politique où s’imposait incontestablement cette orientation : d’un côté le gouvernement Chirac-Juppé dont la réforme-destruction de la Sécurité Sociale concentre sa politique ultra-réactionnaire, de l’autre le prolétariat et la jeunesse qui, à partir de la grève des travailleurs de la SNCF et de la RATP, de gigantesques manifestations, affrontaient ce gouvernement, exigeaient le “retrait du plan Juppé”, or, pour l’obtenir, il fallait vaincre et chasser ce gouvernement. Quelle a été la politique du “C.C.I.” ?

Répondre à cette question exige de surmonter une difficulté : le C.C.I. serait un “courant” du “Parti des Travailleurs”, Parti qui lui n’est pas un Parti de la IVe Internationale et n’a pas comme programme, le programme de celle-ci (le C.C.I. utilise une curieuse “stratégie” de construction d’un Parti de la IVe Internationale, la “stratégie” des poupées gigognes, des petites boîtes dans les grandes. Le Parti Communiste Internationaliste a constitué un autre Parti, le Parti des Travailleurs. La prétendue IVe Internationale reproclamée utilise aussi la “stratégie” des poupées russes : elle construit une autre Internationale : ‘l’Entente internationale des travailleurs).



“iO” avant la greve



Cette difficulté devrait être facilement surmontée puisque les militants du C.C.I. sont à la tête du P.T.. Ce sont eux qui composent, pour l’essentiel, le comité de rédaction d’”Informations Ouvrières”, dont le directeur politique et éditorialiste s’appelle Daniel Gluckstein, le rédacteur en chef, J.P. Raffi, le directeur de publication Pierre Lambert. Tous sont des dirigeants bien connus du C.C.I..

A la suite de la grève de 24 heures du 10 octobre, réalisée à l’appel des directions des fédérations syndicales des fonctionnaires et de celles des travailleurs des entreprises publiques, Daniel Gluckstein a écrit un éditorial qui se conclut ainsi :

«S’il est une question à l’ordre du jour aujourd’hui, n’est-ce pas celle de la réalisation de l’unité tout de suite, sur les revendications précises et dûment qualifiées ? S’il est une question à l’ordre du jour aujourd’hui, n’est-ce pas celle posée par le comité directeur du Parti des Travailleurs “le 14 octobre”. La Sécurité Sociale, c’est nous tous, travailleurs, chômeurs. La Sécurité Sociale ce sont nos salaires. La Sécurité Sociale est à nous. Elle n’appartient ni au gouvernement ni au patronat, elle nous appartient depuis cinquante ans. Des millions et des millions ont fait grève le 10 octobre pour les salaires et pour la défense de la Sécurité Sociale. Par millions et millions dans l’unité, les travailleurs de toutes professions, du public et du privé, ont montré qu’ils sont prêts à la grève générale interprofessionnelle, dans l’unité pour arracher les revendications et défendre la Sécurité Sociale» (I.O. n° 202 - 18 octobre).

Le n° 203 d’”I.O.” titre :

«N’EST-IL PAS TEMPS D’ALLER À LA GRÈVE GÉNÉRALE INTERPROFESSIONNELLE»

Quel radicalisme ! Quelle mâle résolution ! Mais voyons la suite.



“i.o.” pendant la greve



A la suite de la direction de FO, “I.O.” a dénoncé la grève et la manifestation de 24 heures du 24 novembre sous prétexte que la CFDT y appelait. Pourtant c’est à partir d’elle que s’est engagé le mouvement de novembre-décembre 1995. Par contre “I.O.” a soutenu totalement l’appel de FO à une grève interprofessionnelle de 24 heures et à une manifestation pour le 28 novembre.

Et qu’on consulte les n° 204 (1er novembre), 205 (8 novembre), 206 (15 novembre), 207 (22 novembre) et tous les numéros de “I.O.” parus pendant le mouvement de novembre-décembre, on n’y trouve aucun titre, aucun article exigeant des confédérations CGT et CGT-FO qu’elles appellent à la grève générale de toute la classe ouvrière française jusqu’à satisfaction, à la manifestation nationale, centrale à Paris.

