Éditorial du
bulletin « Combattre pour le socialisme » n°64 (n°146 ancienne série)
- 1er mars 2017 :
Les élections
présidentielles et la Ve République
Le 23
avril et le 7 mai aura lieu l’élection présidentielle. Dans le cadre de la Ve
République, les élections présidentielles sont les élections les plus
importantes. Il faut le rappeler : les institutions de la Ve
République consacrent la domination du Président de la République sur l’Assemblée
nationale. Elles lui donnent le pouvoir de désigner le gouvernement et de dissoudre
l’Assemblée nationale. Elles lui donnent le pouvoir de désigner le gouvernement
et de dissoudre l’Assemblée nationale; elles lui permettent, via l’article 16,
de concentrer tous les pouvoirs ; elles permettent au gouvernement, via l’article
49 ter, d’imposer une loi sans passer par le vote des députés.
Ce ne
sont là que quelques aspects parmi les plus violemment anti-démocratiques – y
compris du point de vue de la démocratie bourgeoise – de ces institutions qui
doivent être qualifiés de bonapartistes, le « peuple » étant appelé à
choisir une fois tous les cinq ans un « sauveur suprême ». La
liquidation de la IVe République, par le coup d’état gaulliste,
correspondait à la nécessité politique de trancher brutalement, au profit de la
fraction dominante ayant vocation à s’insérer sur le marché mondial, les
dissensions internes à la bourgeoisie française, notamment sur la question
algérienne. Mais elles sont l’expression française d’une tendance à l’œuvre
partout dans le cadre du capitalisme pourrissant. La transformation du
capitalisme de libre concurrence en un capitalisme des monopoles exige le
passage de la république parlementaire au bonapartisme dont Trotsky rappelle :
« S’élevant politiquement au‑dessus
des classes, le bonapartisme, comme son prédécesseur le césarisme, a toujours
été et reste, du point de vue social, le gouvernement de la partie la plus
forte et la plus solide des exploiteurs ».
L’objectif inachevé de la Ve
République : en finir avec le « régime des partis »,
liquider les partis d’origine ouvrière, intégrer les syndicats à l’appareil d’État
La
réalisation intégrale des objectifs de la Ve République supposerait,
selon la formule de son fondateur, de Gaulle, d’en finir avec « le régime des partis ».
Naturellement, cela vaut d’abord pour les partis d’origine ouvrière : PS
et PCF. Elle supposerait également l’intégration complète des syndicats à
l’appareil d’État, ceux-ci étant transformés en simples rouages de celui-ci,
concourant au « bien commun » dans le cadre d’une association
capital-travail, c’est-à-dire la réalisation du corporatisme.
Pour
des raisons sur lesquelles on ne peut ici revenir de manière complète, cet
objectif politique n’a pu être totalement réalisé. Le PS (qui a pris la place
de l’ancienne SFIO), le PCF continuent d’exister, quoique dans un état
d’extrême décomposition. Les syndicats CGT, FO, FSU, quoique très affaiblis par
la politique constante de trahison de leurs dirigeants, continuent d’exister
comme syndicats ouvriers, même si des coups très violents leur ont été portés
(par exemple avec la destruction de l’ancienne FEN). À travers le dialogue
social, ils s’associent de manière toujours plus profonde à l’ensemble des
contre-réformes de la bourgeoisie qu’ils tendent à prendre en charge. Mais la
quantité ne s’est pas transformée en qualité. La contradiction demeure entre
leur nature de syndicats ouvriers et la politique totalement bourgeoise de leur
direction. À chaque instant, cette contradiction se manifeste à nouveau. On l’a
vu avec la loi El Khomri lorsque les dirigeants de la CGT et de la FSU, après
avoir dans un premier temps signé un communiqué qui l’avalisait totalement, ont
dû ensuite se prononcer formellement pour son retrait – tout en bandant avec
succès toutes leurs forces pour interdire au prolétariat et à la jeunesse
d’affronter victorieusement le gouvernement.
L’Assemblée
nationale elle-même n’a pu être réduite intégralement au rôle de simple chambre
d’enregistrement. Le Bonaparte ne peut se passer totalement de la béquille
qu’elle constitue pour lui. Ainsi, dans les cinq années qui viennent de
s’écouler, rien ne contraignait la majorité de députés PS-PCF à entériner le
CICE, le pacte de responsabilité, la loi El Khomri. Rien ne la contraignait à
accepter les gouvernements bourgeois Hollande-Ayrault-Duflot-Pinel, puis
Hollande-Valls-Macron-Baylet. Rien, sinon sa propre veulerie politique. Elle
n’a été soumise que parce qu’elle s’est elle-même soumise.
Pourquoi la bourgeoisie
veut-elle en finir avec l’existence du PS et du PCF,
malgré la politique de trahison des intérêts ouvriers de ces derniers ?
L’objectif
de la Ve République n’a donc pas été atteint dans son intégralité.
Mais il demeure pour la bourgeoisie une nécessité impérieuse. C’est ainsi que
se mène en permanence une campagne incessante pour que disparaisse le Parti
socialiste, et aussi, accessoirement, une offensive pour la liquidation de ce
qui reste du PCF. « Le PS est mort » ou bien « le PS
doit mourir », « Il faut clore le cycle d’Epinay » (du nom
du congrès de 1971 du PS) : chaque jour, des dizaines d’articles en forme
d’injonctions sont écrits à ce sujet par les plumitifs de la bourgeoisie.
