Article paru dans
le bulletin « Combattre pour le socialisme » n°49 (n°131 ancienne
série) - 15 janvier 2013 :
Après
la grève de Marikana :
un
tournant dans la situation politique en Afrique du Sud (1ère partie)
En
octobre 2012, selon l’agence de presse sud-africaine SAPA, Gwede Mantashe,
secrétaire général du parti au pouvoir en Afrique du Sud, l’ANC, exprimait ses
craintes devant une assemblée de propriétaires terriens : « Les
fermiers installés doivent prendre les fermiers émergents sous leur aile pour
éviter un soulèvement de type Marikana. »
Deux mois plus tard, un communiqué de la confédération syndicale
majoritaire, la COSATU alliée de l’ANC, envoyait ce signal d’alarme : « Marikana débarque dans les
fermes ! » Un mouvement de grève spontané des ouvriers agricoles,
sur la base de revendications salariales, contraignait cette confédération à
prendre l’initiative d’une journée nationale de grève, le 4 décembre. Le
secrétaire régional de la COSATU au Cap Occidental, Tony Ehrenreich, ne s’en
excusait pas moins de ce flagrant-délit de syndicalisme « irresponsable » :
« L’action des ouvriers risque d’être
complètement incontrôlée (...) C’est Marikana, et c’est ce qui arrive au Cap
occidental. » (AFP, 4/12/2012).
« Aucun syndicat ne doit croire qu’il
est immunisé contre un’Marikana’ sur un lieu de travail où il est organisé » : ce constat anxieux n’émane
pas d’un organe patronal ou gouvernemental. Il ouvre un communiqué officiel,
daté du 12 décembre, de la NUMSA – le syndicat majoritaire des ouvriers
métallurgistes d’Afrique du Sud, affilié à la COSATU.
Voilà autant d’expressions du fait que, depuis le 16 août 2012, un
spectre hante les conseils d’administration des trusts installés en Afrique du
Sud, les cercles de la petite-bourgeoisie noire enrichie des miettes de leur
table, les palais du pouvoir... et les bureaux syndicaux. La grève des mineurs
de Marikana marque un tournant dans la situation politique en vigueur dans le
pays depuis 18 ans. Lancée par un comité de grève élu par quelques milliers d’ouvriers,
l’étincelle de Marikana a embrasé toute la classe ouvrière du pays.
De la fin août à début décembre, des dizaines, voire des centaines
de milliers d’ouvriers sud-africains – mineurs, travailleurs des transports et
de l’automobile, ouvriers agricoles... - se sont engagés dans une vague de
grèves sans précédent depuis les heures les plus héroïques de la lutte contre l’apartheid.
Ce mouvement s’est développé en-dehors du contrôle de l’appareil de la COSATU.
Au-delà même des frontières du pays, l’onde de choc s’est étendue à la Namibie
voisine, où s’est développé un mouvement de fonctionnaires tendant vers la
grève générale. Dans
ce mouvement, les travailleurs ont constitué leurs comités de grève élus, se
dressant contre une bureaucratie syndicale corrompue jusqu’à la moelle des os –
renouant aussi bien avec les traditions qu’avec les objectifs, reniés par l’ANC
et les dirigeants de la COSATU, de la lutte historique des masses noires
sud-africaines.
Ce
mouvement est allé bien au-delà des revendications salariales qui en
constituaient le point de départ : il a soulevé la question du pouvoir, se
heurtant au gouvernement vertébré par l’ANC, démontrant l’hostilité de ce gouvernement
à toutes les revendications et aspirations fondamentales des masses noires.
Dès
lors, ces questions se posent à nouveau aux yeux de fractions croissantes du
prolétariat sud-africain : quelle force organisée, quel programme, quel
gouvernement, quelle perspective pour en finir avec l’héritage du colonialisme
et de l’apartheid ? Pour eux, « Marikana » constitue désormais
un point de référence et un cri de ralliement. Mais encore : les
enseignements du mouvement de grève des mineurs sud-africains ont une valeur
qui va bien au-delà des frontières de l’Afrique du Sud.
16 août 2012: une chape
de plomb s’abat sur Marikana
La
déclaration du Groupe en date du 2 septembre 2012, publiée dans le précédent
numéro de CPS, commentait d’emblée le
massacre organisé des mineurs grévistes de Marikana : « Le 16 août, des dizaines de manifestants
étaient massacrés en quelques minutes sous les tirs de la police, d’autres
succombaient ensuite à leurs blessures. Cette répression est délibérément
organisée par le gouvernement de Jacob Zuma, vertébré par l’ANC. Ce
gouvernement, comme les dirigeants des trusts miniers européens ou américains,
sont hantés par une crainte : celle de voir se développer un puissant mouvement
de grève dans les mines, au cœur de la classe ouvrière sud-africaine. Il s’agit
d’étouffer le foyer constitué par la grève de Marikana avant qu’il ne déclenche
une réaction en chaîne. »
Du côté
de la presse capitaliste, il a fallu plusieurs mois pour qu’après les faits,
certains journaux tels que le Guardian
publient noir sur blanc ce qui s’est véritablement passé lors du massacre de
Marikana : encerclés sur une colline où ils s’étaient réfugiés, plusieurs
centaines d’ouvriers en grève pour obtenir des augmentations de salaires,
opérateurs de forage dans une mine de la société Lonmin, ont été bombardés de
grenades lacrymogènes, contraints à fuir en s’engouffrant dans d’étroits
passages où la police, qui les attendait, les a mitraillés de sang-froid pour
délit de « grève sauvage ».