Pourtant, dès la fin de la première semaine, le cours de la grève et des manifestations réclame la mobilisation générale du prolétariat et de la jeunesse, l’appel des confédérations à la grève générale, à la manifestation nationale à Paris, à l’Assemblée Nationale pour le “retrait du plan Juppé”, battre le gouvernement Chirac-Juppé, le chasser. C’est ce que veut la grande masse des travailleurs. Mais c’est précisément ce que ne veulent pas les dirigeants des confédérations FO et CGT. Blondel se prononce le premier contre l’appel des confédérations à la grève générale “mot d’ordre révolutionnaire”. Il y oppose la “généralisation”. Viannet va suivre

 


“i.o.” et le congres de la cgt



Le n° 209 de “IO”(6 décembre) rapporte complaisamment, sous le titre «45e congrès de la CGT : débat sur une décision : “généraliser partout la grève pour le retrait du plan Juppé”», l’intervention d’un délégué à ce congrès lequel propose la résolution suivante :

«Notre congrès se félicite de l’appel de la commission exécutive confédérale de Force Ouvrière à la généralisation de la grève.Le congrès confédéral appelle maintenant, aujourd’hui lundi, tous les salariés du public et du privé à généraliser partout la grève jusqu’au retrait du plan Juppé. Exige du gouvernement l’ouverture de négociations pour le retrait du plan Juppé, le retrait du contrat de plan, l’arrêt de tous les licenciements».

Cette première résolution est présentée contre l’appel à la grève générale. Le même numéro d’I.O. publie intégralement celle votée finalement et portant sur ce point par le congrès de la CGT :

«Appelle les salariés à développer la prise des décisions d’action de manière démocratique, s’appuyant sur leurs aspirations et leur détermination (c’est-à-dire AG par AG, NDLR).

Oui, salariés actifs et retraités, privés d’emploi, précaires, nous sommes tous concernés.

Agissons encore plus unis et rassemblée, pour généraliser partout la grève pour le retrait du plan Juppé et les mesures négatives déjà prises en matière de retraite, pour les salaires, l’emploi et l’ouverture de vraies négociations en prenant comme base toutes les exigences des grévistes.

Ensemble nous avons la force de gagner.


Montreuil, le 4 décembre 1995»


C’est le contre-feu à la réalisation de la grève générale.

Le n° 208 d’”I.O.” avait titré :

«Unité d’action des syndicats CGT et CGT-FO jusqu’au retrait du plan Juppé»

Cette dite “unité d’action” n’est rien d’autre, en l’occurrence, que l’accord des bureaux confédéraux pour contenir le mouvement, se dresser contre la grève générale, protéger le gouvernement Chirac-Juppé. Le P.T. s’est engagé totalement aux côtés des appareils traîtres. Le P.T., le “Courant Communiste Internationaliste”, “I.O.”, Gluckstein, Lambert et leur clique ont coopéré à sauver le gouvernement Chirac-Juppé. Quant au “plan Juppé”, il demeure et commence à s’appliquer.



une fois encore “l’assemblée constituante”



Daniel Gluckstein n’en écrira pas moins :

«Si un député, un seul, voulait réellement faire prévaloir la démocratie, il devrait déclarer :
“…Refusant de cautionner un instant de plus la survie de ces institutions illégitimes et discréditées, j’en appelle au combat uni pour l’Assemblée Constituante. Car c’est au peuple de décider. La convocation d’une Assemblée Constituante est aujourd’hui le moyen indispensable par lequel le peuple se réappropriera la souveraineté, définissant par lui-même, librement et sans contrainte, la forme et le contenu de la démocratie. Forme et contenu qui sans aucun doute, intégreront la préservation de la Sécurité Sociale fondée sur le salaire différé et l’arrêt de son pillage destructeur par les spéculateurs». (I.O. n° 210 - 13 décembre).

Et ce type se dit “trotskyste” ! Un vulgaire “démocrate” petit-bourgeois tout au plus. Faut-il lui rappeler que le “peuple” est composé de toutes les classes sociales d’exploités et d’exploiteurs, d’opprimés et d’oppresseurs. Les marxistes combattent pour que la classe ouvrière prenne le pouvoir, réalise, non la “démocratie” en général, mais la dictature du prolétariat, c’est-à-dire la démocratie ouvrière, nécessaire pour exproprier le capital (et pas seulement “confisquer les profits spéculatifs”). L’affirmation de Lénine : “On ne peut aller de l’avant si on craint d’aller au socialisme” est d’une brûlante actualité.