Mais,
dira-t-on, l’orientation du PS (non plus d’ailleurs que celle du PCF) ne
représente en rien une menace pour la bourgeoisie, puisque ces deux partis se
situent désormais ouvertement sur le terrain de la défense de la propriété
privée des moyens de production. Pourquoi cet acharnement, puisque le PS, qui a
vertébré les gouvernements bourgeois de 1981 à 1986, puis de 1988 à 1993, de
1997 à 2002 et à nouveau depuis 2012, a largement fait la preuve de son
aptitude à prendre en charge les intérêts de la bourgeoisie française, et en
même temps à s’en prendre violemment aux intérêts ouvriers ?
Il est
absolument certain que le PS, le PCF sont passés du côté de l’ordre bourgeois,
et ce définitivement. S’agissant de la social-démocratie, elle est passée du
côté de l’ordre bourgeois, non pas depuis 2012, comme certains semblent se
l’imaginer, mais depuis... 1914 où, ralliant d’union sacrée, elle a envoyé des
millions de prolétaires à la mort en défense de sa propre bourgeoisie.
En un
siècle, pour s’en tenir à la France, la SFIO puis le PS ont mille fois trahi le
prolétariat, pris en charge les intérêts de l’impérialisme français au prix de
la politique la plus barbare et la plus abjecte par exemple en défense du
colonialisme français. Et pourtant, alors même que les rapports du PS avec la
classe ouvrière sont des plus ténus, c’est encore du vote PS (très
accessoirement du vote PCF désormais après la disparition de l’URSS) que se
saisissent travailleurs et jeunes lorsqu’ils veulent se débarrasser des partis
bourgeois. C’est ce qui s’est encore passé en 2012, où massivement travailleurs
et jeunes ont voté Hollande puis PS aux législatives (dans une bien moindre
mesure PCF) contre Sarkozy, l’UMP, le FN, l’UDI.
Est-ce
parce que les masses ont des « illusions » dans le PS ? Est-ce parce que
les travailleurs ont pris au sérieux la phrase creuse de la campagne de
Hollande : « Mon ennemi, c’est la finance » ?
Absolument pas. Il ne faut pas prendre les travailleurs pour des imbéciles ou
des amnésiques. Les travailleurs, en 2012, se sont saisis du vote PS pour la
seule raison qu’ils ne disposaient d’aucun autre moyen de se débarrasser de
Sarkozy, de l’UMP, de l’UDI, et en même temps d’écarter le Front national,
d’autres moyens que d’utiliser le vote pour le vieux parti d’origine ouvrière
mais dont la politique est cent pour cent bourgeoise, ce que les travailleurs
n’ignorent en rien.
Il en
irait évidemment autrement si la classe ouvrière avait construit un Parti
ouvrier révolutionnaire, si elle disposait d’« un drapeau que ne
souille aucune tâche », pour citer Trotsky parlant de la IVe
Internationale. Mais précisément elle n’en dispose pas. Et la classe ouvrière
ne peut attendre, pour engager la bataille pour en finir avec les gouvernements
bourgeois, que ce parti soit construit. Dès lors, elle se saisit des
instruments dont elle dispose, si délabrés, si vermoulus soient-ils. Et il en
sera sans doute ainsi tant qu’au travers de grands combats de classe un parti
authentiquement révolutionnaire ne sera pas construit.
Et
c’est pourquoi la bourgeoisie – qui par ailleurs sait parfaitement à quoi s’en
tenir sur la politique du PS - n’a de cesse de la priver de cet instrument, de
la placer dans une situation où elle ne disposera plus d’aucun instrument, si
délabré soit-il, pour postuler au pouvoir. Elle n’a de cesse de ramener le
prolétariat à une situation qui était la sienne avant qu’il n’édifie un parti
ouvrier et où il était condamné à servir de force d’appoint à un parti du
capital contre un autre.
Mais,
objectera-t-on encore, finalement la disparition du PS et du PCF n’aurait elle
pas le mérite de faire place nette pour la naissance d’un authentique parti
ouvrier révolutionnaire ? Ceux qui prétendent une chose pareille n’ont
jamais pris la peine d’étudier sérieusement l’histoire, ni de regarder autour
d’eux. Dans ce numéro de CPS, un
article consistant est consacré à la situation en Italie. Il y a eu en Italie
un très puissant Parti communiste. Il y a eu un important Parti socialiste (le
PSI). Ces partis ont été liquidés. Le PCI, par la décision de ses dirigeants,
s’est dissout dans un parti bourgeois, le PD (Parti démocrate), aujourd’hui dirigé
par d’anciens démocrates-chrétiens. Le PSI a de même disparu. Aujourd’hui, il
n’y a plus en Italie de parti d’origine ouvrière. La situation politique du
prolétariat italien en a-t-elle été améliorée ? Nulle part le désarroi
politique n’est au contraire plus grand. Les attaques contre les conditions
d’existence des masses avec la collaboration des dirigeants de la CGIL
(principale centrale ouvrière) s’y déchaînent. Quant à la construction d’un
véritable parti ouvrier, elle ne s’en est certainement pas trouvé favorisée,
bien au contraire.
En défense de la Ve
République, Hollande, Valls, Cambadélis prennent l’offensive pour liquider le
PS
Comme
écrit plus haut, toutes les voix autorisées de la bourgeoisie jusqu’à Mélenchon
– voir plus bas - appellent à en finir avec l’existence du PS. Mais d’autres
voix se mêlent au concert, en particulier dans ce qu’il est convenu d’appeler
l’ « extrême gauche », qui évoquent sa mort avec jubilation. Ces
derniers, pour autant qu’ils sont encore capables de penser, devraient méditer
sur le fait suivant. Aucune voix ne hurle plus fort à la mort du PS que... la
plupart des dirigeants du PS eux-mêmes. À commencer par Hollande. C’est avec le
cynisme qui le caractérise qu’il déclare dans son ouvrage en forme de déballage
(Un président ne devrait pas dire ça) :
« Le PS doit se faire hara-kiri ». Il ajoute que Valls est
d’accord, que Cambadélis est d’accord... mais que les choses n’avancent pas.