Autour
de cette tuerie, une vaste campagne d’enfumage médiatique et de calomnies s’est
d’abord développée pour offrir un point d’appui à la répression criminelle. La
presse laissait entendre que les « responsabilités » pouvaient être
partagées : « Dix personnes,
dont deux policiers, avaient été tuées dans les jours précédents au cours de
violences entre syndicats rivaux qui avaient éclaté le 10 août. » (AFP,
24/8/2012). Le chef de la police – coupable de la mort de plus de 40 mineurs -
plaidait... la légitime défense. Le ministre de l’Intérieur sud-africain, la main sur le
cœur, montait au créneau pour soutenir ses troupes : « Ceci ne devait pas arriver, nous avons toujours insisté sur le
fait que nous avons des lois dans ce pays, qui permettent aux gens de faire
grève, de se rassembler pour manifester, et nous pensons que les gens ne
doivent pas ignorer ces piliers de notre système. » (AFP, 17/8/2012).
A la
police, aux milices patronales et au gouvernement se joignaient les dirigeants
syndicaux affiliés à la COSATU. Dès le 13 août, les dirigeants du syndicat
minier NUM avaient appelé « au
déploiement d’urgence des forces spéciales ou des forces armées sud-africaines
avant que la situation soit hors de contrôle ». Au lendemain du
massacre, le secrétaire général de ce syndicat, Frans Baleni, dédouanait encore
les assassins au micro de la radio sud-africaine Kaya FM : « Les policiers ont été patients, mais
ces gens étaient extrêmement armés avec des armes dangereuses »
Les
dirigeants du parti communiste sud-africain SACP appelaient carrément... à l’arrestation
des dirigeants d’un petit syndicat rival, l’AMCU. Selon l’agence de presse
sud-africaine SAPA : « Le
secrétaire provincial Madoda Sambatha a déclaré que l’échange de coups de feu
entre la police et des mineurs grévistes vendredi était un « acte barbare »
coordonné par les dirigeants de l’Association of Mineworkers and Construction
Union (AMCU) ». Menaçant, il indiquait aux travailleurs sud-africains
la leçon qu’il convenait de tirer, selon lui, de cette boucherie : « Les travailleurs doivent repousser
toute tentative de les mobiliser contre la NUM ou de les mobiliser pour
attaquer d’autres travailleurs. »
Mais le
dirigeant local de l’AMCU protestait de son « innocence »: « J’ai plaidé auprès d’eux : « C’est
écrit, ils sont sur le point de vous tuer » (…) « Ils ont refusé de
descendre. Ils voulaient 12500 rands de salaire mensuel. » (SAPA,
17/12/2012). Ainsi, toutes les voix ou presque se relayaient pour rendre les
mineurs de Marikana responsables de la tuerie dont ils étaient les victimes.
Le 19
août, fort de tous ces appuis, le président sud-africain et dirigeant de l’ANC,
Jacob Zuma, appelait à une semaine de « deuil national ». Il
annonçait la mise en place d’une « commission d’enquête »...
véritable supercherie qui permet aux commanditaires du massacre de s’ériger en
juges. Pour boucler la boucle, le 24 août, était organisé un « sommet »
entre la ministre du Travail sud-africain et des dirigeants syndicaux
compatissants...
En
fait, une sorte d’état d’urgence était mise en place dans les zones minières :
barrages routiers, quadrillage policier des mines et des lotissements de
travailleurs. Les obsèques des travailleurs assassinés elles-mêmes se
déroulaient sous haute surveillance : « "Beaucoup
de gens ont peur d’être vus en train de se rassembler, même pour venir à l’église.
Nous faisons attention à ce que notre service ne puisse pas être considéré
comme un rassemblement politique ou syndical", explique un prêtre de l’Église
pentecôtiste, sous le couvert de l’anonymat. » (Le Point, 19/8/2012). Forte de ce quadrillage, la direction de la
Lonmin lançait un ultimatum aux 3000 travailleurs impliqués dans la
grève : s’ils ne reprennent pas le travail, ils seront licenciés.
Du
comité de grève initialement élu par les foreurs grévistes de Lonmin, une partie
a été abattue, le reste est constitué de blessés graves, hospitalisés sous
haute surveillance – dont plusieurs mourront de leurs blessures – ou incarcéré
avec les 270 manifestants survivants. Officiellement, même le syndicat AMCU se
garde bien d’appeler à la poursuite de la grève.