Gluckstein fait preuve d’un mépris total des enseignements de l’histoire. En cas de crise politique fondamentale, mettant en cause son pouvoir, ses institutions, son État, la bourgeoisie a généralement recourt à une “Assemblée Constituante” soi-disant pour que “le peuple définisse par lui-même, librement et sans contrainte la forme et le contenu de la démocratie”. Sauf que : la “Convocation d’une Assemblée constituante” détermine par avance “la forme et le contenu de la démocratie”, puisque, par définition, c’est une Assemblée parlementaire, la forme c’est le parlementarisme bourgeois, le contenu c’est la société bourgeoise et son État. Gluckstein se fait le propagandiste de la “solution” bourgeoise à une situation révolutionnaire où le mouvement du prolétariat et de la jeunesse aurait emporté la Ve République et ses institutions.



pour le gouvernement ouvrier



La démarche du “programme de transition” est radicalement différente. Elle est axée par le mot d’ordre de “gouvernement ouvrier et paysan” :

«Le mot d’ordre de “gouvernement ouvrier et paysan” est employé par nous uniquement dans le sens qu’il avait en 1917 dans la bouche des bolcheviks, c’est-à-dire comme un mot d’ordre anti-bourgeois et anti-capitaliste, mais en aucun cas dans le sens “démocratique” que lui ont donné plus tard les épigones (les staliniens, NDLR) faisant de lui, alors qu’il est une étape vers la révolution socialiste, la principale barrière sur cette voie».

Le “programme de transition” ajoute :

«De tous les partis et organisations qui s’appuient sur les ouvriers et paysans et parlent en leur nom, nous exigeons qu’ils rompent avec la bourgeoisie et entrent dans la voie de la lutte pour le gouvernement ouvrier et paysan. Dans cette voie nous leur promettons un soutien complet contre la réaction capitaliste. En même temps nous déployons une agitation inlassable autour des revendications transitoires qui devraient, à notre avis, constituer le programme du “gouvernement ouvrier et paysan”».

Le PS et le PCF, si traîtres et dégénérés qu’ils soient, appartiennent au type de partis dont parle le “programme de transition”. Mais en l’absence de parti révolutionnaire, et même lorsqu’un parti révolutionnaire existe, sans qu’il soit reconnu par la grande majorité du prolétariat comme son parti (exemple en Russie entre février et octobre 1917), le prolétariat, engagé dans le combat contre la bourgeoisie, ses partis, son pouvoir, s’efforce toujours d’utiliser ses organisations traditionnelles. D’ailleurs, les appareils confédéraux, fédéraux, syndicaux des organisations syndicales sont tout aussi traîtres et dégénérés que le sont le PS et le PCF, les gouvernements bourgeois les utilisent comme courroies de transmission de leur politique. La classe ouvrière ayant besoin de ses syndicats n’en tente pas moins d’avoir recours à ces appareils.


  “rompez avec la bourgeoisie - prenez le pouvoir”



Adresser, systématiquement, aux dirigeants des centrales, des fédérations, des syndicats ouvriers la revendication — rompez avec la bourgeoisie — est indispensable. Encore faut-il concrétiser : boycottez tous les organismes de “concertation”, de “participation” que la bourgeoisie, ses gouvernements ont mis en place pour associer les dirigeants syndicaux à l’application de leur politique anti-ouvrière et ils sont innombrables. C’est nécessaire pour armer la classe ouvrière. Cette même revendication doit être également adressée aux partis ouvriers traîtres et dégénérés.