Valls a fait de la liquidation du PS et du mot socialisme, « un mot du
XIXe siècle » son leitmotiv. Quant à Cambadélis, il lui
revenait la tâche de fondre le PS dans la Belle Alliance populaire avec
quelques débris de micro partis bourgeois (radicaux de gauche, miettes du Parti
écologiste, etc.). La Belle Alliance populaire avait vocation à jouer en France
le rôle du Parti démocrate en Italie... ou aux USA.
L’acharnement
des dirigeants du PS à vouloir liquider leur propre parti signifie simplement
que la défense des objectifs de la Ve République est incompatible au
bout du compte avec l’existence du PS. Il faut rappeler à cet égard que c’est
Jospin qui a réformé en 2000 la Ve République dans le sens de
l’accentuation de ses traits bonapartistes (en instaurant le quinquennat et en
faisant procéder les élections législatives de la présidentielle, visant à
transformer la majorité parlementaire en « majorité
présidentielle »). Il est certes paradoxal que l’offensive contre le PS
vienne de sa propre direction. Mais ce paradoxe est en réalité tout à fait
explicable.
Primaires : l’arroseur
arrosé
Les
primaires de la Belle Alliance populaire – et non du PS - devaient constituer
une étape importante sur le chemin de la liquidation du PS. En lui-même, le
processus des primaires est parfaitement réactionnaire, qui consiste à faire
choisir le candidat d’un parti – en l’occurrence le PS - par d’autres que les
instances de ce parti, y compris par des ennemis de ce parti. Le projet
d’origine était clair : le Bonaparte Hollande devait se faire légitimer à
travers cette élection aux primaires.
Mais le
discrédit de Hollande, la haine populaire contre sa politique, doublée du
mépris dans lequel le tient la bourgeoisie pour qui, ayant fait la sale
besogne, il n’avait plus d’utilité, a conduit Hollande à renoncer. Dès lors,
Valls entrait en piste : partisan déclaré du « dépassement » du PS, « assumant » le bilan de la violente politique
anti-ouvrière poursuivie depuis cinq ans, chantre de la mise en place de l’État
policier au nom de la lutte contre le « terrorisme »,
il se faisait fort d’être adoubé dans le cadre d’élections en principe taillées
sur mesure. L’immense majorité de l’appareil du PS, des députés était derrière
lui.
Las !
Il fut piteusement battu. Significativement il n’arriva en tête, en particulier
au deuxième tour, que dans les circonscriptions bourgeoises tenus généralement
par des députés LR.
Quel
est le sens de cette défaite? Une partie des travailleurs et des jeunes – une
partie certes pas majoritaire, mais tout de même significative – s’est saisie
de la possibilité qu’offrait ce scrutin pour voter contre le gouvernement,
contre sa politique anti-ouvrière, notamment contre la loi El Khomri et
l’instauration de l’État policier. Ce faisant elle votait, avec un degré de
conscience plus ou moins complet, contre la liquidation du PS qui était contenu
dans la position de Valls. Elle s’est ainsi saisie au second tour du vote
Hamon, qui se présentait comme « critique » des gouvernements du
quinquennat Hollande. Ainsi, l’opération primaires a-t-elle abouti au résultat
strictement inverse à celui qu’en espéraient ses promoteurs.
La défaite de Valls, la
victoire de Hamon s’inscrivent dans un affrontement général en Europe, dont l’enjeu
est la survie des partis sociaux-démocrates confrontés à l’offensive de la
bourgeoisie pour les liquider
On ne
peut séparer ce qui vient de se passer en France lors des primaires de ce qui
se passe à cet égard dans d’autres pays d’Europe.
La
prise en charge totale par les partis sociaux-démocrates des objectifs de la
bourgeoise dans le cadre de la crise du capitalisme pourrissant ne peut
conduire qu’à la liquidation de ces partis. En ce sens, la victoire de Valls
aurait représenté un pas de première importance dans cette direction. C’est
exactement ce que montre l’exemple grec où le PASOK, qui a pris en charge au
gouvernement la totalité des violentes offensives anti-ouvrières exigées par la
troïka, et qui est réduit à une influence électorale quasi nulle, est en état
de coma dépassé.
C’est
dans ce sens que la nouvelle direction du PSOE œuvre, en Espagne, en soutenant
le gouvernement du PPE de Rajoy qui continue son offensive meurtrière contre le
prolétariat d’Espagne.
Mais
cette offensive destructrice, arrivée à son terme en Italie et en Grèce, se
heurte ailleurs à une résistance des militants et, au-delà, des travailleurs et
de la jeunesse.
En
Espagne même, l’orientation de soutien à Rajoy des actuels dirigeants du PSOE
se heurte à la volonté de la majorité des militants qui ont exigé la tenue d’un
congrès extraordinaire pour remettre en cause cette orientation. La direction Diaz
doit se livrer aux pires manœuvres bureaucratiques – allant jusqu’à prétendre
interdire toute nouvelle adhésion ! - pour se maintenir.
En
Grande-Bretagne, alors que l’appareil blairiste et la majorité des
parlementaires du Labour apportaient sur tous les terrains son soutien au
gouvernement Tory, des dizaines de milliers de travailleurs et de jeunes ont
adhéré au Labour, et par deux fois en élisant Corbyn, ont cherché à expulser de
la direction du Labour les partisans de Blair.