Tout
devrait aller dans le sens de l’étouffement de ce mouvement embryonnaire... si
ce n’est que la classe ouvrière sud-africaine, dont l’expérience collective
permet de voir clair dans cette situation, va dresser contre cette chape de
plomb sa force considérable.
Comment s’est organisé le
comité de grève
Le
point de départ de la grève de Marikana était le rejet d’une décision
unilatérale du patronat – remettant en cause jusqu’aux « accords »
conclus avec la NUM : en lieu et place d’une augmentation même minime de l’ensemble
des travailleurs de la mine, seule certains travailleurs « méritants »
se verraient récompensés... tous les autres étant priés de se résigner au gel
de leurs salaires.
Le Democratic Socialist Movement (DSM),
organisation sud-africaine qui se réclame du trotskysme a publié ce témoignage
d’un des dirigeants du comité de grève de Marikana :
« L’éclatement soudain de la grève
de Lonmin est dû à la décision unilatérale de la direction d’accorder
des augmentations de salaires à des travailleurs sélectionnés. En dépit du fait
que cela brisait un accord signé pour deux ans par la NUM, qui devait
expirer en juin 2013.
L’incapacité de la NUM à répliquer signifiait qu’elle s’associait
une fois de plus à la direction, donc
les travailleurs ont pris eux-mêmes les choses en mains en formant un comité de grève
indépendant issu du rang. Le 9 août, le comité de grève de Lonmin a présenté sa revendication d’un salaire minimum de 12500
rands par mois. La NUM a refusé de les soutenir, la direction a refusé de
négocier, alors les travailleurs ont bloqué la fosse.
Le samedi matin, les dirigeants de la NUM ont tenté de forcer les
travailleurs à retourner au travail, donc
le comité de grève a envoyé des délégués au local de la NUM (qui se trouve
incroyablement près du commissariat dans
le "lotissement informel"). Comme ils approchaient, ils se sont fait
tirer dessus, entraînant la mort de deux membres du comité de grève. Tandis que
la direction réagissait à sa manière habituelle en dépêchant la sécurité privée
et la police afin de mettre fin de
force à la grève, aboutissant à la mort de quatre autres travailleurs, deux
agents de la sécurité privée et deux policiers.
Les mineurs en grève en ont tiré la
conclusion que, pour leur propre sécurité, il valait mieux s’éloigner de la
mine jusqu’à une petite montagne afin de poursuivre leur mouvement. La
revendication des mineurs était simple: la direction devait les rencontrer et
répondre à leur revendication. Ce qui s’est passé ensuite relève du meurtre
avec préméditation et n’a pu avoir lieu qu’avec l’approbation du
gouvernement au plus haut niveau, de la police et des employeurs. C’était la
décision d’écraser la grève et de la noyer dans le sang des grévistes. »
Dans
les mines de platine, depuis près de vingt ans, les négociations salariales
sont décidées site par site au terme d’une négociation entre les dirigeants de
la NUM et les représentants du patronat. Aucune autre organisation n’est « reconnue »
par les trusts miniers ou par le gouvernement : de même, seule la NUM a le
pouvoir de décider du déclenchement d’une grève « légale ».
Dans ce
sens, les mineurs de Lonmin, confrontés à une provocation patronale, ont
commencé par tenter de se saisir de leur organisation traditionnelle,
majoritaire : le comité de grève de Marikana n’était en rien l’expression
d’un groupe minoritaire. C’est dans le mouvement massif des travailleurs d’un
secteur minier, autour d’une revendication commune à tous - parce qu’ils ont
constaté dans ce mouvement la collusion totale entre les dirigeants de la NUM,
le patronat et la police – que ces travailleurs ont été conduits à élire leur
propre comité de grève et à décider eux-mêmes du déclenchement de leur grève.
Les « affrontements
inter-syndicaux » évoqués par la presse, l’appareil de la COSATU et le
gouvernement sud-africain n’ont été que la conséquence du refus acharné des
dirigeants syndicaux de reprendre à leur compte les revendications des
travailleurs. Le massacre de Marikana a montré jusqu’où allait la volonté de l’appareil,
du patronat et du gouvernement : tenter d’écraser dans l’œuf ce mouvement
d’auto-organisation.
La classe ouvrière s’embrase
Mais
dès le 17 août, de premières réactions tendent à montrer que le prolétariat
sud-africain, instruit par sa propre expérience, n’avale en rien le tissu de
mensonges et de calomnies déversés sur le compte des grévistes de Marikana. Ce
jour-là, tandis que les femmes des mineurs manifestent pour demander la
libération de leurs compagnons, une « poignée de manifestants » se
rassemble aux abords du Parlement, au Cap – à des centaines de kilomètres du
bassin minier de Rustenburg dont Marikana fait partie – « pour protester contre l’usage de la force par la police contre
des mineurs grévistes dans le Nord-Ouest » (SAPA, 17/8/2012). La mobilisation spontanée qui suivra
va montrer que cette « poignée » de manifestants est en phase avec l’état
d’esprit d’une fraction croissante du prolétariat.