La revendication “rompez avec la bourgeoisie” a comme indispensable complément “réalisez le Front Unique pour la combattre, combattre ses gouvernements, son État, sur tous les terrains” et finalement pour que ces partis prennent le pouvoir ainsi que l’indique le programme de transition :

«La revendication adressée systématiquement à la vieille direction : “Rompez avec la bourgeoisie, prenez le pouvoir !”  est un instrument extrêmement important pour dévoiler le caractère traître des partis et organisations de la IIe et de la IIIe Internationales (en l’occurrence le PS et le PCF), ainsi que l’Internationale d’Amsterdam (en l’occurrence les appareils des syndicats)»

Cette méthode contribue à la mobilisation du prolétariat et de la jeunesse parce que :

  -     elle leur fixe un objectif gouvernemental ;

-     en exigeant des vieilles directions qu’elles rompent avec la bourgeoisie, ils se mettent déjà en action ;

-     elle amorce la submersion des vieilles directions traîtres et par la même la réorganisation du mouvement ouvrier sur un nouvel axe ;

-     elle multiplie les possibilités de construire le parti ouvrier révolutionnaire ;

-     elle ne peut que contribuer à ce que surgissent les comités ouvriers, à ce qu’ils se fédèrent à tous les niveaux, jusqu’au niveau national et qu’ils se dressent comme un embryon de nouveau pouvoir face au pouvoir bourgeois.

Ce n’est pas l’orientation des Gluckstein, Lambert et autres, d’”I.O.”, du PT et du CCI. Ainsi, jamais IO n’a, pendant les semaines de la grève et des manifestations, titré, publié un article, une ligne sur la nécessité, pour vaincre, de défaire et de chasser le gouvernement Chirac-Juppé. Pourtant les grévistes et les manifestants, au fur et à mesure où le mouvement se développait, exigeaient de plus en plus “dehors Juppé”. Comme Viannet peut-être, les Gluckstein prétendront-ils qu’il n’y avait, à ce moment, pas d’autre gouvernement possible que le gouvernement Chirac-Juppé.

Si ; les masses engagées dans le combat pour balayer ce gouvernement se seraient inéluctablement tournées vers le PS et le PCF pour qu’ils prennent le pouvoir, forment un gouvernement. Les révolutionnaires avaient à revendiquer au nom des travailleurs : PS, PCF, rompez avec la bourgeoisie, formez un gouvernement sans ministres bourgeois. “Mais ce sont des traîtres !” s’exclament tous les Gluckstein du monde. Et les appareils des confédérations, des fédérations, des syndicats ne sont-ils pas traîtres ? Pourtant c’est d’eux que la classe ouvrière attendait l’appel à la grève générale, à la manifestation centrale à Paris. C’est à eux qu’il fallait revendiquer : appelez à la grève générale, etc… Agir ainsi c’était contribuer à la mobilisation des masses. Ne pas le faire c’était ignorer la dialectique des rapports contradictoires entre le prolétariat, la jeunesse et les organisations traditionnelles : lorsque le prolétariat et la jeunesse s’adressent ainsi à leurs organisations traditionnelles, ils s’engagent dans un processus de débordement, de submersion de celles-ci.



gluckstein et ses amis attendent la mort naturelle de la ve république



Gluckstein tartine des articles dénonçant les institutions de la Ve République. “Il faut qu’elles disparaissent”. OK ! Cela ne fait aucun doute. “Il faut élire une Constituante souveraine”. Admettons-le un moment. Mais il est nécessaire qu’il nous explique comment faire disparaître la Ve République et ses institutions pour qu’éventuellement soit élue une Constituante souveraine. C’était le moment de formuler une réponse claire lorsque les travailleurs étaient en grève, qu’ils manifestaient, qu’ils scandaient de plus en plus, au fur et à mesure que se déroulaient les manifestations : “Juppé dehors”. Mais alors, Gluckstein, “I.O.”, le PT, le CCI, soutenaient Blondel et l’appareil de FO, Viannet et l’appareil de la CGT, lesquels combattaient contre la réalisation de la grève générale, la manifestation centrale à Paris. Ils déclaraient qu’il ne s’agissait pas de vaincre et de balayer le gouvernement Chirac-Juppé. Ils confortaient la Ve République et ses institutions. Telle est la réalité. Manifestement Gluckstein et ses amis attendent la mort naturelle de la Ve République.

Ce qu’ils disent et écrivent n’est que poudre aux yeux, du baratin. Ils essaient de masquer le rôle véritable qu’ils jouent : celui de flanc-garde “gauche” des appareils et principalement de l’appareil FO.

 

Haut de la page