En
Allemagne même, le dirigeant Gabriel, qui a fortement affaibli le SPD par la
participation au gouvernement de « grande coalition » avec Merkel, a
dû renoncer à diriger la prochaine campagne électorale. Et Martin Schulz, le
nouveau leader du SPD, est amené à faire campagne en faisant des phrases contre
l’« Agenda 2010 », ensemble d’attaques les plus violentes contre les
travailleurs allemands initié par le gouvernement Schröder, ancien chef du
gouvernement SPD-Verts.
La
victoire de Hamon participe de ce mouvement de résistance à la liquidation des
partis sociaux-démocrates ; même si la vérité force à dire qu’il n’a en
France pas du tout la même ampleur qu’en Grande-Bretagne, par exemple, pour la
raison que le rapport du PS en France au prolétariat est infiniment plus ténu que
celui du Labour, en particulier du fait des liens de ce dernier avec le
mouvement syndical.
Pour la liquidation des
partis sociaux-démocrates et des PC par le prolétariat dans le cours de la
révolution prolétarienne ; résolument contre leur liquidation par la
bourgeoisie !
Les
militants regroupés autour de « Combattre pour le Socialisme » ne
développent pas la moindre illusion quant à l’avenir des PS et PC. Un siècle
après la révolution d’Octobre, il nous faut préciser que l’avenir de ces partis
ne peut être différent de ce qu’a été celui des mencheviks après 1917,
c’est-à-dire du côté de la contre-révolution, des Blancs et de la coalition
impérialiste. En combattant pour la construction d’un Parti ouvrier
révolutionnaire, de l’Internationale ouvrière révolutionnaire, nous combattons
pour que le prolétariat se débarrasse de la tutelle de ces vieux partis
attachés depuis des décennies au maintien du capitalisme. Nous ne développons
pas non plus la moindre illusion sur les dirigeants de ces partis (Schulz en Allemagne,
Corbyn en Grande-Bretagne, Sanchez en Espagne, Hamon en France) qui à un moment
sont portés à leur tête contre ceux qui veulent les liquider. Tant leur
politique présente que leur passé témoignent du fait qu’ils demeurent
entièrement dévoués à la défense du Capital. En permanence, du reste, ils
cherchent à passer compromis avec ceux-là même contre lesquels ils ont été
portés à la tête de leur Parti. Leur programme (voir plus bas en ce qui
concerne Hamon) est entièrement réactionnaire, sur le terrain de la défense du
Capital.
Mais
nous ne confondons pas les contraires. Ce qui est aujourd’hui en question, ce
n’est pas la liquidation de ces vieux partis par le prolétariat
révolutionnaire. Ce qui est en question, c’est la liquidation de ces partis par
une offensive réactionnaire de la bourgeoisie qui entend priver la classe
ouvrière de tout instrument politique pour chasser les partis bourgeois,
postuler à son propre pouvoir. Et c’est pourquoi nous sommes
inconditionnellement pour défaire cette offensive.
Les présidentielles en
France : après 5 ans de gouvernement PS-Radicaux-Verts
sous la présidence de Hollande
C’est
dans ce cadre qu’il nous faut apprécier l’enjeu des élections présidentielles.
Ces dernières ne se déroulent pas dans n’importe quel contexte. Elles se
déroulent après cinq années de gouvernement PS-Radicaux-Verts, cinq années
marquées par des offensives d’une violence inédite contre le prolétariat et la
jeunesse. CICE, pacte de responsabilité, loi Macron, loi El Khomri :
jamais les cadeaux au patronat n’avaient été aussi énormes ; jamais le
démantèlement des droits ouvriers aussi profonds. À cela, il faut ajouter la
loi Touraine contre l’Hôpital Public, les contre-réformes réactionnaires à tous
les niveaux de l’Enseignement public : « rythmes scolaires »,
réforme du collège, sélection à l’Université au terme de la licence... Il faut
surtout ajouter la marche accélérée à l’État policier sous toutes ses
facettes : état d’urgence permanent, accumulation des lois sécuritaires
(dont la dernière en date donne aux flics un véritable droit de tuer),
interdictions de manifester, condamnation de militants ouvriers. C’est dans ce
cadre qu’il faut mettre « à l’actif » de ce gouvernement la
répression massive des manifestants, en particulier de la jeunesse, au moment
des manifestations contre la loi El Khomri, la violence permanente allant
jusqu’à la mort (Adama Traore), à la torture contre la jeunesse des banlieues,
l’expulsion massive des réfugiés (où la barbarie du gouvernement va jusqu’à
interdire l’aide alimentaire des organisations caritatives). Il faut le
dire : il ne s’agit pas de « bavures » ; il s’agit de l’exercice
ordinaire de la violence de classe par l’appareil d’État au service de la
bourgeoisie, orchestrée depuis les sommets de cet appareil d’État et du
gouvernement.
Durant
ces cinq années, la majorité de députés PS-PCF a tout accepté, y compris les
coups de force répétés du recours à l’article 49 ter. Il existait pourtant une
issue : que cette majorité rejette l’ensemble des lois anti-ouvrières des
gouvernements Hollande successifs, qu’elle se déclare souveraine contre le 49
ter, qu’elle constitue un gouvernement sans représentants des partis bourgeois
dont les masses auraient exigé satisfaction !