Fin
août, la direction de la Lonmin doit constater que son ultimatum n’a pas mis
fin à la grève des foreurs de Marikana : un nouveau comité de grève, élu
par les mineurs, décide conformément à la volonté des travailleurs de la
poursuite du mouvement. L’Usine Nouvelle,
revue patronale, déplore : « Le
NUM ne contrôle plus les mineurs, ses représentants ont refusé de quitter les
véhicules de police dans lesquels ils étaient venus à Marikana pour s’adresser
aux grévistes. A raison, (…) l’an dernier l’un d’eux a reçu une brique et perdu
un œil »
Mais
encore : le mouvement fait tache d’huile. Le 24 août, L’Usine Nouvelle constate : « Une grève de plus de 500 travailleurs dans la mine de Rasimone,
appartenant à une compagnie minière de deuxième rang contrôlée par des intérêts
noirs (...) paralyse actuellement plus de la moitié de la production. Auparavant
un millier de mineurs avaient collectivement démissionné du syndicat NUM, jugé
trop proche des patrons de la mine.
Le plus important producteur de platine, Angloplats, filiale d’Anglo American, a reçu des revendications de hausse de
salaires d’un groupe de mineurs qui n’est pas passé par l’intermédiaire des
délégués syndicaux. Des travailleurs de l’équipe de nuit ont débrayé pour
soutenir ces revendications sur le site de Thembelani. (…) Le numéro 4 du
platine, Aquarius, a déjà fermé sa
mine d’Everest suite à la multiplication des conflits ». Constat de la
dégénérescence complète du syndicat, formation de comités de grève élus chargés
de défendre les revendications : partout, le scénario de Marikana se
répète.
Le 29
août, 12000 mineurs du site KDC West appartenant au groupe Gold Fields entrent
en grève à leur tour : parti des mines de platine, le mouvement gagne les
mines d’or. Là encore, les ouvriers se mobilisent en opposition directe aux
dirigeants de la NUM : « Les
12 000 salariés du site sont en conflit avec la direction locale du
syndicat NUM qui a accepté en leur nom une contribution obligatoire à une
assurance funérailles. » (L’Usine Nouvelle, 5/9/2012).
Le
mouvement se heurte aussi à des représentants de la nouvelle « bourgeoisie
noire », issue directement des rangs de la COSATU ou de l’ANC : « C’est le cas d’Aurora, une compagnie dans
laquelle on retrouve Zondwa Gadaffi Mandela, petit-fils de Nelson Mandela, et
Khulubuse Zuma, neveu de l’actuel président. Aurora a repris deux mines d’or en
2009 mais, malgré les promesses mirobolantes, s’est avérée incapable de payer
les mineurs. Non payés depuis trois ans, ces derniers viennent de menacer d’empêcher
la production dans toutes mines de l’East Rand, à partir de lundi. » (L’Humanité, 3/9/2012).
Une main pour la matraque...
l’autre tendue pour le « dialogue social »
A ce
stade, le gouvernement de Jacob Zuma et le patronat minier croient encore
pouvoir régler cette affaire par un surcroît de répression : le 30 août,
le tribunal chargé de se pencher sur le massacre de Marikana prononce l’inculpation
pour meurtre... des 270 mineurs raflés par la police, rendus responsables de la
mort de leurs camarades ! Ce jugement est rendu en vertu d’une loi « anti-émeutes »...
datant de 1956, au temps de l’apartheid, et « jamais
employée depuis 1994 » (Le Monde,
30/8/2012). L’indignation provoquée par cette décision conduit le gouvernement
à manœuvrer et la levée des inculpations est annoncée trois jours plus tard.
Le 15
septembre encore, la presse fait état d’une incursion policière massive à
Marikana, mettant à sac les maisons des mineurs et laissant plusieurs femmes et
enfants blessés pour produire quelques machettes et bâtons devant les
journalistes, pour preuve de la « violence » des mineurs. Mais aux
yeux du prolétariat minier, à ce stade, le principal tort des grévistes de
Marikana serait de ne pas être suffisamment armés pour se défendre contre la
police : déjà, les dépêches s’accumulent faisant état d’affrontements
sanglants entre la police et les mineurs grévistes dans de nombreux sites.
Parfois, un policier paie d’un doigt ou deux le prix de son zèle criminel dans
la répression des ouvriers.
Alors,
parallèlement à la répression, patronat minier et gouvernement jouent la carte
trompeuse du « dialogue social » : le 5 septembre, un « accord
de paix » tripartite, associant représentants de Lonmin, dirigeants de la
NUM et « arbitres » du gouvernement est annoncé... pour mettre fin à
une grève que les dirigeants de la NUM n’ont jamais appuyée. Il prévoit l’ouverture
de négociations salariales sous trente jours en contrepartie de la reprise du
travail : cet « accord » est immédiatement rejeté par l’AMCU et
par le comité de grève de Marikana, qui dénie tout pouvoir à la direction de la
NUM. Les revendications sont maintenues, la grève se poursuit.