Une
telle possibilité ne pouvait s’ouvrir que par la mobilisation du prolétariat
dans une immense manifestation à l’Assemblée nationale, imposant à cette
majorité PS-PCF de rompre avec le gouvernement. Une telle manifestation n’était
possible qu’à l’initiative du front uni des organisations syndicales (CGT, FO,
FSU, UNEF). Mais précisément durant cinq ans, les dirigeants des organisations
syndicales ont collaboré avec le gouvernement via le « dialogue
social » et ont fait tout ce qui leur était possible pour éviter que se
centralise le combat de la classe ouvrière. Ils se sont dressés, en particulier
sur la loi El Khomri, contre la perspective de la manifestation à l’Assemblée
nationale, protégeant le gouvernement et la majorité PS-PCF, tout en organisant
avec l’« extrême gauche » les opérations locales contre les locaux du
PS, ce qui concourrait au même objectif.
Ce que défendrait un
candidat réellement révolutionnaire dans ces élections
Le
Groupe pour la construction du Parti ouvrier révolutionnaire, de
l’Internationale ouvrière révolutionnaire n’a absolument pas les moyens
militants de présenter un candidat à ces élections présidentielles.
S’il
existait dans ce pays une organisation révolutionnaire ayant de tels moyens, sa
responsabilité serait de présenter un candidat qui défendrait les positions suivantes :
·
Pour le retrait de toutes les contre-réformes réactionnaires, notamment
celles du dernier quinquennat : abrogation des lois El Khomri, Touraine,
des contre-réformes de l’Enseignement : rythmes scolaires, décret Hamon
contre le statut des enseignants, loi Vallaud-Belkhacem de sélection à
l’université. Annulation du CICE, du pacte de responsabilité, de la loi ANI.
Annulation des mesures contre le statut de la Fonction publique (PPCR)
·
Pour la défense de la Sécurité sociale. Gratuité des soins, financement
de la Sécurité sociale par l’augmentation du salaire différé payé par les
patrons dont le paiement des impayés serait immédiatement exigé
·
Abrogation de toutes les contre-réformes des retraites depuis la
réforme Balladur de 1993
·
Rattrapage du pouvoir d’achat des travailleurs perdu depuis la
désindexation des salaires, augmentation générale des salaires, échelle mobile
des salaires
·
Il y a plus de 6 millions de chômeurs en France. Partage du travail
entre toutes les mains disponibles sans diminution de salaire, c’est-à-dire
échelle mobile des heures de travail.
Mais
personne ne peut faire croire, sauf les charlatans et les filous, que ces
revendications, que la moindre de ces revendications, peuvent être satisfaites
dans le cadre du maintien du mode de production capitaliste. Un candidat
révolutionnaire défendrait clairement un programme d’expropriation du
capital : nationalisation sans indemnité ni rachat des grands moyens de
production et d’échange, des banques sous contrôle ouvrier.
Seul un
gouvernement ouvrier pourrait mener à bien un tel programme. Mais nul ne peut
prétendre qu’un tel programme pourrait être mis en œuvre dans le cadre de la Ve
République sans toucher à l’appareil d’État, à ses corps de répression, à la
police, l’armée, la justice aux ordres de la classe dominante. En s’appuyant
sur la mobilisation révolutionnaire des masses, un tel gouvernement en finirait
avec les institutions de la Ve République ; il s’engagerait
dans le démantèlement des corps de répression.
Cela
implique évidemment de rompre avec tous les traités, accords qui relient
l’actuel gouvernement aux autres puissances impérialistes : sortie
immédiate de l’OTAN, de l’UE ! A bas l’Euro ! Mais aucun pays ne peut
durablement s’engager sur la voie du socialisme de manière isolée. C’est
pourquoi à l’UE, le programme révolutionnaire opposerait le combat pour les
États-Unis socialistes d’Europe dans la perspective de la République
universelle des Conseils ouvriers.
Voilà
ce que défendrait un candidat véritablement révolutionnaire à ces élections.
C’est un fait : aucun des candidats, aucun de ceux qui prétendent l’être,
ne défend de près ou de loin un tel programme.
Une crise généralisée de la
représentation politique de la bourgeoisie...
En
l’absence de candidat révolutionnaire, et après cinq ans de gouvernements
Hollande entièrement ordonnés par la défense du capital financier, le seul
enjeu de ces élections pour le prolétariat est : limiter au maximum
l’inéluctable victoire d’un des candidats de la bourgeoisie.
Certes,
la représentation politique de la bourgeoisie française est en crise, éclatée
entre plusieurs représentants. Cette crise a d’ailleurs une base matérielle
concrète : à savoir la situation déliquescente du capitalisme français sur
le marché mondial dont atteste de manière particulièrement marquante
l’augmentation constante du déficit de son commerce extérieur, la diminution de
sa part des échanges mondiaux.
À cette
crise, Le Pen et son Front national prétendent répondre d’abord par de
violentes mesures anti-ouvrières, en particulier contre la partie immigrée du
prolétariat à laquelle serait fermé l’accès à l’École, à l’Hôpital, etc. Ils
prétendent y répondre par une série de mesures protectionnistes, et évoquent la
sortie de l’UE (de manière plus secondaire, Dupont Aignan occupe le même
créneau). C’est précisément pour cette dernière raison que la classe
capitaliste, en particulier sa fraction la plus profondément insérée dans le
marché mondial, ne se reconnaît pas à ce stade dans la candidature Le Pen,
quitte à agir auprès d’elle au cas où elle l’emporterait pour qu’elle
infléchisse son programme sur ce dernier point.
Parmi
les candidats du capital, il faut bien sûr compter Macron, dont la promotion
est entièrement due à Hollande, et qui a notamment pour fonction d’œuvrer à la
liquidation du PS avec la participation, du reste, de plusieurs dirigeants du
PS lui-même : Ferrand, Caresche, Collomb, voire Royal. Mais si Macron est,
du point de vue de la bourgeoisie, très utile à la liquidation escomptée du PS,
sa victoire aux élections serait pour elle lourde d’incertitudes. En
particulier, il ne dispose à ce jour d’aucun parti structuré susceptible de
constituer une majorité de députés solide pour appuyer la violente politique
anti-ouvrière qu’il se propose.
Reste
évidemment Fillon, le candidat LR. LR constitue la filiation de l’UMP, et avant
elle du RPR, de l’UDR, de l’UNR, bref du parti gaulliste, c’est-à-dire du parti
du Bonaparte fondateur de la Ve République. Fillon a remporté la
primaire de la droite sur un programme violemment anti-ouvrier :
suppression de 500 000 postes de fonctionnaires, destruction de la Sécurité
sociale, liquidation de tout âge légal de départ en retraite (celle-ci serait
déterminée par catégorie, en fonction de l’ « espérance de vie »),
programme d’expulsion des immigrés qui n’a rien à envier à celui de Le Pen...
Toutefois, sa victoire annoncée vient de voir se dresser devant elle des
obstacles imprévus. Les révélations de corruption et d’emplois fictifs le
concernant ne nous apprennent rien : tels sont les mœurs de la classe
dominante et de son personnel. Mais le fait que tout cela éclate sur la place
publique, la bombe ayant été déposée selon toute apparence par des hommes de
son propre camp, révèle que la crise de LR continue et s’approfondit, qui renvoie,
au-delà des féroces rivalités personnelles, aux interrogations qui tenaillent
le personnel bourgeois : tant sur la possibilité de mener une offensive
anti-ouvrière d’une telle ampleur, sur la place que doit y occuper le
« dialogue social » avec les appareils (il faut noter que Martinez et
Mailly ont par avance accorder leur onction au candidat Fillon en rencontrant
son bras droit Larcher), sur le degré d’acceptation inévitable de la domination
de l’Allemagne en Europe, etc. La crise de LR concentre la crise de la
bourgeoisie française.
À propos de la candidature
de Mélenchon
Personne
ne discutera sérieusement le fait que Le Pen, Fillon, Macron sont des candidats
bourgeois. Mais comment apprécier la candidature Mélenchon ? Il est
incontestable que l’écœurement et la répulsion qu’inspirent 5 années de
gouvernement Hollande offrent à cette candidature un certain écho populaire.
Mais tel ne peut être le critère pour apprécier cette candidature. Dans de
nombreux pays, au gré des circonstances historiques, des individus ou des
courants politiques profondément étrangers au mouvement ouvrier ont pu avoir un
écho populaire. Ce fut le cas en Amérique latine avec Perón en Argentine, plus
récemment avec Chavez – dont Mélenchon est idolâtre. C’est le cas aujourd’hui
en Europe, avec le mouvement Cinq étoiles en Italie, ou Podemos en Espagne.
Il n’y
a pas d’autre critère pour juger de la candidature de tel ou tel que son
rapport au mouvement ouvrier. La seule arme de la classe ouvrière, c’est
l’organisation. L’histoire de la classe ouvrière, c’est une histoire à travers
laquelle elle a construit ses syndicats et ses partis. L’histoire de la lutte
des classes, c’est aussi celle à travers laquelle la bourgeoisie corrompt et
soumet les sommets des organisations ouvrières pour les inféoder, Mais au-delà
même de la corruption des sommets du mouvement ouvrier, l’objectif fondamental
de la bourgeoisie est de liquider toute organisation de classe du prolétariat,
de ramener le prolétariat à une atomisation totale, à la lutte individuelle de
tous contre tous pour la survie. Comme indiqué plus haut, l’objectif
fondamental de la constitution bonapartiste de la Ve République est
d’en finir « avec le régime des partis », d’intégrer les
syndicats dans le cadre de l’État corporatiste. C’est à cette aune qu’il faut
juger de la candidature de Mélenchon.
Mélenchon
se présente volontiers comme un adversaire de la Ve République. Mais
comme le dit Marx, « n’importe quel boutiquier sait bien faire la
distinction entre ce que chacun prétend être et ce qu’il est réellement ».
Quel est le principe du bonapartisme ? C’est celui d’établir un rapport
direct quasi mystique entre un « homme providentiel » et « le
peuple », rapport direct censé transcender les oppositions de partis et de
classe.
En 2012,
Mélenchon est le candidat d’un cartel de partis dont les deux principaux (le
PCF et le Parti de Gauche) sont issus du mouvement ouvrier. En 2017, la
candidature de Mélenchon n’a été soumise à la désignation d’aucun parti. Celui
qui parle de lui en disant sans rire « le bien commun que je
suis » (sic) déclare : « Je vous propose ma candidature
pour l’élection présidentielle de 2017 (...).
« Je
m’adresse à toute personne qui perçoit l’urgence de la situation. À qui n’en
peut plus de la montée des misères dans notre pays et de l’enrichissement des
plus riches. À qui ne supporte plus d’entendre du matin au soir que tout va mal
sans que soient jamais mis en cause le gavage des actionnaires, l’assistanat
ruineux offert sans contrepartie au MEDEF, le pouvoir de l’oligarchie et de sa
caste droguée aux ivresses de la mondialisation financière.