A KDC
West, la direction de la NUM proclame également avoir trouvé une « solution »
pour mettre fin à la grève : là aussi, la NUM est désavouée par le comité
de grève.
La direction de la Lonmin
lâche du lest
Le 12
septembre, la plus grande mine de platine du monde, Amplats (Anglo-American Platinum) entre en grève
à son tour. C’est un signal d’alarme pour le patronat minier, qui décide de
mettre fin à tout prix à la grève de Marikana pour éviter que l’incendie ne
gagne tous les autres sites : le 19 septembre, un accord salarial est
conclu qui met fin à la grève de Marikana. Pour ce faire, Lonmin a dû accepter
de négocier directement avec les représentants du comité de grève, au grand dam
des dirigeants de la NUM.
Cet accord ne répond pas aux revendications des mineurs, qui
exigeaient rien moins que le triplement de leur salaire (de 4000 rands,
équivalent à moins de 350 euros, à 12500 rands, soit un peu plus de 1000
euros) ; toutefois, de la part d’un patronat qui entendait geler les
salaires de la grande majorité des travailleurs, c’est une défaite. L’accord
entérine des augmentations de salaires pour tous : « Les foreurs à l’initiative du mouvement
seront augmentés de 22 %, les mineurs de base de 15 % et les autres toucheront
conformément à un précédent accord 9 à 10 % de plus début octobre »
(AFP, 19/9/2012).
Epuisés par des semaines de grève, les travailleurs de Marikana
acceptent cet accord qu’ils ont payé au prix du sang : à ce stade, 45
mineurs sont morts du fait de la répression. En matière de bilan d’une grève, l’essentiel
ne réside pas de toutes manières dans la « victoire » ou la « défaite »
sur le seul terrain des revendications salariales : il consiste dans les
leçons politiques que la classe ouvrière retire de son combat.
À cet égard, l’accord de Marikana, qui octroie l’augmentation la
plus significative aux travailleurs qui ont constitué l’avant-garde de la
grève, ne peut qu’inciter la masse des travailleurs sud-africains au combat.
Malgré la reprise du travail
à Marikana : le mouvement des mineurs tend vers la grève générale
Loin de
marquer la fin du mouvement de grèves, l’accord arraché par les travailleurs de
Lonmin encourage des dizaines de milliers de mineurs à s’engager dans un
mouvement qui tend de fait vers la grève générale – alors même que le congrès
de la COSATU, qui s’est tenu fin septembre, a vu les délégués de la NUM,
majoritairement affiliés au SACP (South
African Communist Party), brûler les tracts exhortant les congressistes à
soutenir les grèves de mineurs.
Au
début du mois d’octobre, le mouvement de grèves spontanées, dirigées par des
comités de grève élus, s’est répandu comme une traînée de poudre à des dizaines
de milliers de mineurs sud-africains : la presse estime à 80 000 le nombre
de mineurs en grève. Non seulement la majorité des mines de platine et d’or
sont touchées, mais les grèves se sont étendues à des mines de charbon, de fer
et de diamants. Consternée, la rédaction de L’Usine
Nouvelle multiplie les dépêches instructives :
« Rejetant le NUM, jugé trop proche des
dirigeants des compagnies minières, et méfiants vis-à-vis du nouveau syndicat
AMCU, très actif à Marikana, des mineurs d’Amplats veulent créer un nouveau
syndicat. (…) La situation échappe à ce point à tout contrôle que des
parlementaires de l’ANC, responsables d’une commission sur les mines, n’ont pas
osé se déplacer à Marikana. De même, des dirigeants du NUM n’avaient pu parler
aux grévistes que depuis un véhicule blindé de la police. » (25/9/2012)
« Le mouvement revendicatif s’est étendu
à d’autres secteurs, le charbon, le minerai de fer, le chrome et le diamant.
Kumba, la filiale minerai de fer d’Anglo American, se croyait à l’abri après
avoir versé une prime de résultat de 345 000 rands (41 200 dollars) à 6 200 de
ses salariés ayant cinq ans d’ancienneté. Il y a pourtant eu 300 travailleurs
de sa mine à ciel ouvert de Sishen – sur un total de 4 400, plus 3 800
travaillant pour la sous-traitance – pour débrayer, exigeant un salaire minimum
de 12 500 rands. Alors que le syndicat NUM affirmait que la grève qui avait
arrêté la mine de Mooinooi était réglée, elle s’est étendue à une autre mine,
Kroondal, appartenant également au géant du ferrochrome, Samancor. Ils veulent
également obtenir un salaire minium de 12 500 rands, plus diverses primes.