« Soyons
les indignés, les insoumis qui agissent ! Nous, de tous les milieux
sociaux, [souligné par nous] nous,
femmes et hommes, qui n’en pouvons plus de la société de l’argent-roi quand des
centaines de gens meurent de froid dans la rue, sur leur poste de travail ou de
maladies restées sans soins. »
Passons
sur les trémolos sur les gens qui meurent de froid, et sur l’enrichissement des
plus riches. N’importe quel politicien bourgeois peut s’y livrer comme vient
encore de le montrer un Bayrou. L’essentiel est ailleurs. Mélenchon s’adresse
par-delà les oppositions de classes à « tous
les milieux sociaux ». Il s’adresse à tous les Français au-dessus des
clivages entre « la droite » et « la gauche » :
« Depuis
2012, on s’est présenté parfois comme la ”vraie gauche” à cause de l’écœurement
que la ”gauche officielle” soulevait. Mais cela nous relègue, dans le système
médiatique, à l’extrême gauche. Or nous ne sommes pas des extrémistes. Et puis
je reste persuadé que, plutôt que nous épuiser dans une bataille d’étiquettes
qui ne parle pas à la société, nous avons intérêt à toucher les profondeurs du
pays, qui ne se reconnaissent ni dans la gauche de François Hollande ni dans la
droite de Nicolas Sarkozy, mais qui pourraient être entraînés par notre
discours sur l’indépendantisme français, la souveraineté populaire, la
planification écologique, le progrès humain et le mix particulier que j’opère
de tout cela. Il faut surmonter le blocage des étiquettes pour pouvoir fédérer
largement le peuple et la société autour d’objectifs communs. Il faut aussi
entraîner l’électorat de gauche qui a basculé dans le vote FN ou l’abstention.
Plutôt que la gauche de Hollande et la droite de Sarkozy, je préfère donc
opposer les nucléaristes aux partisans des énergies renouvelables, les
“eurolâtres” aux “euroréalistes”, et ainsi de suite… »
« Par-delà les étiquettes », « toucher
les profondeurs du pays », pour l’« indépendantisme
français »... C’est le langage typique du candidat Bonaparte, dans la
tradition gaulliste au-dessus des partis : « Tout le monde peut se
joindre à moi pour travailler sur le programme et agir. Voilà comment on mène
une élection, dans un rapport direct aux citoyens, pas dans une carabistouille
entre partis politiques ».
Ni de gauche, ni de droite. Au-dessus des
partis et des classes, il n’y a que la France, la France « universaliste » : « la France n’est jamais si grande que quand elle se
pense comme une composante de l’humanité universelle. (…) Pour ce qui nous
concerne, nous devons nous tourner vers les nations émergentes avec lesquelles
nous partageons un destin puisque nous sommes présents sur les cinq continents
(…) Le moment est venu de penser à une francophonie politique ».
L’évocation du fait que « nous
sommes présents sur les cinq continents » l’indique assez clairement : la « France universaliste » qu’évoque Mélenchon, c’est
en réalité la France coloniale, l’Empire français qu’il faudrait reconstituer à
travers « une francophonie politique ».
Il n’est pas étonnant que les aspects les
plus ouvertement réactionnaires de la campagne de Mélenchon touchent aux
questions de l’immigration, aux attaques contre ces travailleurs détachés dont
Mélenchon paraphrasant sans le savoir un célèbre sketch comique nous dit sans
rire « qu’ils volent le pain des Français ». Il n’est pas étonnant que l’ode vibrante à « la
France » se traduise par l’apologie
non moins vibrante à « notre »
« police républicaine »,
trouvant encore le moyen d’utiliser à cet effet les barbaries policières
récentes contre Théo et d’autres : « La police républicaine a un fond républicain très profond. La
police républicaine n’a rien à voir avec ce type de pratique » (la torture de Théo). Pour ce qui est du « fond républicain très
profond », cela est incontestable.
À condition de préciser qu’il s’agit bien de la République coloniale, celle des
ratonnades, celle qui en 1961 jetait par-dessus le pont de la Seine des
centaines de manifestants algériens pour l’Indépendance, celle qui assassinait
à Charonne.
Pour le reste, c’est à peine si le « programme »
de Mélenchon vaut d’être évoqué. Rien à voir avec le communisme, précise-t-il,
tant il est vrai que dans ce programme la propriété du capital est intouchable.
Le « protectionnisme
solidaire » de Mélenchon, c’est
l’utopie réactionnaire de l’autarcie, on pourrait dire du capitalisme dans un
seul pays. L’ennemi ce n’est pas la bourgeoisie française, c’est l’Allemagne.
Mais ce programme ne mérite pas qu’on s’y
attarde. Car la véritable fonction de la candidature de Mélenchon, c’est le
combat pour en finir avec les partis ouvriers (bourgeois) que sont le PS et le
PCF. Le PS est, nous dit Mélenchon, dans un « corbillard », jugeant
sans doute qu’annoncer périodiquement la mort du PS en précipitera le décès.
Quant au PCF, les conditions mises aux candidats aux législatives qui se
réclameront de sa candidature présidentielle l’indiquent clairement : il s’agit
de liquider toute trace de représentation parlementaire du PCF. Les candidats
aux législatives devront en effet se réclamer de « La France insoumise », adopter son sigle, la financer, s’engager
pendant cinq ans à une discipline sans faille. Jamais peut être, n’avait été
formulée aussi clairement l’exigence de députés godillots. Et c’est pourquoi
les déclarations de Mélenchon contre la Ve République ne peuvent
être prises au sérieux une seule seconde. La pratique réelle de Mélenchon
pousse le bonapartisme jusqu’au bout dans la volonté de liquider les partis. Ce
dont d’ailleurs certains dirigeants du PCF ont une claire conscience, tel
Chassaigne qui déclarait avant la décision des militants du PCF : « Si le choix de rallier Jean-Luc
Mélenchon est fait, je le dis avec une conviction voire une forme d’émotion
dans la voix, je crois que c’est véritablement un coup fatal qui sera porté au
parti communiste ».