Remontés contre le syndicat, les grévistes ont solennellement brûlé leurs
tee-shirts rouges du NUM. »
Sur le « modèle »
de la grève de Marikana, le patronat minier s’essaie partout aux mêmes
manœuvres. Le 5 octobre, Amplats menace de licencier 12 000 ouvriers -
suivi par les
dirigeants des groupes aurifères, Gold Fields et Ashanti : au total, des
dizaines de milliers de licenciements sont annoncés. Pourtant, les comités de
grève vont poursuivre le mouvement pendant tout le mois.
Dans le
bassin de Rustenburg, les comités de grève parviennent même à se fédérer :
des tentatives de constituer un comité central de grève, intégrant l’ensemble
des sites qui rejoignent le mouvement, ont eu lieu. La persistance des
travailleurs à rejeter les « accords » signés dans leur dos par les
dirigeants de la NUM témoigne d’un changement de perspective des travailleurs
sud-africains dans le cours même de leur mouvement : partis de leurs
revendications immédiates, ils en viennent confusément à vouloir aller bien
au-delà de quelques rands supplémentaires sur leur fiche de paie. Ce qu’ils
réclament, ce sont des comptes pour toutes les promesses trahies de leurs
dirigeants – ceux de la COSATU, ceux de l’ANC et du SACP depuis la fin
prétendue de l’apartheid.
Les
résultats immédiats de la grève ne sont pas identiques dans tous les
secteurs : dans les mines aurifères, le patronat minier, appuyé par les
dirigeants de la NUM, n’est parvenu à faire reprendre le travail aux mineurs qu’au
prix d’augmentations de salaires allant de 10 à 20%. Une fin de grève à l’usure.
A Amplats, mine de platine qui sera la dernière à reprendre le travail, les
travailleurs obtiennent tout au plus la réembauche des 12 000 travailleurs
licenciés – la direction de la mine n’accordant aux mineurs qu’une prime
unique.
Fin
octobre, la grève a reflué dans la plupart des mines sud-africaines. Pourtant,
ce reflux n’est pas un retour au statu
quo ante : le 28 octobre, une démonstration de force appelée par les
dirigeants de la COSATU pour « briser la contre-révolution » dans le
bassin de Rustenburg – autrement dit parader contre les tenants des comités de
grève et réaffirmer la tutelle de la NUM sur le prolétariat minier – est
dispersée manu militari par des milliers de mineurs scandant : « Souviens-toi de Marikana ! ».
Parmi eux, beaucoup portent des T-shirts aux couleurs de l’AMCU. La
bureaucratie syndicale, qui s’estimait en mesure de piétiner les braises encore
chaudes du mouvement de grève, n’a dû son salut qu’à l’intervention armée de la
police sud-africaine.
Le 2
novembre, encore, la presse faisait état d’une manifestation de plus de 2 000
mineurs dans le bassin de Rustenburg, contre les accords salariaux jugés
insuffisants.
La grève s’étend à d’autres
secteurs
Le
modèle de Marikana s’est répercuté au-delà du seul prolétariat minier. Les
grèves se sont étendues à d’autres secteurs : à Durban, début octobre, la
grande usine de Toyota, premier constructeur automobile du pays, a été bloquée
par des débrayages.
De fin
septembre au 12 octobre, un mouvement de grève des camionneurs sud-africains a
bloqué tout le pays : instruits par les mésaventures de leurs homologues
de la NUM, les dirigeants du syndicat des camionneurs de la COSATU ont préféré
reprendre à leur compte les revendications des grévistes, aboutissant à un
accord salarial accordant 10% d’augmentation aux travailleurs de ce secteur
(contre 12% revendiqués). Pourtant, les camionneurs ont exprimé leur volonté de
contrôle de ce mouvement en organisant leurs barrages et en incendiant les
véhicules de leurs employeurs ou des briseurs de grève. Alors que la tentative
d’écrasement des grévistes de Marikana avait été ponctuée de condamnations des « violences »
imputées aux travailleurs, le prolétariat sud-africain retient du combat des
mineurs la leçon strictement inverse : « La violence qui accompagne les grèves en Afrique du Sud est considérée
comme un mal nécessaire pour réussir la grève par de nombreux syndicalistes,
selon une récente enquête d’opinion conduite par l’institut de recherches
Naledi, proche du Cosatu et citée par le quotidien Business Day. »
(AFP, 27/9/2012).
En
octobre-novembre, en Namibie voisine, s’est développée la plus longue grève
enseignante de l’histoire du pays, exigeant des augmentations salariales de
40% : ce mouvement a ébranlé la chape de plomb constituée par le Swapo,
équivalent namibien de l’ANC où est encarté l’ensemble des dirigeants
syndicaux. Sur le modèle des mineurs sud-africains, ce mouvement a été initié
par une marche d’enseignants vers le siège du syndicat majoritaire, puis s’est
traduit par l’élection de comités de grève et de comités associant parents d’élèves
ou étudiants aux enseignants. Des étudiants, des infirmières, des travailleurs
de Nampower (la compagnie d’électricité)
et de Namibian Airlines ont rejoint
les manifestations enseignantes. Plusieurs dirigeants syndicaux
enseignants ont été écartés ou sommés de rompre avec le mouvement de grève sous
peine d’être exclus du parti au pouvoir.
En
novembre, les grèves de mineurs avaient-elles à peine pris fin qu’un autre incendie
se répercutait, cette fois dans les campagnes : spontanément, les ouvriers
agricoles de De Dooms, à 140 km au nord du Cap, se mettaient en grève pour
exiger le doublement de leur salaires de misère, réduits à 70 rands par jour (6
euros !) en moyenne. L’Alliance Démocratique, parti de l’ » opposition »
bourgeoise à l’ANC, qui dirige la province, en appelait à l’armée. Les
dirigeants du syndicat agricole de la COSATU, la BAWUSA, instruits par le
précédent de Marikana, décidaient d’appeler à une première journée de grève
nationale, le 14 novembre, pour garder le contrôle de la mobilisation :
ils prenaient ensuite appui sur des déclarations du gouvernement ANC,
formellement favorables à une augmentation de salaires symbolique, pour appeler
à la « suspension » du mouvement de grève jusqu’au mois de décembre.
Une
semaine après la reprise du travail, le gouvernement ANC annonçait néanmoins qu’en
raison du calendrier officiel des négociations dans le secteur, les
augmentations promises ne pourraient être accordées au plus tôt qu’en avril
2013... Récriminations outrées des dirigeants de la BAWUSA, qui ne sont
pourtant pas allés au-delà d’une journée de grève le 4 décembre : nombre
des dirigeants et ex-dirigeants de ce syndicat sont impliqués, dans le même
temps, dans la direction d’un groupe de production et d’exportation de vins...
Il n’en
est pas moins vrai que, par l’ampleur des mobilisations ouvrières de fin août à
début décembre 2012, la classe ouvrière sud-africaine, sous l’impulsion du
prolétariat minier, est ressurgie sur le devant de la scène politique – ouvrant
une brèche sans précédent dans une chape de plomb en vigueur depuis 1994. Ce
faisant, elle n’a pas seulement bousculé les appareils syndicaux de la COSATU
ou engagé un processus de recomposition syndicale dans les mines : elle
tend aussi à poser, à nouveau, des questions fondamentales qui sont restées
sans réponse depuis l’accession au pouvoir de l’ANC et la « fin »
proclamée de l’apartheid.
Ce qui est en cause :
le bilan de l’ANC au pouvoir depuis 18 ans
Dans l’histoire
de l’Afrique du Sud, la classe ouvrière – à commencer par le prolétariat
minier, déterminant – a toujours constitué la force décisive dans le combat
contre le système de l’apartheid hérité du colonialisme. Contrairement à la
plupart des autres pays du continent africain, l’Afrique du Sud constitue une « colonie
de peuplement » où les Blancs, issus des Pays-Bas ou de Grande-Bretagne,
ont réduit la majorité noire à un état de semi-esclavage, entassés dans des
ghettos ou des bantoustans au sein de leur propre pays.
En
1975, un an avant les émeutes de Soweto, c’est une grève des mineurs qui a
donné le coup d’envoi à près de 20 ans d’activité révolutionnaire des masses
noires contre l’apartheid. Cette lutte a atteint son point le plus élevé avec
la grève générale des mineurs de 1987, impliquant plus de 360 000 mineurs, et s’est
accompagnée de l’essor fulgurant du mouvement ouvrier noir. Fondée en 1982, la
NUM a enregistré jusqu’en 1992 plus de 300 000 adhérents. En 1985 a été fondée
la COSATU, confédération syndicale liant son existence au combat pour en finir
avec l’apartheid, qui est passée en l’espace de moins d’une décennie de
quelques centaines de milliers de membres à plus d’1,7 million.
C’est
cette activité révolutionnaire des masses noires qui a rendu le régime d’apartheid
inviable aux yeux de la bourgeoisie blanche, et plus encore des trusts
industriels implantés en Afrique du Sud, mais dont les maisons mères sont
installées dans les métropoles impérialistes d’Europe ou d’Amérique. La
bourgeoisie a cherché à négocier un accord avec les dirigeants de l’ANC,
organisation noire petite-bourgeoise, pour procéder au ravalement de façade du
capitalisme sud-africain.
Cet
accord, concrétisé par la tenue des premières élections ouvertes aux Noirs de l’histoire
du pays, en avril-mai 1994, a consisté en ceci : en contrepartie d’un
accès au pouvoir politique, l’ANC montait en première ligne pour étouffer les
revendications des masses noires – jusqu’à capituler sur son propre programme,
consigné dans se « Charte de la Liberté » (1955).