Concluons : la candidature de
Mélenchon en 2017 n’est pas celle de 2012. Mélenchon a en réalité rompu les
amarres avec le mouvement ouvrier. Sa candidature doit être caractérisée comme
une candidature ultra-bonapartiste. Sa tradition politique, c’est celle de de
Gaulle : souveraineté nationale, « indépendantisme
de la France », au-dessus des
partis et des clivages politiques. Mais c’est de Gaulle dans une situation où
la dégradation de la situation du capitalisme français depuis 70 ans est telle
que de Gaulle ne peut plus être ressuscité. De Gaulle, Mélenchon : comme
le disait Marx, la première fois une tragédie, la deuxième fois en farce !
Quel vote émettre ?
En 2012, l’enjeu des présidentielles
était le suivant : chasser Sarkozy, chasser la majorité UMP, élire une
majorité PS-PCF. Les militants regroupés autour de « Combattre pour le Socialisme » avaient clairement appelé à voter au premier
tour Hollande, Mélenchon, voire Arthaud et Poutou, selon ses préférences,
candidats relevant du mouvement ouvrier. Ils avaient appelé à voter Hollande au
second tour, puis PS, PCF, Parti de Gauche aux législatives. Il faut rappeler
les termes de cet appel à voter qui ne laissaient pas la moindre illusion sur
la politique que suivrait Hollande :
« En
combattant pour la défaite des candidats de la bourgeoisie, de Sarkozy en
premier lieu, pour la victoire électorale du candidat du parti issu du
mouvement ouvrier resté en lice au second tour, les militants du Groupe pour la
construction du POR et de l’IOR ne laissent place à aucune illusion. Même en
cas de victoire, la politique que tenterait de mettre en œuvre un gouvernement
d’alliance du PS, éventuellement du PCF, avec des représentants de la
bourgeoisie, notamment Europe Écologie Les Verts, serait une politique de
soumission au capital financier. On ne peut même pas affirmer qu’elle serait
« moins pire « que celle de Sarkozy car, à vrai dire, l’Espagne et le
Portugal hier, la Grèce, la Belgique aujourd’hui montrent assez qu’elle serait
strictement conforme à ce qu’exigent banquiers et capitalistes. Elle aurait
seulement pour effet que le prolétariat aborderait dans des conditions moins
défavorables les échéances à venir sur le terrain de la lutte des classes directes... »
L’enjeu
est aujourd’hui bien différent. Ce qui est à l’ordre du jour, ce n’est pas une
défaite de la bourgeoisie, c’est une défaite inéluctable du prolétariat. Faire
en sorte que cette défaite soit la moins cuisante possible, qu’elle ne se transforme
pas en déroute : telle est la seule possibilité ouverte au prolétariat et
à la jeunesse. Moins violente sera la défaite, moins pires seront les
conditions du combat à venir contre la nouvelle déferlante anti-ouvrière qui se
prépare.
Pas
plus aujourd’hui qu’en 2012, nous ne pouvons appeler à voter pour des candidats
en fonction de leur degré d’accord avec le programme révolutionnaire. Car aucun
candidat, de près ou de loin ne défend un programme révolutionnaire.
Le
programme de Hamon, candidat du PS, est totalement réactionnaire. Il en va
ainsi de sa proposition « phare » de « revenu universel ».
Elle revient à faire payer aux travailleurs sous forme d’impôts l’aumône qui
est faite aux millions de travailleurs privés d’emploi par le capitalisme en crise.
Elle vise à liquider toute une série de droits actuels qui pour la plupart sont
pour l’instant financés par le patronat sous forme de salaire différé
(notamment les indemnités chômage). Elle contribuera à la diminution massive
des salaires directs payés par le patron, qui arguera du fait que le
travailleur touche le fameux « revenu universel ». Par ailleurs,
Hamon se prononce pour l’augmentation massive du budget militaire, pour les
interventions impérialistes françaises. Il défend les contre-réformes de
l’École et de l’Hôpital du quinquennat. Et même son engagement à abroger la loi
El Khomri est une entourloupe puisqu’associé au vote d’une nouvelle loi à la
suite qui remettra sur le pont ce qui a été passé par dessus bord. Nous n’avons
à cet égard aucune illusion.
Les
candidatures d’Arthaud et de Poutou, quels que soient les qualificatifs qui
leur sont donnés, ne sont ni de près ni de loin des candidatures
révolutionnaires. Si notre Groupe se prononce pour leur droit à être candidats
et contre les obstacles légaux réactionnaires mis à leur candidature, il se
doit de caractériser clairement ces candidatures. Tant LO que le NPA ont
soutenu à 100% la politique des directions syndicales conduisant à la sévère
défaite sur la loi El Khomri, se dressant contre toute proposition
d’affrontement avec le gouvernement telle qu’elle était faite notamment par le
syndicat CGT Goodyear. Tant LO que Poutou se sont illustrés soit par leur
soutien total (LO), soit par leur compréhension bienveillante à l’égard des
manifs factieuses auxquelles étaient occupés les flics lorsqu’ils ne sont pas
occupés à énucléer les manifestants, à assassiner ou violer les jeunes des
banlieues.
En
conséquence, ce n’est pas sur la base de leur programme, mais malgré leur
programme que « Combattre pour le Socialisme » appelle à voter pour
les candidats des partis issus du mouvement ouvrier : Hamon, à la rigueur
Arthaud et Poutou.
Aucune voix ouvrière pour Le
Pen, Fillon, Macron, et tous les candidats bourgeois
Aucune voix pour Mélenchon,
et sa candidature ultra-bonapartiste
Pour limiter autant que faire se peut la
victoire de la bourgeoisie annoncée
Appel à voter pour Hamon
candidat du PS, à la rigueur pour Arthaud (LO) et Poutou (NPA)
Telle est notre position que nous vous
invitons à discuter.
Le 23 février 2017
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