Combattre pour le socialisme, publié sous la direction de
Stéphane Just, constatait en juin 1994 : « Peu à peu, la direction de l’ANC a pu s’engager sur le terrain
choisi par la bourgeoisie blanche : ayant dès l’origine rejeté l’exigence du
pouvoir noir et de l’expropriation du capital, elle a peu à peu capitulé
abandonnant sa propre ligne, renonçant à exiger une assemblée constituante,
acceptant la nécessité d’une majorité qualifiée, la mise en place d’une
constitution négociée, de pouvoirs fédéraux (lesquels garantissent des
"sanctuaires" aux Blancs et aux Zoulous)… Finalement, faute de
pouvoir imposer l’exigence du "pouvoir noir" les masses n’ont pu
empêcher ce processus d’arriver à son terme. »
L’ANC
abandonnait en outre toutes les revendications ouvrières et populaires dont sa
Charte se faisait l’écho : réforme agraire (« La terre doit être partagée entre ceux qui la travaillent ! »),
expropriation de la bourgeoisie blanche et des trusts (« La propriété des richesses minérales que recèle le sol, ainsi
que celle des banques et des industries à caractère de monopole, doivent être
transférées à la communauté »), droit à l’éducation, à la gratuité des
soins, à l’égalité salariale et au logement.
Dans le
même temps, faute d’autre perspective, pendant 18 ans, la grande majorité des
masses noires s’est saisie du droit de vote et des maigres libertés
démocratiques qui lui étaient octroyées pour porter au pouvoir une majorité
écrasante issue de l’ANC. De manière déformée, les masses exprimaient par ce
biais leur aspiration à la mise en place d’un pouvoir noir, d’un gouvernement
rompant avec l’héritage de l’apartheid, engageant les mesures permettant d’aller
dans ce sens, dont certaines figuraient au sein de la « Charte des Libertés ».
Rien n’a changé pour les
masses sud-africaines
Le
mouvement des mineurs de Marikana, le mouvement vers la grève générale de
dizaines de milliers de travailleurs sud-africains constitue l’expression du
fait que, 18 ans après, rien n’a fondamentalement changé pour les masses
sud-africaines. 25 ans après la grève générale des mineurs, dirigée par la NUM,
les mineurs sud-africains ont ouvert une brèche dans la chape de plomb
constituée par ses propres dirigeants – qui, à défaut d’obtenir satisfaction
pour les travailleurs, ont constitué un formidable appareil, corrompu jusqu’à l’osmose
avec l’appareil d’Etat et avec la bourgeoisie.
Dans l’Afrique
du Sud de 2012, de l’aveu même de la Banque Mondiale, les 10% de la population
les plus riches concentrent 58% des revenus du pays entre leurs mains, tandis
que les 10% les plus pauvres n’en récoltent que 0,5%. Ces « inégalités »
recoupent toujours pour l’essentiel les divisions raciales : de 1994 à
2009, le revenu moyen des Noirs (79% de la population) s’est accru de 230 rands
(22 euros) tandis que celui des Blancs (moins de 10% de la population) a
presque doublé. Les rapports sociaux fondamentaux, hérités de l’apartheid,
perdurent : plus de 80% des terres cultivables, la grande majorité des
capitaux et des moyens de production restent aux mains des Blancs ou des grands
groupes impérialistes américains et européens. Le taux de chômage – conséquence
de l’exploitation extrême des travailleurs de l’industrie – dépasse
officiellement 24%, mais en réalité il touche plus de 40% de la population
active et franchit allègrement la barre des 50% dans la jeunesse noire ou parmi
les femmes. 62% des familles noires vivent sous du seuil de pauvreté, 48% n’ont
pas accès à l’eau courante et 32% ne mangent pas à leur faim. Ces « inégalités »
sont au cœur des rapports d’exploitation qui font de l’Afrique du Sud un pays « attractif » aux yeux
des trusts occidentaux depuis des décennies.
En lieu
et place de « pouvoir noir », l’ANC au pouvoir a procédé au « Black Economic Empowerment » (renforcement
économique des Noirs) qui a permis à une petite-bourgeoisie noire,
essentiellement issue de l’ANC ou de la COSATU, d’accaparer quelques bribes du
capital et de la plus-value produite par l’exploitation odieuse du prolétariat
noir. Dans le même temps, pour contenir les aspirations des masses noires, une
alliance toujours plus étroite s’est constituée entre les dirigeants de l’ANC,
ceux de la COSATU et l’appareil du SACP : c’est cette alliance tripartite
qui a consacré la mainmise de Jacob Zuma sur l’ANC en décembre 2007, contre
Thabo Mbeki, maître d’œuvre de la fusion organisée entre l’ANC et le parti de l’apartheid
et de la bourgeoisie blanche, le Parti National, en 2004.
En
bousculant cette alliance, en mettant particulièrement à mal la tutelle de la
NUM sur le prolétariat minier, fraction décisive du prolétariat sud-africain,
le mouvement des mineurs initié par la grève de Marikana ouvre une nouvelle
phase dans la lutte des masses noires : CPS y reviendra dans un prochain
article.
Le 11 janvier 2013
[ http://socialisme.free.fr
- © A.E.P.S., 1 Bis Rue GUTENBERG,
93100 MONTREUIL ]